Des territoires inégalement touchés par l’éloignement de l’emploi
Fin 2016, en Auvergne-Rhône-Alpes, un demandeur d’emploi sur cinq est considéré comme éloigné de l’emploi. Le nombre de ces personnes, restées au moins 12 mois sans aucune activité au cours des 15 derniers mois, est en forte augmentation depuis 2010. L’âge est le principal facteur d’éloignement de l’emploi. Mais d’autres caractéristiques ont aussi une influence sur le retour à l’emploi, comme la présence d’un handicap, ainsi que les motifs d’inscription ou encore le type de contrat recherché. Les demandeurs éloignés de l’emploi sont inégalement répartis sur le territoire. Certaines zones d’emploi combinent des facteurs qui limitent l’éloignement de l’emploi. D’autres zones cumulent facteurs de risque d’éloignement et difficultés sur le marché du travail.
- L’âge, premier facteur d’éloignement de l’emploi
- Le handicap et le fait d’avoir été licencié jouent sur l’éloignement de l’emploi
- Des facteurs plus ou moins influents selon l’âge
- Les zones d’emploi sont touchées de manière inégale par l’éloignement de l’emploi
- Des zones d’emploi où l’éloignement de l’emploi reste limité
- Les zones à chômage modéré présentent une grande disparité d’éloignement de l’emploi
- Des zones d’emploi qui cumulent chômage élevé et éloignement de l’emploi
- L’analyse du risque d’être D3E « toutes choses égales par ailleurs »
Au 31 décembre 2016, 622 500 demandeurs d’emploi étaient inscrits à Pôle emploi en Auvergne-Rhône-Alpes en catégorie A, B ou C (définitions). En 2010, ils étaient 445 000, soit une augmentation de 40 % en 6 ans, plus forte qu’en France métropolitaine (+ 35 %).
Le nombre de demandeurs d’emploi augmente et de plus en plus de personnes se retrouvent en situation récurrente de chômage. Pour certains, il s’agit de passages entre deux emplois. D’autres, plus en difficulté, sont restés au moins 12 mois sans activité au cours des 15 derniers mois. Ce sont les demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi (D3E). L’éloignement de l’emploi va de pair avec la précarisation des demandeurs d’emploi. Les D3E sont ainsi plus fréquemment bénéficiaires de droits ouverts au RSA. Ils sont 28 % des D3E contre seulement 14 % des demandeurs de catégories A, B et C à bénéficier de cette prestation.
Les D3E représentent donc un public fragile, notamment ceux n’ayant pas ou plus de droits à indemnisation, et sont alors particulièrement exposés à la pauvreté et à l’exclusion.
En Auvergne-Rhône-Alpes, en décembre 2016, 138 200 personnes sont éloignées de l’emploi. Elles représentent 22 % de l’ensemble des demandeurs d’emploi de catégorie A, B ou C. En 2010, les D3E étaient 88 500. En six ans, leur nombre a augmenté de plus de la moitié (+ 56 %). Cette augmentation est supérieure de 16 points à celle de l’ensemble des demandeurs d’emploi de catégorie A, B ou C.
Face à l’ampleur de cette évolution, alors que certains chômeurs ont un profil qui les expose plus que d’autres, un objectif de Pôle emploi est de faciliter leur insertion professionnelle et d’éviter leur enracinement dans le chômage.
L’âge, premier facteur d’éloignement de l’emploi
L’âge est le premier facteur de risque d’éloignement de l’emploi. En 2016, 38 000 D3E régionaux sont âgés de 55 ans ou plus (figure 2). Les seniors représentent ainsi 28 % des demandeurs éloignés de l’emploi, alors qu’ils représentent 14 % de l’ensemble des demandeurs d’emploi et 19 % de la population active des 15-64 ans de la région en 2014. Toutes choses égales par ailleurs (méthodologie), un senior a quatre fois plus de risque de se retrouver éloigné de l’emploi qu’un demandeur d’emploi de 25 à 34 ans, qui a lui-même deux fois plus de risque qu’un demandeur d’emploi de moins de 25 ans.
