Des salaires structurellement faibles

Hélène Decorme, Insee

En 2012, les entreprises rémunèrent moins de 10 € net de l’heure la moitié des postes de travail en Poitou-Charentes. Plus faible qu’en Province, ce salaire médian varie selon plusieurs facteurs. Il croît avec la qualification du poste, la taille de l’établissement et l’âge du salarié. Certains secteurs d’activité, tels que l’agriculture et l’hébergement-restauration, sont moins rémunérateurs que d’autres. Les écarts hommes-femmes demeurent. Toutes choses égales par ailleurs, le salaire horaire des femmes reste inférieur de 7,6 % à celui des hommes dans la région.

Insee Flash Poitou-Charentes
No 21
Paru le :Paru le18/12/2015
Hélène Decorme, Insee
Insee Flash Poitou-Charentes No 21- Décembre 2015

En 2012, un salarié picto-charentais en poste sur deux perçoit moins de 10 € par heure (10,3 €/h en Province). Ramené à un équivalent temps plein, le salaire médian offert par un poste en Poitou-Charentes est de 1 511 € net par mois. Au regard de cet indicateur, la région se positionne comme la moins rémunératrice des régions de Province (figure 1). De même, les 10 % des postes picto-charentais les mieux rémunérés offrent un salaire de 17,5 €/h, soit 1 €/h de moins qu’en Province. Pour les 10 % des postes les moins rémunérateurs, le salaire offert est, comme en Province, de 7,5 €/h.

Les disparités salariales entre régions s’expliquent en partie par la structure du tissu productif et par les réalités socio-démographiques régionales : Profession et Catégorie Socioprofessionnelle (PCS), taille d’établissement, secteur d’activité, âge, sexe. La différence de salaire entre le Poitou-Charentes et la Province provient pour 62 % de cette structure. La répartition entre PCS y contribue en quasi-totalité. En effet, les postes d’ouvriers sont surreprésentés en Poitou-Charentes (33 %) par rapport à la Province (31 %), à l’opposé des cadres (10 % contre 12 % en Province).

Figure 1Une rémunération des postes en retrait sur l’arc atlantique

Une rémunération des postes en retrait sur l’arc atlantique - Lecture : Du fait de ses fortes particularités, la région Île-de-France n’a pas été prise en compte dans l’analyse.
Libellé de Région salaire net horaire médian
Champagne-Ardenne 10,3
Picardie 10,3
Haute-Normandie 10,6
Centre 10,3
Basse-Normandie 10,09
Bourgogne 10,2
Nord-Pas-de-Calais 10,5
Lorraine 10,4
Alsace 10,7
Franche-Comté 10,3
Pays de la Loire 10,2
Bretagne 10,09
Poitou-Charentes 10,0
Aquitaine 10,2
Midi-Pyrénées 10,4
Limousin 10,0
Rhône-Alpes 10,7
Auvergne 10,1
Languedoc-Roussillon 10,0
Provence-Alpes-Côte d'Azur 10,5
Corse 10,0
  • Lecture : Du fait de ses fortes particularités, la région Île-de-France n’a pas été prise en compte dans l’analyse.
  • Source : Insee, DADS 2012 - Fichier postes au lieu de travail.

Figure 1Une rémunération des postes en retrait sur l’arc atlantiqueSalaire horaire net médian des postes, par région, en 2012 (en euros)

  • Lecture : Du fait de ses fortes particularités, la région Île-de-France n’a pas été prise en compte dans l’analyse.
  • Source : Insee, DADS 2012 - Fichier postes au lieu de travail.

La catégorie socioprofessionnelle : principal facteur des disparités de salaire

En Poitou-Charentes comme en Province, les disparités salariales sont très marquées entre les PCS. Les cadres perçoivent un salaire horaire net médian 2,2 fois supérieur à celui des ouvriers non qualifiés (19,4 €/h contre 8,8 €/h). En situation intermédiaire, les ouvriers qualifiés perçoivent des rémunérations similaires à celles des employés (9 €/h). Enfin, avec 13,1 €/h, les professions intermédiaires gagnent 46,6 % de plus que les employés mais 32,4 % de moins que les cadres.

