Insee Analyses Provence-Alpes-Côte d'Azur · Décembre 2022 · n° 109

Provence-Alpes-Côte d’Azur face aux enjeux du grand âge

En 2019, 1,5 million de personnes sont âgées de 60 ans ou plus en Provence-Alpes-Côte d’Azur, soit 29 % des habitants, une part supérieure à celle de la France métropolitaine (+ 3 points) (figure 1). En proportion de l’ensemble des habitants, ils sont particulièrement présents sur une partie du littoral varois (à Saint-Raphaël, Sanary-sur-Mer ou Bandol), mais aussi dans certaines zones peu denses, telles que le Queyras ou le haut de la vallée de la Vésubie .

En 1990, la part des personnes âgées dans la population était déjà plus élevée qu’en France métropolitaine (22 % contre 19 %). Entre 1990 et 2019, elle a globalement progressé au même rythme dans la région qu’au niveau national (+ 7 points), avec de fortes disparités locales. La hausse est importante à l’ouest de l’étang de Berre ainsi que dans une zone allant de l’est d’Aix-en-Provence jusqu’à Brignoles inclus. Cependant, la part des personnes âgées y reste limitée, du fait de la présence de nombreux actifs dans ces territoires.

La question du vieillissement de la population est donc particulièrement prégnante dans la région, avec des conséquences dans de nombreux domaines : développement d’activités commerciales, récréatives ou culturelles appropriées, adaptation des espaces publics urbains et des politiques de mobilité, mais aussi, avec l’avancée en âge, adaptation des logements, adéquation de l’offre de soins et formation de personnels d’accompagnement dans la dépendance. L’acuité de cette question a été renforcée par l’épidémie de Covid-19, qui a particulièrement concerné les personnes âgées de la région en 2021 (encadré 1).

En 2019, 200 000 personnes âgées de 85 ans ou plus vivent dans la région. Comme les autres seniors, les personnes de 85 ans ou plus sont très présentes sur le littoral (figure 2). Pour les plus âgés, la question de la proximité des équipements représente un enjeu important : l’accès aux commerces, aux services publics et à l’offre de soins est plus compliqué dès lors qu’on s’éloigne des centres-villes.

Du fait de l’écart d’espérance de vie entre femmes et hommes, les femmes sont nettement majoritaires dans cette tranche d’âge (207 femmes pour 100 hommes). Le déséquilibre en faveur des femmes est encore plus prononcé dans certaines communes, notamment celles qui accueillent une institution pour personnes âgées dépendantes (212 femmes pour 100 hommes dans ces communes).

À l’horizon 2050, les habitants de 60 ans ou plus seraient autour de 1,9 million, soit 390 000 de plus qu’en 2019 (+ 26 %) (pour comprendre). Parmi eux, la population âgée de 85 ans ou plus s’accroîtrait bien plus fortement (+ 93 %). Alors qu’en 2019, la part de cette population est de 3,8 %, elle serait de 7,3 % en 2050 dans la région (6,5 % en France métropolitaine).

Si le vieillissement est essentiellement le fait de la population déjà installée dans la région, les mobilités résidentielles en provenance des autres régions françaises contribuent également à accroître la population de 60 ans ou plus en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Entre 2018 et 2019, 12 000 personnes de cette classe d’âge se sont installées dans la région tandis que 10 150 l’ont quittée, soit un excédent de 1 850 habitants sur un an, proche de celui observé entre 2012 et 2013. Les nouveaux arrivants dans la région proviennent essentiellement d’Île-de-France, d’Auvergne-Rhône-Alpes, d’Occitanie ou des Hauts-de-France. Ceux qui la quittent privilégient les régions voisines ou du littoral atlantique : Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes et Nouvelle-Aquitaine. Provence-Alpes-Côte d’Azur reste cependant beaucoup moins attractive pour les seniors que ses voisines. La région accueille en effet un peu moins de nouveaux arrivants que les autres régions du sud de la France, mais surtout, ceux qui la quittent sont proportionnellement plus nombreux. En outre, les seniors qui se retirent de ces régions voisines privilégient moins souvent une installation en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Ainsi, entre 2018 et 2019, la population de 60 ans ou plus s’est accrue par l’effet des migrations avec les autres régions françaises de 1,3 habitant pour 1 000 déjà présents dans la région, contre 5,5 en Nouvelle-Aquitaine et 5,1 en Occitanie (figure 3).

Ces mobilités, auxquelles s’ajoutent les mobilités internes à la région, contribuent à faire progresser plus fortement la population âgée des départements alpins et du Var. A contrario, le département des Bouches-du-Rhône est déficitaire sur cette classe d’âge.

