Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'AzurEmploi salarié – Croissance « externe » dans les grandes entreprises, « interne » dans les plus petites

Frédéric Châtel, Virginie Mora (Insee)

En Provence-Alpes-Côte d'Azur, la croissance de l’emploi salarié depuis la crise de 2008 est attribuable aux établissements relevant de grandes entreprises et d’entreprises de taille intermédiaire. Cette concentration accrue de l’emploi s’explique en partie par des mouvements de rachats et de fusions-acquisitions d’entreprises de moindre taille, mais aussi par des créations de nouveaux établissements. Dans le même temps, leurs établissements pérennes perdent dans l’ensemble des emplois sur la période.

En revanche, les PME et les microentreprises se développent globalement par croissance interne : leurs établissements pérennes créent des emplois. Elles alimentent en outre fortement la croissance des entreprises de taille plus importante, soit que leur développement les conduise à changer de catégorie, soit par le biais des rachats dont elles font l’objet.

Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'Azur
No 72
Paru le :Paru le18/02/2021
Frédéric Châtel, Virginie Mora (Insee)
Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'Azur No 72- Février 2021

ETI et grandes entreprises concentrent davantage d’emplois en 2017 qu’en 2008

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, fin 2017, les secteurs marchands hors agriculture comptent 1 100 000 emplois salariés. C’est 26 000 de plus que fin 2008, au début de la crise. Sur la période, l’effectif salarié relevant d’entreprises de taille intermédiaire () a progressé (+ 35 300 postes), plus encore que celui des grandes entreprises (GE, + 17 200). L’effectif total des PME est resté stable mais celui des microentreprises s'est contracté de 28 300 (figure 1).

Figure 1La part dans l’emploi des plus grandes entreprises augmenteEffectif salarié des établissements de Provence-Alpes-Côte d’Azur en 2008 et 2017, selon la catégorie statistique de l’entreprise d’appartenance

La part dans l’emploi des plus grandes entreprises augmente
2008 2017
Grandes entreprises 249 478 266 668
Entreprises de taille intermédiaire 209 603 244 888
Petites et moyennes entreprises 326 190 328 043
Microentreprises 286 823 258 490
Ensemble 1 072 094 1 098 089
  • Champ : établissements appartenant aux entreprises du secteur marchand non agricole, hors entreprises sous le régime du micro-entrepreneur.
  • Source : Insee, REE, Lifi, Clap, Flores

Figure 1La part dans l’emploi des plus grandes entreprises augmenteEffectif salarié des établissements de Provence-Alpes-Côte d’Azur en 2008 et 2017, selon la catégorie statistique de l’entreprise d’appartenance

  • Champ : établissements appartenant aux entreprises du secteur marchand non agricole, hors entreprises sous le régime du micro-entrepreneur.
  • Source : Insee, REE, Lifi, Clap, Flores

Ces évolutions de l'emploi selon les catégories d'entreprises résultent de plusieurs mouvements.

Elles découlent en partie de variations d’effectifs au sein d’entreprises qui ne changent pas de catégorie. Le niveau d’emploi croît ou diminue dans les établissements , mais aussi sous l’effet , d’établissements au cours de la période. Par ailleurs, les évolutions de l’emploi selon les catégories d’entreprises résultent aussi des franchissements de seuil par certaines entreprises. C'est le cas par exemple si l’effectif total d’une entreprise a suffisamment progressé ou bien lorsqu’un établissement a été acquis par une entreprise d’une autre catégorie.

La progression de l'emploi dans les grandes entreprises passe essentiellement par le rachat d'entreprises de moindre taille

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, entre 2008 et 2017, la progression de l'emploi dans les GE provient pour l'essentiel des emplois gagnés par franchissement de seuil, avec un solde de + 28 700 emplois (figure 2) en leur faveur provenant d'établissements qui relevaient auparavant d'ETI et, dans une moindre mesure, de PME. Ce flux d’emplois témoigne d’un développement important des GE par croissance externe, à travers des rachats, acquisitions-fusions et intégrations d’autres entreprises.

Dans les ETI, le gain net d’emploi lié aux franchissements de seuil est notable également : les emplois provenant d'anciens établissements des PME (+ 42 500 emplois) excèdent très nettement les cessions d’emploi en direction des GE (– 23 900 emplois). Là encore, ce phénomène traduit pour partie la croissance externe des ETI par rachat d’entreprises de plus petite taille mais aussi la croissance interne de certaines PME franchissant le seuil des ETI par leurs recrutements.