L’influence de l’âge est encore plus forte pour les D3E qui n’ont pas travaillé du tout au cours des 15 derniers mois, même en activité réduite. Ainsi, un senior a 6,5 fois plus de risque de n’avoir exercé aucune activité sur la période qu’un demandeur d’emploi âgé de 25 à 34 ans.
tableauFigure 2 – En 2016, la moitié des demandeurs éloignés de l’emploi ont plus de 45 ansRépartition des demandeurs d'emploi en 2010 et 2016 en Auvergne-Rhône-Alpes selon la tranche d'âge
2010 | 2016 | |||||
---|---|---|---|---|---|---|
Demandeurs éloignés de l’emploi | Ensemble des demandeurs d’emploi | Demandeurs éloignés de l’emploi | Ensemble des demandeurs d’emploi | |||
Nombre | Part (en %) | Part (en %) | Nombre | Part (en %) | Part (en %) | |
moins de 25 ans | 5 900 | 6,7 | 16,8 | 6 600 | 4,8 | 14,0 |
de 25 à 34 ans | 20 300 | 22,9 | 29,9 | 28 000 | 20,2 | 28,7 |
de 35 à 44 ans | 24 600 | 27,8 | 25,4 | 30 900 | 22,4 | 23,1 |
de 45 à 54 ans | 24 800 | 28,0 | 19,6 | 34 700 | 25,1 | 20,3 |
55 ans et plus | 12 900 | 14,6 | 8,3 | 38 000 | 27,5 | 13,9 |
Ensemble | 88 500 | 100,0 | 100,0 | 138 200 | 100,0 | 100,0 |
- Source : Pôle emploi, Fichier historique administratif (FHA).
Le handicap et le fait d’avoir été licencié jouent sur l’éloignement de l’emploi
Bien que le statut de travailleur handicapé soit soumis à une réglementation spécifique en matière d’emploi, le handicap reste un frein important à l’embauche. Les personnes en situation de handicap ont deux fois plus de risque que les autres d’être éloignées de l’emploi, toutes choses égales par ailleurs.
Les conditions d’inscription, qui traduisent le parcours du demandeur, jouent également un rôle. Un licenciement pénalise le demandeur, contrairement à une fin de contrat d’intérim à partir de laquelle le demandeur va rebondir plus facilement. Par rapport à un demandeur en fin de contrat à durée déterminée, une personne qui s’inscrit suite à un licenciement économique a 40 % de risque en plus de s’éloigner de l’emploi, alors qu’une autre qui sort d’une période d’intérim a 40 % de risque en moins. De la même façon, le type de contrat a un impact. La recherche d’un temps partiel est défavorable en comparaison d’un temps complet. En revanche, chercher un contrat saisonnier ou un CDD limite le risque de s’éloigner de l’emploi (respectivement de 2 et 1,3 fois moins de risque) par rapport à la recherche d’un CDI.
Des facteurs plus ou moins influents selon l’âge
Quel que soit l’âge de la personne, être un travailleur handicapé, rechercher un emploi à temps partiel ou encore s’être inscrit à la suite d’un licenciement augmentent le risque d’éloignement de l’emploi. En revanche, certains facteurs jouent un rôle à certains âges plus qu’à d’autres. Ainsi, l’absence de mobilité et surtout le niveau de formation jouent plus fortement chez les plus jeunes. Par rapport à un demandeur de niveau CAP ou BEP, un jeune de moins de 25 ans aura par exemple quatre fois moins de risque d’être D3E s’il possède un niveau Bac + 3. Cette différence de niveau de formation n’influe pratiquement plus après 45 ans. Par ailleurs, les hommes sont plus pénalisés que les femmes après 45 ans surtout. Enfin, quand on recherche un emploi dans certains métiers (banque, assurances et immobilier, commerce, support à l’entreprise ou industrie), le risque s’avère amplifié pour les plus âgés.
