Économie numérique : 80 % des établissements franciliens concentrés en cœur d’agglomération
En 2013, l’économie numérique francilienne emploie 500 000 salariés, soit la moitié des effectifs comptabilisés au niveau national. Le domaine des contenus et supports culturels est particulièrement surreprésenté en Ile-de-France. L’essentiel de l’activité numérique est concentré à Paris et dans les Hauts-de-Seine. Les créations d’établissements sont très dynamiques dans le secteur de l’édition de logiciels.
- Les établissements du numérique implantés dans le cœur d’agglomération
- Des producteurs de contenus et des supports culturels très présents à Paris
- Dynamique des créations d’établissements dans le secteur de l’édition de logiciels
- Davantage d’établissements non employeurs dans le numérique
- Des grands établissements, viviers d’emploi
- Les pôles de compétitivité
En Ile-de-France, l’économie numérique est constituée de quatre domaines (Source et champ). Les technologies de l’information et de la communication (TIC) et les contenus et supports culturels (livre, presse, édition, musique, audiovisuel) font partie du tronc commun d’activités, définies par l’OCDE. Dans la présente étude, deux domaines plus spécifiques à l’Ile-de-France complètent ce champ : la publicité-communication et les industries connexes aux TIC (figure 1).
Avec 500 000 emplois salariés, l’Ile-de-France concentre la moitié des emplois de l’économie numérique française contre un quart pour l’ensemble des secteurs d’activité. Les activités des contenus et supports culturels sont particulièrement surreprésentées dans la région.
Cette économie tient une place privilégiée en Ile-de-France, confortée par la présence des pôles de compétitivité Cap Digital et Systematic auxquels sont rattachés de nombreux établissements du numérique (Les pôles de compétitivité). La région francilienne est également avantagée en matière d’aménagement numérique du territoire. Au niveau régional, l’État, les collectivités et les opérateurs ont notamment engagé un programme concerté de déploiement généralisé de la fibre optique visant à faire de l’Ile-de-France la première région fibrée d’Europe à l’horizon 2020 à 2025.
L’économie numérique emploie 9 % des salariés de la région, soit une proportion trois fois plus élevée qu’en province.
graphiqueFigure_1 – Les quatre domaines de l’économie numérique en Ile-de-France
Les établissements du numérique implantés dans le cœur d’agglomération
Les établissements et les emplois salariés franciliens de l’économie numérique sont très concentrés au cœur de l’agglomération : 80 % des établissements de la région y sont situés. Ils sont même près de la moitié à Paris, mais ne représentent qu’un tiers des emplois franciliens. En revanche, les établissements des Hauts-de-Seine emploient 37 % des salariés de la région dans seulement 16 % des établissements, souvent très grands (figure 2).
Ces emplois sont notamment structurés le long d’un grand arc ouest allant des boucles nord de la Seine jusqu’à un corridor Montrouge-Les Ulis, en passant par les arrondissements et communes de l’ouest parisien. Dans ces territoires, ils sont non seulement importants en volume, mais pèsent aussi deux à trois fois plus dans le tissu productif qu’en moyenne régionale.
Aux côtés des foyers historiques (Paris-ouest, Issy-les-Moulineaux, Boulogne-Billancourt, Meudon), de nouveaux pôles du numérique émergent, à la faveur de politiques de soutien dynamiques. Ainsi, en cœur d’agglomération, l’est de Paris (Montreuil), le nord du Val-de-Marne (Val de Bièvre) et le sud des Hauts-de-Seine (cône sud francilien) accueillent de nouveaux établissements. La politique d’incubation de la Ville de Paris, largement déployée dans les arrondissements du centre et de l’est de la capitale, a permis l’amorçage et l’ancrage d’activités numériques. Cette dynamique devrait être encore consolidée dans la métropole par le projet d’Arc de l’innovation, porté par des collectivités de part et d’autre du boulevard périphérique, entre la porte de Vanves (14e arrondissement) et la porte Pouchet (17e arrondissement), sur son versant est. Ce plan vise à mettre en place, dans ces quartiers populaires, un réseau de lieux innovants ayant un impact local, une communauté d’acteurs, des partenariats et une stratégie d’aménagement et de marketing territorial à l’échelle métropolitaine.
