Insee Flash Nouvelle-AquitaineLes conditions de logement en Nouvelle-Aquitaine : frein à la propagation de la Covid-19, mais facteur d’isolement des personnes âgées

Pierre-Émile Bidoux, Ghislaine Monerie (Insee)

La Nouvelle-Aquitaine est relativement épargnée par la mortalité liée à la Covid-19, en dépit d’une population vulnérable par son âge avancé particulièrement nombreuse. Les conditions de logement, plus favorables dans la région qu’en France métropolitaine peuvent expliquer, en partie, que l’épidémie se soit moins diffusée : davantage de maisons et moins de suroccupation, sur un territoire moins densément peuplé. Toutefois, dans cette situation exceptionnelle de confinement, l’isolement fragilise encore plus les personnes âgées vivant seules.

Insee Flash Nouvelle-Aquitaine
No 60
Paru le :Paru le17/12/2020
Pierre-Émile Bidoux, Ghislaine Monerie (Insee)
Insee Flash Nouvelle-Aquitaine No 60- Décembre 2020

En mai 2020, 2 % des Néo-Aquitains de 15 ans ou plus (hors Ehpad, maisons de retraite et prisons) ont développé des anticorps contre le SARS-CoV-2 (Pour en savoir plus). La séroprévalence dans la région apparaît deux fois plus faible qu’en France métropolitaine et cinq fois moindre qu’en Île-de-France. Pendant l’épisode de surmortalité du printemps, l’excédent de mortalité en Nouvelle-Aquitaine reste très limité par comparaison avec le niveau national.

Le maillage territorial de la Nouvelle-Aquitaine et les conditions de logement dans la région pourraient expliquer en partie les moindres conséquences sanitaires de l’épidémie. En effet, résider dans une commune très dense accroît la probabilité de contracter le virus, de même que vivre dans le même logement pour un nombre élevé de personnes. Néanmoins, ces caractéristiques causent d’autres difficultés, comme l’isolement des personnes âgées.

Moins de 4 % des Néo-Aquitains en logement suroccupé

La Nouvelle-Aquitaine se caractérise par une faible densité de population : la moitié des Néo-Aquitains vit dans une commune peu dense ou très peu .

Cette spécificité diminue le risque de contamination par la Covid-19, et ce, d’autant plus que le parc des logements individuels est très important : dans la région, 8 habitants sur 10 résident dans une maison contre 6 sur 10 en France métropolitaine. Les maisons, en général plus spacieuses que les appartements, disposent souvent d’un espace extérieur et d’un nombre de pièces suffisant au regard de la composition des ménages occupants.

Aussi, seuls 2,2 % des résidences principales sont en situation de , soit 57 700 logements (figure 1), pour 1,3 million en France métropolitaine, soit 4,8 % du parc national. La région se place ainsi en 4e position des régions où la suroccupation des logements est la moins forte, derrière la Bretagne (1,5 %), les Pays de la Loire (1,8 %) et la Bourgogne-Franche-Comté (2,1 %).

Au total, 206 500 Néo-Aquitains habitent dans un logement auquel il manque au moins une pièce compte tenu de la taille du ménage qui l’occupe : ils représentent 3,6 % des Néo-Aquitains, contre 7,8 % de la population en France métropolitaine. Les familles monoparentales et les grands ménages sont plus souvent concernés par la suroccupation de leur logement. Toutefois, dans la région, ces ménages bénéficient de conditions d'habitat plus favorables qu'au niveau métropolitain. Seuls 3,8 % des Néo‑Aquitains vivant dans un ménage d’au moins 4 personnes logent en appartement (contre 10,7 % en métropole) et 7,6 % de la population vivant en appartement et en famille monoparentale occupent un logement de 1 ou 2 pièces. Cette part reste moindre qu’en France métropolitaine (10,9 %).

La suroccupation se retrouve essentiellement dans les agglomérations. Elle varie de 1,1 % des logements dans les Deux-Sèvres à 3,2 % en Gironde, où les tensions du marché du logement de la métropole bordelaise peuvent entraîner des difficultés à trouver un logement en adéquation avec les besoins du ménage. Dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville néo-aquitains (QPV), la part des résidences suroccupées (7,7 %) est plus élevée que dans le reste de la région, en particulier en Gironde (9,3 %) et en Haute-Vienne (9,7 %). Néanmoins, elle reste près de deux fois plus faible que dans les QPV de France métropolitaine (14,4 %).

