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Insee Analyses Grand Est · Avril 2025 · n° 194
Insee Analyses Grand EstLes dynamiques des marchés locaux du travail dans le Grand Est : équilibre entre mobilités, emploi et chômage

Guillaume Chassard, Sklaërenn Marry (Insee)

Le Grand Est fait partie des rares régions de France métropolitaine où la population active recule entre 2008 et 2018.

La baisse du taux d’activité des jeunes et le solde négatif des migrations résidentielles expliquent en partie cette évolution. Le taux de chômage croît dans l’ensemble des zones d’emploi. La plupart d’entre elles perdent des emplois et des actifs. Les déplacements domicile-travail et les changements de résidence permettent l’ajustement des marchés du travail au sein du Grand Est, en équilibrant l’offre et la demande d’emplois entre les territoires.

Certaines zones situées à la périphérie de la région, notamment le long de l’axe rhénan, sont attractives par leur dynamisme économique ou pour des motifs résidentiels liés au travail frontalier. D’autres sont marquées, de manière structurelle, par des baisses démographiques et d’emplois conséquentes.

Insee Analyses Grand Est
No 194
Paru le :Paru le03/04/2025
Infographie_les dynamiques des marches locaux du travail dans le Grand est
Publication rédigée par :Guillaume Chassard, Sklaërenn Marry (Insee)

Une baisse du taux d’activité des jeunes et une moindre attractivité résidentielle dans le Grand Est

En 2018, plus de 2,6 millions de personnes composent la population active du Grand Est, soit une perte d’environ 9 000 actifs par rapport à l’année 2008 (‑0,3 %).

Le Grand Est, avec la Normandie et la Bourgogne-Franche Comté, fait partie des rares régions de France métropolitaine où le nombre d’actifs diminue entre 2008 et 2018 (figure 1). Dans l’hexagone, le nombre d’actifs s’accroît de 4,1 % sur la même période.

Figure 1Décomposition de la variation de la population active par région entre 2008 et 2018 selon l’approche sociodémographique

(pour 1 000 actifs)
Décomposition de la variation de la population active par région entre 2008 et 2018 selon l’approche sociodémographique ((pour 1 000 actifs)) - Lecture : Pour 1 000 actifs dans le Grand Est en 2008, on compte 3 actifs de moins en 2018 : -9 actifs liés à l’effet des migrations résidentielles, -17 liés à la baisse des taux d’activité, +23 actifs liés à l’effet démographique.
Code région Région Effet démographique Effet des taux d’activité Effet des migrations résidentielles Variation totale de la population active
27 Bourgogne-Franche-Comté 8 -24 2 -14
44 Grand Est 23 -17 -9 -3
28 Normandie 24 -22 -3 -1
24 Centre-Val de Loire 13 -20 7 0
32 Hauts-de-France 39 -2 -19 18
11 Île-de-France 67 -8 -19 40
93 Provence-Alpes-Côte d'Azur 10 0 30 40
53 Bretagne 13 -16 57 54
75 Nouvelle-Aquitaine -5 -5 66 56
52 Pays de la Loire 36 -12 49 73
84 Auvergne-Rhône-Alpes 34 -1 41 74
76 Occitanie 7 1 84 92
94 Corse -9 37 123 151
// France Métropolitaine 28 -8 21 41
  • Lecture : Pour 1 000 actifs dans le Grand Est en 2008, on compte 3 actifs de moins en 2018 : -9 actifs liés à l’effet des migrations résidentielles, -17 liés à la baisse des taux d’activité, +23 actifs liés à l’effet démographique.
  • Source : Insee, recensements de la population 2008 et 2018.

Figure 1Décomposition de la variation de la population active par région entre 2008 et 2018 selon l’approche sociodémographique

  • Lecture : Pour 1 000 actifs dans le Grand Est en 2008, on compte 3 actifs de moins en 2018 : -9 actifs liés à l’effet des migrations résidentielles, -17 liés à la baisse des taux d’activité, +23 actifs liés à l’effet démographique.
  • Source : Insee, recensements de la population 2008 et 2018.

