Insee Analyses MartiniqueEn 2015, l’activité industrielle résiste

Ali Benhaddouche

Malgré une année 2014 marquée par l’apparition des premiers signes de reprise, l’économie martiniquaise affiche des signaux toujours contrastés en 2015. Dans ce contexte, les entreprises principalement marchandes martiniquaises ont créé près de 3,1 milliards d’euros de valeur ajoutée en 2015.

La richesse créée par le secteur industriel progresse en raison notamment d’une hausse de l’activité des industries manufacturières. Toutefois, l’achèvement des travaux du Transport en Commun en Site Propre (TCSP) et l’absence de nouveaux projets de grande envergure entraînent une détérioration des activités du BTP et des industries liées au secteur.

La valeur ajoutée progresse légèrement pour les entreprises actives entre 2014 et 2015.

La majorité des entreprises sans salarié n’investissent pas. Pour les entreprises employant de 10 à 249 salariés, l’investissement est supérieur à 12 500 euros pour la moitié d’entre elles.

Ali Benhaddouche
Insee Analyses Martinique No 26- Août 2018

Après une année 2014 marquée par l’apparition des premiers signes de reprise, les indicateurs macro-économiques affichent des signaux toujours contrastés en 2015. Si une légère amélioration est perceptible sur le marché du travail, la demande intérieure n’est pas exempte de fragilités.

Sur le plan sectoriel, l’activité est globalement mieux orientée mais certains secteurs rencontrent toujours des difficultés. L’agroalimentaire enregistre des résultats encourageants alors que le Bâtiment et Travaux Public (BTP) et les industries connexes font face à une conjoncture dégradée, et que l’activité commerciale souffre de la faiblesse de la demande. Dans le tourisme, le segment de la croisière garde son dynamisme, contrairement à l’hôtellerie qui peine à se redresser.

L’investissement se maintient grâce au secteur privé. Tous les secteurs n’en profitent pas pour autant. Le secteur du BTP qui absorbe environ 60 % de l’investissement rencontre des difficultés.

Les administrations publiques réduisent leurs dépenses d’investissement de 9,7 %. Cette diminution est due à la contraction des investissements du secteur hospitalier liés à la mise aux normes parasismiques du plateau technique de l’hôpital Pierre Zobda-Quitman.

Les dépenses des collectivités locales en investissement, qui représentent plus de 80 % de l’investissement public en 2015, progressent de 11,4 % en raison de la mise en place du Transport en Commun en Site Propre (TCSP) qui a nécessité un volume total d’investissement estimé à 380 millions d’euros sur la période 2003-2015.

Dans ce contexte, les entreprises principalement marchandes installées en Martinique, ont généré près de 3,1 milliards d’euros de richesses en 2015. La valeur ajoutée dégagée par les entreprises guadeloupéennes s’élève à 2,8 milliards d’euros et celle créée par les entreprises implantées en Guyane à 1,2 milliard d’euros.

Le secteur industriel résiste

En 2015, les richesses produites par le secteur industriel martiniquais ont progressé. Elles s’élèvent à 520 millions d’euros et représentent près de 17 % de la valeur ajoutée totale produite par les entreprises principalement marchandes (figure 1). Ce résultat est lié en partie au secteur des biens manufacturés dont la valeur ajoutée progresse de 7 %. La demande intérieure des entreprises en biens d’investissement comme en matériel de transport s’accroît  en 2015 : les importations de biens d’équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et informatique sont en hausse de 12 %. Toutefois, Le repli de l’activité du BTP est perceptible au niveau des importations d’éléments en métal utilisés dans la construction. Leur volume recule de 1 % après + 53 % en 2014.

Dans le secteur agroalimentaire, les ventes de denrées alimentaires, boissons et produits à base de tabac augmentent de 7 % et la richesse dégagée par les entreprises de ce secteur progresse de 4 %. La production de sucre et la production de rhum augmente respectivement de 18 % et 26 %. Le volume de canne broyée, destinée à la production de rhum, affiche un niveau jamais atteint en plus de 15 ans de campagne (+ 27 %).

