Un tissu économique en constant renouvellement
Entre 2008 et 2013, le nombre d'établissements présents en Rhône-Alpes augmente de + 3,5 % par an en moyenne quand l'emploi salarié n'augmente que de + 0,4 % par an. Mais au-delà de ces évolutions moyennes modestes, le tissu productif rhônalpin se renouvelle fortement chaque année avec 21 % de nouveaux établissements et 17 % de disparitions. De même, trois emplois sur dix sont réalloués entre établissements, par les mouvements de créations-disparitions-transferts d'établissements ou par la variation des effectifs dans les établissements pérennes.
Le renouvellement du tissu productif est particulièrement important dans les zones d'emploi centrales, de Lyon à Grenoble ; il est, au contraire, très faible dans les zones du massif alpin. Autant le "turn-over" des établissements influe positivement sur le nombre d'établissements, autant il a une influence moins directe sur le nombre d'emplois. Ainsi, les emplois générés par les créations ou les transferts n'arrivent souvent pas à compenser les baisses d'effectifs enregistrées dans les établissements déjà existants.
- Les nouveaux établissements sont d’abord des créations
- Un renouvellement élevé à Lyon et faible en montagne
- Une rotation forte dans le tertiaire, faible dans l’industrie
- Trois emplois sur dix sont réalloués entre établissements chaque année
- Les gains nets d’emploi s’expliquent principalement par les créations d’établissements
Le monde de l'entreprise est en constante mutation. Entre janvier 2008 et janvier 2013, les créations de nouveaux établissements l'ont emporté sur les disparitions et le tissu économique de Rhône-Alpes s'est ainsi accru de 69 000 unités pour atteindre 436 000 établissements. Cette évolution du stock d'établissements correspond à une croissance de + 3,5 % en moyenne par an, égale à la moyenne française. Sur cette période, le comptage des établissements inclut les auto-entrepreneurs, statut créé en 2009.
graphiqueFigure_1 – Un renouvellement élevé à Lyon et faible dans le massif alpin
Les nouveaux établissements sont d’abord des créations
Assez modéré sur 5 ans, le solde de ces évolutions cache des flux positifs et négatifs de grande ampleur. Par analogie à la démographie humaine, les établissements naissent, croissent, déclinent, migrent et peuvent disparaître. En moyenne chaque année, ce sont 38 % des établissements qui se renouvellent : 21 % se créent et 17 % disparaissent.
Les nouveaux établissements sont massivement des créations ex nihilo (78 %). Celles-ci représentent 65 000 créations en moyenne par an entre 2008 et 2013. Les autres mouvements proviennent de déménagements des moyens de production déjà existants ou de changements de propriétaire : 18 % des entrées sont des transferts, et 4 % sont en fait des reprises. Le cas des réactivations après une période de mise en sommeil est plus anecdotique. Cette répartition est proche de celle constatée au niveau national, Rhône-Alpes représentant 10,4 % du stock et des entrées d'établissements nationaux.
Parallèlement, entre 2008 et 2013, de nombreux établissements disparaissent, de l'ordre de 51 000 en moyenne chaque année. Les trois quarts relèvent de cessations (établissements mettant fin à leur activité), et 21 % correspondent à un déménagement. Au jeu des mobilités, au final, le nombre d'établissements qui ont quitté la région Rhône-Alpes sur la période est similaire à celui des établissements venus s'y installer.
Les établissements créés démarrent le plus souvent sans salarié : ils sont 85 % dans ce cas, contre 61 % pour l'ensemble du tissu productif. Ainsi, sept établissements qui déménagent sur dix n'ont pas de salarié.
tableauFigure_2 – En Rhône-Alpes, comme en France, 38 % des établissements sont renouvellés chaque année Évolution moyenne du nombre d'établissements entre le 1er janvier 2008 et le 1er janvier 2013
Rhône-Alpes | France entière | |||
---|---|---|---|---|
Nombre d'établissements | Part dans l'ensemble des établissements, en début d'année en % | Nombre d'établissements | Part dans l'ensemble des établissements, en début d'année en % | |
Stock au 1er janvier 2008 | 366 900 | /// | 3 536 800 | /// |
Entrées, en moyenne annuelle | 83 300 | 20,9 | 803 500 | 20,9 |
- créations pures | 65 000 | 16,3 | 632 700 | 16,4 |
- transferts (emménagements) | 14 700 | 3,7 | 138 600 | 3,6 |
- reprises | 3 500 | 0,9 | 31 700 | 0,8 |
- réactivations | 50 | 0,0 | 500 | 0,0 |
Sorties, en moyenne annuelle | 69 400 | 17,3 | 672 500 | 17,4 |
- cessations | 51 200 | 12,7 | 501 000 | 12,9 |
- transferts (déménagements) | 14 700 | 3,7 | 140 000 | 3,6 |
- cessions suivies de reprises | 3 500 | 0,9 | 31 700 | 0,8 |
Variation nette | 13 900 | 3,5 | 131 000 | 3,5 |
Stock au 1er janvier 2013 | 436 000 | /// | 4 191 700 | /// |
- Champ : établissements ayant une activité marchande, hors agriculture.
