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Insee Analyses · Octobre 2022 · n° 76
Insee AnalysesAvec l’inflation, une précarité financière en légère hausse, mais inférieure en août 2022 à son niveau d’avant-crise sanitaire

Marine Adam, Odran Bonnet et Tristan Loisel (Insee)

L’inflation observée depuis l’été 2021 érode le pouvoir d’achat et fait craindre une dégradation de la situation financière de certains ménages. L’analyse de données bancaires jusqu’à l’été 2022 ne met pas en évidence une nette augmentation de la précarité financière. La part des ménages à découvert et celle des ménages avec peu d’avoirs sur leurs comptes, qui avaient diminué lors du premier confinement en 2020, demeurent en août 2022 à des niveaux inférieurs à ceux de 2019.

Néanmoins, la valeur des patrimoines financiers bruts, en forte augmentation depuis 2019, ralentit nettement et diminue même en euros constants depuis l’été 2021, notamment pour les ménages avec de faibles revenus. De plus, la proportion de ménages à découvert augmente lentement depuis début 2021. Enfin, les ménages semblent avoir diminué leurs dépenses de consommation en volume (euros constants), en particulier celles de carburant et d’énergie, contribuant ainsi à préserver leur situation financière.

Avertissement : afin d’analyser l’évolution de la précarité financière presque en temps réel, cette étude mobilise des données anonymisées de comptes de deux banques : le Crédit Mutuel Alliance Fédérale et La Banque Postale.

Les patrimoines financiers bruts diminuent en euros constants depuis l’été 2021

Le des , en hausse notable pendant la crise sanitaire, ralentit depuis l’été 2021. De plus, l’inflation, qui érode la valeur des patrimoines financiers, a sensiblement augmenté depuis l’été 2021, pour atteindre 5,9 % en glissement annuel en août 2022. Sur la période récente, l’inflation est telle que le patrimoine financier brut, mesuré en euros constants, est inférieur en août 2022 à son niveau d’août 2021. Entre août 2021 et août 2022, le patrimoine financier brut au Crédit Mutuel Alliance Fédérale croît ainsi de 4,8 % en euros courants mais diminue de 1,0 % en euros constants (figure 1).

Figure 1a – Évolution mensuelle du patrimoine financier brut des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale

Figure 1a – Évolution mensuelle du patrimoine financier brut des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale - Lecture : en août 2022, en euros courants, le patrimoine financier brut moyen des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale est supérieur de 23,5 % à sa valeur en janvier 2020.
Revenus inférieurs
au 1er quartile
Revenus supérieurs
au 3e quartile
Ensemble IPC
(en %)
euros courants euros constants euros courants euros constants euros courants euros constants
2019 Janvier nd nd nd nd nd nd 1,2
Février 96,2 97,6 92,5 93,9 93,5 94,9 1,3
Mars 97,2 97,8 93,7 94,3 94,6 95,2 1,1
Avril 97,1 97,4 94,9 95,2 95,2 95,5 1,3
Mai 97,2 97,4 94,8 95,0 95,3 95,5 0,9
Juin 97,7 97,7 95,8 95,8 96,2 96,2 1,2
Juillet 97,9 98,0 97,5 97,6 97,3 97,5 1,1
Août 98,2 97,9 97,3 97,0 97,4 97,1 1,0
Septembre 98,4 98,5 97,4 97,5 97,7 97,7 0,9
Octobre 98,4 98,4 97,4 97,4 97,6 97,7 0,8
Novembre 98,6 98,6 97,7 97,7 98,1 98,1 1,0
Décembre 99,4 99,0 99,0 98,6 99,4 99,0 1,5
2020 Janvier 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 1,5
Février 100,5 100,5 99,7 99,7 100,1 100,1 1,4
Mars 100,5 100,4 99,1 99,1 99,8 99,8 0,7
Avril 102,5 102,5 101,3 101,3 102,0 101,9 0,3
Mai 104,1 103,9 102,8 102,7 103,5 103,3 0,4
Juin 104,5 104,2 104,4 104,1 104,6 104,4 0,2
Juillet 105,0 104,3 105,7 105,0 105,8 105,1 0,8
Août 105,4 104,8 106,2 105,6 106,2 105,7 0,2
Septembre 106,2 106,2 106,4 106,3 106,5 106,5 0,0
Octobre 105,8 105,9 105,7 105,7 106,0 106,1 0,0
Novembre 107,3 107,1 107,7 107,5 107,7 107,5 0,2
Décembre 108,5 108,0 109,0 108,6 109,3 108,8 0,0
2021 Janvier 108,8 108,2 110,3 109,7 110,2 109,6 0,6
Février 109,8 109,2 111,1 110,5 111,2 110,6 0,6
Mars 110,3 109,0 113,6 112,3 112,7 111,4 1,1
Avril 111,2 109,8 115,1 113,7 114,1 112,7 1,2
Mai 111,8 110,0 115,4 113,6 114,7 112,9 1,4
Juin 112,7 110,8 117,2 115,2 115,9 113,9 1,5
Juillet 113,4 111,5 118,9 116,9 117,4 115,3 1,2
Août 113,8 111,1 119,6 116,8 117,8 115,0 1,9
Septembre 113,8 111,4 119,3 116,8 117,8 115,3 2,2
Octobre 113,8 110,9 119,5 116,5 117,9 114,9 2,6
Novembre 113,6 110,3 118,8 115,4 117,7 114,3 2,8
Décembre 114,6 111,1 120,5 116,8 119,1 115,4 2,8
2022 Janvier 114,8 111,0 121,1 117,1 119,7 115,7 2,9
Février 115,4 110,7 121,3 116,4 120,1 115,2 3,6
Mars 115,6 109,3 122,8 116,1 121,2 114,7 4,5
Avril 115,9 109,2 123,2 116,1 121,5 114,5 4,8
Mai 115,9 108,4 123,7 115,8 121,8 114,0 5,2
Juin 115,4 107,2 123,5 114,8 122,0 113,3 5,8
Juillet 116,2 107,6 126,3 117,0 123,9 114,7 6,1
Août 116,4 107,3 125,6 115,8 123,5 113,8 5,9
  • nd : non disponible.
  • IPC : indice des prix à la consommation (en glissement annuel).
  • Lecture : en août 2022, en euros courants, le patrimoine financier brut moyen des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale est supérieur de 23,5 % à sa valeur en janvier 2020.
  • Champ : échantillon de clients actifs du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
  • Sources : Crédit Mutuel Alliance Fédérale ; Insee, calculs Insee.

Figure 1a – Évolution mensuelle du patrimoine financier brut des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale

  • IPC : indice des prix à la consommation (en glissement annuel).
  • Note : les périodes de confinement sont grisées.
  • Lecture : en août 2022, en euros courants, le patrimoine financier brut moyen des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale est supérieur de 23,5 % à sa valeur en janvier 2020.
  • Champ : échantillon de clients actifs du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
  • Sources : Crédit Mutuel Alliance Fédérale ; Insee, calculs Insee.

À La Banque Postale, il augmente de 3,7 % en euros courants et diminue de 2,2 % en euros constants. Si ce patrimoine a décru en euros constants depuis l’été 2021, il reste à la mi-2022 supérieur à son niveau pré-crise, y compris pour les 25 % des ménages aux revenus les plus faibles.