La varie selon le jeu de trois facteurs sociodémographiques : l’effet des , l’effet des et l’effet démographique (Pour comprendre). Ainsi, l’effet des taux d’activité contribue à faire baisser la population active de la région de près de 45 000 actifs en dix ans, du fait du recul des 14-24 ans sur le marché du travail. Avec l’allongement de la durée des études, le taux d’activité de cette classe d’âges passe ainsi de 41,9 % en 2008 à 38,6 % en 2018. Le phénomène s’inverse chez les seniors (55 ans et plus), avec une augmentation du taux d’activité en raison d’un report de l’âge de départ à la retraite suite aux différentes réformes. Dans la majorité des régions de France métropolitaine, l’effet des taux d’activité est également négatif ou quasi nul.

Par ailleurs, les départs d’actifs de la région sont plus nombreux que les arrivées : l’effet des migrations résidentielles est négatif, avec une perte globale de plus de 24 000 actifs entre 2008 et 2018. Ce déficit est particulièrement marqué chez les 25-54 ans (‑58 000 actifs). À l’inverse, les régions situées dans le sud du pays ou sur la façade atlantique bénéficient d’une attractivité résidentielle, qui s’explique en grande partie par leur climat et leur proximité du littoral, contribuant fortement à la croissance de leur population active.

Dans le Grand Est, les effets négatifs des taux d’activité et des migrations résidentielles sur la variation de la population active ne sont pas compensés par l’effet démographique positif, c’est-à-dire l’évolution de la structure par âge de la population totale (+60 000 actifs). Cet effet se traduit à la fois par l’augmentation du nombre de personnes âgées de 55 ans et plus et par la moindre diminution des groupes d’âges plus jeunes.

Sous l’influence de ces trois facteurs, la pyramide des âges de la population active du Grand Est fait ainsi apparaître un phénomène de vieillissement (figure 2). Entre 2008 et 2018, le nombre d’actifs âgés de moins de 55 ans décroît (‑171 000 personnes), alors que le nombre de 55 ans et plus augmente (+162 000 actifs).

Figure 2Pyramides des âges de la population active dans le Grand Est en 2008 et 2018

Pyramides des âges de la population active dans le Grand Est en 2008 et 2018 - Lecture : En 2018, on compte 14 600 femmes actives âgées de 20 ans dans le Grand Est.
Âge révolu Nombre de femmes actives en 2018 Nombre d’hommes actifs en 2018 Nombre de femmes actives en 2008 Nombre d’hommes actifs en 2008
0 0 0 0 0
1 0 0 0 0
2 0 0 0 0
3 0 0 0 0
4 0 0 0 0
5 0 0 0 0
6 0 0 0 0
7 0 0 0 0
10 0 0 0 0
11 0 0 0 0
12 0 0 0 0
13 0 0 0 0
14 180 290 350 460
15 750 1940 750 1810
16 1660 4010 2260 5530
17 2590 5330 3730 8260
18 7350 11220 7960 12900
19 11040 15420 12330 17490
20 14600 19670 17290 22460
21 17700 21940 21070 25500
22 19940 23340 23900 27940
23 22000 25700 26630 29700
24 24190 26880 28690 31290
25 26010 28160 29790 32170
26 26910 29100 29480 33100
27 27250 29720 29400 33080
28 27960 30100 28820 32120
29 28850 30880 28270 31890
30 28990 31310 28100 31920
31 28840 31420 27610 32290
32 29030 31350 28820 32960
33 29340 31380 29660 34050
34 29810 32350 31550 35740
35 30000 32090 32600 36470
36 30350 33000 33060 37490
37 30240 32560 33130 37570
38 29980 32210 33230 37600
39 29250 31260 33430 37800
40 29050 30940 33880 37550
41 29030 31080 33790 38120
42 29740 31520 34200 37690
43 30680 32930 34870 38420
44 32040 34180 34410 38370
45 33100 34770 34640 38200
46 33260 35300 34190 37410
47 33270 36070 33630 37150
48 33390 35560 33580 36640
49 32900 35180 33350 36090
50 32940 35540 32400 35500
51 32570 35790 31350 35270
52 33050 35110 30360 34420
53 32880 35320 29960 34030
54 32520 34690 28740 33300
55 31500 34150 25750 31000
56 30510 32590 23380 26530
57 29230 30960 20880 22880
58 27740 28520 17570 18690
59 25950 26370 14460 15380
60 19690 16760 6480 7690
61 15550 13310 4470 5440
62 8470 8620 3220 3800
63 6250 6710 2560 2720
64 4460 5190 1860 2070
65 2920 3440 810 1160
66 1860 2470 660 860
67 1410 2040 600 740
68 1210 1660 510 610
69 990 1440 450 490
70 750 1110 370 430
  • Lecture : En 2018, on compte 14 600 femmes actives âgées de 20 ans dans le Grand Est.
  • Source : Insee, recensements de la population 2008 et 2018.

