Les prix des médicaments de 2000 à 2010
L’Insee suit deux types de prix à la consommation pour les médicaments : le prix « brut », qui est le prix de marché hors remboursement de sécurité sociale et le prix « net », qui correspond à la partie résiduelle du prix acquittée par le consommateur après prise en charge de tout ou partie du coût par la sécurité sociale (hors mutuelles).
Entre 2000 et 2010, le prix « brut » de l’ensemble des médicaments remboursables et non remboursables baisse en moyenne de 1,8 % par an. Dans le même temps, le prix « net » de ces médicaments augmente en moyenne de 0,6 % par an entre 2000 et 2010. Ces évolutions opposées s’expliquent par les différentes mesures de déremboursement partiel ou total intervenues durant la période, ainsi que par la forte progression du prix des médicaments non remboursables.
- Les médicaments, principal poste de consommation en biens et services de santé
- Les génériques font baisser les prix des médicaments
- Hausse des prix après prise en charge de tout ou partie du coût par la sécurité sociale
- Prix des médicaments non remboursables : + 3,2 % par an
- IPC, IPCH, deux indices fondés, l’un sur les prix bruts et l’autre sur les prix nets
- Procédure de fixation des prix des médicaments remboursables
Les médicaments, principal poste de consommation en biens et services de santé
En 2010, les médicaments représentent 36,5 % des dépenses brutes de santé suivies par l’indice des prix à la consommation, hors dépenses hospitalières. Devançant les dépenses liées aux consultations et plus généralement au service rendu par les médecins, les médicaments sont le principal poste de dépenses brutes de santé. Ce fait est constant au cours des années 2000. Cependant, si la part des médicaments dans les dépenses brutes de santé est stable durant la décennie, l’ensemble du secteur de la santé tient une place de plus en plus grande dans les dépenses quotidiennes des Français. Hors dépenses hospitalières, la santé représente 10,0 % des dépenses brutes de consommation des ménages suivies par l’indice des prix à la consommation (IPC - source) en 2010, contre 8,9 % en 2000.
Selon la notion de dépenses nettes, c’est-à-dire celles couvrant la partie non remboursée des dépenses et les biens et services non remboursables, le secteur de la santé représente 3,8 % du budget de consommation des ménages en 2010, contre 3,2 % en 2000. Tout comme en brut, les médicaments arrivent en tête des postes de dépenses nettes de santé. En 2010, 35,6 % des dépenses nettes de santé proviennent des médicaments.
Les génériques font baisser les prix des médicaments
Dans l’indice des prix à la consommation, les évolutions de prix des médicaments sont calculées à partir des prix moyens de chacune des classes d’équivalents thérapeutiques, qui regroupent notamment le princeps et ses génériques.
Entre 2000 et 2010, les prix bruts des médicaments ont diminué en moyenne de 1,8 % par an. Dans le même temps, les prix à la consommation dans leur ensemble ont progressé à un rythme annuel de 1,7 % (graphique 1).
Près de 90 % des dépenses en médicaments proviennent des médicaments remboursables. Ce sont eux qui déterminent le mouvement de l’ensemble des prix des médicaments : entre 2000 et 2010, leurs prix bruts ont diminué de 2,3 % par an.
Les prix des médicaments remboursables sont réglementés : ils sont fixés dans le cadre de conventions conclues entre le Comité économique des produits de santé (CEPS) et les entreprises pharmaceutiques. Le Code de la sécurité sociale précise, d’une part, le contenu de ces relations contractuelles qui doivent respecter l’objectif national des dépenses de l’assurance maladie et, d’autre part, les critères de tarification des médicaments (encadré 2). Pour les génériques, qui sont des copies de médicaments dont le brevet est tombé dans le domaine public, le CEPS fixe un prix qui correspond au prix de l’original auquel est appliquée une structure de décote normalisée.
La baisse de prix observée pour les médicaments remboursables est donc largement due aux politiques mises en œuvre par les pouvoirs publics et, en particulier, au développement des génériques depuis une dizaine d’années.