Figure 1L’industrie et la construction génèrent plus d’un quart des richessesPrincipaux résultats des entreprises implantées en Martinique en 2015 (en milliers d’euros)

L’industrie et la construction génèrent plus d’un quart des richesses
Nombre d'unités Chiffre d'affaires Valeur ajoutée Structure de la VA (%) Excédent brut d'exploitation
Industrie manufacturière, industries extractives et autres 2 156 2 160 773 523 993 16,7 195 764
- Fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac 429 327 972 102 864 3,3 33 848
- Fabrication de produits métalliques, à l'exception des machines et des équipements 202 141 625 39 248 1,2 8 773
Construction 3 467 1 099 894 316 295 10,1 85 287
Commerce de gros et de détail, transports, hébergement et restauration 9 017 6 601 986 1 127 037 35,9 298 880
- Commerce : 5 788 5 542 764 772 252 24,6 218 852
Dont commerce de gros, hors automobiles et motocycles 1 170 2 072 936 212 083 6,8 61 240
Dont commerce de détail, hors automobiles et motocycles 3 768 2 720 895 424 192 13,5 122 446
- Transports et entreposage 1 574 669 678 204 687 6,5 57 010
- Hébergement et restauration 1 655 389 544 150 098 4,8 23 018
Information et communication 652 418 312 181 947 5,8 102 691
Activités immobilières 1 375 402 250 226 479 7,2 158 740
Activités spécialisées, scientifiques et techniques et activités de services administratifs et de soutien 14 669 1 244 251 699 332 22,3 248 207
- Activités de services administratifs et de soutien 12 241 757 627 432 149 13,8 166 026
Autres activités de services 2 013 308 498 65 909 2,1 21 617
Ensemble 33 349 12 235 963 3 140 991 100 1 111 186
  • Source : Insee - Esane 2015 (Données individuelles).

Le secteur du BTP rencontre des difficultés

En 2015, la conjoncture apparaît défavorablement orientée dans le BTP et dans les industries liées au secteur. En effet, l’activité se dégrade après l’amélioration de 2014. Les travaux du TCSP sont en voie d’achèvement et seuls des chantiers de moindre envergure permettent le maintien d’une certaine activité (la construction du Complexe environnemental de traitement et de valorisation des déchets du Petit Galion, la reconstruction du pont du Prêcheur...).

Cette baisse d’activité a un impact direct sur les ventes de ciment qui sont en recul (– 1,6 %, soit 179 395 tonnes). Après le sursaut intervenu en 2014, les ventes en vrac (généralement destinées au chantier d’envergure) sont en progression (+ 1,2 %, soit 133 575 tonnes), alors que les ventes en sacs (plutôt destinées à la construction privée) diminuent (– 8,9 %, à 45 819 tonnes), suite à la baisse de la commande privée. En 2015, 2 799 attestations ont été délivrées pour l’ensemble des logements neufs et des locaux commerciaux, accusant une baisse de 12,8 % par rapport à 2014 et de 42,5 % par rapport à 2008.

En 2015, 2 185 logements sociaux ont été financés pour une dotation globale de 39,4 millions d’euros, dont 22,3 millions d’euros pour la construction neuve et 15,8 millions pour l’amélioration de l’habitat (+ 26 % par rapport à 2014).

Le secteur du BTP représente 10 % de la valeur ajoutée totale produite par les entreprises principalement marchandes.

Taux de marge élevé davantage lié au besoin de financer des investissements

En 2014, le taux de marge est de 35 % sur les secteurs principalement marchands hors agriculture et secteurs financiers (figure 2). Selon les secteurs, il varie entre 22 % et 37 %, sauf dans l’information et la communication et les activités immobilières où il est notablement plus élevé (respectivement 56 % et 70 %).

Un taux de marge élevé résulte en général de la mise en œuvre d’un capital d’exploitation important ; il n’implique pas nécessairement une rentabilité économique forte (l’EBE devant alors être rapporté à ce capital d’exploitation) mais sert à financer les investissements. Ainsi, l’industrie avec un taux de marge de 37 % et un taux d’investissement de 21 % a une rentabilité économique de 8 %. A contrario, la construction avec un taux de marge et un taux d’investissement plus faible (respectivement 27 % et 7 %) a une rentabilité économique plus élevé (15 %).

