Avec le seul mois d’avril en confinement et la reprise progressive des salons et autres manifestations, la crise sanitaire impacte beaucoup moins les productions agricoles et leur commercialisation. En revanche, les effets désormais réguliers du réchauffement climatique sont beaucoup plus préoccupants pour la profession, qui doit s’adapter à ces aléas de plus en plus fréquents.

L’année 2021 est marquée par les premiers résultats de l’opération décennale de recensement agricole. Millésimés 2020, ceux-ci vont à l’encontre de la tendance nationale et sont encourageants pour l’agriculture insulaire. La Corse est la seule région métropolitaine où la lente érosion du nombre d’exploitations, constatée depuis un demi-siècle, s’interrompt (figure 1). Si, avec 2 936 exploitations, la croissance est de 4,5 % en dix ans, elle est encore plus nette en termes d’emplois directs : 4 500 équivalents temps-plein travaillent sur les exploitations, soit une hausse de 12 %. La Corse se distingue également par un dynamisme plus prononcé quant aux pratiques porteuses pour la profession : une exploitation sur six est dorénavant « bio », une sur trois bénéficie d’une appellation et huit sur dix commercialisent au moins une partie de leur production en circuit court.

Avec 345 000 hectolitres, la production 2021 est conforme à la moyenne des cinq années précédentes, mais en recul de 11 % par rapport à l’excellente récolte de 2020 (figure 2). En l’absence d’aléas sanitaires importants, les raisons sont à rechercher dans les manifestations de plus en plus fréquentes et hétérogènes du réchauffement climatique : pluviométrie atone, avec sécheresse estivale particulièrement marquée, mais aussi gels localisés au printemps. En termes de commercialisation, la saison touristique a porté le marché insulaire, où s’écoule environ un tiers de la production.

À l’international (20 % de la production régionale), la situation s’est aussi améliorée avec le changement politique aux États-Unis et la fin de la surtaxe sur les vins français.

Pour fêter les 15 ans de l’obtention de l’Indication Géographique Protégée (IGP), la récolte de clémentines corses est encore importante (37 350 tonnes) et de bonne qualité pour la saison 2021/2022 (figure 3). Sa commercialisation est satisfaisante, avec des cours sur les marchés de gros supérieurs aux années précédentes. La mise en place d’un pont aérien avec le Maroc, initiée l’an passé au plus fort de la crise Covid, est renouvelée en 2021, pour faciliter l’acheminement de la main-d’œuvre saisonnière nécessaire à la cueillette des fruits. La filière poursuit sa modernisation, avec le lancement de chantiers d’unités locales de transformation pour les fruits de calibre insuffisant, qui étaient auparavant traités sur le continent, et une réflexion sur le renforcement de capacité en locaux réfrigérés pour la conservation.

Parmi les productions caractéristiques insulaires, la récolte de châtaignes est particulièrement importante en 2021, renouant avec les années fastes qui approchent ou dépassent les 200 tonnes.

En revanche, des difficultés sanitaires majeures (forte pression de la mouche de l’olive, attaques du charançon de l’olivier) ont affecté la récolte d’olives, très déficitaire après une année 2020 exceptionnelle.

Les productions animales sont à nouveau touchées par les difficultés sanitaires ou structurelles qui les pénalisent régulièrement. La fermeture des abattoirs de Ponte-Leccia et de Cuttoli complique l’organisation des abattages, notamment en fin d’année, pleine saison pour les porcs et les agneaux. Cela nécessite l’adaptation des tonnages dans les autres structures de l’île. La rénovation du parc des abattoirs insulaires est un objectif majeur pour la filière.

Plusieurs foyers de fièvre catarrhale ovine (FCO), également connue sous le nom de « Bluetongue » (ou maladie de la langue bleue) ont été détectés au cours de l’automne 2021. La surveillance des troupeaux et les mesures sanitaires sont renforcées.

Autre source de préoccupation pour les éleveurs, la sécheresse récurrente ces dernières années limite la production fourragère locale. Déficitaire pour nourrir un cheptel important, même si en légère baisse ces dernières années (figure 4), elle nécessite un recours accru à des achats coûteux de fourrages en provenance de la plaine de Crau.

Les conditions climatiques impactent également depuis plusieurs années la population des essaims d’abeilles et la production de miel. Approchant régulièrement les 20 kg par ruche il y a encore quelques années, le rendement est tombé à moins de 14 kg lors des deux derniers exercices.