Les grands établissements de l’économie numérique sont disséminés en grande couronne, ils sont davantage présents dans les Yvelines et en Essonne, en particulier autour des agglomérations de Saint-Quentin-en-Yvelines, Vélizy, Massy ou encore Les Ulis, dans des entreprises à fort contenu technologique lié à l’industrie et la R&D. C’est également dans cette zone qu’est installé, à Saclay, l’Institut de la société numérique, bénéficiant de la présence d’établissements d’enseignement supérieur, de centres de recherche et de grands établissements du numérique. Ces emplois de grande couronne ne représentent que 19 % des emplois numériques de la région, mais ils tendent à se développer localement à proximité de pôles déjà existants plus centraux. C’est par exemple le cas d’Argenteuil-Bezons, en limite des Hauts-de-Seine, qui prolonge le regroupement situé dans la boucle nord de la Seine, à Gennevilliers-Bois-Colombes. Ce territoire héberge notamment le pôle mécatronique (EMC2, Atos Origin et Sophos). Le dispositif Silicon Banlieue, lancé et soutenu par la communauté d’agglomération Argenteuil-Bezons, constitue un accélérateur d’implantation pour les entreprises du secteur.
graphiqueFigure_2 – les emplois salariés du numérique concentrés dans le cœur de l’Ile-de-France en 2013
Des producteurs de contenus et des supports culturels très présents à Paris
Les activités des TIC sont localisées pour l’essentiel dans les Hauts-de-Seine et à Paris. Dix communes concentrent 38 % des emplois salariés de ce domaine. Elles sont situées sur un arc Gennevilliers-Issy-les-Moulineaux qui comporte deux extensions : le Quartier central des affaires de Paris et les communes de Meudon et Vélizy-Villacoublay, traits d’union vers le sud de l’agglomération. Plusieurs géants du numérique sont implantés sur cet arc : Orange, Thales, Dassault Systèmes, IBM ou encore Hewlett-Packard.
Le domaine des contenus et supports culturels est encore plus concentré, puisqu’il est implanté en grande partie à Paris et dans quelques communes limitrophes. Neuf communes, dont six arrondissements parisiens, captent la moitié de l’emploi salarié régional. Les grands noms de la presse, de l’édition, de la programmation et la diffusion y sont associés : Le Monde, Le Figaro, l’AFP, Universal Music, ou encore, dans le pôle médias de Paris 15e, Boulogne-Billancourt et Issy-les-Moulineaux : France Télévisions, TF1, Canal +, Eurosport, L’Équipe. Hors de ce périmètre resserré, quelques communes hébergent des activités de contenus et supports : Bry-sur-Marne, Montreuil, Saint-Denis et Rueil-Malmaison.
Le domaine de la publicité-communication est présent pour une large part à Paris, dans les arrondissements de la rive droite et dans les Hauts-de-Seine (Pages Jaunes, Publicis Conseil, Google France, BETC...).
La localisation des industries connexes aux TIC est assez éclatée et plutôt en grande couronne. Deux pôles se dégagent : Élancourt-Plaisir, dans les Yvelines (Airbus, Thales, Zodiac), ainsi que Massy-Palaiseau-Les Ulis, dans l’Essonne (Sagem, Amplitude technologies, Quantel...). Ce sont pour l’essentiel de grands établissements, qui requièrent des emprises foncières de taille conséquente.
Dynamique des créations d’établissements dans le secteur de l’édition de logiciels
Dans l’économie numérique, 22 400 établissements ont été créés en Ile-de-France en 2013. Le taux de création d’établissements y atteint 20 % contre 14 % dans les autres secteurs économiques. Cette économie est soutenue par des politiques nationales, mais bénéficie également au niveau régional de la synergie créée entre les différents acteurs au sein du comité stratégique de filière régional du numérique et de l’agence publique numérique (La Fonderie). Le dynamisme de ces créations s’explique par l’importance des micro-entrepreneurs (se substituant au terme d’auto-entrepreneurs à partir du 19 décembre 2014). Dans le numérique, ils représentent six créations d’établissements sur dix (sept sur dix dans le secteur de la publicité-communication) contre un peu plus de quatre sur dix dans le reste de l’économie. Ce phénomène doit cependant être nuancé. En effet, en France, 60 % des micro-entrepreneurs seulement déclarent véritablement une activité.