L’agriculture et l’hébergement-restauration, secteurs les moins rémunérateurs

Le secteur d’activité influe aussi sur les salaires, les faisant varier du simple au double. Au regard des salaires médians, la hiérarchie des secteurs d’activité en Poitou-Charentes est semblable à celle de Province. En région, la production et la distribution d'électricité et de gaz est l’activité la plus rémunératrice avec un salaire horaire net médian de 18,3 €/h. Viennent ensuite les activités financières et d’assurance, l’enseignement puis l’information et communication, trois activités à forte concentration de cadres (plus de 30 %). Leurs salaires médians sont compris entre 12,9 €/h et 15,2 €/h. À l’opposé, l’agriculture et l’hébergement-restauration présentent les salaires médians les plus faibles de la région, respectivement 8,2 €/h et 8,8 €/h. Ce positionnement s’explique essentiellement par une majorité d’ouvriers non qualifiés dans l’agriculture et d’employés dans l’hébergement-restauration.

Les grands établissements plus rémunérateurs

La taille de l’établissement joue aussi sur les disparités salariales. Plus celle-ci augmente, plus les salaires sont en moyenne élevés. Le salaire net médian pour les établissements de moins de 10 postes est de 8,8 €/h, il est de 10,8 €/h pour les établissements de taille intermédiaire (entre 100 et 249 postes) et de 12,6 €/h pour les établissements les plus importants. Cette corrélation peut s’expliquer par différents facteurs  : des taux d’encadrement plus importants, un pouvoir de négociation plus élevé, l’existence de politiques d’intéressement… Elle est observée de façon générale en Province, mais les salaires médians restent toujours plus faibles en Poitou-Charentes.

L’âge augmente les disparités hommes-femmes

Enfin, le salaire croît avec l’âge, les évolutions de carrière entrainant de fait une augmentation de salaire. Les jeunes de 18 à 25 ans perçoivent ainsi un salaire horaire net médian inférieur de 18,2 % à celui des 36 à 45 ans et de 28,4 % à celui des plus de 55 ans (8,8 €/h contre 10,4 €/h et 11,3 €/h).

Par ailleurs, si la progression du salaire avec l’âge est régulière pour les hommes, celle des femmes connaît un fort ralentissement à partir de 35 ans. L’écart de salaire entre hommes et femmes est ainsi plus faible chez les salariés de 18 à 25 ans (2,4 % en moyenne). Il augmente ensuite progressivement avec l’âge : 13,4 % pour les salariés de 36 à 45 ans et 20 % chez les plus de 55 ans (figure 2).

Figure 2La disparité salariale hommes-femmes se creuse avec l’âge

La disparité salariale hommes-femmes se creuse avec l’âge
Hommes Femmes
moins de| 18 ans 8,2 8,1
entre 18| et 25 ans 8,9 8,6
entre 26| et 35 ans 10,1 9,4
entre 36| et 45 ans 11,2 9,7
entre 46| et 55 ans 11,8 9,8
plus de| 55 ans 12,7 10,2
  • Source : Insee, DADS 2012 - Fichier postes au lieu de travail.

Figure 2La disparité salariale hommes-femmes se creuse avec l’âgeSalaire horaire net médian (en €/h) selon le sexe et l’âge en Poitou- Charentes

  • Source : Insee, DADS 2012 - Fichier postes au lieu de travail.

Des disparités salariales hommes-femmes toujours d’actualité en 2012

En Poitou-Charentes, une femme est en moyenne moins rémunérée qu’un homme. En effet, le salaire net horaire moyen d’une picto-charentaise est inférieur de 17,2 % à celui d’un picto-charentais (10,4 €/h contre 12,6 €/h). Toutefois, cette différence est moins marquée dans la région qu’en Province (19,0 %). À caractéristiques équivalentes, l’écart serait de 7,6 % (figure 3). Toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire après prise en compte des effets de structure, les écarts de salaires sont particulièrement importants chez les cadres (15,3 %) et les ouvriers qualifiés (11,9 %). L’inégalité salariale est forte dans les activités financières et d’assurance (13,5 %). Elle est nettement plus faible dans le secteur de l’information et communication ainsi que de l’enseignement (5,0 %). Cette inégalité croit aussi avec la taille de l’établissement.

