Insee Analyses Hauts-de-France · Décembre 2022 · n° 144

Les logements neufs du Grand Amiénois attirent surtout ses habitants

Un déménagement peut répondre à des besoins variés : devenir propriétaire, améliorer son cadre de vie, prendre son indépendance… Chaque année, 16 750 ménages s’installent dans un logement ordinaire du Grand Amiénois, dont 1 230 dans un logement neuf. Les installations dans le neuf (source) représentent ainsi 7,3 % de l’ensemble des emménagements, une proportion équivalente à la situation régionale.

Au sein de ce territoire, le pôle urbain amiénois, composé de 11 communes, accueille à lui seul un peu plus de la moitié des emménagements (encadré). Pour autant, la part des installations dans le neuf y est moins élevée (6,9 %) que dans les territoires ruraux de l’aire d’attraction d’Amiens (10,3 %).

En 6 ans, 3 100 ménages ont emménagé dans un logement neuf de la commune d’Amiens, soit 42 % de l’ensemble des installations dans le parc neuf au sein du PMGA. De nombreux projets immobiliers y ont en effet éclos depuis 2014, sous l’impulsion notamment du dispositif Pinel. Celui-ci ouvre droit à des réductions d’impôt en cas d’investissement dans des logements neufs destinés à la location.

Plus de la moitié de ces projets sont localisés dans 4 des 23 quartiers amiénois, situés au sud de la ville. Saint-Honoré Jeanne d’Arc (900 emménagements dans le neuf), Plein sud (300) et Sainte-Anne-Faubourg de Noyon (200) constituent des quartiers en mutation sociale et urbaine depuis la fin des années 2000. Ils attirent plutôt de jeunes adultes, actifs et qualifiés avec des revenus plus élevés que la moyenne des ménages amiénois. Le quartier Saint-Honoré Jeanne d’Arc bénéficie notamment de l’attractivité des ZAC Intercampus et Paul Claudel ainsi que de la proximité du CHU. À l’inverse, dans le quartier Sud-Est, les 200 ménages qui se sont installés dans une construction neuve sont plus âgés et ont un niveau de vie en moyenne plus faible. En outre, ils investissent plus souvent dans une maison.

Parmi les premiers occupants d’un logement neuf du Grand Amiénois, 86 % y habitaient déjà et 43 % ont déménagé dans la même commune. Lorsqu’il s’agit d’une acquisition, une meilleure connaissance du territoire et du marché local, des délais souvent longs entre l’achat et la mise à disposition du logement ainsi qu’un suivi des travaux facilité peuvent expliquer cette proximité. Sur 6 ans, seuls 1 000 ménages ont emménagé dans un logement neuf du PMGA alors qu’ils n’y résidaient pas auparavant. Leur profil diffère de ceux qui y vivaient déjà. Il s’agit plus souvent de personnes seules (56 %), de jeunes de 18-24 ans (28 %) et de locataires (82 %) (figure 1). Ils s’installent dans des logements plus petits (47 % dans un T1 et un T2) et majoritairement dans le pôle urbain amiénois (69 %) où est implanté le pôle universitaire. Le marché de l’emploi diversifié est également susceptible d’attirer de jeunes actifs.

Qu’ils soient originaires ou non du PMGA, les nouveaux arrivants dans le neuf intègrent autant de maisons que d’appartements alors que le parc de résidences principales est majoritairement composé de maisons (71 %). Cette particularité s’explique par la prédominance des constructions dans le neuf au sein du pôle urbain amiénois (figure 2) : 84 % des installations dans un logement neuf se font dans des appartements, soit 10 point de plus dans le parc ancien (73 %).

Dans le neuf, la moitié des premiers occupants ont un référent fiscal âgé de 25 à 39 ans (figure 3) alors que ces derniers représentent 44 % des emménagements dans l’ensemble du parc. Ces âges coïncident généralement avec le début de la vie conjugale et la naissance des enfants. Les couples, avec ou sans enfants, sont donc aussi proportionnellement plus nombreux à emménager dans le neuf (50 % des premiers occupants) que dans l’ensemble du parc (39 %). Leur niveau de vie est en moyenne plus élevé que celui de l’ensemble des ménages, ce qui facilite l’acquisition d’un bien. Ils sont ainsi plus souvent propriétaires de leur logement que les autres types de ménages. Les couples sans enfant se tournent davantage vers le pôle urbain amiénois, ceux avec enfants privilégient quant à eux les territoires ruraux, à la recherche d’espace.