Les zones d’emploi sont touchées de manière inégale par l’éloignement de l’emploi
Les demandeurs éloignés de l’emploi ne sont pas présents dans les mêmes proportions au sein des différentes zones d’emploi de la région (figure 1). Dans celle de Montluçon, un demandeur d’emploi sur trois est éloigné de l’emploi contre un sur dix dans la zone du Mont-Blanc. Au niveau régional, 39 % des D3E ont exercé une activité réduite (nécessairement de moins de 3 mois) au cours des 15 derniers mois. Ce n'est par exemple le cas que d'un tiers des D3E dans les zones d’emploi du Puy-en-Velay, de Montluçon, de Vichy ou encore d’Ambert, quand c'est la moitié dans celle du Mont-Blanc. Globalement, les zones les plus touchées par l’éloignement de l’emploi sont aussi celles où l’exercice d’une activité réduite est la plus faible.
Au sein des zones d’emploi, les niveaux de chômage et d’éloignement de l’emploi s’expliquent par la conjoncture économique, localement plus ou moins bien orientée, et par l’attractivité résidentielle qui facilite l’adéquation des emplois proposés à la population active. Une conjoncture qui se dégrade provoque d’abord la hausse du chômage, puis dans un deuxième temps l’éloignement de l’emploi si la situation économique difficile perdure.
tableauFigure 1 – Davantage d’éloignement de l’emploi au nord-ouest et au sud de la régionNombre et part des demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi dans l’ensemble des demandeurs d’emploi au 31/12/2016
Zone d’emploi | Libéllé zone d’emploi | Nombre de demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi | Part de demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi |
---|---|---|---|
0053 | Mâcon | 402 | 15,7 |
0060 | Saint-Étienne | 12 856 | 24,3 |
8201 | Ambérieu-en-Bugey | 1 323 | 18,0 |
8202 | Bourg-en-Bresse | 1 882 | 19,7 |
8203 | Oyonnax | 1 015 | 17,9 |
8204 | Annonay | 941 | 21,2 |
8205 | Aubenas | 2 665 | 24,9 |
8206 | Montélimar | 4 439 | 23,8 |
8207 | Romans-sur-Isère | 1 987 | 24,3 |
8208 | Valence | 7 152 | 22,5 |
8209 | Bourgoin-Jallieu | 3 657 | 19,8 |
8210 | Grenoble | 13 019 | 21,3 |
8211 | Vienne - Roussillon | 3 348 | 19,1 |
8212 | Roanne | 2 775 | 24,5 |
8213 | Villefranche-sur-Saône | 3 162 | 19,0 |
8214 | Lyon | 34 225 | 22,9 |
8215 | La Tarentaise | 853 | 11,5 |
8216 | Chambéry | 3 959 | 18,5 |
8217 | La Maurienne | 372 | 14,2 |
8218 | Annecy | 3 269 | 16,8 |
8219 | Le Genevois Français | 6 890 | 24,2 |
8220 | La Vallée de l'Arve | 1 007 | 18,4 |
8221 | Le Mont Blanc | 401 | 10,0 |
8222 | Le Chablais | 1 406 | 18,1 |
8301 | Montluçon | 2 864 | 30,1 |
8302 | Moulins | 2 055 | 26,3 |
8303 | Vichy | 3 067 | 27,4 |
8304 | Aurillac | 1 097 | 21,5 |
8305 | Mauriac | 263 | 18,0 |
8306 | Saint-Flour | 345 | 18,6 |
8307 | Brioude | 799 | 22,6 |
8308 | Le Puy-en-Velay | 1 811 | 26,3 |
8309 | Ambert | 419 | 28,9 |
8310 | Clermont-Ferrand | 10 106 | 24,2 |
8311 | Issoire | 1 029 | 24,9 |
8312 | Thiers | 1 325 | 29,8 |
- Source : Pôle emploi, Fichier historique administratif (FHA).
graphiqueFigure 1 – Davantage d’éloignement de l’emploi au nord-ouest et au sud de la régionNombre et part des demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi dans l’ensemble des demandeurs d’emploi au 31/12/2016

- Source : Pôle emploi, Fichier historique administratif (FHA).