Figure 3Forte inégalité salariale hommes-femmes chez les cadres

Salaire horaire net moyen (en euros) et inégalité salariale (en %) en Poitou-Charentes, parmi certaines sous-populations
Forte inégalité salariale hommes-femmes chez les cadres (Salaire horaire net moyen (en euros) et inégalité salariale (en %) en Poitou-Charentes, parmi certaines sous-populations) - Lecture : Un homme est rémunéré en moyenne 12,6 €/h contre 10,4 €/h pour une femme. L’écart entre les deux est de 17,2 %. Si on supprime les effets de structure suivants : PCS, secteur d’activité, âge et taille d’établissement, il reste une différence inexpliquée de 7,6 %, appelée inégalité salariale.
Hommes Femmes Écart (en %) Inégalité salariale (en %)
Ensemble 12,6 10,4 -17,2 -7,6
Catégorie socioprofessionnelle
Cadres 23,1 18,7 -18,8 -15,3
Professions intermédiaires 14,3 13,2 -7,1 -3,8
Ouvriers qualifiés 10,7 9,5 -10,4 -11,9
Âge
entre 18 et 25 ans 9,3 8,9 -4,3 -5,0
entre 36 et 45 ans 13,0 10,5 -19,6 -7,3
plus de 55 ans 16,2 11,6 -28,2 -10,3
Secteur d'activité
Activités financières et d'assurance 22,0 15,4 -29,8 -13,5
Commerce ; réparation d'automobiles 11,4 9,7 -14,5 -10,8
Information et communication 15,4 12,8 -16,8 -5,0
Enseignement 15,9 13,9 -12,9 -4,9
Taille de l'établissement
1 à 9 postes 10,9 8,5 -22,3 -6,3
50 à 99 postes 12,7 11,1 -12,3 -7,6
250 à 499 postes 14,6 12,2 -16,7 -10,3
  • Lecture : Un homme est rémunéré en moyenne 12,6 €/h contre 10,4 €/h pour une femme. L’écart entre les deux est de 17,2 %. Si on supprime les effets de structure suivants : PCS, secteur d’activité, âge et taille d’établissement, il reste une différence inexpliquée de 7,6 %, appelée inégalité salariale.
  • Source : Insee, DADS 2012 - Fichier postes au lieu de travail.

Sources

Cette publication étudie les salaires versés au niveau des postes de travail. Ceux-ci sont connus chaque année grâce aux Déclarations Annuelles de Données Sociales (DADS) des entreprises. Le champ de cette publication couvre aussi la fonction publique. Il exclut les emplois aidés, les apprentis, les stagiaires, les particuliers employeurs, les intérimaires et les chefs d'entreprise salariés.

Définitions

Le salaire net (de prélèvements sociaux) est le salaire que perçoit réellement le salarié.

Le salaire horaire net médian partage la population salariée en deux groupes : la moitié gagne moins et l'autre plus.

L’analyse des salaires doit aussi tenir compte des effets de structure (les rémunérations dépendent notamment de la catégorie socioprofessionnelle, du secteur d’activité, de la taille de l’établissement et de l’âge). Pour mesurer réellement la discrimination homme-femme en matière de salaire, on utilise la décomposition de Blinder-Oaxaca. Elle consiste à estimer une équation de salaire pour les hommes et à l’appliquer aux femmes. On estime ainsi un salaire pour chaque femme comme si elle avait un profil identique à celui d’un homme. La différence brute de salaire entre les hommes et les femmes est égale à une partie expliquée et à une partie non expliquée, qui mesure l’inégalité salariale.

Pour en savoir plus

Chaput H., Pinel C., Wilner L., « Salaires dans le secteur privé et les entreprises publiques », Insee Première N° 1565 – septembre 2015

Hamzaoui L., « Un niveau salarial modéré en lien avec le profil des emplois », Insee Flash Pays de la Loire N° 26 - juillet 2015.

« Emploi et salaires » - Insee Références - Édition 2014 - septembre 2014