En 1999, le droit de substitution est accordé aux pharmaciens et s’accompagne d’incitations financières. Mais c’est surtout après juillet 2002 que le marché des génériques prend son essor du fait de l’engagement des médecins à rédiger des ordonnances comportant au moins 25 % de lignes prescrites selon le nom chimique de la molécule active au lieu de celui de la marque du médicament. En 2003, parmi les médicaments remboursables, les quantités de princeps vendus baissent de 18 % alors que les quantités de génériques augmentent de 17 %. Ce déplacement de la consommation vers les génériques s’observe également en 2006 et en 2007 (+ 8 % et + 7 % respectivement). Les principales années de hausse de ventes de génériques correspondent à des campagnes de sensibilisation du grand public autour de cette thématique. En décembre 2010, 24 % des boîtes de médicaments remboursables sont des génériques (contre 11 % en janvier 2003). Les génériques représentent 15 % du montant des ventes réalisées en décembre 2010. Le développement des génériques est plus visible en termes de quantités vendues qu’en termes de montant des ventes, parce que les génériques sont vendus moins chers. En 2010, le prix moyen de l’ensemble des génériques est en moyenne inférieur de 20 % à celui des princeps.
Par ailleurs, la montée en puissance des génériques peut avoir pour effet d’encourager les laboratoires proposant le princeps correspondant à baisser leur prix de façon à rester compétitifs. C’est ce que l’on observe par exemple pour les médicaments dont le groupe générique a été créé en juin 2008 : le prix de ces princeps baisse de 7,5 % entre décembre 2008 et décembre 2009 (graphique 2).
graphiqueGraphique 1 – Indices des prix bruts et des prix nets des médicaments
graphiqueGraphique 2 – Indice¹ des prix bruts des médicaments princeps dont le groupe générique a été crée en juin 2008
Hausse des prix après prise en charge de tout ou partie du coût par la sécurité sociale
Alors que le prix « brut » des médicaments remboursables diminuait, dans le même temps de nombreuses mesures sont intervenues dans le cadre d’une politique de maîtrise des dépenses de santé (instauration de franchises sur les boîtes de médicaments, baisses de taux de remboursement, déremboursements, etc.). En particulier, le taux de remboursement d’un médicament est déterminé en fonction du service médical rendu, et ce service peut faire l’objet d’une réévaluation périodique. Toutes ces mesures ont conduit à alourdir la part des dépenses restant à charge des ménages. Entre 2000 et 2010, les prix « nets » des médicaments ont ainsi crû de 0,6 % par an. Cette interprétation en termes de hausse de prix, retenue en particulier dans le cadre de l’établissement de l’indice de prix harmonisé au niveau européen (IPCH), diffère donc de celle qui découle de l’indice des prix à la consommation (encadré 1).
L’évolution du prix « net » des médicaments est caractérisée par de forts à-coups à la hausse en 2003, puis en 2008 (graphique 1).
De fait, la hausse du prix « net » des médicaments de 3,3 % en 2003 résulte d’une importante vague de déremboursements partiels ainsi que de la mise en place du tarif forfaitaire de responsabilité (TFR). Ainsi, le taux de remboursement de plus de 450 produits est passé de 65 % à 35 % en avril 2003, ce qui a d’ailleurs conduit à une baisse de l’ordre de 11 % des quantités vendues entre janvier et décembre 2003. La mesure du TFR consiste à rembourser tous les médicaments d’un groupe générique en fonction d’un tarif calculé sur la base des prix des génériques du groupe. En septembre 2003, 71 groupes génériques furent soumis au TFR et depuis, plusieurs autres vagues de TFR ont été instaurées.
En 2008, la hausse du prix « net » des médicaments de 4,9 % s’explique par l’instauration au 1er janvier d’une franchise médicale de 0,50 euro par boîte de médicament remboursable achetée.
Ces deux années de forte hausse du prix « net » contrastent avec la stabilité voire les baisses de prix observées durant le reste de la période.