Au contexte économique local se mêlent les difficultés particulières des chômeurs, liées à leurs caractéristiques et à leur trajectoire professionnelle. Dans certaines zones d’emploi, les demandeurs d’emploi âgés ou ceux qui se sont inscrits à la suite d’un licenciement économique sont plus nombreux qu’ailleurs. Dans d’autres zones d’emploi, ceux qui ont déjà effectué des missions d’intérim ou qui cherchent un emploi saisonnier sont surreprésentés. Ces facteurs vont soit défavoriser, soit faciliter un retour rapide à l’emploi, et donc influer sur la part des D3E parmi les demandeurs d’emploi.
Bien qu’en général les zones d’emploi où le taux de chômage est élevé sont aussi celles où la part des D3E est importante, celle-ci peut varier du simple au double sur certaines zones d’emploi ayant des taux de chômage proches. C’est le cas par exemple des zones de la Tarentaise et d’Ambert, qui affichent respectivement une part de D3E de 12 % et 29 %.
Des zones d’emploi où l’éloignement de l’emploi reste limité
Parmi les 14 zones d’emploi d’Auvergne-Rhône-Alpes qui ont un taux de chômage inférieur ou égal à 8 % (figure 3), toutes bénéficient d’une part de D3E inférieure à la moyenne régionale (22 %), à l’exception du Genevois français. Trois de ces zones combinent des facteurs favorisant le retour à l’emploi. La Tarentaise, la Maurienne et le Mont Blanc comptent de nombreuses demandes d’emploi dans les activités touristiques. Les contrats saisonniers proposés limitent l’éloignement de l’emploi dans les zones alpines. Dans la Maurienne, le nombre de demandeurs d’emploi ainsi que celui des D3E augmente fortement entre 2010 et 2016, mais la zone conserve une faible part de D3E (14 %).
tableauFigure 3 – Chômage élevé et éloignement de l’emploi vont souvent de pairPart des demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi dans l’ensemble des demandeurs d’emploi au 31/12/2016 et taux de chômage au 4ᵉ trimestre 2016
Modalité | Libellé | Part des demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi fin 2016 | Taux de chômage au 4ᵉ trimestre 2016 |
---|---|---|---|
0060 | Saint-Étienne | 24,3 | 9,8 |
8201 | Ambérieu-en-Bugey | 18,0 | 7,6 |
8202 | Bourg-en-Bresse | 19,7 | 7,4 |
8203 | Oyonnax | 17,9 | 9,5 |
8204 | Annonay | 21,2 | 9,4 |
8205 | Aubenas | 24,9 | 13,6 |
8206 | Montélimar | 23,8 | 12,1 |
8207 | Romans-sur-Isère | 24,3 | 11,1 |
8208 | Valence | 22,5 | 9,9 |
8209 | Bourgoin-Jallieu | 19,8 | 9,0 |
8210 | Grenoble | 21,3 | 8,0 |
8211 | Vienne | 19,1 | 8,6 |
8212 | Roanne | 24,5 | 9,6 |
8213 | Villefranche-sur-Saône | 19,0 | 6,8 |
8214 | Lyon | 22,9 | 8,9 |
8215 | La Tarentaise | 11,5 | 7,8 |
8216 | Chambéry | 18,5 | 7,9 |
8217 | La Maurienne | 14,2 | 7,3 |
8218 | Annecy | 16,8 | 6,4 |
8219 | Le Genevois Français | 24,2 | 7,5 |
8220 | La Vallée de l'Arve | 18,4 | 8,8 |
8221 | Le Mont Blanc | 10,0 | 6,1 |
8222 | Le Chablais | 18,1 | 8,0 |
8301 | Montluçon | 30,1 | 11,8 |
8302 | Moulins | 26,3 | 8,8 |
8303 | Vichy | 27,4 | 10,8 |
8304 | Aurillac | 21,5 | 6,7 |
8305 | Mauriac | 18,0 | 5,5 |
8306 | Saint-Flour | 18,6 | 5,5 |
8307 | Brioude | 22,6 | 9,0 |
8308 | Le Puy-en-Velay | 26,3 | 8,4 |
8309 | Ambert | 28,9 | 8,1 |
8310 | Clermont-Ferrand | 24,2 | 8,5 |
8311 | Issoire | 24,9 | 9,2 |
8312 | Thiers | 29,8 | 10,8 |
Ensemble | AURA | 22,2 | 8,7 |
- Sources : Pôle emploi, Fichier historique administratif (FHA) ; Insee, taux de chômage localisés.
graphiqueFigure 3 – Chômage élevé et éloignement de l’emploi vont souvent de pairPart des demandeurs d’emploi éloignés de l’emploi dans l’ensemble des demandeurs d’emploi au 31/12/2016 et taux de chômage au 4ᵉ trimestre 2016

- Sources : Pôle emploi, Fichier historique administratif (FHA) ; Insee, taux de chômage localisés.
