59 000 ménages en situation de précarité énergétique

Yves Lebeau, Insee Franche-Comté - Patrice Perron, DREAL Franche-Comté

Chauffer son logement ou payer le carburant pour se déplacer en voiture pèse sur le budget des ménages, notamment des plus modestes. Parmi les ménages en situation de pauvreté monétaire, huit sur dix se trouvent également en situation de précarité énergétique

Insee Flash Franche-Comté
No 13
Paru le :Paru le07/07/2015
Yves Lebeau, Insee Franche-Comté - Patrice Perron, DREAL Franche-Comté
Insee Flash Franche-Comté No 13- Juillet 2015

Le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale adopté en 2013 accorde une large place à la problématique du logement, facteur décisif d’inclusion sociale. Il vise en particulier à mettre en place des solutions pérennes de logement (construction de logements sociaux, plan de rénovation énergétique de l'habitat, garantie des loyers notamment pour les salariés précaires et les jeunes…).

Aux enjeux énergétiques liés à l’amélioration des conditions de confort du logement s’ajoute également la question des inégalités de mobilité. Se rendre au travail, bénéficier des services entraîne des dépenses en carburant pour les ménages utilisant leur voiture. Plus l’éloignement aux bassins d’emplois et de services est important, plus les ménages dont les revenus sont faibles risquent de se trouver en situation de précarité énergétique.

En Franche-Comté, 59 000 ménages sont en situation de précarité énergétique : après prise en compte de leurs dépenses énergétiques leur « reste à vivre » est inférieur au seuil de pauvreté monétaire calculé sur les revenus hors consommation énergétique ().

Ils représentent 11,6 % des ménages. Ce taux est comparable à celui observé en moyenne au niveau national. La région figure à la 9e place sur le plan national, avec un taux de précarité énergétique proche de celui de la Bourgogne (11,4 %). L’Île-de-France est la moins concernée (8,7 %). C’est en Corse que le taux de précarité énergétique est le plus élevé (19,3 %).

Pauvreté monétaire et précarité énergétique vont de pair

Parmi les 59 000 ménages francs-comtois concernés par la précarité énergétique, 54 000 sont également en situation de pauvreté monétaire, soit 82 % des 65 000 Francs-Comtois dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté monétaire. Les 5 000 autres ménages concernés par la précarité énergétique ont un niveau de vie les situant au-dessus du seuil de pauvreté monétaire, mais la prise en compte de leurs dépenses énergétiques les fait basculer sous le seuil de pauvreté (figure 1).

Figure 1Répartition des ménages exposés à la précarité énergétique selon leur niveau de revenu

en nombre
Répartition des ménages exposés à la précarité énergétique selon leur niveau de revenu (en nombre)
Précaires Non.précaires
Inférieur au| seuil pauvreté 54 180 11 882
Entre 1 et 1,1 fois| le seuil de pauvreté 2 598 22 882
Entre 1,1 et 1,5 fois| le seuil de pauvreté 1 804 131 614
Entre 1,5 et 2 fois| le seuil de pauvreté 12 144 339
Supérieur à 2 fois| le seuil de pauvreté 0 134 455
  • Sources : Insee Recensement 2008, Enquête Revenus Fiscaux et Sociaux, RDL ; SoeS, Anah

Figure 1Répartition des ménages exposés à la précarité énergétique selon leur niveau de revenu

  • Sources : Insee Recensement 2008, Enquête Revenus Fiscaux et Sociaux, RDL ; SoeS, Anah

Le risque de précarité énergétique diminue avec l’élévation du niveau de revenu. La précarité énergétique concerne plus particulièrement les 10 % des ménages aux revenus les plus faibles. Leur taux de précarité énergétique s’élève à 74 %. Dès le deuxième décile, la part des ménages précaires est au maximum de 10,8 % (figure 2). Parmi les ménages les plus modestes, davantage de ménages sont concernés par la précarité énergétique liée aux dépenses de chauffage de leur logement (72,5 %) qu’à celle liée à la prise en compte des dépenses en carburant pour les déplacements contraints (62,6 %).