En sus de ces apports de population internes au territoire national, près de 1 700 seniors en provenance de l’étranger se sont installés dans la région en 2019, plus particulièrement dans les Alpes-Maritimes et le Var. Ils sont majoritairement originaires d’un pays frontalier, Belgique, Monaco, Italie et Suisse, mais aussi des États-Unis et du Royaume-Uni. Provence-Alpes-Côte d’Azur est la quatrième région de France métropolitaine à accueillir le plus de seniors étrangers après l’Île-de-France, l’Occitanie et Nouvelle Aquitaine.

Parmi les seniors déjà installés, comme parmi les nouveaux arrivants, les anciens cadres, artisans et commerçants sont plus présents dans la région qu’en France métropolitaine (17,0 % contre 14,4 % au niveau national). À l’inverse, les seniors de la région sont moins souvent d’anciens ouvriers (15,6 % contre 20,8 % en France métropolitaine).

Le fait que les seniors soient plus souvent d’anciens cadres dans la région rejaillit sur leurs niveaux de vie. Parmi les ménages dont la personne de référence a 60 ans ou plus, les 10 % de personnes les plus aisées ont un niveau de vie supérieur à 3 480 euros mensuels, soit un 9^e décile bien plus élevé que la moyenne des régions métropolitaines hors Île-de-France (3 250 euros, figure 4).

Le niveau de vie médian des seniors s’établit à 1 930 euros mensuels. Ce montant partage la population en deux, la première moitié ayant un niveau de vie inférieur et la seconde un niveau de vie supérieur ; il est légèrement supérieur au niveau de vie médian des seniors des régions de province (1 890 euros mensuels).

Dans le bas de l’échelle des revenus, 12,5 % des personnes vivant dans des ménages dont la personne de référence a 60 ans ou plus sont considérées comme pauvres (encadré 2). Le taux de pauvreté des seniors dépasse de trois points la moyenne des régions de province, un écart semblable à celui observé tous âges confondus. La part des seniors pauvres est toutefois inférieure à celle des autres catégories d’âge, en raison des moindres charges, notamment parentales, auxquelles ils doivent faire face. Le minimum vieillesse permet aux personnes âgées d’au moins 65 ans (ou ayant atteint l’âge minimum légal de départ à la retraite en cas d’inaptitude au travail) d’accéder à un seuil minimal de ressources. Fin 2019, le montant du minimum vieillesse s’élève à 868 euros par mois pour une personne seule, et à 1 348 euros par mois pour un couple d’allocataires. Dans la région, 76 000 seniors bénéficient de ces aides en 2019.

Parmi les ménages dont la personne de référence a 60 ans ou plus, ceux constitués de personnes âgées vivant seules sont les plus représentés (45 %), mais ceux de couples sans enfant sont également nombreux (37 %). Les personnes âgées vivant en couple ont généralement un niveau de vie plus élevé que celles vivant seules. Parmi ces dernières, les femmes ont globalement un niveau de vie inférieur à celui des hommes quelle que soit la tranche d’âge au-delà de 60 ans, en raison de carrières plus courtes et de revenus d’activité antérieurs plus faibles. Ces disparités de niveau de vie augmentent avec l’âge.

Au-delà de 60 ans, les revenus proviennent principalement des pensions de retraite. Si celles-ci représentent 60 % du revenu disponible pour les ménages des 60-74 ans (dont une partie peut encore inclure un actif occupé), cette part monte à 87 % pour les ménages dont la personne de référence a 75 ans ou plus. Les seniors nouveaux arrivants dans la région ont un niveau de vie médian supérieur d’environ 50 euros mensuels à celui des seniors déjà présents. L’apport principal des revenus provient plus souvent des salaires pour les seniors arrivants que pour ceux déjà installés (11,0 % contre 8,5 %). C’est dû en partie à un âge moins élevé, pouvant correspondre à une fin de vie active : 32 % des seniors arrivants ont entre 60 et 64 ans contre 22 % de ceux déjà présents.

Les logements des seniors sont en moyenne plus petits dans la région qu’en France métropolitaine, en raison de la forte proportion d’appartements dans le parc immobilier. Les nouveaux arrivants, malgré un niveau de vie médian supérieur à celui des résidents déjà présents, habitent plutôt dans des logements plus petits. Ils passent, en changeant de région, d’une surface médiane de 129 m² à 66 m² (contre 79 m² pour les résidents depuis plus d’un an), surface plus adaptée à la taille de leur ménage. Neuf ménages seniors sur dix arrivant dans la région sont en effet composés d’un couple sans enfant ou d’une personne seule.

