Insee Analyses Centre-Val de LoireDes jeunes salariés davantage exposés aux accidents du travail

Auteur : Anne-Céline Charel

En Centre-Val de Loire, un salarié en emploi sur cinq a moins de 30 ans. Comme ailleurs, ces jeunes sont plus exposés aux risques professionnels que leurs aînés. En moyenne, ces jeunes entrent rapidement sur le marché du travail et sont peu diplômés. Ils ont un peu plus d’accidents du travail que leurs homologues de province, notamment dans la construction, les services administratifs et de soutien et le transport et entreposage, secteurs importants pourvoyeurs d’emploi dans la région. Les jeunes ouvriers, très présents en Centre-Val de Loire, sont également fréquemment concernés par les accidents du travail. Les apprentis et intérimaires de la région, population majoritairement jeune et ouvrière, font partie des salariés les plus exposés.

Insee Analyses Centre-Val de Loire
No 27
Paru le :Paru le29/07/2016
Auteur : Anne-Céline Charel
Insee Analyses Centre-Val de Loire No 27- Juillet 2016

La prévention des risques et nuisances auxquels sont soumis les salariés dans le cadre de leur travail est un des enjeux importants de santé publique, comme en témoigne la mise en œuvre par la Direccte du 3e Plan régional de santé au travail. En France, les jeunes sont plus exposés que leurs aînés aux risques professionnels, notamment aux risques chimiques et cancérogènes (encadré partenaire).

Faire le lien entre les spécificités régionales des conditions d’emploi des jeunes et la fréquence de leurs accidents du travail permet de mieux cibler les actions de prévention des risques professionnels et de maintien dans l’emploi.

Des jeunes peu diplômés

En Centre-Val de Loire, 200 000 personnes de moins de 30 ans occupent un emploi en 2012, dont 190 000 exercent une activité salariée. Ces jeunes représentent ainsi 20 % de l’emploi régional, proportion proche de celle de la France de province.

Les jeunes de la région poursuivent moins souvent des études longues que leurs homologues des autres régions ; ils entrent donc plus rapidement sur le marché du travail. Le taux d’emploi des 15-24 ans est ainsi légèrement supérieur en Centre-Val de Loire à celui de la France de province. Ces jeunes, arrivés précocement sur le marché du travail, sont plus souvent peu ou pas diplômés (15,4 % contre 13,9 % en moyenne des régions non franciliennes). Près d’un quart d’entre eux sont titulaires d’au plus un diplôme de niveau V (CAP ou BEP), soit deux points de plus qu’en moyenne de province. Ils sont également plus nombreux en contrat d’apprentissage.

Des accidents du travail plus nombreux parmi les plus jeunes

En 2012, on dénombre plus de 27 000 accidents du travail en Centre-Val de Loire (), soit un taux de fréquence de 23,8 accidents par million d’heures rémunérées.

Dans la région comme en province, la fréquence des accidents de travail est plus importante chez les salariés de moins de 30 ans que parmi leurs aînés.

Ils représentent ainsi un accident du travail sur trois en 2012 alors qu’ils n’occupent qu’un emploi sur cinq.

Avec 33,8 accidents du travail par million d’heures rémunérées, la fréquence des accidents des jeunes de la région est 1,6 fois plus élevée que celle des plus de 30 ans.

Les jeunes plus exposés en Centre-Val de Loire

Tous âges confondus, les salariés de la région sont un peu moins souvent victimes d’accidents qu’en moyenne de France de province (23,8 contre 24,3 accidents) (figure 1).

Par contre, les jeunes de la région sont un peu plus souvent victimes d’accidents du travail que leurs homologues de la France de province (33,8 contre 33,4 accidents).

Figure 1Fréquence des accidents du travail

taux de fréquence
Fréquence des accidents du travail (taux de fréquence) - Note de lecture : les salariés âgés de 15 à 29 ans en Centre-Val de Loire ont subi 33,8 accidents du travail par million d’heures rémunérées en 2012.
Centre-Val de Loire France de province France métropolitaine
15 à 29 ans 33,8 33,4 30,2
30 ans ou plus 20,8 21,4 21,7
Total 23,8 24,3 22,1
  • Champ : population salariée.
  • Note de lecture : les salariés âgés de 15 à 29 ans en Centre-Val de Loire ont subi 33,8 accidents du travail par million d’heures rémunérées en 2012.
  • Sources : Insee, DADS 2012 (calculs DARES) ; Cnam TS ; MSA 2012