Deux autres zones d’emploi, Bourg-en-Bresse et Ambérieu-en-Bugey, se distinguent par une surreprésentation des jeunes et des fins de mission d’intérim, caractéristiques qui favorisent le retour à l’emploi. L’augmentation de la part des D3E y a été plutôt faible entre 2010 et 2016. Le chômage reste modéré, même s’il a progressé à Bourg-en-Bresse, où la hausse de l’emploi n’a pas suivi l’augmentation de la population active.
Six zones d’emploi se caractérisent par un nombre important de demandeurs d’emploi cadres et techniciens, plutôt jeunes. Elles sont centrées sur de grandes agglomérations (Grenoble, Villefranche-sur-Saône, Chambéry, Annecy) ou à proximité (Genevois français et Chablais, proches de Genève). Ces zones présentent une situation plutôt favorable vis-à-vis de l’emploi qui permet de contenir l’éloignement de l’emploi. La perte des emplois dans l’industrie est compensée par des gains dans les services. Grenoble, mais aussi Chambéry et Annecy, constituent des pôles d’emploi importants. Les zones du Chablais, de Villefranche-sur-Saône et du Genevois français bénéficient de la proximité des pôles de Lyon ou de Genève, dans lesquels un grand nombre de leurs résidents vont travailler. Mais, au sein de ces zones, des facteurs d’éloignement restent présents. Grenoble compte une part importante de demandeurs précaires avec des droits ouverts au RSA. Dans le Genevois français, comme dans le Chablais ou la zone d’emploi de Villefranche-sur-Saône, de nombreux demandeurs se sont inscrits suite à un licenciement. Le Genevois français connaît une croissance démographique forte et reste très lié à la conjoncture suisse qui ralentit. Le poids des cadres et des techniciens y est élevé parmi les D3E.
Enfin, trois zones de la partie sud de l’Auvergne (Aurillac, Mauriac, Saint-Flour) se ressemblent par leur forte proportion de demandeurs plutôt âgés (45 ans et plus) et de nombreuses recherches d’emploi à temps partiel. Ces zones bénéficient pourtant de taux de chômage parmi les plus bas de la région, en lien avec la diminution de leur population active, mais la structure plutôt âgée des chômeurs influe sur l’éloignement de l’emploi.
Les zones à chômage modéré présentent une grande disparité d’éloignement de l’emploi
Au sein des 15 zones d’emploi qui ont un taux de chômage intermédiaire, entre 8 % et 10 %, le taux d’éloignement de l’emploi est particulièrement dispersé.
Les zones d’emploi d’Oyonnax et de la Vallée de l’Arve perdent des emplois, notamment dans l’industrie, mais la diminution de la population ou l’augmentation des « navetteurs » qui travaillent à l’extérieur de la zone y limitent la progression du chômage. Ces zones sont désavantagées par un taux élevé de demandeurs d’emploi qui sont des ouvriers non qualifiés ou des personnes peu mobiles géographiquement. En revanche, la demande d’emploi reste en adéquation avec la spécialisation industrielle de ces zones où l’intérim est développé. Ces zones présentent un éloignement vis-à-vis de l’emploi limité. La Vallée de l’Arve compte même en 2016 une proportion moins élevée de D3E qu’en 2010.
Dans la zone d’emploi de Lyon, cadres et techniciens sont surreprésentés parmi les demandeurs d’emploi, mais également les demandeurs précaires avec des droits ouverts au RSA ainsi que des jeunes peu ou pas diplômés. Taux de chômage et part des D3E y sont dans la moyenne régionale.