Une troisième hausse du prix « net » est toutefois intervenue en 2010, du fait de la baisse du taux de remboursement de 35 % à 15 % d’une centaine de médicaments.
Prix des médicaments non remboursables : + 3,2 % par an
Depuis 2000, les dépenses en médicaments non remboursables représentent environ 9 % du total des dépenses brutes en médicaments et 20 % du total des dépenses nettes en médicaments.
Contrairement aux médicaments remboursables, les médicaments non remboursables ont des prix librement fixés par les entreprises pharmaceutiques. Cette différence institutionnelle entraîne une divergence d’évolution entre le prix des médicaments remboursables et ceux qui ne le sont pas. Entre 2000 et 2010, le taux de croissance annuel moyen du prix des médicaments non remboursables est de + 3,2 %. Cette hausse est en partie liée aux mesures de déremboursement. D’une part, le déremboursement total d’un médicament entraîne une hausse mécanique du taux de TVA, qui passe de 2,1 % à 5,5 % ; d’autre part, le déremboursement d’un médicament est généralement suivi d’une baisse de sa consommation et d’une hausse concomitante de son prix de vente car il n’est plus soumis à réglementation.
La principale vague de déremboursement total a eu lieu en 2006. Pour les médicaments concernés, les quantités vendues dans l’année ont diminué des deux tiers (graphique 3). Dans le même temps, l’indice des prix bruts de ces médicaments a augmenté de 41 % entre janvier et décembre 2006. La deuxième vague de déremboursement de 2008 concerne principalement les vasoprotecteurs. Les quantités vendues de cette catégorie de médicaments sont presque deux fois moindres en 2008 qu’en 2007 lorsqu’ils étaient remboursés à 15 % (graphique 4). L’indice des prix bruts des vasoprotecteurs a augmenté de 13 % dès le mois de leur déremboursement.
Par ailleurs, à compter de juillet 2008, environ 200 médicaments d’automédication ont été mis en libre accès dans les pharmacies. L’indice des prix des dix médicaments d’automédication les plus vendus s’en est ressenti : il a baissé de 2 % entre janvier et décembre 2008.
graphiqueGraphique 3 – Indice¹ des quantités pour les médicaments totalement déremboursés en 2006
graphiqueGraphique 4 – Quantités de vasoprotecteurs vendus en 2007 et 2008
IPC, IPCH, deux indices fondés, l’un sur les prix bruts et l’autre sur les prix nets
L’Insee élabore deux indices de prix à la consommation : l’indice des prix à la consommation (IPC) est l’indice national et l’indice des prix harmonisé (IPCH) est la composante française de l’indice des prix européen. Dans l’IPC, on s’intéresse au « prix brut » qui correspond au prix que paierait le consommateur en l’absence de remboursements de sécurité sociale. En revanche, dans l’IPCH, l’approche retenue est celle du « prix net ». C’est le prix qui reste à la charge du consommateur, déductions faites des remboursements de sécurité sociale (hors remboursements des mutuelles).
Les indices de prix à la consommation sont en principe cohérents avec les concepts de comptabilité nationale. Cependant, les logiques d’interprétation sont différentes dans le cas des produits donnant lieu à remboursement de sécurité sociale. En comptabilité nationale, la consommation effective du ménage est une consommation brute. Le concept de prix de consommation en comptabilité nationale est donc en ligne avec celui de prix brut évoqué dans ce texte. La consommation effective est la somme d’une dépense de consommation du ménage (la partie non remboursée) et d’une dépense de consommation des administrations publiques (le remboursement). Dans ce cadre, une baisse d’un taux de remboursement est sans incidence sur le prix du médicament consommé : elle s’interprète comme un transfert de volume de dépense de consommation des administrations publiques vers les ménages.