En 2015, le taux de marge augmente sensiblement dans les secteurs de l’industrie, la construction, le commerce, l’hébergement et restauration, les transports et entreposage et les autres services. En complément du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), en vigueur depuis 2013, le Pacte de responsabilité et de solidarité (PRS) participe, à partir du 1er janvier 2015, à la baisse des charges. L’impact de ces mesures est plus fort pour les petites entreprises pour lesquelles les salaires sont en moyenne inférieurs. Ces évolutions et celles de l’emploi influent directement sur le taux de marge.

Figure 2Un taux de marge supérieur à la moyenne régionale dans l’industrieQuelques ratios d'analyse financière des entreprises implantées en Martinique par secteur d'activité en 2015 (en %)

Un taux de marge supérieur à la moyenne régionale dans l’industrie
Taux de VA Vaht/CA Taux de marge EBE/VA part des frais de personnel FP/VA
Industrie manufacturière, industries extractives et autres 24,3 37,4 62,6
- Fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac 31,4 32,9 67,1
- Fabrication de produits métalliques, à l'exception des machines et des équipements 27,7 22,4 77,6
Construction 28,8 27,0 73,0
Commerce de gros et de détail, transports, hébergement et restauration 17,1 26,5 73,5
- Commerce : 13,9 28,3 71,7
Dont commerce de gros, hors automobiles et motocycles 10,2 28,9 71,1
Dont commerce de détail, hors automobiles et motocycles 15,6 28,9 71,1
- Transports et entreposage 30,6 27,9 72,1
- Hébergement et restauration 38,5 15,3 84,7
Information et communication 43,5 56,4 43,6
Activités immobilières 56,3 70,1 29,9
Activités spécialisées, scientifiques et techniques et activités de services administratifs et de soutien 56,2 35,5 64,5
- Activités de services administratifs et de soutien 57,0 38,4 61,6
Autres activités de services 21,4 32,8 67,2
Ensemble 25,7 35,4 64,6
  • Source : Insee - Esane 2015 (Données individuelles).

Valeur ajoutée médiane : 4 000 euros pour les entreprises sans salarié

En 2015, la moitié des entreprises de 10 à 249 salariés dégagent une valeur ajoutée supérieure à 581 000 euros (figure 3). Cette valeur médiane est sept fois supérieure à celle des entreprises de 1 à 9 salariés et 53 fois supérieure à celles n’ayant pas de salarié. La moitié des entreprises sans salarié dégagent une valeur ajoutée inférieure à 4 000 euros, ce sont ainsi près de 17 000 unités qui ne financent pas l’équivalent d’un Smic (coût annuel à temps plein charges patronales comprises : près de 20 000 euros).

Figure 3La dispersion de la valeur ajoutée varie selon la taille de l’entrepriseDispersion de la valeur ajoutée des entreprises martiniquaises en 2015 (en milliers d’euros)

La dispersion de la valeur ajoutée varie selon la taille de l’entreprise - Lecture : en 2015, 50 % des entreprises martiniquaises de 1 à 9 salariés ont une valeur ajoutée inférieure à 84 000 euros (médiane), 25 % une valeur ajoutée inférieure à 31 000 euros (1er quartile) et 25 % une valeur ajoutée supérieure à 194 000 euros (3e quartile).
1er quartile mediane 3e quartile
0 salarié 4,03 4,29 24,73
1 à 9 salariés 31,24 84,37 193,87
10 à 249 salariés 223,56 581,28 1268,22
250 salariés et plus 338,24 1427,64 3016,03
  • Lecture : en 2015, 50 % des entreprises martiniquaises de 1 à 9 salariés ont une valeur ajoutée inférieure à 84 000 euros (médiane), 25 % une valeur ajoutée inférieure à 31 000 euros (1er quartile) et 25 % une valeur ajoutée supérieure à 194 000 euros (3e quartile).
  • Source : Insee - Esane 2015 (Données individuelles).