Cette dynamique est à mettre en regard de l’évolution du patrimoine financier sur les trois dernières années. Entre le premier trimestre 2019 et le premier trimestre 2022, pour l’ensemble des ménages, les encours des placements financiers, exprimés en euros courants, ont augmenté de 14 % [Ouvrir dans un nouvel ongletBanque de France, 2022b]. Sur les deux échantillons étudiés, les patrimoines financiers bruts ont également augmenté, en moyenne, de 23,5 % (soit 11 200 euros) depuis janvier 2020 sur l’échantillon du Crédit Mutuel Alliance Fédérale et de 18,4 % (soit 7 500 euros) sur celui de La Banque Postale. La croissance du patrimoine financier s’est accrue en 2020 du fait de la constitution d’une épargne consécutive à la baisse de la consommation liée aux restrictions sanitaires. L’augmentation du patrimoine financier brut s’observe chez tous les , quel que soit leur niveau de . Néanmoins, elle est plus forte pour les ménages aux revenus élevés. Ainsi, entre janvier 2020 et août 2022, le patrimoine des 25 % des ménages aux plus hauts revenus a crû de 25,6 % au Crédit Mutuel Alliance Fédérale et de 22,6 % à La Banque Postale, contre des hausses respectives de 16,4 % et 12,6 % pour les 25 % des ménages aux revenus les plus faibles. Ces évolutions reflètent à la fois le comportement d’épargne des clients et la fluctuation de la valeur des actifs. Les ménages modestes détiennent moins de comptes-titres et d’assurances vie et leurs avoirs sont donc moins soumis aux variations du cours de la bourse.

Pas de nette hausse de la précarité financière consécutive à l’inflation

L’évolution de la précarité est étudiée grâce à trois indicateurs : la proportion de ménages à découvert en fin de mois (patrimoine financier brut négatif), la proportion de ménages avec un patrimoine brut inférieur à trois fois le montant du seuil de pauvreté mensuel (1 102 euros en 2019 et ajusté ensuite selon l’évolution des prix) et la proportion de ménages avec plus de cinq jours de découvert dans le mois (moyenne des jours sur tous les comptes courants si le ménage en possède plusieurs ; indicateur défini seulement à La Banque Postale).

En août 2022, la proportion de ménages à découvert en fin de mois et la proportion de ménages avec plus de cinq jours de découvert dans le mois sont légèrement plus élevées que début 2021 sur les deux réseaux bancaires (figure 2) et (figure 3). Une hausse des indicateurs de précarité depuis l’été 2021 s’observe à La Banque Postale, dont la clientèle est en moyenne moins aisée qu’au Crédit Mutuel Alliance Fédérale. Cela peut être le signe de difficultés croissantes pour certains ménages. À ce titre, le Baromètre mensuel de l’inclusion bancaire de la Banque de France reporte également une hausse en 2022 de quelques indicateurs, comme le nombre d’inscriptions au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) qui remonte en mars 2022 et se stabilise à un niveau proche de celui de 2019 [Ouvrir dans un nouvel ongletBanque de France, 2022a].

Figure 2a – Proportion de ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale à découvert en fin de mois

en %
Figure 2a – Proportion de ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale à découvert en fin de mois (en %) - Lecture : en août 2022, 5,1 % des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont à découvert en fin de mois.
Ménages ruraux Ménages
avec revenus modestes
Ensemble
2019 Janvier nd nd nd
Février 6,0 10,4 6,3
Mars 5,8 10,2 6,2
Avril 6,2 10,7 6,5
Mai 6,1 10,9 6,3
Juin 6,0 10,3 6,2
Juillet 5,5 10,4 6,0
Août 5,7 10,3 6,1
Septembre 6,1 10,9 6,5
Octobre 6,0 10,5 6,2
Novembre 6,0 10,3 6,2
Décembre 5,8 10,6 6,1
2020 Janvier 6,1 10,8 6,2
Février 5,7 10,6 6,1
Mars 5,7 10,1 5,8
Avril 4,6 8,6 4,9
Mai 4,8 8,5 4,9
Juin 5,1 9,3 5,3
Juillet 4,4 9,1 4,8
Août 4,9 9,5 5,3
Septembre 5,2 9,7 5,5
Octobre 5,1 9,6 5,5
Novembre 4,5 8,5 4,9
Décembre 4,4 8,9 4,9
2021 Janvier 4,6 8,8 4,9
Février 4,5 8,5 4,8
Mars 4,6 8,8 4,8
Avril 4,4 8,4 4,6
Mai 4,6 9,0 5,0
Juin 4,7 9,1 5,0
Juillet 4,4 8,8 4,7
Août 4,6 9,2 5,0
Septembre 4,7 9,2 5,1
Octobre 4,5 9,0 5,0
Novembre 5,0 9,4 5,4
Décembre 4,5 9,0 4,9
2022 Janvier 4,7 9,0 5,1
Février 4,5 8,6 5,0
Mars 4,6 9,0 5,0
Avril 4,5 8,9 5,0
Mai 4,7 9,5 5,3
Juin 4,6 9,3 5,1
Juillet 4,3 8,6 4,7
Août 4,6 9,2 5,1
  • nd : non disponible.
  • Notes : les ménages avec revenus modestes sont les 25 % des ménages aux revenus les plus faibles.
  • Lecture : en août 2022, 5,1 % des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont à découvert en fin de mois.
  • Champ : échantillon de clients actifs du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
  • Sources : Crédit Mutuel Alliance Fédérale ; Insee, calculs Insee.