Figure 2Pyramides des âges de la population active dans le Grand Est en 2008 et 2018

  • Lecture : En 2018, on compte 14 600 femmes actives âgées de 20 ans dans le Grand Est.
  • Source : Insee, recensements de la population 2008 et 2018.

La majorité des zones d’emploi de la région Grand Est perdent des actifs

Si la population active diminue légèrement à l’échelle régionale, de fortes disparités existent au niveau de ses . Les deux tiers, soit 18 d’entre elles, perdent des actifs entre 2008 et 2018 (figure 3). Dans ces territoires, qui sont pour la plupart ruraux ou touchés depuis plusieurs décennies par la désindustrialisation, la baisse de la population active est plus ou moins marquée, variant de ‑0,4 % pour la zone d’emploi de Mulhouse à ‑10,5 % pour celle de Bar-le-Duc, avec un effet négatif des migrations résidentielles.

Figure 3Population active dans les zones d’emploi du Grand Est en 2018 et évolution entre 2008 et 2018

Population active dans les zones d’emploi du Grand Est en 2018 et évolution entre 2008 et 2018 - Lecture : En 2018, 358 000 actifs résident à Strasbourg, soit une hausse de 4,8 % par rapport à l’année 2008.
Code zone d’emploi Zone d’emploi Nombre d’actifs en 2018 Variation de la population active (en %)
4401 Bar-le-Duc 30 351 -10,5
4402 Châlons-en-Champagne 51 550 -1,7
4403 Charleville-Mézières 70 194 -5,5
4404 Chaumont 56 347 -7,5
4405 Colmar 102 780 1,7
4406 Épernay 41 013 -4,5
4407 Épinal 84 924 -2,9
4408 Forbach 45 735 -5,4
4409 Haguenau 128 113 1,2
4410 Metz 209 988 -0,8
4411 Mulhouse 204 633 -0,4
4412 Nancy 257 679 -1,4
4413 Reims 153 762 0,3
4414 Remiremont 38 553 -7,8
4415 Romilly-sur-Seine 37 706 1,5
4416 Saint-Avold 56 412 -1,7
4417 Saint-Dié-des-Vosges 39 245 -6,9
4418 Saint-Louis 55 219 6,7
4419 Sarrebourg 52 579 -3,7
4420 Sarreguemines 60 282 -0,7
4421 Sedan 41 980 -6,3
4422 Sélestat 51 938 2,9
4423 Strasbourg 357 962 4,8
4424 Thionville 172 124 6,1
4425 Troyes 117 691 0,0
4426 Verdun 36 098 -2,1
4427 Vitry-le-François Saint-Dizier 50 543 -8,7
0056 Cosne-Cours-sur-Loire 27 359 -8,3
1102 Coulommiers 35 907 6,8
1105 Fontainebleau-Nemours 92 952 1,1
1106 Marne-la-Vallée 245 629 7,7
1107 Meaux 104 635 10,3
1108 Melun 97 405 4,2
1110 Provins 27 356 3,0
2409 Montargis 55 236 0,4
2702 Auxerre 81 951 -5,9
2703 Avallon 21 206 -8,3
2705 Belfort 89 529 -0,6
2706 Besançon 147 441 1,3
2709 Châtillon-Montbard 26 955 -4,0
2711 Dijon 188 437 1,1
2712 Dole 36 675 0,8
2714 Montbéliard 73 402 -6,0
2715 Pontarlier 64 336 15,2
2717 Sens 51 070 3,0
2718 Vesoul 57 200 -5,3
3203 Arras 84 473 2,2
3208 Cambrai 70 868 2,2
3209 Château-Thierry 33 990 1,9
3210 Compiègne 94 712 -0,6
3212 Douai 106 535 -0,1
3214 Laon 47 954 -2,5
3217 Maubeuge 105 456 -1,0
3220 Saint-Quentin 109 859 -2,8
3221 Soissons 78 974 2,1
3222 Valenciennes 170 888 3,2
  • Lecture : En 2018, 358 000 actifs résident à Strasbourg, soit une hausse de 4,8 % par rapport à l’année 2008.
  • Source : Insee, recensements de la population 2008 et 2018.