Hors micro-entrepreneurs, le taux de création d’établissements dans l’économie numérique s’établit à 8 %, comme dans l’ensemble des secteurs d’activité. Au sein du numérique, les TIC sont les secteurs les plus dynamiques, en particulier l’édition de logiciels. Cette dernière bénéficie notamment de créations soutenues dans les créneaux de l’édition de jeux électroniques (20 %) ou encore de logiciels système et de réseau (16 %). La programmation et le conseil informatique sont également porteurs, principalement dans la gestion d’installations informatiques (12 %) et le conseil en systèmes et logiciels informatiques (10 %). Le secteur « portails Internet » a aussi le vent en poupe : son taux de création est de 16 %.
En revanche, les créations sont plutôt faibles dans les industries connexes aux TIC : l’implantation de ces établissements est ancienne et ce secteur est très concentré.
En 2013, la Seine-Saint-Denis et le Val-d’Oise sont les départements franciliens les plus dynamiques en termes de créations (hors micro-entreprises) dans le numérique (9 %), comme également dans l’ensemble de l’économie.
Davantage d’établissements non employeurs dans le numérique
En 2013, en Ile-de-France, 80 % des établissements du numérique sont non employeurs (105 500), soit neuf points de plus que dans les autres secteurs d’activité. Cette proportion est proche de 90 % dans les activités de publicité-communication, mais est à l’inverse bien plus faible dans les secteurs industriels connexes (30 %). La part des établissements non employeurs s’est accentuée depuis 2007, en particulier dans la publicité-communication (+ 17 points) et dans la réparation d’ordinateurs et d’équipements de communication (+ 14 points). Elle a en revanche diminué dans les secteurs de la vente des TIC, les industries connexes et les télécommunications.
Ces établissements sans salarié ont principalement le statut de professions libérales (40 %).
Le développement des établissements non employeurs, notamment les micro-entreprises, peut être lié à des pratiques d’externalisation d’une partie des activités de certains établissements. Il illustre également l'émergence du travail collaboratif et l’évolution des formes d’emploi.
Des grands établissements, viviers d’emploi
L’économie numérique emploie davantage de salariés dans des grands établissements, en comparaison avec le reste de l’économie (figure 3). Parmi les 500 000 salariés franciliens du numérique (travaillant dans 25 700 établissements employeurs), sept sur dix sont employés dans un établissement comportant 50 salariés ou plus, contre six sur dix dans les autres secteurs.
Cette concentration de l’emploi dans ces établissements de grande taille concerne en particulier la programmation et diffusion, les industries connexes, les télécommunications et la fabrication des TIC. Ces établissements sont davantage présents dans l’ouest de la région, notamment dans les Hauts-de-Seine, les Yvelines et le Val-d’Oise. L’implantation des établissements de plus de 250 salariés s’est accentuée lors des cinq dernières années dans le Val-d’Oise et en Seine-Saint-Denis, plus particulièrement dans des activités de réparation d’ordinateurs et d’équipements de communication.
À l’opposé, les établissements employeurs de moins de 50 salariés sont plutôt concentrés dans la capitale, du fait de la création de nombreuses start-up, et le quart sud-est (Val-de-Marne et Seine-et-Marne). Dans ces territoires, 44 % des salariés du numérique travaillent dans ce type d’établissements.
Les plus petits établissements employeurs (de 1 à 9 salariés) représentent 11 % de l’emploi salarié régional du numérique contre 17 % pour les autres secteurs. Cependant, ils sont davantage présents dans certains secteurs tels que l’enregistrement sonore et l’édition musicale, la production cinématographique et la publicité-communication.