À l'opposé, ces franchissements de seuil réduisent très fortement l'emploi recensé au sein des micro-entreprises. Que ce soit par développement de l’emploi en interne ou bien par rachat de ces entreprises, 32 900 emplois nets basculent ainsi au cours de la période vers des entreprises de plus grandes tailles, pour l'essentiel des PME. Enfin, pour les mêmes raisons, les PME cèdent dans l’ensemble 15 100 emplois, essentiellement en direction des ETI.

Lorsque l’on met de côté les transferts d'emplois liés aux changements de catégories d'entreprises, les dans la région sont à mettre particulièrement au crédit des ETI et des PME, avec respectivement 14 300 et 13 000 emplois créés. Les microentreprises en génèrent encore 4 300. En revanche, considérées à contour constant, les GE ont été, sur la période, destructrices nettes d'emploi, avec 11 000 emplois perdus.

Les établissements pérennes des grandes entreprises perdent davantage d’emplois qu’ils n’en créent

Au sein des GE de la région, les hausses d'emplois liées à des entrées d’établissements font plus que compenser l’effet des sorties (+ 14 200 emplois au total). En revanche, les établissements pérennes des GE perdent dans le même temps 25 200 emplois.

Les pertes au sein des établissements pérennes de GE sont majeures dans le secteur du transport-entreposage (– 12 400 emplois), compensées seulement en partie par les emplois issus du solde des entrées et sorties d'établissements (+ 5 800 emplois). Les activités financières et d’assurance perdent des emplois à la fois dans leurs établissements pérennes et sur le solde des entrées-sorties (– 3 200 emplois dans l'ensemble).

Les créations d'établissements stimulent particulièrement les gains d'emploi dans les ETI

Dans les ETI, les créations d'emploi à contour constant reposent pour l’essentiel sur le solde des emplois issus des entrées et sorties d'établissements sur la période. Face aux 20 900 emplois nets ainsi créés, les établissements pérennes des ETI perdent un peu plus d'emplois qu'ils n'en créent (– 6 500 emplois nets).

Les entrées et sorties d'établissements conduisent à des gains d’emploi, en particulier dans le secteur du commerce et dans celui de l’enseignement-santé humaine et action sociale. Ce dernier se distingue en créant, en outre, 2 900 emplois dans ses établissements pérennes entre 2008 et 2017.

Les établissements pérennes des PME et microentreprises créent des emplois

Dans les PME comme dans les microentreprises, les gains d’emploi à contour constant entre 2008 et 2017 s'appuient sur la progression de l'emploi au sein de leurs établissements pérennes (+ 13 000 emplois et + 12 200 respectivement). La plupart des secteurs d’activité sont concernés. Seules la construction et les activités immobilières, auxquels s'ajoute, pour les PME, l’hébergement-restauration, font exception : l’emploi se contracte dans leurs établissements pérennes.

Les entrées et sorties d'établissements conduisent en revanche à une variation quasi nulle de l’emploi dans les PME et à une nette diminution de l'emploi salarié dans les microentreprises, avec d'importantes différences entre secteurs. Par ce biais des entrées-sorties, la construction perd un très grand nombre d'emplois (– 9 400) tandis que l'hébergement-restauration parvient à en créer 5 900 en solde net entre 2008 et 2017.

Figure 2Les changements de catégorie d’entreprises permettent aux grandes entreprises de gagner des effectifsVariation totale de l’emploi entre 2008 et 2017 en Provence-Alpes-Côte d’Azur et contribution de la variation des établissements pérennes, des entrées-sorties d’établissements et des changements de catégorie, par catégorie d’entreprise

