Insee Flash BretagneL’emploi non salarié en Bretagne : une dynamique accrue entre 2009 et 2013

Magali Février et Michel Rouxel, Insee

Durant les trente dernières années, la baisse de l’emploi non salarié agricole s’est poursuivie tout en s’atténuant. Hors secteur agricole, l’emploi indépendant a diminué jusqu’au début des années 2000. Il s’est ensuite redressé puis a augmenté fortement de 2009 à 2013, en lien avec l’instauration du statut de micro-entrepreneur. Depuis 2014, l’emploi non salarié se stabilise. Le secteur tertiaire est le principal créateur d’emplois non salariés, en particulier dans les départements d’Ille-et-Vilaine et du Morbihan.

Magali Février et Michel Rouxel, Insee
Insee Flash Bretagne No 38- Décembre 2017

Fin 2016, 156 000 personnes exercent une activité non salariée en Bretagne (Méthodologie). Depuis 2004, l’emploi des non-salariés est en augmentation dans la région après une longue période de forte baisse due, pour une large part, aux profondes mutations du secteur agricole.

Moindre baisse des emplois non salariés agricoles

Sur l’ensemble de la période 1989 1 à 2016 (figure 1), l’emploi non salarié dans le secteur agricole présente une évolution assez différente de celle observée par ailleurs dans le non-salariat. Depuis l’après-guerre, le monde agricole a connu de profonds bouleversements en raison, d’une part, de gains de productivité substantiels engendrés par la mécanisation puis l’introduction de nouvelles technologies et, d’autre part, de la concentration de la production dans des exploitations de plus en plus grandes. S’en est suivie une forte contraction de l’emploi non salarié agricole (– 4,4 % par an entre 1962 et 1990) et un exode rural vers des emplois salariés souvent plus urbains. Ce repli des emplois se poursuit encore après 1990, en s’atténuant toutefois : – 6,6 % par an en Bretagne dans les années 1990, – 2,8 % dans les années 2000 puis – 1,7 % entre 2009 et 2016. Au niveau national, le recul est un peu moindre, les baisses sur les périodes précédentes s’établissant respectivement à – 5,6 %, – 2,3 % et – 1,3 %.

1- Les estimations annuelles régionales d’emploi non salarié sont disponibles à partir de l’année 1989.

Figure 1Quatre grandes périodes bien distinctesÉvolution des emplois non salariés (base 100 en 1989)

Quatre grandes périodes bien distinctes
Non-salariés France métropolitaine hors agriculture Bretagne hors agriculture France métropolitaine Bretagne
1989 100 100 100 100
1990 98 97 97 95
1991 95 92 93 89
1992 91 89 88 85
1993 89 86 84 80
1994 87 83 82 76
1995 85 80 79 72
1996 83 79 77 69
1997 83 77 75 67
1998 82 76 74 65
1999 83 76 74 64
2000 82 74 73 63
2001 81 73 73 62
2002 82 74 73 62
2003 83 76 73 62
2004 85 78 74 62
2005 87 80 75 63
2006 89 82 76 63
2007 91 84 76 63
2008 92 83 77 63
2009 93 85 77 63
2010 99 89 81 65
2011 103 93 84 67
2012 108 96 87 69
2013 113 99 90 70
2014 113 100 90 70
2015 113 100 90 70
2016 113 101 89 69
  • Champ : France métropolitaine
  • Source : Insee, estimations d’emploi localisées

Figure 1Quatre grandes périodes bien distinctesÉvolution des emplois non salariés (base 100 en 1989)

  • Champ : France métropolitaine
  • Source : Insee, estimations d’emploi localisées

Hors agriculture, quatre périodes distinctes d’évolution de l’emploi non salarié

En remontant à la fin des années 1980, la dynamique des emplois non salariés non agricoles, observée aussi bien en Bretagne qu’en France, se décompose en quatre phases : une baisse entre 1989 et 2001, puis une hausse jusqu’en 2009 qui s’accélère entre 2009 et 2013 et une stabilisation depuis 2013.

Plus précisément, les années 1990 prolongent les tendances des décennies précédentes, avec une réduction du non-salariat dans l’ensemble des secteurs non agricoles, qu’il s’agisse de l’industrie, de la construction ou des services. Dans la région, la baisse atteint 2,7 % par an soit un rythme plus rapide qu’au niveau national (– 1,8 %). Les reculs les plus importants apparaissent dans le tertiaire : le développement des grandes surfaces commerciales, déjà amorcé dans les années 1980, se poursuit en créant des emplois salariés et réduisant le nombre de petits commerces (Pour en savoir plus).

