Les inégalités entre les femmes et les hommes : une situation régionale contrastée
Les inégalités entre les femmes et les hommes sont, sur le marché du travail, plus prononcées en Nord-Pas-de-Calais qu'en moyenne nationale. L'insertion professionnelle des femmes nordistes est en effet plus précaire, avec un taux d'activité plus faible, un taux de chômage plus élevé et une propension au travail à temps partiel plus importante. Si les écarts de salaire entre les femmes et les hommes sont comparables à ceux observés au niveau national, les revenus sont globalement plus faibles pour chacun des deux sexes. La pauvreté monétaire est plus accentuée dans la région, notamment pour les familles monoparentales dont le chef de famille est le plus souvent une femme. L'espérance de vie reste plus élevée pour les femmes que pour les hommes, avec un écart entre sexes plus prononcé qu'en moyenne nationale. À l'inverse, l'éducation est un domaine où les différences entre filles et garçons sont dans l'ensemble moins marquées en Nord-Pas-de-Calais qu'en moyenne nationale. Sur ces différentes facettes des inégalités entre femmes et hommes, le Nord-Pas-de-Calais présente un profil globalement similaire à la région Lorraine. Dans la dernière décennie, le niveau d'inégalités s'est rapproché du niveau national, même si l'insertion des femmes sur le marché de l'emploi reste plus défavorable.
- Des inégalités entre les femmes et les hommes plus prononcées dans le domaine de l’emploi
- L’éducation : un domaine plus « équitable », hormis pour la filière professionnelle
- Les femmes : moins souvent actives et davantage au chômage
- Des conditions de vie à l'état de santé : des inégalités renversées ?
- Des évolutions contrastées pour l’emploi et la formation depuis 1999
- L’activité féminine : d’importantes disparités infrarégionales
Des inégalités entre les femmes et les hommes plus prononcées dans le domaine de l’emploi
Les inégalités entre les femmes et les hommes, qu'elles portent sur l'emploi, l'éducation, les revenus ou les conditions de vie, s'observent dans l'ensemble des régions françaises. D’une région à l’autre, les différences entre les sexes sont toutefois d’ampleurs inégales et plus ou moins prégnantes selon les domaines. Ainsi, le Nord-Pas-de-Calais présente un degré d'inégalités entre femmes et hommes plus soutenu concernant le marché de l’emploi ( figure 1 ). Certains écarts significatifs se dessinent également dans le domaine de la santé, pour l'espérance de vie, et de l’éducation, pour ce qui est de l'orientation scolaire ou encore de la proportion de diplômés du supérieur. Le profil du Nord-Pas-de-Calais peut être rapproché de celui de la Lorraine : les caractéristiques de ce territoire en matière de disparités entre les sexes semblent sensiblement les mêmes que celles de la région nordiste, hormis pour ce qui concerne le domaine de l'emploi. La similitude entre le Nord-Pas-de- Calais et la Lorraine est particulièrement visible au regard de la formation et des revenus.
graphique1 – Un profil régional proche de la Lorraine
L’écart observé par rapport à la moyenne nationale ne suffit cependant pas à résumer la situation régionale. Ainsi, si l’on considère certains aspects démographiques, pour lesquels Nord-Pas-de-Calais et Lorraine sont à première vue relativement voisines vis-à-vis de la moyenne française, des divergences plus profondes peuvent apparaître. Pour exemple, les inégalités entre sexes apparaissent identiques à la France pour les deux régions face à l'âge moyen à la parentalité. Pour autant, femmes et hommes deviennent parents plus tôt dans le Nord-Pas-de-Calais, et, qui plus est, le plus tôt parmi l’ensemble des régions de France métropolitaine.
L’éducation : un domaine plus « équitable », hormis pour la filière professionnelle
En matière d’éducation, la région Nord-Pas-de-Calais présente un moindre niveau d'inégalités entre les filles et les garçons. Ainsi, les différences de taux de scolarisation à 18 ans sont plus faibles qu'au niveau national. De plus, le Nord-Pas-de-Calais affiche des taux de scolarisation à 18 ans supérieurs à la moyenne française pour les deux sexes (définitions).