Figure 3Population active dans les zones d’emploi du Grand Est en 2018 et évolution entre 2008 et 2018

  • Lecture : En 2018, 358 000 actifs résident à Strasbourg, soit une hausse de 4,8 % par rapport à l’année 2008.
  • Source : Insee, recensements de la population 2008 et 2018.

Toutefois, le nombre d’actifs n’augmente pas systématiquement dans les territoires les plus peuplés. Si la moitié de la population active réside dans les zones d’emploi de Strasbourg, Thionville, Reims, Nancy, Metz et Mulhouse, elle recule depuis dix ans dans les trois dernières.

Les huit zones d’emploi dans lesquelles le nombre d’actifs progresse se situent toutes en périphérie de la région. Les migrations résidentielles contribuent à cette hausse pour la plupart d’entre elles. L’augmentation est la plus importante dans les zones de Saint-Louis, Thionville (plus de 6 %) et de Strasbourg (4,8 %). Troyes est la seule zone d’emploi où la population active reste stable entre 2008 et 2018.

Les variations de la population active au sein de ces différents territoires résultent à la fois des effets sociodémographiques et, sous l’angle du marché du travail, des variations de l’emploi, du chômage et du solde des domicile-travail (Pour comprendre). On obtient ainsi cinq catégories de zones d’emploi dans le Grand Est (figure 4).

Figure 4Cinq profils de zones d’emploi

Cinq profils de zones d’emploi
Code zone d’emploi Zone d’emploi Groupe Libellé du groupe
4409 Haguenau 1 Zones attractives avec une hausse de l’emploi et des actifs
4418 Saint-Louis 1 Zones attractives avec une hausse de l’emploi et des actifs
4422 Sélestat 1 Zones attractives avec une hausse de l’emploi et des actifs
4423 Strasbourg 1 Zones attractives avec une hausse de l’emploi et des actifs
4424 Thionville 2 Zone frontalière avec une très forte attractivité résidentielle
4405 Colmar 3 Zones avec une perte d’emplois modérée
4411 Mulhouse 3 Zones avec une perte d’emplois modérée
4412 Nancy 3 Zones avec une perte d’emplois modérée
4413 Reims 3 Zones avec une perte d’emplois modérée
4415 Romilly-sur-Seine 3 Zones avec une perte d’emplois modérée
4420 Sarreguemines 3 Zones avec une perte d’emplois modérée
4425 Troyes 3 Zones avec une perte d’emplois modérée
4426 Verdun 3 Zones avec une perte d’emplois modérée
4402 Chalons-en-Champagne 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4403 Charleville-Mézières 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4404 Chaumont 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4406 Épernay 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4407 Épinal 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4408 Forbach 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4410 Metz 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4416 Saint-Avold 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4419 Sarrebourg 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4421 Sedan 4 Zones avec une perte d’emplois et d’actifs
4401 Bar-le-Duc 5 Zones avec une forte perte d’emplois et d’actifs
4414 Remiremont 5 Zones avec une forte perte d’emplois et d’actifs
4417 Saint-Die-des-Vosges 5 Zones avec une forte perte d’emplois et d’actifs
4427 Vitry-le-François Saint-Dizier 5 Zones avec une forte perte d’emplois et d’actifs
  • Source : Insee, recensements de la population 2008 et 2018.

