Insee Flash Corse · Mai 2025 · n° 98

Croissances et vieillissement : 50 ans d’observations en Corse

En un demi-siècle, la population de la Corse croît fortement. Entre 1975 et 2021, elle passe de 226 000 à 348 000 habitants, soit une hausse de 54 % (figure 1).

Supérieur à 1 % par an, l’accroissement de population place l’île parmi les régions les plus dynamiques de France métropolitaine. Cet essor résulte principalement d’un solde migratoire positif, avec des arrivées qui dépassent largement les départs. À l’inverse, le solde naturel reste neutre. Depuis 2013, il est négatif avec davantage de décès que de naissances.

Cette croissance démographique s’accompagne toutefois d’un important vieillissement de la population insulaire. Un habitant sur quatre est âgé de 65 ans ou plus en 2021, contre un sur six en 1975. Les seniors sont désormais aussi nombreux que les jeunes de moins de 25 ans. En particulier, les effectifs des personnes de plus de 80 ans triplent sur la période. À l’inverse, la population en âge de travailler (20-64 ans) progresse modérément et représente aujourd’hui 55 % de la population contre 63 % en 1975.

Deux principaux facteurs expliquent cette évolution : l’allongement de l’espérance de vie et la baisse de la natalité. D’une part, entre 1999 et 2024, l’espérance de vie à la naissance progresse de 6,1 ans pour les hommes et de 3,1 ans pour les femmes. La Corse présente une espérance de vie supérieure à la moyenne nationale, notamment chez les hommes (+1,6 an). D’autre part, la fécondité recule. Elle atteint 1,9 enfant par femme dans les années 1970 et 1980, puis descend à 1,5 enfant dans les décennies 1990 et 2000 pour s’établir à 1,2 aujourd’hui. Ce niveau reste durablement en deçà du seuil de renouvellement des générations fixé à 2,05 enfants par femme.

La croissance démographique de la région s’accompagne d’un développement rapide du parc de logements. En 1975, 105 000 logements existent en Corse. En 2021, ce nombre atteint 262 000, soit une multiplication par 2,5 (figure 2). Le nombre de résidences principales double sur la période, passant de 82 000 à 156 000 logements. Ces habitations répondent à la fois à la hausse de la population, et à un phénomène de décohabitation généralisé, amorcé dans les années 1980 à l’échelle nationale. Le nombre moyen de personnes par ménage diminue nettement, passant de 2,84 en 1982 à 2,19 en 2021.

Cette expansion du parc de logements s’explique également par l’essor des résidences secondaires. Leur présence augmente encore plus fortement, favorisée par le développement du tourisme et la désaffection de certains villages au profit des pôles urbains et de leurs périphéries. Depuis 1982, elle constitue un tiers du parc de logements, soit 100 000 unités actuellement.

Comme la population et les logements, l’emploi progresse à un rythme soutenu au cours des cinq dernières décennies. Entre 1989 et 2023, il augmente de 69 %, porté principalement par l’emploi salarié. Le tertiaire marchand double ses effectifs. Il représente aujourd’hui 44 % de l’emploi total contre 38 % en 1989. Le tertiaire non-marchand (administration, santé, éducation) et la construction se développent aussi fortement. L’industrie, bien que moins représentée, maintient son poids dans l’emploi (figure 3).

En revanche, l’agriculture se contracte nettement. Les effectifs agricoles sont divisés par deux entre 1989 et la fin des années 2000. Depuis 2011, une reprise modérée s’amorce, mais les niveaux restent inférieurs à ceux établis trente-cinq ans auparavant. Entre 1989 et 2023, ils baissent de 27 %. La fréquentation touristique se développe fortement durant ces décennies. En 1977, 2,4 millions de passagers transitent par les ports et aéroports corses, dont 42 % par voie aérienne. En 2024, ils sont 8,4 millions, avec une part de l’aérien qui atteint 53 %. Même si tous ces passagers ne relèvent pas du tourisme, les professionnels de l’hébergement confirment la croissance du secteur. Les nuitées passées dans les hôtels, campings et autres hébergements collectifs de tourisme (AHCT) évoluent de 5 millions en 1977 à 10,7 millions en 2024. La saison touristique s’allonge renforçant le poids économique de l’activité.

L’ensemble du marché du travail bénéficie de cette dynamique de l’emploi. Cependant, il subit également l’effet du vieillissement de la population avec un poids des actifs qui se réduit. Le chômage recule sur la période en phase avec les grandes tendances nationales. Jusqu’au milieu des années 2000, le taux de chômage en Corse dépasse celui de la moyenne nationale d’un écart pouvant atteindre deux points. Depuis 2008, cet écart se résorbe avant de s’inverser. Les différences entre femmes et hommes se réduisent également. En 1996, le taux de chômage des femmes dépasse de 5 points celui des hommes contre 1,2 point aujourd’hui. Comme au niveau national, le chômage des jeunes reste relativement élevé, même s’il se replie nettement depuis 2015.