Figure 1Fréquence des accidents du travail

  • Champ : population salariée.
  • Note de lecture : les salariés âgés de 15 à 29 ans en Centre-Val de Loire ont subi 33,8 accidents du travail par million d’heures rémunérées en 2012.
  • Sources : Insee, DADS 2012 (calculs DARES) ; Cnam TS ; MSA 2012

Fortes présence et accidentologie des jeunes dans la construction et l’intérim

La nature de l’appareil productif régional explique largement la fréquence d’accidents du travail parmi les jeunes. Ils sont en effet un peu plus nombreux qu’en France de province dans trois des cinq secteurs les plus exposés aux risques professionnels (figure 2). Ainsi, 9,5 % des salariés de moins de 30 ans de la région travaillent dans la construction (contre 9,2 % en moyenne de France de province). Dans ce secteur, ils subissent un taux d’accidents du travail particulièrement élevé : près de 60 par million d’heures rémunérées soit 2,5 fois plus qu’en moyenne régionale, tous âges et secteurs confondus. Ils sont également un peu plus présents qu’en France de province dans les services administratifs et de soutien (8,9 % contre 8,1 %), qui englobent notamment les activités de travail temporaire, mais aussi dans les transports et l’entreposage (3,8 % contre 3,5 %). Les taux d’accidents du travail pour les jeunes de la région y atteignent respectivement 39 et 44 par million d’heures rémunérées. A l’inverse les jeunes du Centre-Val de Loire sont légèrement sous représentés dans les deux autres secteurs accidentogènes que sont l’hébergement médico-social et social et l’hébergement et restauration.

Si la structure de l’appareil productif était en Centre-Val de Loire identique à celle de la France de province, la fréquence des accidents du travail des jeunes serait, comme en France de province, de 33,4 accidents par million d’heures rémunérées. Le faible écart avec les 33,8 accidents constatés pour les jeunes dans la région s’explique principalement par la structure de leur emploi par secteur d’activité.

La fréquence d’accidents du travail parmi les jeunes de la région diffère toutefois dans chaque secteur de celle constatée en moyenne dans les régions (figure 2, partie droite). Elle est plus élevée en Centre-Val de Loire dans les secteurs de l’hébergement médico-social et social et des activités de services administratifs et de soutien. Si le secteur des transports et entreposage n’est globalement pas plus accidentogène dans la région, les activités de logistique, exposent davantage les jeunes. En Centre-Val de Loire, les salariés de moins de 30 ans sont ainsi plus touchés par les accidents du travail qu’en moyenne de France de province dans quatre des cinq de leurs principaux secteurs d’activité.

Figure_2Des jeunes salariés plus exposés dans les secteurs les plus employeurs

  • Note de lecture : en 2012, 16,9 % des salariés âgés de 15 à 29 ans en Centre-Val de Loire travaillent dans le secteur du commerce, contre 12,6 % de la population totale de la région.
  • Dans ce même secteur, les salariés âgés de 15 à 29 ans ont subi 27,6 accidents du travail par million d’heures rémunérées, contre 21,3 pour l'ensemble des salariés de la région.
  • Champ : population salariée.
  • Sources : Insee, DADS 2012 (calculs DARES) ; Cnam TS ; MSA 2012

Les jeunes ouvriers plus exposés

Dans la région, au profil industriel encore prononcé, les ouvriers représentent près de 40 % des salariés. Leur part parmi ceux de moins de 30 ans est également plus élevée (41,5 %) qu’en France de province (37,6 %) (figure 3, partie gauche). Les jeunes ouvriers du Centre-Val de Loire sont plus souvent spécialisés ou hautement qualifiés (28,8 % en Centre-Val de Loire contre 27,2 % en France de province), notamment dans la construction et l’industrie.

A l’opposé, cette part est inférieure de 2,5 points dans les domaines du transport et de l’entreposage.

De part la nature de leurs travaux, les ouvriers sont plus fréquemment victimes d’accidents de travail que les employés ou les cadres (figure 3, partie droite). On compte respectivement 54,0 accidents du travail par million d’heures rémunérées contre 21,2 pour les employés et 6,1 pour les cadres de la région. En 2012, ils représentent ainsi près de 70 % des accidents du travail occasionnant un arrêt d’activité.

La plus grande proportion de jeunes ouvriers dans la région explique donc aussi le nombre légèrement plus élevé d’accidents du travail chez les salariés de moins de 30 ans du Centre-Val de Loire comparé à la moyenne de province.

Les jeunes employés sont proportionnellement moins nombreux dans la région : 40,2 % contre 43,6 % en France de province. Comme ailleurs, les cadres et professions intellectuelles supérieures ne représentent qu’un emploi salarié sur vingt chez les moins de 30 ans.