- Source : Insee, REE et Clap
Un renouvellement élevé à Lyon et faible en montagne
La région Rhône-Alpes présente tout l'éventail des taux de renouvellement que l'on peut observer France entière. L'ampleur du renouvellement est la plus élevée dans un territoire englobant la zone d'emploi de Lyon et son pourtour est. Ce dernier intègre la zone d'emploi de Bourgoin-Jallieu, ainsi que, dans une moindre mesure, celles de Chambéry et de Grenoble. Ainsi, plus de 42 % des établissements se renouvellent chaque année à Lyon et à Bourgoin-Jallieu. Cette rotation élevée s'approche de celle relevée dans les zones d'emploi situées autour de l'arc méditerranéen. Dans la zone d'emploi de Lyon, la rotation des établissements se caractérise notamment par un poids important des transferts au sein du territoire ; dans celle de Bourgoin-Jallieu, on constate un fort dynamisme des créations-cessations. À l'opposé, les zones d'emploi du massif alpin affichent une plus forte stabilité, avec des taux de renouvellement parmi les plus faibles de France, du même ordre de grandeur que celles du sud du massif central (Mauriac, Saint-Flour, Ambert et Aurillac). C'est le cas des zones d'emploi de la Tarentaise, de la Maurienne, du Mont Blanc, de la Vallée de l'Arve et du Chablais. Dans ces territoires plus enclavés, le taux de renouvellement est inférieur à 31 %.
De manière générale, les zones qui se renouvellent le plus le font à la fois par des entrées et des sorties massives. Inversement, les zones où les taux de création sont les plus faibles sont aussi celles où le taux de cessation est bas. L'ampleur du mouvement est un signe indéniable de dynamisme du tissu productif, et influence directement l'évolution du stock d'établissements.
Une rotation forte dans le tertiaire, faible dans l’industrie
Sur l'ensemble de la région Rhône-Alpes, la structure du tissu productif explique très peu le niveau de création constaté. Si on appliquait la structure moyenne française, le taux de création rhônalpin ne serait inférieur que de 0,1 point au taux effectif.
Le dynamisme local des créations et cessations peut en partie s'expliquer par la structure sectorielle du territoire. Les secteurs dans lesquels les créations sont nombreuses sont aussi ceux où les fermetures définitives sont importantes. Ce phénomène de "turn-over" est particulièrement net dans le secteur tertiaire, constitué surtout de petites unités. Ainsi, le taux de création est élevé dans le secteur de l'information et communication (59 %), et dans les autres activités de services (55 %), où l'on trouve notamment les activités de programmation informatique et des portails d'internet, les services personnels (soins de beauté, entretien corporel), la réparation d'ordinateur et les activités liées au sport. À l'opposé, les activités industrielles présentent une faible rotation de leurs établissements.
En matière de création, il existe aussi un effet géographique propre à chaque zone d'emploi. Dans celles à faible renouvellement, les taux d'entrée sont plus faibles qu'ailleurs, quel que soit le secteur d'activité. À taux d'entrée moyen par secteur égal à celui observé en France, le taux d'entrée des zones de la Tarentaise, de la Maurienne et du Mont Blanc dépasserait 24 %, contre 15 % effectivement mesurés. À l'opposé, la zone d'emploi de Bourgoin-Jallieu a un dynamisme propre : si le taux d'entrée par secteur était identique à la moyenne française, son taux de création ne serait que de 21 %, contre 26 % en réel.
graphiqueFigure_3 – Un renouvellement plus important des établissements du secteur tertiaire
Trois emplois sur dix sont réalloués entre établissements chaque année
Le renouvellement des établissements a également un impact sur l'emploi des salariés : de forts mouvements d'emploi accompagnent en effet les péripéties de la vie des établissements, par rapport aux variations nettes habituellement commentées.