Figure 1Peu de résidences principales suroccupées dans les départements de Nouvelle-AquitainePart des résidences principales suroccupées par département

(en %)
Peu de résidences principales suroccupées dans les départements de Nouvelle-Aquitaine ((en %))
Code département Département Part des résidences principales suroccupées
93 Seine-Saint-Denis 20,6
75 Paris 15,9
94 Val-de-Marne 13,7
92 Hauts-de-Seine 13,0
06 Alpes-Maritimes 11,7
95 Val-d'Oise 11,3
91 Essonne 8,7
13 Bouches-du-Rhône 7,6
77 Seine-et-Marne 7,5
78 Yvelines 7,3
2A Corse-du-Sud 6,3
83 Var 6,1
2B Haute-Corse 5,9
69 Rhône 5,6
34 Hérault 5,2
74 Haute-Savoie 4,5
60 Oise 4,4
66 Pyrénées-Orientales 4,2
84 Vaucluse 4,2
67 Bas-Rhin 4,1
30 Gard 3,8
31 Haute-Garonne 3,6
45 Loiret 3,4
59 Nord 3,4
68 Haut-Rhin 3,3
73 Savoie 3,3
28 Eure-et-Loir 3,2
33 Gironde 3,2
04 Alpes-de-Haute-Provence 3,1
38 Isère 3,1
80 Somme 3,1
27 Eure 3,0
10 Aube 2,9
76 Seine-Maritime 2,9
05 Hautes-Alpes 2,8
89 Yonne 2,7
11 Aude 2,6
21 Côte-d'Or 2,6
42 Loire 2,6
54 Meurthe-et-Moselle 2,6
82 Tarn-et-Garonne 2,6
14 Calvados 2,5
37 Indre-et-Loire 2,5
01 Ain 2,4
02 Aisne 2,4
57 Moselle 2,4
62 Pas-de-Calais 2,4
25 Doubs 2,3
26 Drôme 2,3
64 Pyrénées-Atlantiques 2,3
09 Ariège 2,2
44 Loire-Atlantique 2,2
51 Marne 2,2
87 Haute-Vienne 2,2
90 Territoire de Belfort 2,2
47 Lot-et-Garonne 2,1
86 Vienne 2,1
18 Cher 2,0
35 Ille-et-Vilaine 2,0
41 Loir-et-Cher 2,0
58 Nièvre 2,0
07 Ardèche 1,9
17 Charente-Maritime 1,9
48 Lozère 1,9
63 Puy-de-Dôme 1,9
72 Sarthe 1,9
24 Dordogne 1,8
46 Lot 1,8
61 Orne 1,7
65 Hautes-Pyrénées 1,7
71 Saône-et-Loire 1,7
03 Allier 1,6
12 Aveyron 1,6
19 Corrèze 1,6
23 Creuse 1,6
36 Indre 1,6
39 Jura 1,6
40 Landes 1,6
49 Maine-et-Loire 1,6
81 Tarn 1,6
88 Vosges 1,6
08 Ardennes 1,5
16 Charente 1,5
32 Gers 1,5
52 Haute-Marne 1,5
70 Haute-Saône 1,5
56 Morbihan 1,4
22 Côtes-d'Armor 1,3
50 Manche 1,3
55 Meuse 1,3
29 Finistère 1,2
43 Haute-Loire 1,2
85 Vendée 1,2
15 Cantal 1,1
53 Mayenne 1,1
79 Deux-Sèvres 1,1
  • Champ : France métropolitaine, résidences principales, hors studio d’une personne
  • Source : Insee, Recensement de la population 2016 (exploitation complémentaire)

Figure 1Peu de résidences principales suroccupées dans les départements de Nouvelle-Aquitaine

  • Champ : France métropolitaine, résidences principales, hors studio d’une personne
  • Source : Insee, Recensement de la population 2016 (exploitation complémentaire)

L’isolement des personnes âgées notamment a pu se renforcer pendant la crise sanitaire

De telles conditions de logement ont néanmoins d’autres conséquences, notamment l’isolement. La population âgée, importante dans la région, vit seule à 41 % (figure 2). Elle peut ainsi rencontrer des difficultés renforcées par les restrictions dues à la crise sanitaire : isolement et difficultés à se déplacer, pour faire ses courses ou se soigner.

En proportion, ces personnes âgées sont davantage présentes en Creuse. Dans ce département, 40 % des personnes de 75 ans ou plus vivant seules résident dans une commune dépourvue de commerce alimentaire généraliste, et un quart vit sous le , contre 12 % au niveau métropolitain.