Si la répartition par catégorie socio-professionnelle des jeunes de la région était identique à celle de la France de province, le nombre d’accidents du travail serait de 32,7 par million d’heures rémunérées, soit un peu moins que les 33,8 accidents constatés.

Figure_3Des jeunes ouvriers plus exposés

  • Champ : population salariée âgée de 15 à 29 ans.
  • Sources : Insee, DADS 2012 (calculs DARES) ; Cnam TS ; MSA 2012

Plus d’accidents du travail parmi les jeunes dans les entreprises de taille intermédiaire

En Centre-Val de Loire, un salarié de moins de 30 ans sur trois travaille dans une entreprise de 500 salariés ou plus. Cette part dépasse de trois points la moyenne des régions de province (33,5 % contre 30,3 %) (figure 4).

Ils sont également plus présents dans les très petites entreprises : un jeune sur quatre travaille dans une entreprise de moins de 10 salariés, contre un salarié sur cinq dans l’ensemble de l’emploi régional.

Les petites structures sont très souvent dépourvues de dispositif permettant de limiter ou de prévenir les accidents du travail, comme les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ou le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP).

Elles sont pourtant, avec les très grandes entreprises, celles où les fréquences d’accidents sont les plus faibles (figure 5).

Au contraire, les entreprises dont les effectifs sont compris entre 10 et moins de 200 salariés, a priori mieux sensibilisées que les plus petites aux risques professionnels, sont celles où la fréquence des accidents du travail est la plus élevée.

Figure 4En Centre-Val de Loire, un jeune sur trois travaille dans une grande entreprise - Répartition de l'emploi

%
En Centre-Val de Loire, un jeune sur trois travaille dans une grande entreprise - Répartition de l'emploi (%)
 Effectif de l'entreprise Centre-Val de Loire France de province
Moins de 10 salariés 24,1 25,8
De 10 à 49 salariés 20,5 22,1
De 50 à 99 salariés 7,0 7,7
De 100 à 249 salariés 8,6 8,3
De 250 à 499 salariés 6,3 5,9
500 salariés ou plus 33,5 30,3
Total 100,0 100,0
  • Champ : population salariée âgée de 15 à 29 ans.
  • Source : Insee, DADS 2012

Figure 5Davantage d’accidents du travail dans les entreprises de moins de 200 salariés - Fréquence des accidents du travail

taux de fréquence
Davantage d’accidents du travail dans les entreprises de moins de 200 salariés - Fréquence des accidents du travail (taux de fréquence)
 Effectif de l'entreprise Centre-Val de Loire France de province
De 1 à 9 salariés 25,9 24,6
De 10 à 49 salariés 41,7 40,6
De 50 à 199 salariés 41,0 41,0
De 200 à 499 salariés 30,0 36,5
500 salariés ou plus 17,3 16,8
Total 33,8 33,4
  • Champ : population salariée âgée de 15 à 29 ans.
  • Sources : Insee, DADS 2012 (calculs DARES) ; Cnam TS ; MSA 2012

Des conditions d’emploi des jeunes un peu plus favorables

Les jeunes salariés de la région rencontrent plus de difficultés d’insertion sur le marché du travail que leurs aînés. Ils occupent plus souvent un emploi précaire, toutefois moins qu’en moyenne de France de province.

Ainsi, ils sont plus de six sur dix à travailler en contrat à durée indéterminée (CDI). Cette situation est encore plus favorable pour les 25-29 ans avec près de 80 % de CDI, soit deux points de plus qu’en France de province.

Ces jeunes travaillent également moins souvent à temps partiel, 18,3 % contre 21,0 % dans la moyenne des régions de province. Ils ne sont pas plus nombreux qu’ailleurs à cumuler plusieurs emplois. La multiactivité n’est d’ailleurs pas plus marquée chez les jeunes que dans l’ensemble de la population active de la région.

En 2012, les jeunes de moins de 30 ans représentent un emploi régional sur cinq, mais occupent un emploi aidé sur trois, quatre emplois d’intérimaires sur dix et quatre contrats à durée déterminée (CDD) sur dix.

Les plus jeunes de ces salariés sont notamment concernés par ces formes particulières d’emploi (). Les moins de 25 ans représentent ainsi la moitié des salariés de moins 30 ans, mais 60 % des jeunes employés en intérim ou en CDD et la quasi-totalité des jeunes apprentis.

Des jeunes apprentis et intérimaires nombreux et plus exposés

La nature de l’appareil productif régional conduit à une surreprésentation de l'apprentissage et de l'intérim en Centre-Val de Loire (figure 6).

En 2012, la région accueille ainsi plus de 20 000 apprentis, essentiellement ouvriers et travaillant dans des secteurs parmi les plus accidentogènes.