Figure 3La dispersion de la valeur ajoutée varie selon la taille de l’entrepriseDispersion de la valeur ajoutée des entreprises martiniquaises en 2015 (en milliers d’euros)

  • Lecture : en 2015, 50 % des entreprises martiniquaises de 1 à 9 salariés ont une valeur ajoutée inférieure à 84 000 euros (médiane), 25 % une valeur ajoutée inférieure à 31 000 euros (1ᵉʳ quartile) et 25 % une valeur ajoutée supérieure à 194 000 euros (3ᵉ quartile).
  • Source : Insee - Esane 2015 (Données individuelles).

La valeur ajoutée progresse pour les entreprises actives entre 2014 et 2015

En 2015, dans les secteurs principalement marchands non agricoles et non financiers, la valeur ajoutée des entreprises employeuses actives à la fois en 2014 et en 2015, progresse de 5,3 % par rapport à 2014. La valeur ajoutée médiane a augmenté de 2 %. Les entreprises de 10 à 249 salariés ont réalisé plus de croissance (+ 5,3 %) : la valeur ajoutée médiane pour ces entreprises croît de 5 %. En revanche, l’évolution médiane est négative pour les entreprises de 1 à 9 salariés (– 1 %).

Investissement médian nul pour les entreprises sans salarié

Les montants investis par les petites entreprises sont faibles, en rapport avec le niveau de leur activité. Au-delà des spécificités liées au secteur d’activité, si une partie importante des petites sociétés n’investit pas, cela est souvent lié à une contrainte économique. Ainsi, l’excédent brut d’exploitation, qui permet notamment de financer l’investissement, est nettement plus faible pour les sociétés non investisseuses. Ceci peut écarter toute possibilité d’investir par l’autofinancement ou via l’endettement, l’obtention d’un prêt étant plus difficile dans ces conditions.

En 2015, seule une entreprise sans salarié sur dix a investi : pour la moitié d’entre elles, l’investissement est inférieur à 2 000 euros, et pour le reste il est inférieur à 22 000 euros. La moitié des entreprises de 1 à 9 salariés n’ont pas investi. Parmi celles qui ont investi, la moitié a investi moins de 5 000 euros (3e quartile), soit dix fois moins que les unités de 10 à 249 salariés (figure 4). Le montant médian s’élève à 12 500 euros pour les entreprises de 10 à 249 salariés.

Figure 4Forte dispersion de l’investissement pour les entreprises de 10 à 249 salariésDispersion de l'investissement des entreprises martiniquaises en 2015 (en milliers d’euros)

Forte dispersion de l’investissement pour les entreprises de 10 à 249 salariés - Lecture : en 2015, 50 % des entreprises martiniquaises de 10 à 249 salariés ont investi moins de 12 500 euros (médiane), 25 % ont investi moins de 1 700 euros (1er quartile) et 25 % ont investi plus de 50 000 euros (3e quartile).
1er quartile médiane 3e quartile
0 salarié 0 0 0
1 à 9 salariés 0 0 4,5
10 à 249 salariés 1,7 12,5 49,98
  • Lecture : en 2015, 50 % des entreprises martiniquaises de 10 à 249 salariés ont investi moins de 12 500 euros (médiane), 25 % ont investi moins de 1 700 euros (1er quartile) et 25 % ont investi plus de 50 000 euros (3e quartile).
  • Source : Insee - Esane 2015 (Données individuelles).

Figure 4Forte dispersion de l’investissement pour les entreprises de 10 à 249 salariésDispersion de l'investissement des entreprises martiniquaises en 2015 (en milliers d’euros)

  • Lecture : en 2015, 50 % des entreprises martiniquaises de 10 à 249 salariés ont investi moins de 12 500 euros (médiane), 25 % ont investi moins de 1 700 euros (1ᵉʳ quartile) et 25 % ont investi plus de 50 000 euros (3ᵉ quartile).
  • Source : Insee - Esane 2015 (Données individuelles).