Figure 2a – Proportion de ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale à découvert en fin de mois

  • Notes : les périodes de confinement sont grisées. Les ménages avec revenus modestes sont les 25 % des ménages aux revenus les plus faibles.
  • Lecture : en août 2022, 5,1 % des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont à découvert en fin de mois.
  • Champ : échantillon de clients actifs du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
  • Sources : Crédit Mutuel Alliance Fédérale ; Insee, calculs Insee.

Figure 3 – Proportion de ménages à découvert plus de cinq jours dans le mois

en %
Figure 3 – Proportion de ménages à découvert plus de cinq jours dans le mois (en %) - Lecture : en août 2022, 21,1 % des ménages de La Banque Postale sont à découvert plus de cinq jours dans le mois.
Ménages ruraux Ménages
avec revenus modestes
Ensemble
2019 Janvier 20,2 24,8 24,2
Février 17,8 22,4 21,5
Mars 18,4 23,9 22,8
Avril 19,4 24,5 23,5
Mai 20,0 24,9 24,0
Juin 18,8 24,4 22,9
Juillet 20,2 25,7 24,3
Août 18,4 23,2 22,2
Septembre 18,2 23,2 22,5
Octobre 19,6 24,4 23,7
Novembre 19,3 23,9 23,3
Décembre 17,0 21,9 20,6
2020 Janvier 20,4 25,1 24,6
Février 17,7 23,1 22,1
Mars 17,5 22,4 21,7
Avril 13,5 17,9 17,0
Mai 13,7 18,4 17,2
Juin 15,3 20,1 19,0
Juillet 16,5 22,3 20,7
Août 15,3 20,8 19,5
Septembre 16,2 21,4 20,5
Octobre 16,9 23,4 21,8
Novembre 15,2 19,8 18,9
Décembre 14,0 18,5 17,6
2021 Janvier 16,4 22,1 20,8
Février 14,2 19,6 18,3
Mars 15,8 20,9 20,0
Avril 15,7 21,0 20,0
Mai 15,3 20,4 19,4
Juin 16,6 21,4 20,8
Juillet 16,9 22,7 21,2
Août 16,3 20,9 20,1
Septembre 16,7 21,4 20,9
Octobre 16,9 22,8 21,7
Novembre 17,2 22,4 21,8
Décembre 15,5 20,8 19,5
2022 Janvier 16,7 21,5 21,1
Février 14,6 19,5 18,9
Mars 16,1 21,2 21,1
Avril 16,5 22,4 21,4
Mai 17,8 23,0 22,3
Juin 17,7 22,8 22,2
Juillet 16,9 23,0 21,8
Août 16,8 21,5 21,1
  • Notes : les ménages avec revenus modestes sont les 25 % des ménages aux revenus les plus faibles.
  • Lecture : en août 2022, 21,1 % des ménages de La Banque Postale sont à découvert plus de cinq jours dans le mois.
  • Champ : échantillon de clients actifs de La Banque Postale.
  • Sources : La Banque Postale ; Insee, calculs Insee.