Les changements de catégorie d’entreprises permettent aux grandes entreprises de gagner des effectifs - Lecture : les 28 300 emplois en moins dans les microentreprises entre 2008 et 2017 résultent du solde des emplois créés et supprimés par les établissements pérennes dépendant de microentreprises (+ 12 200 emplois), du solde lié aux créations et disparitions d’établissements dans des entreprises de cette catégorie (– 7 800 emplois), enfin du solde lié aux changements de catégories d’entreprise entre ces deux dates (– 32 900 emplois). S'y ajoute la variation de l’emploi liée aux entrées et sorties d’établissements du champ de l’étude (pour comprendre), qui n'est pas traitée dans cette étude en raison de son caractère numériquement mineur.
Variation de l’emploi 2008-2017 Variation d’emploi dans les établissements pérennes (solde) Variation d’emploi liée aux entrées et sorties d’établissements (solde) Variation d’emploi liée aux changements de catégorie d’entreprise (solde)
Grandes entreprises 17 190 -25 200 14 195 28 736
Entreprises de taille intermédiaire 35 285 -6 560 20 880 19 228
Petites et moyennes entreprises 1 853 12 973 46 -15 062
Microentreprises -28 333 12 185 -7 844 -32 902
  • Lecture : les 28 300 emplois en moins dans les microentreprises entre 2008 et 2017 résultent du solde des emplois créés et supprimés par les établissements pérennes dépendant de microentreprises (+ 12 200 emplois), du solde lié aux créations et disparitions d’établissements dans des entreprises de cette catégorie (– 7 800 emplois), enfin du solde lié aux changements de catégories d’entreprise entre ces deux dates (– 32 900 emplois). S'y ajoute la variation de l’emploi liée aux entrées et sorties d’établissements du champ de l’étude (pour comprendre), qui n'est pas traitée dans cette étude en raison de son caractère numériquement mineur.
  • Champ : établissements appartenant aux entreprises du secteur marchand non agricole, hors entreprises sous le régime de microentrepreneur.
  • Source : Insee, REE, Lifi, Clap, Flores

Figure 2Les changements de catégorie d’entreprises permettent aux grandes entreprises de gagner des effectifsVariation totale de l’emploi entre 2008 et 2017 en Provence-Alpes-Côte d’Azur et contribution de la variation des établissements pérennes, des entrées-sorties d’établissements et des changements de catégorie, par catégorie d’entreprise

  • Lecture : les 28 300 emplois en moins dans les microentreprises entre 2008 et 2017 résultent du solde des emplois créés et supprimés par les établissements pérennes dépendant de microentreprises (+ 12 200 emplois), du solde lié aux créations et disparitions d’établissements dans des entreprises de cette catégorie (– 7 800 emplois), enfin du solde lié aux changements de catégories d’entreprise entre ces deux dates (– 32 900 emplois). S'y ajoute la variation de l’emploi liée aux entrées et sorties d’établissements du champ de l’étude (champ), qui n'est pas traitée dans cette étude en raison de son caractère numériquement mineur.
  • Champ : établissements appartenant aux entreprises du secteur marchand non agricole, hors entreprises sous le régime de microentrepreneur.
  • Source : Insee, REE, Lifi, Clap, Flores

Des créations d’emploi plus importantes dans les ETI et les PME de la région

Les phénomènes décrits pour les grandes entreprises de la région s’observent aussi, dans des proportions comparables, pour l’ensemble de la France. En revanche, la croissance de l’emploi dans les ETI se déroule de façon plus appuyée dans la région. Le solde des effectifs résultant des entrées et sorties d’établissements y est particulièrement positif, et les gains liés aux franchissements de seuil sont de plus grande ampleur.

Contrairement à la région, les PME comptent au niveau national moins d’emploi en 2017 qu’en 2018. En particulier, la progression des effectifs au sein des établissements pérennes est plus rapide dans la région.

Inversement, la part des effectifs salariés dans les microentreprises s’est davantage réduite dans la région sur la période 2008 à 2017. Cela tient à un moindre dynamisme de l’emploi parmi les entreprises pérennes de cette catégorie.

Sources

Cette étude utilise une base créée par l’Insee à partir des données de démographie des établissements de 2008 à 2017 (stocks et transferts d’établissements, continuité économique…), enrichies de données sur l’emploi issues des sources Clap (2008 à 2015) et Flores (à partir de 2016) et d’informations sur le contour des entreprises issues de la source Lifi pour calculer les catégories d’entreprises.