tableauFigure_3 – Plus encore que dans le reste de l'économie, les salariés du numérique travaillent dans de grands établissements
Tranche d'effectif | TIC | Contenus et supports | Publicité-communication | Industries connexes aux TIC | Économie numérique | Autres secteurs |
---|---|---|---|---|---|---|
1 à 9 salariés | 9,1 | 13,8 | 21,3 | 2,2 | 11,3 | 16,8 |
10 à 19 salariés | 6,7 | 8,6 | 10,9 | 2,8 | 7,5 | 9,1 |
20 à 49 salariés | 11,8 | 12,7 | 17,4 | 6,2 | 12,4 | 13,7 |
50 à 249 salariés | 27,5 | 25,6 | 35,5 | 19,8 | 27,7 | 24,0 |
250 salariés ou plus | 44,9 | 39,3 | 14,9 | 69,0 | 41,1 | 36,4 |
Total | 100,0 | 100,0 | 100,0 | 100,0 | 100,0 | 100,0 |
- Source : Insee, Clap 2013
Les pôles de compétitivité
Cap Digital et Systematic sont les deux pôles de compétitivité franciliens de l’économie numérique. En 2012, les 747 établissements d’Ile-de-France appartenant à ces deux pôles comptent près de 45 000 salariés (source : Direction générale des entreprises). Ces pôles, en développement continu, sont devenus des acteurs incontournables de l’écosystème numérique francilien. Cap Digital est le pôle de compétitivité de la filière des contenus et des services numériques, Systematic est orienté vers les TIC sur le thème de la conception, réalisation et maîtrise des systèmes complexes.
Un pôle de compétitivité rassemble, sur un territoire bien identifié et sur une thématique ciblée, des entreprises de toutes tailles, des laboratoires de recherche et des établissements de formation. Les pouvoirs publics nationaux et locaux sont étroitement associés à cette dynamique. Le pôle a vocation à soutenir l’innovation. Il favorise le développement de projets collaboratifs de recherche et développement (R&D) particulièrement innovants. Il accompagne également le développement et la croissance de ses entreprises membres grâce notamment à la mise sur le marché de nouveaux produits, services ou procédés issus des résultats des projets de recherche. En permettant aux entreprises impliquées de prendre une position de premier plan sur leurs marchés en France et à l’international, les pôles de compétitivité sont des moteurs de croissance et d’emplois.
Sources
La source utilisée est le fichier Clap (Connaissance locale de l’appareil productif) 2013.
L’analyse porte sur les emplois salariés privés et publics dans les secteurs d’activités numériques.
Les statistiques sur les créations d'établissements proviennent du répertoire des entreprises et des établissements (issu de Sirene), géré par l'Insee.
Il n’existe pas de définition officielle délimitant le périmètre de l’économie numérique. Le champ de l’étude s’appuie sur la définition de l’économie de l’information proposée par l'OCDE en 2007, qui retient deux domaines : les technologies de l’information et de la communication (TIC en 25 secteurs) et les contenus et supports des TIC (18 secteurs), qui ont pour objet de participer à la création et à la diffusion de ceux-ci. Ce périmètre a été enrichi de deux domaines complémentaires à fort enjeu dans la région : la publicité et la communication, et les activités industrielles connexes aux TIC. Ces domaines ont été identifiés à partir de la définition anglaise de l’économie numérique retenue par la London Metropolitan University ainsi que les travaux menés par l’Insee Franche-Comté. Au total, dans la présente étude, l’économie numérique est constituée de 51 secteurs d’activité (NAF) (cf. données complémentaires).
Pour en savoir plus
Camors C., Dezenaire F., Godonou C., Renouvel S., Roger S., Soulard O., « Économie numérique en Ile-de-France : une dynamique d’emploi portée par les non-salariés », Insee Analyses Ile-de-France n° 31, mars 2016.
Ayache C., Camors C., Castel J., Singier S., Soulard O., Thépin D., « Ouvrir dans un nouvel ongletLa transformation numérique de l’économie francilienne », IAU îdF / Cap Digital, Note rapide n° 686, juin 2015.
Pierre-Marie E., Préault M., Renouvel S., « Ouvrir dans un nouvel ongletNouveaux regards sur l’économie à Paris : quelques filières d’avenir, industries créatives, numérique, mode-design, écoactivités », Apur, mars 2015.
Pariente J., Quillery P., Stenta M., « Technologies de l’information et de la communication en Franche-Comté », Insee dossier Franche-Comté, édition 2014.
Garcin C., Hausswalt P., Siné A., « Ouvrir dans un nouvel ongletLe soutien à l’économie numérique et à l’innovation », Inspection générale des finances, rapport n° 2011-M-060-02.