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Insee Analyses Normandie · Juin 2025 · n° 143
Insee Analyses NormandieUn secteur stratégique : 41 000 emplois dans la filière énergie normande

Thomas Balcone, Babacar Diop, Alexis Lancel (Insee), Valérie Dhomé (Direction régionale de l'économie de l'emploi du travail et des solidarités), Valérie Rai-Punsola (Normandie Énergies)

Grâce à la présence de plusieurs raffineries et centrales nucléaires, ainsi qu’au développement d'énergies émergentes comme l'éolien en mer, la filière énergie occupe une place prépondérante dans l'économie normande. Très présente dans le Nord Cotentin et sur la côte d’Albâtre, elle rassemble 41 000 emplois au sein de 670 établissements, soit 5 % de l’emploi salarié régional. Avec plus de 14 000 salariés, les établissements spécialisés dans la production d’énergie sont les principaux employeurs de la filière. Les salariés de la filière présentent un profil moins féminin, plus âgé et plus qualifié que l’ensemble des salariés de la région. Leurs conditions d’emploi sont plus favorables, avec des rémunérations en moyenne plus élevées. Pour autant, les dix métiers les plus fréquents dans la filière énergie en Normandie restent fortement soumis à des tensions sur le marché du travail.

Insee Analyses Normandie
No 143
Paru le :Paru le17/06/2025

Un emploi sur vingt porté par la filière énergie

La Normandie figure parmi les régions clés pour la souveraineté énergétique et industrielle de la France. Elle produit plus du double de sa consommation d’électricité, contribuant à hauteur de 12 % à la production nationale. Cette performance repose sur un mix énergétique diversifié, associant sources renouvelables et énergies nucléaires (encadré 1). La filière énergie (pour comprendre) en Normandie regroupe 41 100 salariés (figure 1), soit 5 % de l’emploi salarié régional, et génère 6 % de la de la région en 2022. La filière énergie s’organise autour de deux grands ensembles d’activité : un « noyau » central et des activités de « support » ou « complémentaires ».

Le noyau regroupe les activités qui permettent de transformer des ressources brutes (ressources fossiles, renouvelables, minerais radioactifs, déchets, etc.) en énergie consommable par les usagers. Il se décline en quatre segments d’activités, qui totalisent 20 000 emplois, soit près d’un salarié de la filière sur deux. Parmi ces segments, celui de la production d’énergie (électrique et thermique) est de loin le plus important, avec 14 100 salariés. Il englobe principalement la production d’électricité et le raffinage du pétrole, ainsi que dans une moindre mesure la production de chaleur via les réseaux thermiques. Le segment « distribution, commerce de gros d’énergie », avec 4 000 salariés, constitue le deuxième pôle d’emploi du noyau, devant l’« extraction de matières premières, valorisation des déchets » (1 400 salariés) et le « stockage, transport d’énergie » (500 salariés). La Normandie se classe au 1er rang des régions de France métropolitaine pour le poids de son noyau de filière dans l’emploi salarié régional (encadré 2).

Pour assurer son bon fonctionnement, le noyau de la filière énergie s’appuie sur un ensemble d’activités complémentaires réparties en six segments. Certains sont indispensables au fonctionnement même du noyau, tandis que d’autres relèvent d’activités plus autonomes. Ces activités regroupent au total 21 200 salariés, soit un peu plus de la moitié des emplois de la filière. Trois d’entre eux concentrent l’essentiel de ces effectifs : la fabrication d’équipements (8 000 salariés), l’installation et la maintenance d’équipements (comme les panneaux photovoltaïques) (7 700 salariés) ainsi que les travaux d’ingénierie ou de recherche et développement expérimental (R&D) (4 600 salariés). Les trois autres segments (« services », « commercialisation d’équipements », « holdings, sièges sociaux ») regroupent, au total, moins de 1 000 salariés.

La filière énergie génère également de l’emploi au-delà de ses propres établissements, en faisant régulièrement appel aux compétences des entreprises du bâtiment et des travaux publics (BTP). Environ 1 700 salariés normands du BTP y contribuent directement.

Figure 1Organisation et emplois de la filière énergie en Normandie

Organisation et emplois de la filière énergie en Normandie
Groupe Segment Nombre de salariés
Noyau Extraction de matières premières, valorisation des déchets 1 400
Noyau Production d’énergie 14 100
Noyau Stockage, transport d’énergie 500
Noyau Distribution, commerce de gros d’énergie 3 900
Support Fabrication d’équipements 8 000
Support Installation maintenance sur les équipements 7 700
Support Commercialisation d’équipements 200
Support Services 600
Support Recherche et ingénierie 4 600
Support Holding, sièges sociaux 100
  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022.