Ainsi, plus de 96 000 nouveaux emplois salariés sont imputables aux établissements crées, repris ou emménageant dans la région. Inversement, 91 300 sont supprimés du fait de cessations, cessions ou de sorties d'établissements de la région. Au sein des établissements pérennes, 113 900 emplois sont créés dans les établissements en croissance et 113 200 emplois disparaissent dans des établissements en déclin. Au final, chaque année, près de 415 000 emplois, soit 27 % des effectifs, sont donc réalloués entre établissements.
tableauFigure_4 – La vie des établissements renouvelle l'emploi Réallocation des emplois en moyenne annuelle entre le 1er janvier 2008 et le 1er janvier 2013
Rhône-Alpes | France entière | |||
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Nombre d'emplois salariés moyen | Évolution annuelle moyenne en % | Nombre d'emplois salariés moyen | Évolution annuelle moyenne en % | |
Stock moyen en début d'année | 1 530 700 | 14 769 900 | ||
Stock moyen en fin d'année | 1 536 400 | 14 786 800 | ||
Solde | 5 700 | 0,4 | 16 900 | 0,1 |
Créations (y.c. reprises) - (1) | 63 600 | 644 500 | ||
Disparitions (y.c. cessations-reprises) - (2) | 61 000 | 632 700 | ||
Solde : (1)-(2) | 2 600 | 0,2 | 11 800 | 0,1 |
Transferts entrants - (3) | 32 700 | 324 600 | ||
Transferts sortants - (4) | 30 300 | 316 400 | ||
Solde : (3)-(4) | 2 400 | 0,2 | 8 200 | 0,1 |
Établissements perennes en croissance - (5) | 113 900 | 1 139 200 | ||
Établissements perennes en déclin - (6) | 113 200 | 1 142 300 | ||
Solde : (5)-(6) | 700 | 0,0 | -3 100 | 0,0 |
Réallocation de l'emploi : (1)+(2)+(3)+(4)+(5)+(6) | 414 700 | 4 199 700 |
- Guide de lecture : en Rhône-Alpes, en moyenne chaque année, les nouvelles structures qui se créent génèrent 63 600 emplois et celles qui disparaissent, entraînent une perte de 61 000. Ces mouvements démographiques amènent donc au final une hausse de 2 600 emplois, soit + 0,2 %. L'ensemble des emplois concernés par ces mouvements d'établissements (créations/cessations, transferts et établissements en croissance-déclin) sont donc au nombre de 414 700, soit 27,1 % du stock.
- Champ : établissements ayant une activité marchande, hors agriculture.
- Source : Insee, REE et Clap
Le taux de réallocation de Rhône-Alpes se situe en position intermédiaire parmi les régions françaises. Il est légèrement inférieur au chiffre moyen enregistré France entière (28,4 %), ce dernier étant tiré vers le haut par les niveaux exceptionnellement élevés dans les départements d'Outre-mer, en Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Languedoc-Roussillon. Au sein de la région Rhône-Alpes, le taux de renouvellement fluctue entre 23 % et 24 % dans les zones d'emploi d'Annonay, de la Vallée de l'Arve, d'Oyonnax et de la Maurienne et dépasse 29 % dans celle de Lyon.
Les gains nets d’emploi s’expliquent principalement par les créations d’établissements
En Rhône-Alpes, la résultante de ces mouvements dans la période 2008-2013 est une croissance du nombre de salariés de l'ordre de + 0,4 % par an. Cette croissance de l'emploi s'explique, de façon équilibrée (+ 0,2 %), par le jeu des créations-cessations et par celui des transferts, tandis que le solde des variations d'effectifs dans les établissements pérennes est nul. Les nouveaux établissements créés sont massivement sans salarié, mais présentent néanmoins une taille moyenne supérieure à celle des établissements qui disparaissent. De la même façon, les établissements transférés sont sensiblement plus grands dans les arrivées que lors des départs. Quant aux mouvements dans les établissements pérennes, ceux-ci se soldent par un nombre d'emplois stable sur la période : autant d'emplois ont disparu des établissements en déclin que d'autres sont apparus dans les établissements en croissance.
