Insee Flash MayotteSurmortalité des enfants et des femmes de 60 ans ou plus Les décès à Mayotte en 2016

Chantal Chaussy et Sébastien Merceron (Insee), Julien Balicchi (ARS OI)

Du fait de la jeunesse de sa population, Mayotte est le département français où le nombre de décès par habitant est le plus faible : 2,9 décès pour 1 000 habitants en 2016. Mais les taux de décès de chaque tranche d’âge sont plus élevés qu’en métropole. En particulier, la mortalité infantile et celle des seniors sont nettement plus fortes qu’au niveau national. L’espérance de vie à Mayotte est ainsi plus faible qu’en France métropolitaine, surtout pour les femmes (9 ans de moins). Pour la première fois, des causes de mortalité ont pu être identifiées. Un quart des décès ont une cause indéterminée. En outre, plus de deux décès sur dix s'expliquent par des pathologies de l’appareil circulatoire. Alors qu’en métropole, les décès ont lieu généralement en milieu hospitalier, la majorité des décès à Mayotte se produisent à domicile.

Chantal Chaussy et Sébastien Merceron (Insee), Julien Balicchi (ARS OI)
Insee Flash Mayotte No 68- Mai 2018

En 2016, 700 personnes domiciliées à Mayotte sont décédées, tandis que dans le même temps 9 500 naissances sont survenues sur le territoire. Comme la population de Mayotte est bien plus jeune que celle de métropole, le nombre de décès rapporté au nombre d’habitants est plus faible. Ainsi, globalement, le taux de mortalité est trois fois plus faible sur l’île (2,9 contre 9,0 pour 1 000 habitants). Mais si la population de Mayotte présentait la même structure par âge que la population métropolitaine, le taux de mortalité y serait 1,5 fois plus élevé qu’en métropole. En effet, à âge égal, la probabilité de décès à Mayotte est plus élevée qu’en métropole (figure 1).

Une mortalité infantile importante 

La mortalité infantile reste très élevée à Mayotte : en 2016, sur 1 000 enfants nés vivants, dix n’atteignent pas l’âge d’un an. Si ce taux est comparable à celui observé en Guyane, il est trois fois plus élevé qu’en métropole. Le risque de décès de nourrissons au cours de la première semaine de vie est fort à Mayotte, et il augmente même par la suite. Ainsi, 2,8 nourrissons sur 1 000 décèdent avant une semaine à Mayotte et 7,3 sur 1 000 entre une semaine et un an. En métropole, il décède 1,7 bébé pour 1 000 naissances avant comme après une semaine de vie.

Les conditions de vie précaires d’une forte proportion de mères expliquent en grande partie la mortalité infantile élevée sur le territoire mahorais, mais également la plus grande fragilité des nourrissons. En particulier, les naissances prématurées et les nouveaux-nés dont le poids est inférieur à 2,5 kilos y sont plus fréquents qu’en métropole.

Au-delà d’un an et à tous les âges de l’enfance, les taux de mortalité à Mayotte restent nettement plus élevés qu’en métropole. Ils sont équivalents à ceux de la Guyane pour les moins de 4 ans.

Figure 1Un taux de mortalité élevé à mayotte avant 4 ans et après 60 ansTaux de mortalité pour 1 000 habitants par sexe et tranche d'âge en 2016

Un taux de mortalité élevé à mayotte avant 4 ans et après 60 ans - Lecture : en 2016, 2,9 personnes domiciliées à Mayotte sont décédées pour 1 000 habitants, contre 9,0 pour 1000 en France métropolitaine.
Hommes Femmes Ensemble
Mayotte Métropole Mayotte Métropole Mayotte Métropole
De 0 à 4 ans 3,2 0,8 2,9 0,7 3,1 0,8
De 5 à 19 ans 0,5 0,2 0,2 0,1 0,4 0,1
De 20 à 39 ans 1,5 0,8 0,5 0,3 0,9 0,5
De 40 à 59 ans 3,8 3,9 3,4 2,0 3,6 2,9
De 60 à 74 ans 24,2 16,1 21,9 7,6 23,1 11,6
75 ans ou plus 91,9 77,4 79,9 62,6 85,5 68,2
Ensemble 3,4 9,3 2,5 8,8 2,9 9,0
  • Lecture : en 2016, 2,9 personnes domiciliées à Mayotte sont décédées pour 1 000 habitants, contre 9,0 pour 1000 en France métropolitaine.
  • Source : Insee, état-civil 2016.

Une surmortalité plus prononcée chez les femmes

Entre 20 et 59 ans, le surcroît de mortalité à Mayotte par rapport à la métropole est plus faible. Mais, après 60 ans, la mortalité y redevient nettement plus élevée. En particulier, entre 60 et 74 ans, à Mayotte, les femmes ont un risque de décès trois fois plus important que celles vivant en métropole. Les hommes meurent, quant à eux, 1,5 fois plus à ces âges qu’en métropole. Les conditions de vie précaires d’une part importante de la population et la sous-dotation en professionnels de santé peuvent expliquer cette surmortalité sur l’île.

Pour les femmes, s’ajoutent d’autres facteurs : le surpoids qui touche une part importante d’entre elles et un nombre élevé de grossesses.

À Mayotte, l’espérance de vie des femmes s’établit ainsi à 77 ans. Elle est inférieure de 9 ans à celle des femmes qui vivent en métropole. L’écart est moins prononcé pour les hommes, qui ont une espérance de vie de 74 ans, soit 5 ans de moins qu’en métropole.