À l’inverse, les personnes seules ne représentent que 35 % des arrivées dans le neuf contre 46 % dans l’ensemble du parc. Les trois quarts emménagent dans le pôle urbain amiénois. Leur niveau de vie est en moyenne plus faible et elles sont plus souvent locataires.

Dans le neuf comme dans l’ancien, déménager constitue souvent l’occasion d’adapter la taille du logement au nombre de personnes et aux besoins du ménage. Ainsi, dans le PMGA, 36 % des ménages s’installent dans un logement plus petit en déménageant dans le neuf, et quasiment autant dans un logement plus grand. Les petits logements (T1 et T2) sont occupés en grande majorité par des ménages jeunes dont le référent fiscal est âgé de moins de 40 ans. Emménager dans le neuf permet à la moitié d’entre eux de passer d’un T1 à un T2. Inversement, les anciens occupants d’un logement d’au moins trois chambres (T4 et plus) réduisent souvent le nombre de pièces en déménageant dans le neuf. La moitié des 18 à 24 ans déménagent ainsi dans un T2 et un quart dans un T1 lorsqu’ils quittent le domicile familial pour leurs études ou un premier emploi. Un tiers des ménages dont le référent est âgé de 50-64 ans et la moitié des 65 ans ou plus optent plutôt pour un T3 après le déménagement, le plus souvent suite au départ des enfants et/ou à une rupture conjugale.

Les deux tiers des ménages qui s’installent dans un logement neuf en sont locataires, à parts égales dans le parc social (33 %) et privé (32 %). Il s’agit d’une spécificité du logement neuf puisque, dans l’ensemble du parc (logements anciens et neufs), les arrivants dans le locatif privé sont nettement majoritaires (60 % des emménagements) par rapport à ceux du parc social (19 %), ou aux propriétaires (21 %). Cet accès préférentiel à la propriété et au parc social dans le neuf s’explique notamment par des dispositifs légaux (prêt social de location-accession), des incitations locales (fixation d’un seuil de 30 % de logements sociaux pour les nouveaux programmes libres à Amiens) ou encore des montages opérationnels (vente par les promoteurs d’une partie des lots neufs aux organismes de logement social).

Quatre locataires du parc privé sur dix deviennent propriétaires en déménageant dans le neuf (figure 4). C’est deux fois plus que ceux qui emménagent comme propriétaires dans l’ensemble du parc. Dans une moindre mesure, la construction neuve permet aussi aux locataires sociaux d’acquérir un logement (18 % contre 11 % ailleurs). Cette plus forte accession à la propriété dans le neuf est favorisée par de nombreuses mesures incitatives : prêts à taux zéro, frais de notaires réduits ou pris en charge par les promoteurs, exonération de taxe foncière dans les deux ans suivant l’achèvement. À l’inverse, 38 % des ménages anciennement propriétaires sont devenus locataires du parc privé en emménageant dans le neuf, nettement moins que dans l’ensemble du parc (63 %). Il s’agit généralement de jeunes qui quittent le domicile familial pour suivre leurs études ou occuper un premier emploi, de personnes seules à la suite d’une séparation, ou de familles monoparentales.

En emménageant dans le neuf, 3 ménages sur 10 qui louaient auparavant dans le parc privé deviennent locataires sociaux. De plus, 7 ménages sur 10 du parc social restent locataires sociaux. La construction neuve, en complément de la réhabilitation du parc social, contribueraient ainsi à améliorer les conditions d’habitat de leurs locataires. Cet accès important au logement social concerne surtout les ménages qui déménagent dans le pôle urbain amiénois.

Les trois quarts des locataires qui quittent le pôle urbain amiénois pour s’installer dans un logement neuf des zones rurales de l’aire d’attraction d’Amiens deviennent propriétaires ; 80 % de ceux qui étaient déjà propriétaires le restent. Le constat est identique pour les ménages qui vivaient déjà dans cet espace rural : en déménageant dans un logement neuf, 77 % des locataires accèdent à la propriété et 75 % des propriétaires conservent leur statut.

Au contraire, les ménages qui s’installent dans un logement neuf du pôle amiénois acquièrent nettement moins souvent leur logement. Seuls 12 % des locataires déjà présents dans le pôle urbain deviennent propriétaires. Ce taux chute même à 5 % pour ceux qui ne sont pas originaires du Grand Amiénois. Parallèlement, plus des trois quarts des propriétaires passent à un statut de locataire (essentiellement des étudiants et des jeunes actifs quittant le domicile parental).