Figure 3 – Proportion de ménages à découvert plus de cinq jours dans le mois

  • Notes : les périodes de confinement sont grisées. Les ménages avec revenus modestes sont les 25 % des ménages aux revenus les plus faibles.
  • Lecture : en août 2022, 21,1 % des ménages de La Banque Postale sont à découvert plus de cinq jours dans le mois.
  • Champ : échantillon de clients actifs de La Banque Postale.
  • Sources : La Banque Postale ; Insee, calculs Insee.

En août 2022, les trois indicateurs de précarité demeurent néanmoins à des niveaux inférieurs à ceux de 2019, après avoir diminué lors des confinements en 2020 et 2021. Ces observations sont cohérentes avec les constats du Baromètre mensuel de l’inclusion bancaire qui souligne que les flux de dossiers de surendettement déposés, de demandes de droit au compte et d’inscriptions au fichier central des chèques (FCC) sont à des niveaux inférieurs à leurs niveaux de 2019 [Ouvrir dans un nouvel ongletBanque de France, 2022a].

Moins de précarité financière en 2022 qu’en 2019, même parmi les ménages grands consommateurs d’énergie et de carburant

L’inflation est particulièrement élevée sur les postes de (22,2 % en glissement annuel en août et 28,5 % en juillet). Les ménages dont les dépenses en gaz, électricité et carburant représentent une grande part de leur consommation totale subissent ainsi une inflation plus élevée. La note de conjoncture de juin estime qu’en avril 2022, alors que l’inflation d’ensemble était de 4,9 % sur un an, les ménages des zones rurales ont été confrontés à un surcroît d’inflation de 1,0 point et les 10 % des ménages au niveau de vie le plus faible, à un surcroît de 0,4 point [Insee, 2022b].

Au sein même de ces catégories, l’inflation subie est hétérogène : elle dépend notamment du niveau de dépenses d’énergie et de carburant. Les données du Crédit Mutuel Alliance Fédérale permettent d’isoler les grands consommateurs de carburant et d’énergie – plus de 100 euros par adulte et par mois en moyenne entre janvier 2020 et août 2022. Ils représentent 62 % de l’échantillon et 36 % parmi les ménages avec des faibles revenus. Les ménages modestes grands consommateurs de carburant et d’énergie sont étudiés spécifiquement dans la suite.

En août 2022, les patrimoines financiers bruts en euros constants des habitants des zones rurales et des ménages les plus modestes sont supérieurs à leurs niveaux de 2019, et les indicateurs de précarité inférieurs. Ce constat s’applique aussi aux ménages modestes ou ruraux qui consomment beaucoup d’énergie et de carburant. Le premier confinement de 2020 a en effet provoqué une hausse de l’épargne et une baisse des indicateurs de précarité chez tous ces groupes ; une période de relative stabilité s’en est suivie.

En revanche, depuis juillet 2021, le patrimoine financier brut en euros courants des ménages modestes grands consommateurs de carburant et d’énergie n’augmente presque plus. Ainsi, le patrimoine financier brut moyen de ce groupe a diminué de 4,7 % en euros constants entre août 2021 et août 2022, contre 3,4 % pour l’ensemble des bas revenus et 1,0 % pour la population générale. Cela semble indiquer que la situation financière se tend en bas de la distribution des revenus pour certains ménages, sans impliquer, à ce stade, de hausse généralisée de la précarité financière.

Face à l’augmentation des prix, les ménages diminuent leurs consommations de carburant et d’énergie en volume

Depuis un an, les des ménages augmentent en euros courants (figure 4), tirées par celles de carburant (figure 5). Sur l’ensemble de l’échantillon du Crédit Mutuel Alliance Fédérale, les dépenses augmentent de 0,8 % en glissement annuel sur la période juin-juillet (soit 31 euros mensuels). Cette augmentation est nettement inférieure à l’augmentation des prix en glissement annuel sur la période : 6,0 %. Cela suggère que les ménages ont diminué leur consommation en volume afin de préserver leur situation financière. En particulier, ils semblent avoir diminué leurs dépenses de carburant et d’énergie en volume. Effectivement, ces dépenses augmentent de 13,8 % en glissement annuel sur la période juin-juillet (soit 32 euros mensuels), alors que l’augmentation des prix de l’énergie (y compris produits pétroliers) est de 30,7 % sur la période.