Les ménages âgés sont moins souvent propriétaires de leur logement dans la région qu’au niveau métropolitain (69 % contre 73 %). Seulement la moitié des ménages seniors arrivés dans la région au cours de la dernière année possèdent leur logement. En effet, une partie d’entre eux deviennent locataires, notamment parce qu’ils conservent leur ancien logement ou qu’ils voient dans la location une solution transitoire en attendant de trouver un nouveau logement en propriété.

En 2014, un logement sur dix occupé par un senior dispose d’au moins un aménagement spécifique pour l’aider à son autonomie (barre d’appui, douche adaptée, élargissement des portes…), soit une part comparable au niveau national. Le taux diffère selon le sexe : 7,5 % pour les hommes de 60 ans ou plus, contre 12,9 % pour les femmes. La proportion double pour les logements occupés par les 75 ans ou plus.

Les logements sont plus anciens que dans le reste de la France métropolitaine. Ainsi, les adapter aux nouvelles normes énergétiques et environnementales mais aussi à la dépendance constitue un enjeu important dans la région.

En 2019, 43 300 personnes de 60 ans ou plus vivent en maison de retraite ou en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) dans la région. Parmi les 85 ans ou plus, 28 800 personnes y résident, soit 15 % de cette classe d’âge. La part des personnes âgées de 85 ans ou plus vivant en Ehpad est inférieure à celle de France métropolitaine (18 %) ou des régions voisines d’Auvergne-Rhône-Alpes (19 %) et d’Occitanie (17 %), mais supérieure à celle de Corse (9 %). L’écart entre la région et la France peut en partie s’expliquer par une offre de places plus faible [Drees, 2020 ; pour en savoir plus], par la présence de seniors aux revenus modestes, pour lesquels l’accès aux institutions est davantage contraint, ou encore par un maintien à domicile facilité par la densité élevée d’infirmiers libéraux [Drees, 2018 ; pour en savoir plus].

Dans la région, en 2019, 225 000 personnes âgées de 60 ans ou plus se déclarent dépendantes dont 61 500 sévèrement dépendantes. La grande majorité de ces personnes âgées dépendantes vivent à domicile.

En lien avec la poursuite du vieillissement de la population, le nombre de personnes dépendantes va continuer à progresser. En 2050, 306 000 seniors seraient dépendants dont 71 000 sévèrement dépendants (pour comprendre). La question de la prise en charge de ces personnes par des professionnels se posera alors davantage dans les années à venir.

En 2019, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’équivalent de 77 500 emplois à plein temps travaillent auprès des personnes âgées, dont 47 300 intervenant à domicile (aides à domicile, infirmiers libéraux, etc.) et 30 200 dans les institutions d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Parmi ces emplois, 68 300 sont mobilisés pour la prise en charge des personnes âgées dépendantes, qu’elles vivent en institution ou à domicile. Ces deux formes d’aide professionnelle sont moins mobilisées que dans le reste de la France de province.

Dans le secteur de l’aide à domicile comme dans les institutions d’hébergement pour personnes âgées, la plupart des postes sont de catégorie employé (respectivement 96 % et 73 %). Ces postes d’employés sont majoritairement occupés par des femmes, avec une moyenne d’âge de 46 ans, plus élevée que pour le reste des employés du tertiaire (figure 5). Dans les institutions d’hébergement, le salaire net horaire est un peu plus élevé que pour la moyenne du tertiaire, mais il est en revanche plus faible dans le secteur de l’aide à domicile. Dans ce dernier secteur, qui est par ailleurs le plus féminisé, la très faible rémunération horaire s’accompagne d’une faible durée de travail médiane de sorte que la moitié des employés retire moins de 860 euros nets par mois de leur activité.

En termes d’offre de soins, la région est plutôt bien pourvue en médecins généralistes libéraux ou salariés de centres de santé : seulement 0,9 % de la population vit dans une zone « sous-dense » en matière de santé contre 5,7 % au niveau national. L’ accessibilité potentielle localisée des services d’aide et d’accompagnement à domicile pour les personnes de 60 ans ou plus est la plus élevée autour de Draguignan et de Gap. Elle est en revanche moindre autour d’Aix-en-Provence, Istres, Briançon, Barcelonnette et Arles (figure 6). Les personnels sont proportionnellement moins nombreux dans les territoires alpins et dans l’arrière-pays niçois.