Définitions

Grandes entreprises, entreprises de taille intermédiaire, PME, microentreprises

Quatre catégories d’entreprises sont définies dans le décret d’application de la loi de modernisation de l’économie (décret n° 2008-1354) pour les besoins de l’analyse statistique et économique, les petites et moyennes entreprises (PME) dont les microentreprises, les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises. La notion de microentreprise, utilisée à des fins d’analyse statistique et économique, diffère de celle du régime fiscal de la micro-entreprise et ne s’apparente pas non plus au statut de micro-entrepreneur, appelé auto-entrepreneur avant le 19 décembre 2014.

Les PME sont les entreprises qui, d’une part, occupent moins de 250 personnes, d’autre part, ont un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 43 millions d’euros. Parmi elles, les microentreprises occupent moins de 10 personnes et ont un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 millions d’euros.

Les ETI sont des entreprises qui n’appartiennent pas à la catégorie des PME et qui, d’une part, occupent moins de 5 000 personnes, d’autre part, ont un chiffre d’affaires annuel n’excédant pas 1 500 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 2 000 millions d’euros.

Les grandes entreprises sont des entreprises non classées dans les catégories précédentes.

Dans la présente étude, l’appellation PME désigne les PME hors microentreprises.

Les établissements pérennes sont ceux qui, en début et en fin d’année, avaient des effectifs salariés non nuls, étaient dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, et avaient au moins deux ans d’ancienneté en fin de période.

Les établissements « entrés » comprennent les créations, reprises et réactivations d’établissements, les arrivées d’établissements dans la région ainsi que les créations d’établissement de l’année civile précédente.

Les établissements « sortis » comprennent les établissements disparus administrativement, les établissements n’ayant plus d’emploi ou transférés hors de la région.

Variation à contour constant et effet de changement de catégorie d’entreprise

Comparer le niveau d’emploi des différentes catégories d’entreprises à deux dates différentes ne permet pas de savoir quelles catégories ont créé ou détruit des emplois sur la période. La variable étudiée (l’emploi) influe en effet directement sur la variable qui sert au classement (la catégorie d’entreprise).

Pour savoir dans quelle catégorie l’emploi a été créé ou détruit, on calcule une variation de l’emploi à contour constant, qui partage l’évolution des effectifs entre les catégories situées en deçà et au-delà du seuil franchi. Plusieurs conventions sont possibles pour effectuer cette répartition. Proposée en 1996, l’approche dynamique, qui a rassemblé le plus d’avis favorables dans les débats entre économistes, est retenue pour cette étude.

La différence entre la variation totale et la variation à contour constant est la variation liée au franchissement de seuil.

Par exemple, lorsqu’une microentreprise comptant 7 salariés se développe jusqu’à atteindre 15 salariés (croissance interne), la variation « à contour constant » répartit l’augmentation de 8 emplois entre, d’une part, + 2 emplois attribués aux microentreprises (pour atteindre le seuil de 9 salariés, taille maximale des entreprises de cette catégorie) et + 6 emplois pour les PME. L’effet « franchissement de seuil » réduit de 9 salariés l’effectif global des microentreprises et augmente de 9 celui des PME. Au total, la variation d’emploi dans les microentreprises est de - 7 et de + 15 dans les PME

Lorsqu’une microentreprise comptant 7 salariés est rachetée par une PME comptant déjà 15 salariés (croissance externe de la PME), on considère qu’il y a simple transfert d’une catégorie d’entreprise à une autre. Il n’y a pas de variation à contour constant. La variation liée au franchissement de seuil est de - 7 pour les microentreprises et de + 7 pour les PME.

La variation d’emploi à contour constant, donc hors éventuel franchissement de seuil, peut également se décomposer selon deux dimensions :

  • celle intervenue au sein des établissements « pérennes » ;
  • celle intervenue suite à des « entrées » ou « sorties » d’établissements.

Champ

Le champ de l’étude est le secteur marchand non agricole hors intérimaires. Les micro-entrepreneurs sont exclus du champ.

Pour en savoir plus

Bacheré H., Mirouse B., « Une dynamique d’emploi spécifique dans les grandes entreprises », Insee Première n° 1839, février 2021

Rau F., Hecquet V., « Les grandes entreprises pèsent plus dans le Nord et les petites dans le Sud », Insee Première n° 1440, avril 2013

Besson V., Pailler P., « Un salarié du privé sur quatre travaille dans une microentreprise », Insee Analyse Provence-Alpes-Côte d’Azur n° 29, avril 2013