Figure 2Répartition des ménages précaires selon leur niveau de revenu

en %
Répartition des ménages précaires selon leur niveau de revenu (en %) - Note de lecture : Le premier décile de revenu (D1) est le revenu au-dessous duquel se situent 10 % des revenus ; le neuvième décile (D9) est le revenu au-dessous duquel se situent 90 % des revenus.
Déciles de revenu Précarité au sens large (logements ou déplacements) Précarité liée aux logements Précarité liée aux déplacements
D1 74,2 72,5 62,6
D2 10,8 10,6 6,4
D3 8,8 8,4 6,8
D4 10,2 9,8 8,8
D5 7,2 6,4 6,2
D6 3,1 2,8 2,7
D7 1,4 1,2 1,3
D8 0,3 0,3 0,3
D9 0,1 0,1 0,1
D10 0,0 0,0 0,0
  • Note de lecture : Le premier décile de revenu (D1) est le revenu au-dessous duquel se situent 10 % des revenus ; le neuvième décile (D9) est le revenu au-dessous duquel se situent 90 % des revenus.
  • Sources : Insee Recensement 2008, Enquête Revenus Fiscaux et Sociaux, RDL ; SoeS, Anah

Figure 2Répartition des ménages précaires selon leur niveau de revenu

  • Note de lecture : Le premier décile de revenu (D1) est le revenu au-dessous duquel se situent 10 % des revenus ; le neuvième décile (D9) est le revenu au-dessous duquel se situent 90 % des revenus.
  • Sources : Insee Recensement 2008, Enquête Revenus Fiscaux et Sociaux, RDL ; SoeS, Anah

Davantage de ménages en situation de précarité énergétique en Haute-Saône et à Besançon

En lien avec la répartition et la concentration géographique de la population en situation de pauvreté monétaire, la problématique de la précarité énergétique concerne plus particulièrement le nord du département de la Haute-Saône et Besançon (figure 3). En Haute-Saône, les situations de précarité énergétique sont plus fréquentes qu’en moyenne dans la région, à la fois en ce qui concerne la prise en compte des dépenses pour le logement et pour les déplacements contraints. Le risque d’être exposé à la précarité énergétique est en revanche réduit le long de la frontière et en périphérie de Besançon. Les revenus y sont en moyenne plus élevés que sur le reste du territoire. Ainsi, les dépenses énergétiques pèsent moins dans le budget des ménages.

Figure_3Localisation des ménages précaires en Franche-Comté

  • Sources : Insee Recensement 2008, Enquête Revenus Fiscaux et Sociaux, RDL ; SoeS, Anah

Personnes seules, jeunes, familles monoparentales : les plus exposés à la précarité énergétique

Ne disposant pas toujours de revenus suffisants pour subvenir à leurs besoins énergétiques, les jeunes de moins de 30 ans, les familles monoparentales et les personnes vivant seules sont les plus exposés à la précarité énergétique : 36 % des jeunes de moins de 30 ans rencontrent des difficultés pour régler leur facture énergétique. Cette part s’élève à 24 % pour les familles monoparentales et à 21 % pour les personnes vivant seules. Dès que le ménage compte au moins deux adultes, le taux de précarité énergétique chute à 1,6 % lorsqu’il n’y a pas d’enfant à charge et à 5,5 % lorsque des enfants sont présents dans le foyer.

Définitions

En France, la notion de précarité énergétique est définie par la loi du 12 juillet 2010, dite « loi Grenelle II » : « Est en précarité énergétique au titre de la présente loi, une personne qui éprouve dans son logement des difficultés particulières à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires en raison notamment de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’habitat ».

Dans cette étude, un ménage est considéré comme précaire si son revenu disponible hors dépenses énergétiques liées au logement ou aux déplacements contraints en voiture (travail, études, achats, santé, raisons administratives) est inférieur à 900 euros par mois et par unité de consommation pour la précarité énergétique liée au logement et 930 euros par mois et par unité de consommation pour la précarité énergétique liée aux déplacements contraints.

La notion de précarité énergétique diffère de celle de la vulnérabilité énergétique. Un ménage est considéré comme vulnérable si son taux d’effort (dépenses énergétiques / revenu disponible) dépasse un certain seuil, par exemple le double du taux d’effort médian national. En France, cela correspond à 8 % du revenu disponible pour l’énergie du logement ou plus de 4,5 % pour le carburant.