Figure 1Organisation et emplois de la filière énergie en Normandie

  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022.

La filière énergie très présente dans le Nord Cotentin et sur la côte d’Albâtre

La filière énergie est particulièrement présente en Normandie dans les territoires du Nord Cotentin et de la côte d’Albâtre (figure 2). La zone d’emploi de Cherbourg-en-Cotentin se distingue particulièrement, avec un poids record de la filière dans l’emploi total local : 22 %. Cette concentration s’explique avant tout par la présence de deux sites majeurs : l’usine de recyclage des combustibles nucléaires usés du groupe Orano à la Hague et la centrale nucléaire de Flamanville. La zone d’emploi de Dieppe-Caux maritime présente également un poids élevé de la filière (14 %), portée par les deux autres centrales nucléaires présentes en Normandie (sites de Paluel et de Penly). Enfin, la filière est également bien implantée dans les zones d’emploi d’Yvetot-Vallée du Commerce (10 %) et du Havre (8 %), principalement en raison de la présence d’une raffinerie sur chacun de ces territoires.

De manière plus générale, les emplois de la filière sont fortement concentrés dans quelques territoires de la région, en lien avec l’implantation des grands sites de production. Quatre zones d’emploi regroupent à elles seules plus de 70 % des salariés de la filière : Cherbourg-en-Cotentin (26 %), Rouen (19 %), Le Havre (17 %) et Dieppe-Caux maritime (11 %).

Figure 2Effectif salarié de la filière énergie et part dans l’emploi salarié par zone d’emploi en Normandie

Effectif salarié de la filière énergie et part dans l’emploi salarié par zone d’emploi en Normandie
Code zone d’emploi Zone d’emploi Effectif salarié de la filière énergie Poids de la filière énergie dans l’emploi salarié de la zone d’emploi (en %)
2805 Cherbourg en Cotentin 10 616 22.3
2815 Rouen 7 610 3.9
2813 Le Havre 6 812 7.7
2807 Dieppe-Caux maritime 4 514 13.9
2819 Yvetot-Vallée du Commerce 2 713 10.4
2804 Caen 2 531 1.9
2817 Vernon-Gisors 1 589 6.1
2808 Évreux 1 399 3.7
2814 Lisieux 519 2.8
2809 Flers 476 2.1
2858 La Vallée de la Bresle-Vimeu - partie Normandie 343 3.1
2811 Honfleur Pont-Audemer 335 1.4
2803 Bernay 332 2.3
2816 Saint-Lô 318 1.1
2851 Alençon - partie Normandie 296 1.5
2818 Vire Normandie 239 2.1
2802 Avranches 137 0.6
2810 Granville 89 0.8
2806 Coutances 79 0.6
2801 Argentan 74 0.9
2812 L'Aigle 35 0.4
2861 Nogent-le-Rotrou - partie Normandie 8 0.2
2854 Beauvais - partie Normandie 3 0.1
2857 Dreux - partie Normandie 0 0.0
  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022.

Figure 2Effectif salarié de la filière énergie et part dans l’emploi salarié par zone d’emploi en Normandie

  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022.

Une filière énergie structurée autour de grands établissements

En 2022, la filière énergie en Normandie comprend près de 3 500 établissements, dont 671 emploient au moins un salarié. Les établissements employeurs sont moins présents dans la filière (19 % des établissements) que dans l’ensemble de l’économie régionale (26 %). La majorité (57 %) des établissements employeurs de la filière énergie interviennent dans des activités de support ou connexes au noyau de la filière. Ils se répartissent de manière relativement équilibrée entre l’installation et la maintenance des équipements, la fabrication d’équipements ainsi que les activités d’ingénierie et de recherche et développement. Concernant le noyau de la filière, plus de la moitié des établissements employeurs relèvent de la distribution et du commerce de gros d’énergie. La production d’énergie constitue quant à elle le deuxième segment en nombre d’établissements employeurs au sein de ce noyau.