Trois zones d’emploi situées au sud de Lyon (Bourgoin-Jallieu, Vienne et Annonay) bénéficient d’un éloignement de l’emploi en dessous de la moyenne régionale. Elles font partie des zones où les jeunes et les fins de mission d’intérim sont surreprésentés. Dans les zones de Vienne et de Bourgoin-Jallieu, l’augmentation de la part des D3E a été plutôt modérée entre 2010 et 2016. À Annonay, zone industrielle qui a davantage subi la crise, le manque de dynamisme du marché du travail sur la période récente a quelque peu détérioré l’insertion dans l’emploi. Le déclin de l’industrie a particulièrement touché les ouvriers seniors qui ont perdu leur emploi et n’ont souvent pu en trouver un autre faute de qualification suffisante.
Six zones d’emploi cumulent une surreprésentation parmi les chômeurs de plusieurs des facteurs qui favorisent l’éloignement de l’emploi (seniors, travailleurs handicapés, demandeurs d’emploi non qualifiés). Ces zones d’emploi sont situées à l’ouest de la région (Clermont-Ferrand, Issoire) et dans une diagonale du nord de la partie auvergnate jusqu’à la Drôme (Moulins, Roanne, Saint-Étienne, Valence). Les D3E y sont plus nombreux qu’en moyenne régionale, entre 23 % et 26 % des demandeurs d’emploi. Dans la zone de Clermont-Ferrand, qui compte moins de demandeurs âgés et plus de techniciens et cadres, l’éloignement de l’emploi a moins augmenté entre 2010 et 2016 que dans les cinq autres zones.
Trois zones au sud de l’Auvergne (Brioude, Le Puy-en-Velay et Ambert) font partie des territoires où les demandeurs d’emploi sont plus âgés que la moyenne. De plus, au Puy-en-Velay et à Brioude, les travailleurs handicapés sont surreprésentés parmi les demandeurs d’emploi. Dans la zone d’Ambert, l’emploi industriel progresse, mais le profil des actifs n’est pas toujours en adéquation avec les emplois qui sont plutôt qualifiés. De nombreux cadres viennent ainsi de l’extérieur de la zone pour y travailler. Dans cette zone d’emploi, la part des D3E s’élève à 29 % alors que le taux de chômage est plutôt bas (8 %).
Des zones d’emploi qui cumulent chômage élevé et éloignement de l’emploi
Enfin, six zones d’emploi ont un taux de chômage qui dépasse 10 % et un éloignement de l’emploi plus élevé que la moyenne, entre 24 % et 30 %.
Cinq d’entre elles font partie des zones d’emploi qui cumulent les facteurs d’éloignement de l’emploi (Montluçon, Thiers, Vichy, Romans-sur- Isère et Montélimar). Néanmoins, Romans-sur-Isère et Montélimar se distinguent des trois autres par un éloignement de l’emploi moins marqué. La part des seniors parmi les chômeurs y est plus réduite. Ce sont des zones d’emploi centrées sur des villes attractives, où la population active a augmenté plus fortement que l’emploi sur la période récente, ce qui contribue à une hausse du taux de chômage.
Enfin, la zone d’emploi d’Aubenas dispose de caractéristiques liées au tourisme qui devraient jouer favorablement contre l’éloignement de l’emploi. Mais, bien que l’emploi augmente, la forte croissance démographique aggrave le phénomène du chômage pour tous les âges, particulièrement chez les jeunes actifs qui peinent à s’insérer dans l’emploi. Le tourisme estival n’influe pas suffisamment sur l’éloignement de l’emploi au sein d’une économie tournée vers les services à la personne, en lien avec une structure de population plutôt âgée.
L’analyse du risque d’être D3E « toutes choses égales par ailleurs »
De nombreux déterminants influencent le risque de devenir D3E. Un modèle logit a été élaboré afin d’identifier les facteurs les plus déterminants par un raisonnement « toutes choses égales par ailleurs », neutralisant les effets de structure.