Figure 4a – Revenus et dépenses de l'ensemble des ménages, par catégorie

en euros
Figure 4a – Revenus et dépenses de l'ensemble des ménages, par catégorie (en euros) - Lecture : en juillet 2022, les revenus des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont en moyenne de 4 656 euros.
Dépenses Revenus
Dépenses en carburant et énergie Dépenses par carte (hors carburant) Autres opérations sortantes
2020 Février 201 1 513 1 840 3 997
Mars 186 1 408 1 732 4 082
Avril 134 972 1 324 3 615
Mai 159 1 292 1 437 3 667
Juin 192 1 778 1 962 4 380
Juillet 208 1 772 2 078 4 651
Août 201 1 745 1 559 3 909
Septembre 191 1 593 1 908 3 996
Octobre 190 1 557 2 498 4 224
Novembre 156 1 375 1 968 4 083
Décembre 191 1 886 2 195 4 746
2021 Janvier 186 1 398 1 865 4 085
Février 187 1 433 1 755 3 903
Mars 220 1 559 2 031 4 390
Avril 188 1 472 1 939 4 152
Mai 214 1 592 1 814 4 013
Juin 218 1 853 2 015 4 422
Juillet 237 1 839 2 049 4 605
Août 235 1 864 1 662 4 021
Septembre 216 1 650 1 945 4 076
Octobre 223 1 630 2 497 4 256
Novembre 221 1 857 2 117 4 292
Décembre 231 1 957 2 288 4 905
2022 Janvier 223 1 639 1 955 4 310
Février 228 1 608 1 781 4 116
Mars 257 1 702 2 026 4 490
Avril 245 1 718 1 900 4 200
Mai 261 1 948 2 001 4 381
Juin 256 1 844 2 026 4 509
Juillet 262 1 886 1 999 4 656
  • Lecture : en juillet 2022, les revenus des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont en moyenne de 4 656 euros.
  • Champ : échantillon de clients actifs du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
  • Sources : Crédit Mutuel Alliance Fédérale ; Insee, calculs Insee.

Figure 4a – Revenus et dépenses de l'ensemble des ménages, par catégorie

  • Note : les périodes de confinement sont grisées.
  • Lecture : en juillet 2022, les revenus des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont en moyenne de 4 656 euros.
  • Champ : échantillon de clients actifs du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
  • Sources : Crédit Mutuel Alliance Fédérale ; Insee, calculs Insee.

Figure 5a – Dépenses en carburant et dépenses en énergie de l'ensemble des ménages

en euros
Figure 5a – Dépenses en carburant et dépenses en énergie de l'ensemble des ménages (en euros) - Lecture : en juillet 2022, les dépenses en carburant des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont en moyenne de 146 euros.
Dépenses en énergie Dépenses en carburant
2020 Février 109 92
Mars 122 64
Avril 109 25
Mai 108 51
Juin 113 79
Juillet 110 98
Août 101 100
Septembre 106 85
Octobre 104 85
Novembre 106 49
Décembre 114 77
2021 Janvier 110 76
Février 113 74
Mars 135 85
Avril 117 71
Mai 118 96
Juin 116 102
Juillet 118 119
Août 117 118
Septembre 111 105
Octobre 110 113
Novembre 119 103
Décembre 124 107
2022 Janvier 124 99
Février 123 105
Mars 139 119
Avril 122 123
Mai 130 130
Juin 120 137
Juillet 116 146
  • Lecture : en juillet 2022, les dépenses en carburant des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont en moyenne de 146 euros.
  • Champ : échantillon de clients actifs du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
  • Sources : Crédit Mutuel Alliance Fédérale ; Insee, calculs Insee.