Avec une moyenne de 61 salariés, les établissements employeurs de la filière énergie en Normandie sont près de sept fois plus grands que la moyenne régionale, tous secteurs confondus. Les structures de grande taille (250 salariés ou plus) représentent 4 % des établissements de la filière, un poids notable alors qu’elles sont rares dans l’économie régionale. Les établissements de taille intermédiaire (de 50 à moins de 250 salariés) sont dix fois plus présents (21 %) que dans l’ensemble de l’économie régionale (figure 3). De même, ceux employant entre 10 et 49 salariés représentent 40 % des établissements de la filière, soit une part trois fois supérieure à la moyenne régionale. À l’inverse, les petits établissements (1 à 9 salariés) sont deux fois moins nombreux dans la filière (35 %) que dans l’économie régionale dans son ensemble. Cette prédominance des structures de taille plus importante se retrouve aussi bien dans le noyau de la filière (69 emplois en moyenne par établissement) que dans ses activités complémentaires (56 emplois en moyenne).

La surreprésentation des structures de grande taille se retrouve également au niveau des détenant un ou plusieurs établissements de la filière énergie dans la région. Les y occupent une place importante, notamment dans le noyau de la filière, où elles sont majoritaires. Les (PME), hors , sont elles aussi surreprésentées, particulièrement dans les activités complémentaires, où elles détiennent près d’un établissement sur deux. À l’inverse, les microentreprises sont nettement moins présentes dans l’ensemble de la filière.

Les ou sont moins représentées dans la filière énergie normande que dans l’ensemble de l’économie régionale : elles détiennent 48 % des établissements de la filière, contre 69 % dans l’ensemble des secteurs. Cette sous-représentation s’explique principalement par leur faible présence dans le noyau de la filière, où elles représentent 29 % des établissements, un domaine largement dominé par les grandes entreprises. Elles restent toutefois bien implantées dans la production d’énergie, où elles concentrent un établissement sur deux.

Par ailleurs, la filière énergie normande se caractérise par une forte intégration des établissements au sein de  : près de huit établissements sur dix font partie d’un groupe, contre moins de trois sur dix dans l’ensemble de l’économie régionale. Cette spécificité concerne aussi bien le noyau de la filière que ses activités complémentaires. Comme dans l’ensemble de l’économie, la quasi-totalité des groupes présents dans la filière ont leur centre de décision implanté en France.

Figure 3Taille des établissements de la filière énergie en Normandie

(en %)
Taille des établissements de la filière énergie en Normandie ((en %))
Établissements Répartition des établissements selon leur taille
De 1 à moins de 10 salariés De 10 à moins de 50 salariés De 50 à moins de 250 salariés 250 salariés ou plus
Support 23 47 26 4
Noyau 50 31 15 4
Ensemble de la filière énergie 35 40 21 4
Ensemble de l’économie 83 14 3 0
  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs, implantés en Normandie ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022.

Figure 3Taille des établissements de la filière énergie en Normandie

  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs, implantés en Normandie ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022.

Un profil de salariés moins féminin, plus âgé et plus qualifié

Les femmes sont nettement moins présentes dans la filière énergie, où elles représentent 22 % des salariés, contre 42 % dans l’ensemble de l’économie régionale (figure 4). Cette sous-représentation concerne à la fois le noyau de la filière et ses activités complémentaires. Le segment de l’installation et de la maintenance des équipements est le moins féminisé, avec seulement 12 % de femmes parmi les salariés.

Les 50 ans ou plus représentent 29 % des effectifs, contre 27 % tous secteurs confondus, une proportion qui atteint 31 % dans les activités complémentaires. Dans certains segments, cette tendance est encore plus marquée : plus d’un salarié sur trois a 50 ans ou plus dans la fabrication d’équipements (36 %) et les services (37 %). À l’inverse, les jeunes de moins de 30 ans sont sous-représentés, avec une part de 18 %, contre 27 % dans l’ensemble de l’économie régionale. Cette situation est particulièrement marquée dans le noyau de la filière, où seuls 16 % des salariés ont moins de 30 ans, une proportion qui tombe à 12 % dans le stockage et le transport d’énergie. En revanche, certains segments du complément se distinguent : dans les activités d’ingénierie et de recherche et développement, plus d’un salarié sur quatre est âgé de moins de 30 ans (27 %).