Plus d’un jeune de moins de trente ans sur dix est en contrat d’apprentissage, part un peu supérieure à celle de la France de province. De nombreuses actions ont été mises en place dans la région pour développer l’apprentissage. Le diplôme le plus préparé reste le certificat d’aptitude professionnelle (CAP). Même si le nombre d’apprentis de 16 à 25 ans a légèrement diminué ces dernières années, il reste élevé dans la région.

Les secteurs les plus employeurs de jeunes apprentis sont le commerce, la construction et l’industrie, mais aussi l’hébergement et la restauration. Les jeunes apprentis ont un peu plus d’accidents du travail dans la région car ils cumulent des caractéristiques favorisant une exposition aux risques : plus jeunes, majoritairement ouvriers et travaillant dans des secteurs accidentogènes.

Les contrats d’intérim constituent un moyen de répondre aux besoins de flexibilité des entreprises. Les intérimaires sont principalement des ouvriers non qualifiés et sont souvent jeunes, particulièrement dans la région. Ils travaillent en outre plus souvent dans des secteurs impactés par les accidents du travail.

Figure 6Intérim et apprentissage plus présents chez les jeunes de la région

en %
Intérim et apprentissage plus présents chez les jeunes de la région (en %)
Centre-Val de Loire France de province
Apprentissage 31,0 26,8
Intérim 13,0 11,1
Emplois-jeunes,| CES, contrats| de qualif. 3,5 4,9
Stagiaires |rémunérés |en entreprise 2,6 3,3
Autres emplois |à durée limitée 49,8 53,8
  • Champ : population salariée âgée de 15 à 29 ans.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2012

Figure 6Intérim et apprentissage plus présents chez les jeunes de la région

  • Champ : population salariée âgée de 15 à 29 ans.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2012

Encadré partenaire - Enquête Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels (SUMER 2010)

L’enquête SUMER 2010 dresse une cartographie des expositions des salariés aux principaux risques professionnels en France. Elle est menée conjointement par la Direction de l’Animation, de la Recherche, des Études et des Statistiques (Dares) et la Direction Générale du Travail (DGT) et repose sur l’expertise professionnelle de médecins du travail volontaires qui questionnent un grand nombre de salariés (près de 50 000 entre janvier 2009 et avril 2010). La Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique (DGAFP) a également participé au financement de l’enquête, dans le cadre d’un élargissement aux trois versants de la fonction publique.

Cette enquête nationale vise à :

décrire l’ensemble des expositions des salariés sur leurs postes de travail (ambiance et contraintes physiques, contraintes organisationnelles et relationnelles, agents biologiques et produits chimiques, risques psycho-sociaux) ;

caractériser ces expositions (durée et intensité) ;

évaluer l’évolution dans le temps des principales expositions ;

décrire les pratiques de prévention et les protections collectives ou individuelles mises en place par les entreprises ;

contribuer à éclairer les priorités en matière de prévention des risques professionnels.

Par rapport aux autres enquêtes sur ce thème, qui reposent sur les déclarations des salariés et de leurs employeurs, SUMER 2010 apporte une information d’experts sur l’évaluation des expositions aux risques. Cette enquête a été largement mobilisée lors de la définition du projet de Compte Personnel de Prévention de la Pénibilité (C3P) et du troisième plan santé travail (PST3).

Direction régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi du Centre-Val de Loire (Direccte Centre-Val de Loire)

Sources

Les indicateurs utilisés sont issus du recensement de la population 2012. Les données plus spécifiques sur l’emploi salarié proviennent de l’exploitation de la Déclaration Annuelle de Données Sociales (DADS) 2012.

Les éléments concernant les accidents du travail proviennent de la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAM TS) et de la Mutualité Sociale Agricole (MSA).

Définitions

SUMER 2010 : L’enquête nationale Surveillance médicale des expositions aux risques professionnels, menée conjointement par la Direction de l’Animation, de la Recherche, des Études et des Statistiques (Dares) et la Direction Générale du Travail, permet d’évaluer l’exposition des salariés aux risques professionnels.

Est considéré comme accident du travail un accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail, quelle qu’en soit la cause. Les accidents du travail mesurés dans cette étude sont reconnus et ont entraîné un arrêt de travail d’au moins un jour.

Le taux de fréquence désigne le nombre d’accidents du travail par million d’heures rémunérées.

Les formes particulières d’emploi regroupent les statuts d’emploi qui ne sont pas des contrats à durée indéterminée à temps plein. Ce sont l’apprentissage, l’intérim, les emplois aidés, les emplois à durée déterminée et les temps partiels.