Figure 5a – Dépenses en carburant et dépenses en énergie de l'ensemble des ménages

  • Note : les périodes de confinement sont grisées.
  • Lecture : en juillet 2022, les dépenses en carburant des ménages du Crédit Mutuel Alliance Fédérale sont en moyenne de 146 euros.
  • Champ : échantillon de clients actifs du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.
  • Sources : Crédit Mutuel Alliance Fédérale ; Insee, calculs Insee.

Les ménages avec de faibles revenus et une consommation élevée de carburant et d’énergie ont également ajusté leur consommation. Leurs dépenses augmentent de 1,5 % en glissement annuel sur la période juin-juillet (soit 32 euros mensuels). En particulier, leurs dépenses d’énergie et de carburant augmentent de 13,0 % en glissement annuel sur cette période (soit 32 euros mensuels), impliquant un recul de leur consommation en volume.

Les revenus ont, quant à eux, augmenté de 1,5 % en glissement annuel sur la période juin-juillet (soit 69 euros mensuels) pour l’ensemble des ménages (dans cet échantillon) et de 3,3 % (soit 72 euros mensuels) pour les ménages cumulant faibles revenus et importantes consommations de carburant et d’énergie. Plusieurs facteurs pourraient expliquer cette hausse des revenus, dont les hausses de salaires poussées notamment par les revalorisations automatiques du SMIC indexées sur l’inflation. Celui-ci a en effet augmenté de 5,85 % depuis un an. Les prestations sociales et familiales ont, quant à elles, été revalorisées de 1,8 % en avril 2022 et les pensions de retraite de 1,1 % en janvier 2022.

Cette croissance des revenus limite la dégradation de la situation financière. Toutefois, les revenus tels que mesurés dans ces données peuvent sous-estimer les contraintes pesant sur les ménages. Une partie des flux entrants considérés comme des revenus correspondent à des transferts d’un même ménage depuis une autre banque vers sa banque principale, ou des transferts entre différents ménages. Or, ces deux types de transferts peuvent augmenter en cas de difficultés financières (sources et méthodes).

Publication rédigée par :Marine Adam, Odran Bonnet et Tristan Loisel (Insee)

Sources et méthodes

Accès et utilisation des données

L’Insee remercie le Crédit Mutuel Alliance Fédérale et La Banque Postale pour leur disponibilité et pour avoir permis d’accéder à des données de comptes bancaires dans un cadre garantissant l’anonymat des clients. Les détails concernant l’accès et l’utilisation des données sont disponibles dans la note de conjoncture de mars 2021 [Insee, 2022b] pour les données du Crédit Mutuel Alliance Fédérale et dans l’Insee Analyses n° 69 [Bonnet et al., 2021] pour les données de La Banque Postale.

Le Conseil d’analyse économique a publié récemment une note sur les effets inflationnistes grâce aux seules données du Crédit Mutuel Alliance Fédérale : leurs analyses sont cohérentes avec celles présentées dans cette étude qui les complète avec le recours aux données de La Banque Postale.

Notre partenaire, le Crédit Mutuel Alliance Fédérale, souhaite rappeler les éléments suivants :

  • Première banque à adopter le statut d’entreprise à mission, Crédit Mutuel Alliance Fédérale a participé à cette étude dans le cadre des missions qu’elle s’est fixées ;
  • contribuer au bien commun en œuvrant pour une société plus juste et plus durable : pour Crédit Mutuel Alliance Fédérale, participer à l’information économique c’est contribuer au débat démocratique ;
  • protéger l’intimité numérique et la vie privée de chacun : Crédit Mutuel Alliance Fédérale veille à la protection absolue des données de ses clients.

Toutes les analyses réalisées dans le cadre de cette étude ont été effectuées sur des données strictement anonymisées et sur les seuls systèmes d’information sécurisés et hébergés en France du Crédit Mutuel.

Limites de l’étude liées aux données bancaires

La clientèle d’une banque n’est pas représentative de la population. L’échantillon exclut les individus non bancarisés. De plus, chaque banque a une clientèle particulière qui n’est pas représentative de la population française.