L’âge plus élevé des salariés de la filière énergie s’explique en grande partie par la forte présence des professions qualifiées. Ces dernières sont en effet deux fois plus fréquentes dans la filière que dans l’ensemble de l’économie normande, tandis que les métiers peu qualifiés y sont nettement moins représentés. Deux salariés sur cinq y exercent une profession intermédiaire, contre moins d’un sur cinq dans l’économie régionale. Ces professions intermédiaires sont particulièrement présentes dans le noyau de la filière, où elles sont majoritaires. Elles sont très nombreuses dans la production d’énergie (53 % des salariés), la « distribution, commerce de gros d’énergie » (48 %), ainsi que dans le « stockage, transport d’énergie » (46 %). Les cadres et professions intellectuelles supérieures représentent, quant à eux, 21 % des salariés de la filière, soit presque le double de leur part dans l’économie régionale (11 %). Ils sont particulièrement nombreux dans les activités d’ingénierie et de R&D, où ils représentent près de 40 % des effectifs. À l’inverse, les employés sont nettement sous-représentés dans la filière énergie : ils ne constituent que 6 % des effectifs, contre 29 % dans l’ensemble de l’économie régionale. La commercialisation d’équipements constitue toutefois une exception, avec une part d’employés proche de la moyenne régionale (près de trois salariés sur dix). Quant aux ouvriers, ils sont davantage qualifiés dans la filière.

De façon générale, les conditions d’emploi dans la filière énergie sont plus favorables que dans le reste de l’économie régionale. Les salariés y bénéficient plus souvent d’un CDI (92 % contre 82 %) et travaillent majoritairement à temps complet (96 % contre 84 %). Ils sont également mieux rémunérés : le salaire horaire brut moyen s’élève à 27 € dans la filière contre 20 € dans l’ensemble de l’économie (11 € pour le salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic)). À niveau de poste égal, la différence de salaire se réduit, mais persiste. Par ailleurs, les écarts sont marqués entre le noyau de la filière, où le salaire horaire moyen atteint 31 €, et les activités complémentaires, qui affichent une moyenne de 23 €. Les segments les plus rémunérateurs sont le « stockage, transport d’énergie » (39 € de l’heure), suivis de la « production d’énergie » (33 €).

Le recours à l’intérim dans l’ensemble de la filière énergie est comparable à celui observé dans l’ensemble de l’économie régionale, avec un de 5 %. Toutefois, cette moyenne recouvre des disparités : l’intérim est plus fréquent dans les activités complémentaires, où il concerne 8 % des salariés, et atteint même 11 % dans le segment de l’« installation ou de la maintenance d’équipements ». À l’inverse, le recours à l’intérim est bien plus limité dans le noyau de la filière, avec un taux de seulement 2 %, notamment dans la « distribution, commerce de gros d’énergie » (1 %) ainsi que dans la production d’énergie (2 %).

Figure 4Caractéristiques des salariés de la filière énergie en Normandie

Caractéristiques des salariés de la filière énergie en Normandie
Caractéristique Filière énergie Ensemble de l’économie
Femmes (en %) 22 42
Âge (en %)
Moins de 30 ans 18 27
De 30 ans à moins de 50 ans 52 46
50 ans ou plus 29 27
Catégorie socioprofessionnelle (en %)
Artisans, commerçants et chefs d'entreprise 0 1
Cadres et professions intellectuelles supérieures 21 11
Professions intermédiaires 40 19
Employés 6 29
Ouvriers qualifiés 29 27
Ouvriers non qualifiés 4 13
Salaire horaire brut (en €) 27 20
  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022.

Figure 4Caractéristiques des salariés de la filière énergie en Normandie

  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022.

Dix métiers rassemblent près d’un tiers des salariés de la filière énergie

Dix métiers concentrent près d’un tiers des emplois de la filière énergie en Normandie (figure 5). Les deux professions les plus représentées sont des professions intermédiaires. Chacune regroupe plus de 2 000 salariés : les « agents de maîtrise et techniciens en production et distribution d'énergie, eau, chauffage » ainsi que les « techniciens d'installation et de maintenance des équipements industriels (électriques, électromécaniques, mécaniques, hors informatique) ». Les autres métiers les plus répandus relèvent également de professions intermédiaires, ou de cadres ou de professions intellectuelles supérieures, mais aussi d’ouvriers qualifiés comme les « pilotes d'installation lourde des industries de transformation : agroalimentaire, chimie, plasturgie, énergie » et les « monteurs câbleurs qualifiés en électricité ». La quasi-totalité de ces dix métiers se concentre majoritairement au sein des établissements du noyau de la filière.

