Des multinationales étrangères très implantées dans l’industrie régionale

Les multinationales sont des groupes d’entreprises qui exercent leur activité dans plusieurs pays. Certaines d’entre elles, françaises ou étrangères, localisent une partie de leur activité en Auvergne-Rhône-Alpes. Elles occupent une place importante dans le tissu économique régional puisqu’elles y emploient 780 000 salariés en 2017. Elles ont la capacité de réorganiser assez rapidement certains segments de leur activité. Il existe ainsi des enjeux locaux non seulement pour les attirer, mais aussi et surtout pour créer les conditions permettant de les ancrer durablement sur le territoire. De plus, les multinationales produisent des biens et des services qui ont vocation à alimenter de vastes marchés. Leurs activités s’inscrivent donc dans une logique de production : dans la région, 68 % de leurs emplois relèvent de la sphère productive, soit 13 points de plus que dans l’ensemble de l’emploi salarié.

Les multinationales étrangères ont leur centre de décision principal implanté à l’étranger. Elles emploient 226 100 salariés dans la région, répartis dans 7 310 établissements pour 2 700 entreprises. Elles regroupent 13,6 % des emplois salariés du secteur marchand en Auvergne-Rhône-Alpes, qui se place au quatrième rang des régions pour cet indicateur, proche de la Bourgogne-Franche-Comté et du Centre-Val de Loire. Le poids des multinationales étrangères est plus important dans le Grand Est (18,7 %), en Île-de-France (16,5 %) et dans les Hauts-de-France (15,9 %). Compte tenu de son poids économique, Auvergne-Rhône-Alpes est la région de province comptabilisant le plus d’emplois de ces multinationales (devant le Grand Est qui en accueille 186 100). Dans la région, le tissu industriel développé et la présence de grands établissements contribuent à expliquer ce poids assez important des groupes étrangers.

En France, les multinationales étrangères sont concentrées géographiquement. On les retrouve surtout implantées au nord d’une diagonale Caen-Marseille (figure 1). Les quatre premières régions employeuses rassemblent ainsi les deux tiers des emplois des groupes étrangers implantés en France.

Dans la région, l’emploi des groupes étrangers est concentré : 5 % des établissements regroupent près de la moitié des emplois sous contrôle étranger. Les dix plus gros établissements des multinationales étrangères de la région emploient plus de 1 000 salariés chacun.

La présence des grands établissements des multinationales étrangères en Auvergne-Rhône-Alpes répond à différentes logiques d’implantation historiques. Un premier type de multinationales étrangères se distingue par une installation et un développement dans la région ex nihilo. C’est le cas du groupe américain Caterpillar implanté à Grenoble notamment (fabrication de machines pour l’extraction ou la construction) et du groupe suisse Stäubli (fabrication de machines pour le textile, la robotique et la connectique). D’autres firmes étrangères implantées en Auvergne-Rhône-Alpes sont issues d’opérations capitalistiques, suite au rachat de grandes entreprises françaises. Renault Trucks (groupe suédois Volvo depuis 2001) ou le groupe japonais NTN-SNR, spécialisé dans la fabrication de roulements mécaniques, relèvent de cette logique d’implantation. Enfin, d’autres groupes étrangers sont issus de la fusion de plusieurs entreprises, comme le groupe suisse ST, spécialisé dans la fabrication de composants électroniques, ou Iveco, dans la construction de véhicules industriels.

Les multinationales étrangères sont plus présentes dans l’industrie que dans l’emploi total. En Auvergne-Rhône-Alpes, 111 000 emplois sous contrôle étranger relèvent de ce secteur, soit 24 % des emplois de l’industrie régionale (22 % au niveau national). La présence des groupes étrangers est forte dans la fabrication de machines et équipements, avec 20 100 emplois (55 % des emplois de ce secteur contre 51 % en France, figure 2). Dans la fabrication de matériels de transport, les multinationales étrangères, avec 13 200 salariés, concentrent également plus de la moitié des emplois (contre 22 % en moyenne nationale). C’est une spécificité de la région due notamment au poids de Renault Trucks et d’Iveco. Avec 8 600 emplois, les groupes étrangers concentrent 44 % de l’emploi dans la fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques (35 % en France). ST contribue fortement à cette spécificité régionale. Dans le commerce et la réparation d’automobiles et de motocycles, les groupes étrangers sont moins implantés (15 % dans la région, contre près de 17 % au niveau national). Toutefois, cette part représente 51 300 emplois en Auvergne-Rhône-Alpes, soit un peu moins d’un quart des effectifs des multinationales étrangères.