Figure 4Cinq profils de zones d’emploi

  • Source : Insee, recensements de la population 2008 et 2018.

Des zones d’emploi attractives dans la plaine alsacienne

La première catégorie comprend les quatre seules zones de la région, toutes alsaciennes, dans lesquelles l’emploi progresse entre 2008 et 2018 (+11 000 emplois), ce qui n’empêche pas une hausse du chômage plus importante (+12 000 chômeurs). Le nombre d’actifs augmente donc encore plus vite que le nombre d’emplois en raison des migrations résidentielles et d’un effet démographique très favorable : la population en âge de travailler croît, de 3,2 % à 4,8 % en dix ans selon les zones, soit une progression supérieure à celle du niveau régional (2,3 %).

Pour chacune de ces quatre zones d’emploi, plus de la moitié des nouveaux résidents arrivent des autres zones d’emploi de la région. Pour Saint-Louis, cette attractivité résidentielle provient en partie de sa proximité géographique avec la Suisse. De nombreux actifs s’y installent pour pouvoir travailler de l’autre côté de la frontière. Par conséquent, cette zone d’emploi se caractérise par une proportion élevée de navetteurs parmi les actifs occupés résidents (61 %), avec des navettes entrantes trois fois moins nombreuses que les navettes sortantes (34 entrées pour 100 sorties).

Alors que les zones d’emploi de Haguenau et de Sélestat présentent également un solde des entrées-sorties négatif, celle de Strasbourg se distingue par un solde des navettes positif (147 entrées pour 100 sorties), en raison de son attractivité sur les actifs des zones d’emploi voisines.

Thionville, une zone très attractive pour les travailleurs frontaliers vers le Luxembourg

Dans le Grand Est, entre 2008 et 2018, la zone d’emploi de Thionville est la seule où, à la fois, l’effet démographique, l’effet des taux d’activité et les migrations résidentielles contribuent à l’augmentation de la population active.

L’effet des taux d’activité est particulièrement fort chez les 55 ans et plus (+6 900 actifs) alors que l’attractivité résidentielle concerne surtout les 25-54 ans (+11 300 actifs). Près des trois quarts des nouveaux résidents proviennent des autres territoires du Grand Est. En 2018, 40 % des actifs s’installant dans la zone de Thionville sont originaires de la zone d’emploi de Metz et 10 % de celle de Nancy.

Cette attractivité résidentielle s’explique par sa situation frontalière avec le Luxembourg, pays dans lequel le salaire moyen est plus élevé qu’en France. La part des navetteurs parmi les actifs occupés résidant dans la zone s’accroît de 8,5 points en dix ans, pour atteindre 57 % en 2018. Et sur cette même période, la différence entre les navettes entrantes et les navettes sortantes pour la zone d’emploi de Thionville se creuse pour s’établir à 22 entrées pour 100 sorties. Près des trois quarts des actifs qui travaillent en dehors de la zone ont un emploi au Luxembourg.

Si ces différentes composantes sont favorables à une hausse de la population active dans la zone d’emploi de Thionville, le nombre d’emplois diminue de 8 % (soit une perte de 7 500 emplois) et le nombre de chômeurs augmente de 18 % (soit +3 300).

En raison de cette baisse du nombre d’emplois, Thionville devient de plus en plus une zone résidentielle, ne comptant en 2018 que 55 .