Avec un salaire net moyen supérieur à 30 €/h, les métiers d’ingénieurs figurent parmi les plus rémunérateurs de la filière énergie. Des écarts de rémunération subsistent toutefois entre les différentes spécialités de l’ingénierie. Des disparités notables sont par ailleurs observées parmi les ouvriers qualifiés : les pilotes d'installation lourde perçoivent en moyenne 22 €/h, un niveau nettement supérieur à celui des monteurs câbleurs qualifiés en électricité, rémunérés en moyenne 15 €/h.

Un indicateur synthétique permet d’évaluer, métier par métier, les difficultés de recrutement [Chartier et al., 2023 ; pour en savoir plus (2)]. Selon cet indicateur, les dix métiers les plus représentés dans la filière énergie sont tous en très forte tension, en grande partie en raison d’une pénurie de main d’œuvre disponible dans chacune de ces professions.

Figure 5Les 10 métiers les plus répandus dans la filière énergie en Normandie

Les 10 métiers les plus répandus dans la filière énergie en Normandie
Profession Nombre de salariés Noyau (en %) Support (en %) Salaire net moyen (en €/h)
Agents de maîtrise et techniciens en production et distribution d'énergie, eau, chauffage 2 350 98 2 20
Techniciens d'installation et de maintenance des équipements industriels (électriques, électromécaniques, mécaniques, hors informatique) 2 200 63 37 20
Pilotes d'installation lourde des industries de transformation : agroalimentaire, chimie, plasturgie, énergie 1 510 92 8 22
Experts salariés de niveau technicien, techniciens divers 1 320 84 16 19
Ingénieurs et cadres de la production et de la distribution d'énergie, eau 1 230 96 4 33
Techniciens d'installation et de maintenance des équipements non industriels (hors informatique et télécommunications) 1 070 91 9 21
Techniciens de production et de contrôle-qualité des industries de transformation 930 50 50 21
Monteurs câbleurs qualifiés en électricité 840 58 42 15
Ingénieurs et cadres d'étude, recherche et développement de la distribution d'énergie, eau 690 45 55 30
Ingénieurs et cadres de fabrication des industries de transformation (agroalimentaire, chimie, métallurgie, matériaux lourds) 630 81 19 34
  • Champ : Établissements marchands, actifs et hors particuliers employeurs ; effectifs salariés au 31/12.
  • Source : Insee, Flores 2022, Base tous salariés 2022.

Encadré 1 - Un écosystème énergétique varié

La Normandie bénéficie d’un écosystème énergétique particulièrement diversifié. Elle accueille trois centrales nucléaires (sites de Flamanville, Paluel et Penly), totalisant huit réacteurs et un EPR (Evolutionary Power Reactor) à Flamanville. La région abrite également la première usine mondiale de recyclage des combustibles usés à La Hague. À cela s’ajoutent deux raffineries d’envergure européenne, une centaine de parcs éoliens terrestres, 38 360 installations solaires, 210 sites de production de biogaz ainsi qu’un parc éolien en mer (Fécamp).

D’ici 2032, la région devrait accueillir quatre parcs éoliens en mer supplémentaires. Deux sont déjà en construction : le parc du Calvados et celui de Dieppe Le Tréport. Deux autres sont en projet : le parc Manche Normandie, et le parc Centre Manche 2, actuellement en phase d’appel d’offres.

La région se positionne aussi sur les énergies émergentes. Dans le domaine de l’hydrolien, deux projets sont en cours de développement au Raz Blanchard. L’hydrogène décarboné et ses dérivés (carburants de synthèse notamment) font aussi l’objet d’initiatives structurantes.

De nouveaux projets dans le nucléaire se développent également en Normandie visant à renforcer la souveraineté énergétique nationale. Il s’agit du Grand Carénage (programme industriel de rénovation et de modernisation des centrales nucléaires existantes), du chantier EPR2 de Penly, et des programmes Pérennité et Résilience (investigations visant à se prononcer sur la durée de vie des équipements) et Aval du futur (renouvellement des usines de traitement et de recyclage des combustibles usés à l’horizon 2040-2050) d’Orano La Hague.

Encadré 2 - La Normandie, première région pour les activités du noyau de la filière énergie

Pour une région donnée, le noyau de la filière énergie est constitué d’un noyau d’activités, comprenant 21 sous-classes de la nomenclature, complété par des établissements régionaux sélectionnés à dire d’experts. Les comparaisons régionales ne peuvent ainsi porter que sur le noyau d’activités qui, par construction, est indépendant de la région considérée. Sur ce périmètre restreint, la Normandie se classe au 1er rang des régions métropolitaines, avec 2,1 % de l’emploi salarié régional concentré dans ces activités. Elle devance le Centre-Val de Loire (1,8 %) et l’Auvergne-Rhône-Alpes (1,5 %), et se situe nettement au-dessus de la moyenne nationale (1,1 %). La position en tête s’explique en grande partie par la forte implantation d’activités de production d’énergie, en particulier d’origine nucléaire, dans ces trois régions.