Même si la plupart des multinationales étrangères implantées en Auvergne-Rhône-Alpes ont pour finalité de produire des biens, seuls 28 % de leurs effectifs relèvent d’emplois de production (fabrication ou construction). Les groupes étrangers présents dans la région se démarquent par une surreprésentation des emplois relevant de fonctions métropolitaines (conception-recherche, commerce interentreprises, gestion, prestations intellectuelles et culture-loisirs). Celles-ci occupent 41 % des emplois, contre 35 % dans les multinationales françaises et 33 % dans l’ensemble des entreprises. Auvergne-Rhône-Alpes est la région de province dans laquelle les groupes étrangers emploient le plus de fonctions métropolitaines, en part mais aussi en volume (93 100 emplois, figure 3).

Les fonctions de conception-recherche sont un marqueur fort de la région. Elles regroupent 9 % des emplois des groupes étrangers, soit deux points de plus que dans les multinationales françaises. Le profil d’Auvergne-Rhône-Alpes est comparable à celui de Provence-Alpes-Côte d’Azur (avec Sophia Antipolis) ou d’Occitanie (avec la filière aéronautique), alors qu’en Grand Est, en Bourgogne-Franche-Comté ou dans les Hauts-de-France, l’emploi sous contrôle étranger reste plutôt orienté vers des fonctions de production.

Dans l’industrie, les fonctions de conception-recherche se rapportent aux phases préliminaires de la fabrication. En Auvergne-Rhône-Alpes, elles concernent 13 000 emplois sous contrôle étranger, soit 12 % des emplois des multinationales étrangères industrielles, contre 10 % pour leurs homologues françaises. Par rapport aux autres régions de province, les multinationales étrangères d’Auvergne-Rhône-Alpes concentrent davantage de fonctions de conception-recherche.

En Auvergne-Rhône-Alpes, deux tiers des emplois des multinationales étrangères sont contrôlés par des groupes dont le centre de décision est localisé sur le continent européen. C’est en partie le reflet du mode d’organisation de la production et de l’intégration forte de certaines filières au sein du continent.

Troisième nationalité représentée, la Suisse a un poids plus fort dans la région qu’en France (+ 4 points, figure 4), qui est dû à sa proximité géographique notamment. Auvergne-Rhône-Alpes est la région dans laquelle cette nationalité est la plus représentée. 27 % des emplois sous contrôle suisse concernent la fabrication d’équipements électriques, électroniques, informatiques ou de machines, soit presque deux fois plus qu’en moyenne nationale. Cette particularité tient notamment au poids de ST. En lien principalement avec l’implantation de Renault Trucks dans la région, la nationalité suédoise est également plus présente. Ainsi, en Auvergne-Rhône-Alpes, dans le secteur de la fabrication de matériels de transport, 44 % des salariés dépendant de l’étranger sont sous contrôle suédois (contre seulement 13 % en moyenne nationale).

Comme en France, les groupes ayant un centre de décision aux États-Unis restent ceux qui emploient le plus de salariés en Auvergne-Rhône-Alpes, avec 51 000 emplois, soit 23 % des emplois de la région sous contrôle étranger. Les multinationales allemandes, principalement implantées en Île-de-France et en Grand Est, emploient en proportion moins de salariés en Auvergne-Rhône-Alpes qu’en France (2,5 points d’écart). Néanmoins, la nationalité allemande est la deuxième employeuse en multinationales étrangères dans la région, avec 34 400 salariés dans 1 210 établissements. Les groupes britanniques portent 14 400 emplois répartis dans 540 établissements, Auvergne-Rhône-Alpes étant leur deuxième région d’implantation en France.

Certaines entreprises implantées en France ont plus de la moitié de leurs effectifs français en Auvergne-Rhône-Alpes : on parle d’entreprises « majoritairement implantées » dans la région. Les groupes sous contrôle étranger dont les filiales françaises sont majoritairement implantées en Auvergne-Rhône-Alpes emploient 100 900 salariés dans la région, soit 45 % des effectifs régionaux en multinationales étrangères. Sur ce critère, Auvergne-Rhône-Alpes se situe loin derrière l’Île-de-France (61 %) et juste devant le Grand Est (43 %). Les activités industrielles ont un degré d’implantation plus fort en Auvergne-Rhône-Alpes. En effet, 64 % des emplois sous contrôle étranger dans l’industrie relèvent d’une entreprise majoritairement implantée dans la région, soit près de 70 700 emplois. Cette proportion est la plus forte de France devant celle de Grand Est (54 %).