Les données bancaires ne permettent pas d’observer avec précision les revenus des ménages. Tout d’abord, certains revenus peuvent être perçus via une autre institution bancaire ou en liquide. Cela a pour effet de sous-estimer les revenus des ménages concernés. Ensuite lorsque l’on considère les flux entrants, certains correspondent vraisemblablement à des transferts depuis des comptes détenus dans une autre banque. Cela a pour effet de surestimer le revenu de certains ménages et de lisser les chocs (un ménage qui subit une perte de revenu pourrait avoir tendance à rapatrier une partie de ses fonds vers sa banque principale).

Les données bancaires ne permettent pas d’observer avec précision toutes les dépenses. Certains flux sortants ne correspondant pas à de la consommation : transferts de fonds d’une institution financière à une autre, impôts, transferts entre ménages, etc.

Constitution des échantillons finaux

Sur la période, le nombre de comptes inactifs dans l’échantillon est en augmentation. Pour éviter les biais qui pourraient en résulter, seuls les clients qui dépensent (en cartes, retraits et prélèvements) et perçoivent plus de 150 euros sur trois mois glissants tout au long de la période sont conservés dans l’étude. Ainsi, les échantillons finaux correspondent à des populations fixes au cours du temps entre 2019 et 2022. L’échantillon est pondéré, à partir du recensement de la population, selon l’âge quinquennal et le département afin de mieux représenter la structure générale de la population française. Cette opération ne suffit cependant pas à rendre chaque échantillon représentatif de la population. Pouvoir comparer des résultats sur deux réseaux bancaires, avec des clientèles différentes, permet de vérifier la robustesse des analyses.

Biais dû à un panel sans nouveaux entrants

Les panels sont constitués de ménages présents sur l’ensemble de la période. Les observations d'août 2022 correspondent, par construction, à des individus plus âgés que celles de janvier 2019, dont les revenus ont pu augmenter indépendamment de la conjoncture (du fait de leur ancienneté en emploi par exemple). De plus, par construction toujours, les clients ont une ancienneté moyenne dans la banque plus importante à la fin de la période qu’au début. Cela peut, en particulier, affecter les soldes sur les comptes. Ce biais potentiel ne semble toutefois pas de premier ordre, les évolutions observées sur ces échantillons étant proches de celles constatées sur l’ensemble de la population.

Publication rédigée par :Marine Adam, Odran Bonnet et Tristan Loisel (Insee)

Définitions

Le patrimoine financier brut d’un ménage client d’une institution bancaire correspond à la somme de tous les avoirs sur ses comptes (hormis les dettes et les crédits) : comptes courants (individuels et joints), comptes épargne, assurances vie et comptes-titres.

Les ménages correspondent aux groupes clients au Crédit Mutuel Alliance Fédérale et aux clients partageant un compte joint à La Banque Postale. Les groupes de ménages sont constitués à partir de la distribution du revenu du ménage (pris sur l’ensemble de la période étudiée), divisé par le nombre d’adultes dans le ménage.

Les revenus mensuels sont mesurés par la somme des virements et des chèques entrants d’un montant inférieur à 40 000 euros.

Les dépenses en énergie correspondent aux prélèvements catégorisés « énergie » par le Crédit Mutuel Alliance Fédérale (disponibles dans les données à partir de décembre 2019). Ainsi, les dépenses d’énergie effectuées à partir d’autres moyens de paiements ne sont pas incluses dans cette catégorie. Les dépenses en carburant correspondent à des dépenses par carte. Elles sont identifiées à partir de la nomenclature Merchant Category Code (MCC). Ainsi, les dépenses de carburant effectuées à partir d’autres moyens de paiements sont ignorées.

Les dépenses mensuelles correspondent à la somme des dépenses par carte, y compris les retraits (au distributeur ou au guichet), et des autres opérations sortantes : chèques et virements sortants ainsi que les prélèvements (à l’exclusion de ceux correspondant à des remboursements de crédits).

Pour en savoir plus