Un décès sur quatre reste indéfini

À Mayotte, 24 % des décès ont une cause indéterminée. Les symptômes ou les états morbides mal définis constituent ainsi la première cause de décès (figure 2). L’insuffisante appropriation du système de santé par les usagers peut expliquer cette méconnaissance plus importante des causes de décès qu’ailleurs en France. Les décès pour cause indéterminée sont certes la troisième cause de mortalité en métropole et dans les autres DOM, mais dans des proportions bien moindres (respectivement 9 % et 12 % en moyenne).

Les deux premières causes de décès identifiées à Mayotte sont les maladies de l’appareil circulatoire et les cancers, pour les femmes comme pour les hommes. Les blessures et empoisonnements sont la troisième cause pour les hommes, alors que ce sont les maladies endocriniennes, nutritionnelles et métaboliques (essentiellement le diabète) pour les femmes. Si la structure par âge de la population de Mayotte était celle de métropole, les taux de mortalité liés à certaines causes seraient très importants, notamment quatre fois plus qu’en métropole pour les décès liés au diabète. En revanche, les décès liés à des maladies de l’appareil digestif ou du système nerveux et des organes des sens seraient deux fois moins nombreux.

Figure 2Les maladies de l’appareil circulatoire, première cause de mortalité identifiéePrincipales causes des décès survenus, en moyenne de 2013 à 2015

en %
Les maladies de l’appareil circulatoire, première cause de mortalité identifiée (en %) - Lecture : 24 % des causes de décès survenus à Mayotte sont des symptômes et états morbides mal définis.
Mayotte Métropole
Symptômes et états morbides mal définis 24 9
Maladies de l’appareil circulatoire 23 24
Cancers 16 29
Causes externes de blessure et d’empoisonnement 8 7
Maladies endocriniennes, nutritionnelles et métaboliques 6 4
  • Lecture : 24 % des causes de décès survenus à Mayotte sont des symptômes et états morbides mal définis.
  • Source : ARS OI, Inserm-CépiDC

Figure 2Les maladies de l’appareil circulatoire, première cause de mortalité identifiéePrincipales causes des décès survenus, en moyenne de 2013 à 2015

  • Lecture : 24 % des causes de décès survenus à Mayotte sont des symptômes et états morbides mal définis.
  • Source : ARS OI, Inserm-CépiDC

Six décès sur dix ont lieu à domicile

À Mayotte, plus de la moitié des décès ont lieu à domicile : 56 % contre 24 % en métropole (figure 3). En métropole, la majorité des décès surviennent à l’hôpital. La culture mahoraise, les rites funéraires et les coûts associés (transport funéraire...) conduisent un grand nombre de familles à organiser un retour au domicile à l’approche du décès. De plus, il n’y a pas de maisons de retraite à Mayotte (13 % des décès en métropole).

Par ailleurs, 4 % des décès de Mahorais ont eu lieu dans un hôpital de La Réunion.

Figure 3À Mayotte, seuls 35 % des décès ont lieu à l’hôpitalDécès domiciliés selon le lieu de décès en 2016

en %
À Mayotte, seuls 35 % des décès ont lieu à l’hôpital (en %) - Lecture : e n 2016, 56 % des décès de résidents de Mayotte ont lieu à leur domicile.
Domicile Maison de retraite Hôpital ou clinique privée Voie ou lieu public Autre lieu
Mayotte 56,5 0,0 35,2 1,6 6,8
Métropole 23,8 12,7 55,3 1,2 7,0
  • Lecture : e n 2016, 56 % des décès de résidents de Mayotte ont lieu à leur domicile.
  • Source : Insee, état civil, 2016

Figure 3À Mayotte, seuls 35 % des décès ont lieu à l’hôpitalDécès domiciliés selon le lieu de décès en 2016

  • Lecture : e n 2016, 56 % des décès de résidents de Mayotte ont lieu à leur domicile.
  • Source : Insee, état civil, 2016

Partenariat

Cette publication a été réalisée dans le cadre d’un partenariat entre l’Insee et l’Agence régionale de Santé Océan Indien (ARS OI).

Définitions

Le taux de mortalité est le rapport du nombre de décès de l’année à la population totale moyenne de l’année.

Le taux de mortalité infantile est le rapport entre le nombre d’enfants décédés à moins d’un an et l’ensemble des nés vivants.

L’espérance de vie est la durée de vie moyenne ou l’âge moyen au décès d’une génération fictive soumise aux conditions de mortalité par âge de l’année considérée.

Pour en savoir plus

Genay V., Merceron S., « 256 500 habitants à Mayotte en 2017 : la population augmente plus rapidement qu’avant », Insee Analyses Mayotte n° 15, décembre 2017 ;

Merceron S., « Naissances 2016 à Mayotte : une natalité record », Insee Flash Mayotte n° 54, août 2017 ;

Les décès en 2016 - État civil, Insee Résultats, octobre 2017 ;

Aouba A., Boulogne R., Danet S., Gonzalez L., Jougla E., Rey G., « Ouvrir dans un nouvel ongletLa mortalité infantile dans les départements d’outre-mer (2000-2008) », Études et Résultats n° 808, Drees, septembre 2012

Le compte Twitter de l’Insee La Réunion-Mayotte : Ouvrir dans un nouvel onglet@InseeOI ;