Des disparités existent toutefois concernant le type de filière suivie durant le secondaire. Quelle que soit la région, les filles s’orientent davantage vers un baccalauréat général et y sont proportionnellement surreprésentées. Toutefois, en région Nord-Pas-de-Calais, une part importante de filles est inscrite au baccalauréat professionnel (32 % contre 29 % en France métropolitaine en 2013-2014). Cette plus grande diversité dans les choix de filières opérés par les femmes se traduit par de moindres inégalités sexuées en matière d'inscription au baccalauréat général. À l'inverse, la filière professionnelle étant davantage encore suivie par les garçons, l'écart de scolarisation entre les deux sexes dans cette filière reste important et supérieur à celui observé en moyenne nationale.
Toutes filières confondues, les filles obtiennent de meilleurs résultats au baccalauréat, que ce soit dans la région ou au niveau national. Bien que la part d’hommes et de femmes diplômés du supérieur en Nord-Pas-de-Calais soit, dans l'ensemble, plus faible que celle observée au niveau métropolitain, les femmes de la région sont proportionnellement aussi nombreuses que les hommes à être diplômées, voire plus nombreuses pour les tranches d’âge les plus jeunes. Dans ce domaine, les inégalités sont moins prononcées en région par rapport au niveau national. Leur insertion professionnelle n’en est pas pour autant facilitée. À diplôme du supérieur équivalent, les femmes sont moins fréquemment actives et plus touchées par le chômage que les hommes.
Les femmes : moins souvent actives et davantage au chômage
Le Nord-Pas-de-Calais se caractérise par un écart de taux d’activité entre femmes et hommes très accentué par rapport à la situation nationale, écart le plus important observé pour l'ensemble des régions ( encadré ). En 2011, 80 % des femmes âgées de 25 à 54 ans sont actives contre 95 % des hommes de la même tranche d’âge. La différence est plus faible au niveau national où elle avoisine les 9 points ( figure 2 ). La moindre présence des femmes nordistes sur le marché de l'emploi explique entièrement cette amplitude, le taux d'activité des hommes étant équivalent à la moyenne nationale. De plus, les femmes sont davantage exposées au chômage que les hommes, et ce, quelle que soit leur région d’appartenance. Le Nord-Pas-de-Calais présente cependant un écart entre les sexes plus faible qu’en moyenne française, en raison d’un taux de chômage masculin lui-même élevé.
tableau2 – Tableau synthétique des indicateurs sur le marché du travail
Taux d'activité * | Taux de chômage * | Temps partiel * | Revenu salarial net moyen ** | |||||||||
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Région | Femmes (%) | Hommes (%) | Écart Femmes / Hommes (Points de %) | Femmes (%) | Hommes (%) | Écart Femmes / Hommes (Points de %) | Femmes (%) | Hommes (%) | Écart Femmes / Hommes (Points de %) | Femmes (euros courants) | Hommes (euros courants) | Écart femmes / hommes (%) |
Nord-Pas-de-Calais | 80,2 | 94,7 | -14,5 | 14,4 | 12,9 | 1,6 | 31,5 | 5,1 | 26,4 | 21 256 | 26 586 | -20,0 |
Lorraine | 84,6 | 94,8 | -10,2 | 11,9 | 10,3 | 1,6 | 31,8 | 4,2 | 27,6 | 20 693 | 26 516 | -22,0 |
France métropolitaine | 86,8 | 95,3 | -8,5 | 11,5 | 9,7 | 1,8 | 27,4 | 5,0 | 22,4 | 23 555 | 29 373 | -19,8 |
France | 86,6 | 95,2 | -8,6 | 12,1 | 10,1 | 2,0 | 27,3 | 5,1 | 22,2 | 23 556 | 29 320 | -19,7 |
- (*) Population des ménages de 25 à 54 ans, 2011
- (**) Ensemble des ménages, 2012
- Sources : Insee, recensement de la population, DADS.