En Normandie, les 17 000 salariés du noyau d’activités de la filière énergie représentent 8 % de l’ensemble de ces emplois en France métropolitaine, soit deux fois le poids de la région dans l’emploi salarié national (4 %). La région se classe ainsi au 3e rang des régions métropolitaines, à égalité avec le Grand Est et l’Occitanie. L’Île-de-France, où la « distribution et le commerce de gros d’énergie » est majoritaire, arrive largement en tête (25 % des emplois du noyau d'activités au niveau national), suivie par l’Auvergne-Rhône-Alpes (17 %), où la « production d’énergie » domine.

Publication rédigée par :Thomas Balcone, Babacar Diop, Alexis Lancel (Insee), Valérie Dhomé (Direction régionale de l'économie de l'emploi du travail et des solidarités), Valérie Rai-Punsola (Normandie Énergies)

Pour comprendre

Dans cette étude, la filière énergie est définie principalement selon une approche « activités » à partir de la nomenclature d’activités française (niveau 5 de la NAF rév. 2, 2008). L’appartenance à la filière est définie selon deux niveaux :

  • Le noyau correspond à l’ensemble des activités permettant de passer de la matière brute (ressources fossiles, ressources renouvelables, minerais radioactifs, déchets, etc.) à l’énergie utilisée par les consommateurs. Il est constitué d’un noyau d’activités, comprenant 21 sous-classes de la nomenclature, et est complété par des établissements sélectionnés à dire d’experts ;
  • Le support ou le complément regroupe des établissements retenus à dire d’experts dans la mesure où ils exercent des activités prépondérantes au sein de la filière énergie et indispensables au bon fonctionnement du noyau de la filière.

Sont notamment pris en compte dans la filière énergie ainsi définie les entreprises du nucléaire, du pétrole et gaz, des énergies renouvelables (éolien terrestre /en mer, solaire, gaz renouvelables, etc.) et de récupération (EnR&R) et les acteurs de l’efficacité énergétique.

Compte tenu de la définition de la filière, fondée en partie sur une sélection d’établissements établie par des experts régionaux, les comparaisons régionales ne peuvent porter que sur les noyaux d’activités de la filière, ceux-ci étant, par construction, indépendants de la région considérée.

Définitions

La notion de richesse dégagée correspond à une ventilation entre établissements d’une même entreprise de la valeur ajoutée créée par l’entreprise. Elle permet de quantifier le poids local de l’activité économique.

L'entreprise est la plus petite combinaison d'unités légales qui constitue une unité organisationnelle de production de biens et de services jouissant d'une certaine autonomie de décision, notamment pour l'affectation de ses ressources courantes. Quatre catégories d'entreprises sont définies dans le décret d'application de la loi de modernisation de l'économie (décret n°2008-1354) pour les besoins de l'analyse statistique et économique :

  • les petites et moyennes entreprises (PME) dont les microentreprises ;
  • les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ;
  • les grandes entreprises (GE).

Une entreprise mono régionale est une entreprise dont tous les établissements sont situés dans la même région. Une entreprise quasi mono régionale est une entreprise dont au moins 80 % de ses salariés sont employés dans la région.

Un groupe de sociétés est une entité économique formée par une société contrôlante et l’ensemble des sociétés qu’elle contrôle.

Le taux de recours à l’intérim est le rapport entre le nombre de salariés employés en intérim et le nombre total de salariés, pour une profession donnée ou pour un ensemble de professions.

Pour en savoir plus

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(2) Chartier F., Ducatel V., Lainé F., Niang M., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes tensions sur le marché du travail en 2022 », Dares Résultats no 59, novembre 2023.

(3) Gosselin S., Louza T., Mura B., « Plus de 6 000 emplois générés par l’activité des centrales nucléaires normandes », Insee Analyses Normandie no 104, juillet 2022.

(4) Brunet L., Mura B. (Insee), Barthélémy D., Chedmail L. (Direccte), Pouliquen E. (Dreal), « 36 000 emplois salariés dans la filière énergie normande », Insee Analyses Normandie no 22, janvier 2017.