Derrière cette situation moyenne se cachent là aussi de fortes disparités selon les zones d'emploi. Les mouvements d'emploi dans les établissements pérennes s'équilibrent au niveau régional, mais ce n'est pas toujours le cas au plan local. Ainsi, dans les zones qui ont le plus souffert de baisses d'emploi entre 2008 et 2013, telles que celles d'Oyonnax, de la Vallée de l'Arve, d'Annonay et de la Maurienne, l'emploi a surtout baissé dans les établissements déjà présents sur le territoire. La perte d'emplois due aux établissements pérennes dépasse 1,6 % en moyenne annuelle. En revanche, les zones plus dynamiques de Montélimar, de Lyon et du Mont Blanc ont enregistré des mouvements positifs à la fois dans les établissements créés, transférés et pérennes. L'augmentation du nombre d'emplois dans les établissements pérennes y dépasse + 0,3 % en moyenne annuelle. Les zones d'emploi du Genevois français, du Chablais, d'Aubenas et de Bourg-en-Bresse, enfin, ont réussi à compenser les pertes d'emploi dans les établissements pérennes par des créations d'emplois dans les établissements créés.
graphiqueFigure_5 – Les fortes baisses d’emplois dans les établissements pérennes non compensées par les créations et les transferts
Sources
Les données sur les établissements proviennent du répertoire des entreprises et des établissements (REE) de Sirene. Les effectifs salariés sont issus de la source Clap. L'étude porte sur les établissements ayant une activité principale marchande dans l'industrie, la construction, le commerce ou les services, à l'exclusion de l'agriculture. Les établissements des auto-entrepreneurs sont compris.
Définitions
L'étude porte sur les établissements , c'est-à-dire les unités de production géographiquement localisées.
Les différents événements concernant les établissements peuvent être illustrés par analogie avec la démographie des individus. Ainsi, la création correspond à la "naissance" de l'établissement, c'est-à-dire au début de son activité. La disparition correspond à son "décès", c'est-à-dire à la fin de son activité. Le transfert correspond à la migration, c'est-à-dire au déplacement complet des moyens de production d'un établissement d'un lieu géographique à un autre. Pour le territoire de départ de l'établissement, on parlera de transfert sortant. Pour le territoire d'arrivée, on parlera de transfert entrant. Dans cette étude, les lieux de départ et d'arrivée ne sont pas identifiés simultanément. Un établissement se déplaçant dans la même zone d'emploi sera compté pour la zone à la fois en transfert sortant et en transfert entrant.
Il y a également des événements affectant les établissements qui n'ont pas de correspondance avec la démographie classique. La réactivation est le fait qu'un établissement disparu reprenne son activité moins d'un an après l'avoir interrompue. Le changement de propriétaire d'un établissement se traduit par une cession du côté de l'établissement qui cède son activité et une reprise du côté de celui qui la reprend. Les cessions et reprises sont suivies uniquement au niveau des établissements, pas des entreprises.
Sur un territoire, on comptabilise l'ensemble des entrées et des sorties. Les entrées sont les créations, transferts entrants, réactivations et reprises. Les sorties sont les disparitions, transferts sortants et cessions. Les taux d'entrée et de sortie sont mesurés en ramenant les entrées et les sorties au nombre d'établissements au 1er janvier de l'année. Les établissements pérennes sont ceux qui ne sont l'objet ni d'une entrée ni d'une sortie.
Les créations et suppressions d'emplois sont mesurées en comparant les effectifs salariés des établissements en début et en fin d'année. Elles ne prennent pas en compte les mouvements des salariés (embauches, licenciements, départs à la retraite, …) au cours de l'année.
Le renouvellement des établissements mesure l'ensemble des mouvements sur le territoire, en sommant l'ensemble des entrées et sorties (créations, disparitions, transferts, cessions, reprises).
La réallocation des emplois correspond à la même idée sur les emplois salariés. Elle somme l'ensemble des effectifs des établissements entrants ou sortants sur le territoire. Sont également ajoutées les augmentations d'effectif dans les établissements pérennes en croissance et les diminutions d'effectifs dans les établissements pérennes en déclin. Seuls les changements ayant un effet sur l'évolution du niveau d'emploi de l'établissement sont pris en compte. les réallocations d'emplois ne sont donc pas la rotation des salariés. Un salarié peut changer d'emploi et être remplacé par un autre salarié : ces deux mouvements de salariés ne modifieront pas le niveau des emplois. Le détail des mouvements tels que retraites, embauches, licenciements, etc. ne sont pas suivis ici, à la différence du suivi des mouvements de main-d'œuvre réalisé par la Dares.
Le concept d'emploi utilisé ici est l'emploi salarié des établissements, au 31 décembre ou au 1er janvier selon les cas. Il s'exprime en "personnes physiques" au sens où un salarié compte pour un, même s'il est à temps partiel.
Pour en savoir plus
Publications :
"">Bilan économique de Rhône-Alpes", Insee Conjoncture Rhône-Alpes n° 5, mai 2015
"Hausse des créations d'entreprise en 2014, notamment des sociétés", Insee Première n° 1534, janvier 2015
"Moins de créations d'entreprises individuelles en 2011", Insee Première n° 1387, janvier 2012