Dans les années 2000, la tendance s’inverse avec la hausse de l’emploi non salarié dans tous les secteurs non agricoles. Le dynamisme de la création d’entreprise depuis 2002 a contribué à ce regain, notamment au sein des activités de santé et d’action sociale. Le contexte de la crise économique de 2008, en freinant l’emploi salarié, a également pu favoriser la création d’emplois indépendants.

L’introduction du statut de micro-entrepreneur le 1er janvier 2009 a joué sur l’accélération des créations d’entreprises et par là même sur l’emploi non salarié. Alors que le rythme de croissance dépasse désormais 3,3 % par an (entre 2009 et 2015) en France, il est légèrement moindre en Bretagne (+ 2,8 %). Le micro-entrepreneuriat constitue en effet une forme d’entreprise un peu moins fréquente dans la région : en 2015, 28 % des non-salariés sont des micro-entrepreneurs en France, 23 % en Bretagne. Cet écart résulte en particulier de celui enregistré dans les secteurs de la construction (29 % en France, 23 % en Bretagne), du commerce de détail en magasin (13,5 % contre 10 %) et de l’hébergement-restauration (12 % contre 9 %).

Depuis 2014, d’après les chiffres provisoires, une stabilisation de l’emploi non salarié est observée

Depuis les années 2000, des pertes dans l’agriculture compensées par les hausses dans les autres secteurs

Sur l’ensemble de la période 1990-2015, les évolutions de l’emploi non salarié agricole ont fortement pesé sur celles du non-salariat dans son ensemble. C’est particulièrement vrai lors des années 1990 (figure 2). À partir de 2001, l’ensemble des emplois non salariés se redresse puis se stabilise. La croissance de l’emploi non salarié hors agriculture, en particulier dans le tertiaire, compense le recul des effectifs dans le secteur agricole. Une analyse par pas de 5 ans apporte des points de vue complémentaires (figure 3). Ainsi, en tenant compte de la structure des emplois pour chaque période, les contributions de l’agriculture à l’évolution totale tendent à diminuer, au profit du secteur tertiaire. Sur les deux premières périodes (de 1990 à 1995 puis de 1995 à 2000), le repli du non-salariat dans l’agriculture explique 60 % de la baisse de l’ensemble des emplois non salariés. Depuis 2005, la baisse dans l’agriculture est largement compensée par la reprise dans les autres secteurs, notamment ceux du tertiaire.

Figure 2Une progression des emplois récente, mais atténuée par le recul dans l’agricultureÉvolution de l’emploi non salarié décliné par secteur d’activité (base 100 en 1989)

Une progression des emplois récente, mais atténuée par le recul dans l’agriculture
Agriculture Industrie Construction Tertiaire marchand Tertiaire non marchand Tertiaire total
1989 100 100 100 100 100 100 100
1990 93 97 94 97 101 98 95
1991 86 90 88 92 96 93 89
1992 80 88 82 89 96 90 85
1993 73 82 75 87 99 89 80
1994 67 80 72 84 96 86 76
1995 62 77 70 80 94 83 72
1996 58 75 68 79 92 82 69
1997 55 72 66 77 92 80 67
1998 52 70 64 76 91 79 65
1999 51 70 66 76 91 79 64
2000 50 69 65 74 88 77 63
2001 49 69 66 73 86 75 62
2002 48 70 67 73 87 76 62
2003 45 70 68 75 90 78 62
2004 44 71 71 78 94 81 62
2005 43 71 75 79 97 83 63
2006 41 72 80 80 99 84 63
2007 40 67 80 82 104 87 63
2008 39 68 77 81 106 86 63
2009 38 70 77 82 114 89 63
2010 37 73 79 87 119 94 65
2011 37 76 81 92 122 98 67
2012 36 77 83 95 128 102 69
2013 36 79 84 97 135 105 70
2014 35 80 83 98 139 106 70
2015 34 79 81 97 146 107 70
2016 33 79 80 97 150 108 69
  • Champ : Bretagne
  • Source : Insee, estimations d’emploi localisées

Figure 2Une progression des emplois récente, mais atténuée par le recul dans l’agricultureÉvolution de l’emploi non salarié décliné par secteur d’activité (base 100 en 1989)

  • Champ : Bretagne
  • Source : Insee, estimations d’emploi localisées

Figure 3Sur les quinze dernières années l’emploi dans le tertiaire compense le recul dans l’agricultureÉvolutions quinquennales de l’emploi non salarié breton (en %) et contributions des secteurs à ces évolutions (en points de %)