Le pacte de responsabilité et de solidarité

Le pacte de responsabilité et de solidarité vise principalement à réduire pour les entreprises :

  • le coût du travail et la fiscalité des entreprises pour dégager des marges pour investir et créer des emplois ; à partir du 1er janvier 2015, l’employeur d’un salarié payé au SMIC (qu’il soit déjà employé ou nouvellement recruté) ne paiera plus aucune cotisation patronale à l’URSSAF. Pour les salaires jusqu’à 3,5 fois le SMIC, les cotisations « Famille » seront abaissées de 1,8 point (d’abord en 2015 pour les salaires jusqu’à 1,6 SMIC, puis en 2016 pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC) ;
  • les prélèvements salariaux pour mieux rémunérer le travail ; à partir du 1er janvier 2015, les cotisations sociales payées par les salariés dont la rémunération est inférieure à 1,3 SMIC seront abaissées.

Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

L’entrée en vigueur le 1er janvier 2013 du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) doit permettre de réduire le coût du travail. Ce crédit d’impôt porte sur la masse salariale des salariés dont la rémunération brute est inférieure à 2,5 SMIC. Dans les DOM, son taux est de 7,5 % en 2015 (6 % pour la France hexagonale).

Les entreprises ont investi 804 millions d’euros

En 2015, l’investissement corporel brut, hors apports des entreprises des secteurs principalement marchands non financiers et non agricoles, s’élève à 804 millions d’euros. Il chute de 14 % par rapport à 2014. Les secteurs qui investissent le plus sont les activités de services administratifs et de soutien (400 millions d’euros dont 350 millions d’euros pour les activités de location et de location-bail), l’industrie (112 millions d’euros), les activités immobilières (82 millions d’euros dont 77 millions d’euros pour la location et l’exploitation de biens immobiliers propres ou loués), l’hébergement (47 millions d’euros) et le commerce (47 millions d’euros).

Dans l’industrie, les investissements ont fortement progressé par rapport à 2014 (+ 73 %). Cette évolution est essentiellement liée à la forte augmentation des investissements dans le secteur de la production, le transport et la distribution d’électricité (+ 400 %). Ce secteur représente la moitié de l’ensemble des investissements dans l’industrie.

Les entreprises sans salarié ont réalisé 64 % de l’investissement total. Cette proportion très importante s’explique par une forte hétérogénéité de ces structures : on y retrouve des artisans, des professions libérales, mais aussi des holdings, des SCI, etc. À elles seules, les activités de location et location-bail représentent les deux tiers de l’ensemble des investissements de ces petites entreprises.

Sources

L’élaboration des statistiques annuelles d’entreprise (Esane) est le système d’information qui permet d’élaborer les statistiques structurelles d’entreprises françaises, à destination à la fois des autorités politiques et administratives françaises (sous l’égide du Cnis), de la Commission européenne (Eurostat), des statisticiens français et en particulier des comptables nationaux. Le dispositif Esane combine des données administratives (déclarations annuelles de bénéfices des entreprises et données annuelles de données sociales) et des données obtenues à partir d’un échantillon d’entreprises enquêtées par un questionnaire spécifique pour produire des statistiques structurelles d’entreprises (enquête sectorielle annuelle (ESA)). Mis en place en 2009 sur l’exercice 2008, ce dispositif remplace le précédent système composé de deux dispositifs avec les enquêtes annuelles d’entreprise (EAE) et le système unifié de statistiques d’entreprises (Suse) s’appuyant sur les déclarations fiscales, en les unifiant. Le champ d’Esane est celui des entreprises marchandes à l’exception du secteur financier et des exploitations agricoles. Ce champ est défini à partir des codes de la nomenclature d’activité NAF. Les soldes comptables présentés dans cette étude sont calculés à partir d’Esane.