Par ailleurs, lorsqu’elles ont un emploi, les femmes travaillent davantage à temps partiel. C’est particulièrement le cas en région Nord-Pas-de-Calais où plus de trois femmes sur dix en emploi sont à temps partiel. La région présente ainsi un écart entre les sexes plus important que celui observé en moyenne nationale. En outre, en Nord-Pas-de-Calais plus encore qu'au niveau national, l'emploi féminin reste très concentré sur un faible nombre d'activités. De surcroît, ces secteurs plus féminisés, comme les services à la personne, la santé, l'éducation et le commerce, sont bien souvent moins rémunérateurs.
Ainsi, d'importantes inégalités de salaires entre sexes sont observées en Nord-Pas-de-Calais, comparables toutefois à celles constatées au niveau national. Les femmes perçoivent un revenu salarial net moyen inférieur d’environ 20 % à celui des hommes. Les salaires sont cependant plus faibles dans la région qu’en moyenne française, en partie en raison d’un chômage plus marqué, d’une moindre propension des femmes à se porter sur le marché du travail et d’un temps partiel féminin plus prononcé.
Des conditions de vie à l'état de santé : des inégalités renversées ?
Les inégalités entre les femmes et les hommes sur le marché de l'emploi ont des répercussions sur les conditions de vie des ménages. Ainsi, l'ensemble des ménages nordistes est touché par la pauvreté, et en particulier les familles monoparentales, dirigées le plus souvent par des femmes (85 %). Qui plus est, ce type de famille est à la fois proportionnellement plus nombreux dans la région, et davantage exposé à la précarité ( figure 3 ). En effet, le taux de pauvreté des familles monoparentales avoisine 41 %, contre 31 % au niveau national. Ces dernières connaissent bien souvent une situation difficile sur le marché de l'emploi, couplée à des conditions de logement moins favorables. Les femmes sont donc ici les plus affectées car plus nombreuses à être concernées. Toutefois, lorsqu'ils vivent seuls, les hommes sont davantage touchés par la pauvreté que les femmes, en région comme en France métropolitaine.
graphique3 – Une proportion plus élevée de familles monoparentales dans le nord et le sud de la France
Disposant d'un temps de loisirs plus conséquent que les femmes (+ 10 % au niveau national), les hommes sont plus souvent licenciés sportifs. Ainsi, près de 72 % des licenciés sportifs sont des hommes en région Nord-Pas-de-Calais, contre 70 % en France métropolitaine.
Toutefois, les inégalités semblent être inversées s'agissant des problématiques sanitaires. En 2012, les femmes disposent dans la région d’une espérance de vie supérieure de 7 ans à celle des hommes, contre 6 ans en France métropolitaine. Loin de traduire une situation plus favorable pour les femmes, ce résultat met surtout en évidence la faible espérance de vie masculine : 75,4 ans contre 78,5 en moyenne métropolitaine. Le passé régional ouvrier et ses métiers à forte pénibilité, ainsi qu’une tendance au tabagisme et à l’alcoolisme plus marquée que la moyenne nationale, expliquent ce constat. Toutefois, les femmes du Nord-Pas-de- Calais sont également exposées à ces problèmes de santé : l'espérance de vie féminine reste en deçà des références nationales (82,8 ans contre 84,9 ans).
Des évolutions contrastées pour l’emploi et la formation depuis 1999
Depuis 1999, les évolutions les plus significatives sont intervenues dans le domaine de l’emploi et de la formation ( figure 4 ), ce qui explique les différences notables observées en 2011 par rapport à la moyenne nationale.
graphique4 – Dans la dernière décennie, le niveau d'inégalités s'est rapproché du niveau national dans la plupart des domaines
Les écarts entre sexes en matière de chômage se sont réduits plus fortement qu’au niveau national. La région est ainsi passée d’une situation plus inégalitaire qu’en moyenne nationale en 1999 à un profil nettement plus équitable en 2011. Cette inversion de position observée vis-à-vis de la situation métropolitaine résulte d’une baisse plus importante du taux de chômage féminin régional sur la période. À l’inverse, le chômage des hommes, déjà élevé, a continué à croître, rattrapant plus vite qu’en moyenne nationale celui des femmes.