Figure 2En Creuse, une part importante de personnes âgées vivant seules et éloignées d’un commerce alimentaire généralistePart des 75 ans ou plus vivant seuls dans la population des ménages et part des 75 ans ou plus vivant seuls et résidant dans une commune dépourvue de commerce alimentaire généraliste dans la population des 75 ans ou plus vivant seuls

(En %)
En Creuse, une part importante de personnes âgées vivant seules et éloignées d’un commerce alimentaire généraliste ((En %))
Personnes seules âgées de 75 ans ou plus (en nombre) Part des personnes seules de 75 ans ou plus dans la population des ménages Part des personnes seules de 75 ans ou plus vivant et résidant dans une commune dépourvue de commerce alimentaire généraliste dans la population des 75 ans ou plus vivant seuls
Charente 15 255 4,4 29,7
Charente-Maritime 29 957 4,8 14,8
Corrèze 12 806 5,5 20,5
Creuse 7 119 6,2 40,4
Dordogne 20 289 5,0 26,3
Gironde 52 289 3,4 8,1
Landes 16 224 4,1 18,7
Lot-et-Garonne 15 083 4,7 19,4
Pyrénées-Atlantiques 29 613 4,5 14,9
Deux-Sèvres 14 918 4,1 25,1
Vienne 17 553 4,1 20,2
Haute-Vienne 17 750 4,8 14,7
  • Note : En Creuse, 7 100 personnes âgées de 75 ans ou plus vivent seules dans leur logement, soit 6 % de la population des ménages du département. Dans cette population des seniors creusois de 75 ans ou plus vivant seuls, 40 % résident dans une commune dépourvue de commerce alimentaire généraliste.
  • Champ : Population des logements ordinaires
  • Source : Insee, Recensement de la population 2016 et Base permanente des équipements 2018

Figure 2En Creuse, une part importante de personnes âgées vivant seules et éloignées d’un commerce alimentaire généralistePart des 75 ans ou plus vivant seuls dans la population des ménages et part des 75 ans ou plus vivant seuls et résidant dans une commune dépourvue de commerce alimentaire généraliste dans la population des 75 ans ou plus vivant seuls

  • * des personnes seules de 75 ans ou plus
  • Note : En Creuse, 7 100 personnes âgées de 75 ans ou plus vivent seules dans leur logement, soit 6 % de la population des ménages du département. Dans cette population des seniors creusois de 75 ans ou plus vivant seuls, 40 % résident dans une commune dépourvue de commerce alimentaire généraliste.
  • Champ : Population des logements ordinaires
  • Source : Insee, Recensement de la population 2016 et Base permanente des équipements 2018

Définitions

La grille communale de densité, définie par Eurostat, permet de comparer le degré d’urbanisation des pays européens, selon une méthodologie homogène. Elle caractérise les communes en fonction de la répartition de la population sur leur territoire. Plus la population est concentrée et nombreuse, plus la commune est considérée comme dense.

La suroccupation est mesurée en rapportant la composition du ménage au nombre de pièces du logement, les studios occupés par une personne étant exclus du champ. Un logement est suroccupé quand il lui manque au moins une pièce par rapport à la situation d’« occupation normale », définie comme :

  • une pièce de séjour pour le ménage ;
  • une pièce pour chaque personne de référence de chaque famille occupant le logement ;
  • une pièce pour les personnes hors famille non célibataires ou les célibataires de 19 ans ou plus.

Et pour les célibataires de moins de 19 ans :

  • une pièce pour deux enfants s’ils sont de même sexe ou ont moins de 7 ans ;
  • sinon, une pièce par enfant.

Un individu est considéré comme pauvre lorsqu'il vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté. Ce dernier est fixé à 60 % de la médiane des niveaux de vie de France métropolitaine.

Pour en savoir plus

Genin G.,Lafféter Q., “ En Nouvelle-Aquitaine, des décès plus nombreux à partir de septembre 2020 ”, Insee Flash Nouvelle-Aquitaine n°58, décembre 2020

Warszawski J. (Inserm, Univ. Paris-Saclay, AP-HP) et al., " Ouvrir dans un nouvel ongletEn mai 2020, 4,5 % de la population en France métropolitaine a développé des anticorps contre le SARS-CoV-2 ”, Drees Études & Résultats n° 1167, octobre 2020

Gascard N., Kauffmann B., Labosse A., “ 26 % de décès supplémentaires entre début mars et mi-avril 2020 : les communes denses sont les plus touchées ”, Insee Focus n°191, mai 2020

Dossier " Conditions de vie des ménages en période de confinement ”, Insee.fr, avril 2020