Définitions

Comprendre les soldes comptables : Le chiffre d’affaires se compose de la production vendue de biens et services et les ventes de marchandises. Les marchandises ne sont pas une production réalisée par l’entreprise qui les commercialise, contrairement aux productions vendues de biens ou services. Contrairement au chiffre d’affaires, la valeur ajoutée hors taxes correspond à ce qui est vraiment créé par l’entreprise. Elle s’obtient en additionnant le chiffre d’affaires, la production stockée et les autres produits d’exploitation, auxquels sont retranchées les consommations intermédiaires, les charges d’exploitation et la variation de stock. Les valeurs ajoutées peuvent s’additionner car les consommations intermédiaires sont soustraites. Transformées, ces consommations permettent la production d’autres biens ou services ou la vente de marchandises. Certains secteurs d’activités bénéficient de subventions. Les entreprises sont également taxées. La valeur ajoutée au coût des facteurs de production s’obtient en ajoutant à la valeur ajoutée les subventions et en retranchant les impôts et taxes. La valeur ajoutée au coût des facteurs de production se divise en deux parties : les frais de personnel qui permettent la rémunération du facteur de production « travail » et l’excédent brut d’exploitation qui s’interprète comme le revenu du facteur de production « capital ». L’excédent brut d’exploitation (EBE) n’est pas seulement la rémunération des apporteurs de capitaux ou le bénéfice de l’entreprise. Il permet de rémunérer les actionnaires, mais également de rembourser les dettes ou de financer des investissements. Il rémunère également le travail des entrepreneurs individuels.

Le taux de valeur ajoutée mesure la performance de l’outil de production, le degré d’intégration ou de sous-traitance d’une entreprise dans une filière de production. Plus ce taux est élevé, plus l’entreprise contribue à créer de la valeur et plus elle est intégrée dans le tissu économique. Une entreprise qui réalise en interne l’ensemble de la chaîne de production aura un taux de valeur ajoutée plus important que celle qui sous-traite certaines étapes, à chiffre d’affaires égal. Taux faible : peu de main-d’œuvre, processus court, activité commerciale. Taux élevé : part importante de la main-d’œuvre dans les processus, activité de services.

Le taux de marge : La valeur ajoutée au coût des facteurs de production (y compris les subventions d’exploitation, hors impôts et taxes d’exploitation) permet aux entreprises de payer les frais de personnel et de dégager un excédent brut d’exploitation… Le taux de marge est le rapport de l’EBE sur la valeur ajoutée aux coûts des facteurs de production (VACF). La comparaison des taux de marge entre secteurs est un exercice délicat. Chaque secteur présente en effet des particularités vis-à-vis du recours à l’emploi et au capital et du cycle conjoncturel. Les secteurs capitalistiques ont de fait un taux de marge plus élevé que les secteurs de main-d’œuvre. Dans le partage de la VACF, le taux de marge rend compte de ce qui reste à disposition des entreprises, l’EBE notamment, pour rémunérer le capital, une fois déduites les rémunérations salariales. Un taux de marge élevé résulte en général de la mise en œuvre d’un capital d’exploitation important ; il n’implique pas nécessairement une rentabilité économique forte (l’EBE devant alors être rapporté à ce capital d’exploitation) mais sert à financer les investissements. La taille des entreprises, mesurée par l’effectif salarié, influe sur les taux de marge. Le taux de marge est plus élevé en règle générale dans les entreprises de moins de dix salariés que dans les autres. Les micro entreprises intègrent des travailleurs individuels indépendants (commerçants, artisans, professions libérales), et des gérants majoritaires de SARL, qui ne sont pas salariés mais rémunèrent leur travail sur le résultat de l’entreprise. Le taux de marge s’en trouve augmenté mécaniquement. Or, les micro entreprises sont proportionnellement beaucoup plus nombreuses aux Antilles-Guyane qu’en France. La comparaison des taux de marge n’est donc juste qu’à structure équivalente.

Pour en savoir plus

Benhaddouche A., « Fragile amélioration de l’activité commerciale et industrielle en 2015 », Insee Analyses Guadeloupe n° 31, août 2018.

Benhaddouche A., « En 2015, le secteur de la construction demeure fragile », Insee Analyses Guyane n° 30, août 2018.

Benhaddouche A., « En 2014, l’activité s’améliore dans le BTP et l’industrie », Insee Analyses Martinique n° 24, mars 2018.