Sur les quinze dernières années l’emploi dans le tertiaire compense le recul dans l’agriculture
Agriculture Industrie Construction Tertiaire marchand Tertiaire non marchand Tertiaire
1990-1995 -15,2 -1,0 -2,3 -5,6 -0,6 -6,1
1995-2000 -7,9 -0,5 -0,7 -2,8 -0,7 -3,4
2000-2005 -4,8 0,1 1,6 2,4 1,1 3,5
2005-2010 -4,1 0,1 0,6 4,1 2,9 7,0
2010-2015 -2,5 0,5 0,3 4,8 3,3 8,1
  • Champ : Bretagne
  • Source : Insee estimations d’emploi localisées

Figure 3Sur les quinze dernières années l’emploi dans le tertiaire compense le recul dans l’agricultureÉvolutions quinquennales de l’emploi non salarié breton (en %) et contributions des secteurs à ces évolutions (en points de %)

  • Champ : Bretagne
  • Source : Insee estimations d’emploi localisées

Une croissance soutenue en Ille-et-Vilaine et dans le Morbihan

Les tendances observées au niveau régional se retrouvent dans les quatre départements bretons, avec quelques variantes cependant. Au cours de la période 2010-2016, les emplois non salariés ont augmenté de 6 % au niveau régional (figure 4). Le Morbihan et l’Ille-et-Vilaine (+ 9 %) présentent des taux de croissance bien supérieurs pouvant s’expliquer par un fort dynamisme dans le secteur tertiaire.

Le recul de l’emploi non salarié dans le secteur agricole est de même ampleur pour chaque département breton : de l’ordre de 11 % sur la période 2010-2016.

Figure 4Une création d’emplois non salariés moindre dans les Côtes-d’Armor et le FinistèreL’emploi non salarié décliné par département

Une création d’emplois non salariés moindre dans les Côtes-d’Armor et le Finistère
Effectif Évolution (en %)
au 31/12/2016 Variation 2010-2016 Total dont agriculture Tertiaire
22-Côtes-d'Armor 31 403 446 1,4 -11,6 10,6
29-Finistère 40 005 1 711 4,5 -11,7 11,8
35-Ille-et-Vilaine 46 636 3 839 9,0 -11,7 18,8
56-Morbihan 38 128 3 146 9,0 -10,8 18,5
Bretagne 156 172 9 142 6,2 -11,5 15,3
  • Source : Insee – Estimations d’emploi localisées

Pour comprendre

Le dispositif d'ESTimations d'Emploi Localisées (Estel) a pour objectif de produire, par une synthèse de sources administratives, des estimations localisées d'emploi cohérentes entre les différents échelons géographiques et les secteurs de la nomenclature d'activités. Estel vise ainsi à couvrir l'emploi total, salarié (au lieu de travail, comme au lieu de résidence) et non salarié (au lieu de travail) et par secteur d'activité détaillé.

Ce dispositif donne le nombre de personnes en emploi au 31 décembre selon le concept d'emploi du Bureau international du travail (BIT).

Pour l’estimation des non-salariés, les sources mobilisées sont les fichiers de la Mutualité Sociale Agricole (MSA) pour les non-salariés agricoles et les fichiers de l'Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale (Acoss) pour les non-salariés non agricoles.

NB : le dispositif Estel comptabilise chaque personne dans son poste principal et ne peut cumuler 2 profils d’emplois pour une même personne. En particulier, les salariés ayant ponctuellement une activité non salariée seront comptabilisés en salariés dans Estel. En Bretagne, il en résulte un écart de 7 % entre le nombre de non-salariés selon le dispositif Estel (156 000 personnes) et les estimations des non-salariés avec les bases MSA et Accos dans lesquelles sont prises en compte la polyactivité.

Pour en savoir plus

En Bretagne, un travailleur indépendant sur cinq exerce également une activité salariée  / I. Baudequin et M. Rouxel – Dans : Insee Analyse Bretagne n° 65 (2017, novembre) - 4 p.

Auto-entrepreneurs immatriculés en 2010 : cinq ans après, moins d’un quart sont encore actifs / D. Richet. - Dans : Insee Première ; n° 1666 (2017, septembre) – 4 p.

Ouvrir dans un nouvel ongletLes micro-entrepreneurs fin 2016 – Dans : Accosstat ; n° 252 (2017, juillet) – 4 p.

Ouvrir dans un nouvel ongletL’évolution des formes d’emploi – Dans : Conseil d’orientation pour l’ emploi (2014, avril) - 196 p