Les variables retenues dans cette étude comme facteur structurel du risque d’éloignement de l’emploi sont : le sexe, l’âge et la mobilité du demandeur d’emploi, l’état matrimonial et le nombre d’enfants, le niveau et le secteur de formation, le diplôme obtenu, la nationalité, la qualification et le domaine professionnel de l’emploi recherché, l’expérience dans le métier recherché, le type de contrat et le temps de travail souhaité, le motif d’inscription, le fait de bénéficier ou non de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés.
La typologie :
Dans un premier temps, une analyse en composantes principales (ACP) a été menée sur 17 variables caractérisant la demande d’emploi dans chacune des zones d’emploi. Les variables retenues ont toutes une influence sur l’éloignement de l’emploi (part des demandeurs d’emploi : de moins de 25 ans, de plus de 55 ans, cadres, non qualifiés, recherchant un contrat saisonnier, à temps partiel, inscrits suite à une période d’intérim ou un licenciement…). À partir de ces résultats, une classification ascendante hiérarchique (CAH) a permis de regrouper les zones d’emploi en 6 classes. Dans chaque classe, les zones comportent ainsi une demande d’emploi proche sur certains critères d’éloignement de l’emploi.
tableauFigure 4 – Typologie
Zones d’emploi de la classe | Modalités surreprésentées | |
---|---|---|
Jaune | Ambérieu-en-Bugey, Bourg-en-Bresse, Annonay, Bourgoin-Jallieu, Vienne-Roussillon | Demandeurs d’emploi de moins de 25 ans et inscriptions suite à intérim |
Vert | Aubenas, La Tarentaise, La Maurienne et Le Mont Blanc | Recherche de contrat saisonnier et CDD, et recherche dans l’hôtellerie-restauration |
Rouge | Grenoble, Villefranche-sur-Saône, Lyon, Chambéry, Annecy, Le Genevois Français et Le Chablais | Cadres et techniciens et demandeurs d’emploi de 25 à 44 ans |
Violet | Oyonnax et la Vallée de l’Arve | Ouvriers, inscriptions suite à intérim, absence de mobilité et recherche dans l’industrie |
Orange | Saint-Étienne, Montélimar, Romans-sur-Isère, Valence, Roanne, Montluçon, Moulins, Vichy, Clermont-Ferrand, Issoire et Thiers | Demandeurs d’emploi non qualifiés, de 55 ans et plus, avec droits ouverts au RSA et/ou obligation d’emploi |
Bleu | Aurillac, Mauriac, Saint-Flour, Brioude, Le Puy-en-Velay et Ambert | Demandeurs d’emploi de 45 ans et plus, recherche de temps partiel |
Sources
Le fichier historique administratif (FHA) décrit au jour le jour la situation de chaque inscrit à Pôle emploi. L’extraction des données utilisées dans cette étude a été réalisée par Stéphane Lascombe de la direction régionale Pôle emploi Auvergne-Rhône-Alpes.
Définitions
Demandeur d’emploi : personne inscrite à Pôle emploi. Sont classés en catégorie A, B ou C les demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi et n’ayant exercé aucune activité réduite au cours du mois précédent (cat. A) ou ayant exercé une activité réduite de 78 heures ou moins (cat. B) ou de plus de 78 heures (cat. C).
Demandeur d’emploi éloigné de l’emploi (D3E) : demandeur d’emploi resté au moins 12 mois en catégorie A au cours des 15 mois précédents.
Demandeur d’emploi bénéficiaire de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés : tout employeur du secteur privé ou établissement public à caractère industriel et commercial occupant au moins 20 salariés doit employer des travailleurs handicapés (6 % de son effectif salarié). L’article L. 5212-2 définit les personnes pouvant bénéficier de cette obligation d’emploi, par exemple, les travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, les titulaires de l’allocation aux adultes handicapés, les victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles ayant entraîné une incapacité permanente au moins égale à 10 %.
Pour en savoir plus
« En 2014, un demandeur d’emploi sur quatre est éloigné de l’emploi en Auvergne », Insee Analyses Auvergne n° 6, mars 2016
« Deux ans au moins sans travail pour 8 % des demandeurs d’emploi inscrits en 2013 », Insee Analyses Languedoc-Roussillon n° 4, décembre 2014
« L’éloignement durable du marché du travail », Conseil d’orientation pour l’emploi, octobre 2014