Procédure de fixation des prix des médicaments remboursables
L’article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale stipule :
« La fixation de ce prix tient compte principalement de l’amélioration du service médical rendu apportée par le médicament, le cas échéant des résultats de l’évaluation médico-économique, des prix des médicaments à même visée thérapeutique, des volumes de vente prévus ou constatés ainsi que des conditions prévisibles et réelles d’utilisation du médicament. »
tableauTableau – Principales mesures en matière de politique de remboursement des médicaments
Baisse taux de remboursement | Déremboursement total | Tarif Forfaitaire de Responsabilité | Autres mesures | |
---|---|---|---|---|
2001 | de 65 % à 35 % pour 148 puis 125 médicaments | |||
2002 | accord conventionnel avec les médecins, incitation à la prescription en génériques | |||
2003 | baisse du taux de remboursement de 65 % à 35 % pour 617 médicaments | 84 médicaments «anciens» | première vague de TFR pour 71 groupes génériques | |
2004 | de 65 % à 35 % pour les médicaments homéopathiques | |||
2006 | création du taux de remboursement de 15 % pour les veinotoniques | 282 spécialités disponibles sans prescription | ||
2008 | mise en place de la franchise médicale (0,50 € par boîte) | Veinotoniques | 200 médicaments d’automédication en libre accès | |
2010 | de 35 % à 15 % pour 150 médicaments |
Sources
L’indice des prix à la consommation (IPC) vise à rendre compte de l’évolution pure des prix des produits consommés par les ménages. Tous les mois, les enquêteurs de l’Insee effectuent environ 200 000 relevés de prix dans 27 000 points de vente. L’Insee collecte aussi, de manière centralisée, différents tarifs de services fixés nationalement. Tous ces produits et services couvrent l’ensemble du champ de la consommation des ménages. L’IPC est un indice à qualité constante ce qui, pour les médicaments, conduit à considérer que les médicaments comportant un principe actif identique rendent le même service. En pratique, la méthode adoptée consiste à suivre les évolutions moyennes mensuelles des prix « des classes d’équivalents thérapeutiques ». Une classe d’équivalents thérapeutiques regroupe les médicaments ayant mêmes molécules, même dosage et même voie d’administration. Ce concept permet de rassembler dans une même classe un princeps et ses génériques mais ne se limite pas à cette agrégation. À chaque classe est affectée une pondération fixée pour l’année, qui correspond au poids de la classe dans la dépense annuelle de consommation de l’année précédente.
Un nouveau médicament ne peut être pris en compte en cours d’année que s’il peut s’insérer dans une classe d’équivalents thérapeutiques existante. Les médicaments innovants non rattachés à une classe n’intègrent l’échantillon suivi que lors d’une mise à jour du panier de biens de l’IPC. Ces mises à jour ont lieu à l’occasion du changement d’année.
Les données utilisées par l’Insee pour le calcul de l’indice des prix des médicaments sont collectées par la société IMS Health auprès de 14 000 pharmacies métropolitaines. Fin 2010, les prix de vente et les quantités vendues mensuellement d’environ 11 000 produits sont collectés dans l’ensemble des pharmacies de l’échantillon.
En 2010, parmi les médicaments remboursables : 14 % sont des princeps, 48 % des génériques et 38 % sont « autres ». La catégorie « autres » regroupe les médicaments originaux de marque dont le brevet est toujours en cours et les copies (médicaments dont la molécule n’est pas inscrite au répertoire des génériques).
Définitions
Brut / net : une valeur brute intègre la partie financée par la sécurité sociale ; une valeur nette représente uniquement la partie restant à la charge des ménages après remboursement de tout ou partie du coût par la sécurité sociale. Ce qualificatif s’applique au prix payé par les ménages ou à leurs dépenses (encadré 1).
Princeps : nom donné au médicament original de marque qui sert de référence lorsque les médicaments génériques sont autorisés à être mis sur le marché.
Générique : médicament ayant le même principe actif, le même dosage, la même forme pharmaceutique et la même biodisponibilité (vitesse et intensité d’absorption dans l’organisme) que le médicament princeps qu’il copie. Les génériques sont inscrits au répertoire des génériques.
Droit de substitution : un pharmacien a le droit de délivrer un générique à la place d’un princeps (avec l’accord du patient). Ce droit a été inscrit pour la première fois dans la loi de financement pour la sécurité sociale pour 1999.