L'écart entre le taux d'activité des femmes et celui des hommes s'est accentué dans la région. Depuis 1999, les femmes sont cependant proportionnellement de plus en plus nombreuses à être actives en Nord-Pas-de-Calais, mais le rattrapage ayant été moindre que celui observé au niveau national, les écarts relatifs entre sexes se sont accentués.
Pour ce qui concerne l’inscription au baccalauréat professionnel, la région est passée d’une situation moins inégalitaire qu’au niveau métropolitain à des écarts à l’inverse plus prononcés. La part de filles s’orientant vers un bac professionnel s’est accrue à rythme relativement comparable en Nord-Pas-de-Calais et en France métropolitaine. Cependant, les garçons nordistes ont également davantage choisi cette orientation, à un rythme encore plus soutenu. Par conséquent, les écarts entre sexes ont augmenté dans la région, ainsi que vis-à-vis de la moyenne nationale. Les disparités se sont accentuées entre les sexes pour les diplômés du supérieur, en faveur des femmes. La part des diplômées du supérieur est passée de 18,4 % en 1999 à 32,2 % en 2011 pour les femmes, contre une progression de 18,5 % à 27,8 % pour les hommes.
L’activité féminine : d’importantes disparités infrarégionales
La région Nord-Pas-de-Calais le taux d’activité féminin le plus faible de France métropolitaine en 2011 avec 80,2 % de femmes actives. Cette situation très dégradée toutefois des disparités importantes au niveau infrarégional ( figure 5 ). En effet, certains territoires s’en sortent mieux comme l’agglomération lilloise ou encore l’Arrageois. À l’inverse, les taux d’activité féminins sont largement en dessous de la moyenne nationale le long de la frange allant du littoral nord jusqu’à l’Avesnois en passant par l’ancien bassin minier. Pour exemple, la zone d’emploi de Lens-Hénin, territoire connaissant une activité féminine historiquement faible, un taux d’activité de 72,3 %, contre 86 % pour la zone d’emploi de Lille.
Outre l’effet historique et culturel expliquant une partie de ces écarts, un potentiel découragement des femmes à s’insérer sur le marché de l’emploi du fait d’un chômage prononcé peut également être avancé. De même, la parentalité régionale plus précoce, et une part plus importante de familles nombreuses peuvent contraindre les choix d’activité des femmes.
graphique5 – Une moindre activité féminine au cœur de l'ancien bassin minier
Définitions
Taux d'activité : Rapport entre le nombre de personnes actives (personnes ayant un emploi et chômeurs) et l'ensemble de la population correspondante.
Taux de chômage (au sens du recensement de la population) : Proportion du nombre de chômeurs dans la population active. Les actifs comprennent les personnes qui déclarent exercer une profession (salariée ou non) y compris à temps partiel, aider une personne dans son travail (même sans rémunération), être apprenti ou stagiaire rémunéré, être étudiant ou retraité mais occupant un emploi, être militaire du contingent (tant que cette situation existait), enfin être chômeur à la recherche d'un emploi ou exerçant une activité réduite. Ne sont pas retenues les personnes qui, bien que s'étant déclarées chômeurs, précisent qu'elles ne recherchent pas d'emploi.
Taux de pauvreté : Proportion d'individus (ou de ménages) dont le niveau de vie est inférieur pour une année donnée à un seuil, dénommé seuil de pauvreté (exprimé en euros). On privilégie en Europe le seuil de 60 % du niveau de vie médian.
Taux de scolarisation à 18 ans : Pourcentage de jeunes de 18 ans qui sont scolarisés par rapport à l'ensemble de la population du même âge.
Pour en savoir plus
« L'égalité professionnelle : Où en est-on ? », Insee Dossiers Nord-Pas-de-Calais, n° 05, février 2015.
« Femmes et hommes – Regards sur la parité », Insee Références, édition 2012, mars 2012.
« Femmes et hommes face à l’emploi : les inégalités persistent », Insee Nord-Pas-de-Calais, Pages de Profils n° 140, octobre 2013.