Des territoires dont l’emploi diminue de manière modérée

Cette catégorie regroupe des zones d’emploi où le recul de l’emploi est modéré, variant de ‑1,9 % pour Reims à ‑5 % pour Verdun entre 2008 et 2018, contre ‑4,1 % pour l’ensemble du Grand Est.

Cette classe s’inscrit dans la moyenne régionale : une augmentation du nombre de chômeurs, un effet négatif des taux d’activité et un effet démographique positif expliquent la variation de la population active.

Les effets des migrations résidentielles sont plus disparates à l’intérieur de cette classe. Ils contribuent positivement au nombre d’actifs dans les zones d’emploi de Colmar, Romilly-sur-Seine et Troyes. En 2018, deux tiers des actifs qui se sont installés dans les zones de Troyes et Romilly-sur-Seine arrivaient d’une autre région. En particulier, 40 % des migrations d’actifs vers la zone de Romilly-sur-Seine sont originaires d’Île-de-France. Et la moitié des actifs sortant de cette zone d’emploi vont travailler en Île-de-France. Les autres zones de cette catégorie perdent plus de résidents actifs qu’elles n’en gagnent.

Des zones perdant des emplois et des actifs

Les 14 zones d’emploi restantes du Grand Est s’étendent des Ardennes au département des Vosges en passant par la Marne, la Haute-Marne ainsi qu’une partie de la Meuse et de la Moselle. Ces zones se caractérisent par une forte réduction de l’emploi et de la population active (respectivement ‑62 000 et ‑39 000). Les effets sociodémographiques sont particulièrement défavorables à la hausse du nombre d’actifs, avec notamment un effet des migrations résidentielles négatif chez les 15-24 ans.

Dans les zones de Bar-le-Duc et Vitry-le-François Saint-Dizier, la population active diminue de plus de 8 % et les migrations résidentielles contribuent pour plus de moitié à cette évolution. Cet effet est un peu moins fort dans les zones de Remiremont et de Saint-Dié-des-Vosges, bien que la perte d’actifs demeure importante (‑8 % et ‑7 %). Ces quatre territoires présentent une baisse de l’emploi supérieure à 10 %. Néanmoins, en raison du départ des actifs, le nombre de chômeurs y croît lentement avec une hausse inférieure à 5 %, hormis dans la zone de Remiremont où il augmente de 13,8 %, ce qui est toutefois au-dessous du niveau régional (+16,4 %).

En 2018, le chômage reste cependant élevé pour certaines de ces zones d’emploi, comme Forbach, Saint-Dié-des-Vosges et Charleville-Mézières où les taux de chômage sont égaux ou supérieurs à 11 %.

Publication rédigée par :Guillaume Chassard, Sklaërenn Marry (Insee)

Pour comprendre

La variation de la population active est tributaire, sous l’approche sociodémographique, des arrivées de jeunes dans les âges actifs et des départs de fin d’activité (effet démographique), des modifications de comportement vis-à-vis de l’activité selon l’âge et le sexe (effet des taux d’activité) et des migrations résidentielles qui jouent sur le volume de la main-d’œuvre.

Chacun de ces effets est quantifié en maintenant les deux autres constants sur la période.

Vu sous l’angle du marché du travail, l’évolution de la population active résulte de l’évolution de l’emploi au lieu de travail, du nombre de chômeurs et des navettes domicile-travail. On obtient ainsi les égalités suivantes :

Variation de la population active

= effet démographique + effet des taux d’activité + effet des migrations résidentielles

= variation de l’emploi (au lieu de travail) + variation du chômage – variation du solde des navettes domicile-travail.

La typologie a été réalisée sur la base de ces six variables décomposant l’évolution de la population active, pour la période 2008-2018.

Publication rédigée par :Guillaume Chassard, Sklaërenn Marry (Insee)

Sources

Les données sont issues des exploitations 2008 et 2018 du recensement de la population. Le nombre de chômeurs provient du recensement de la population. En revanche, les taux de chômage localisés s’entendent au sens des normes internationales.

Définitions

La population active regroupe la population active occupée (ayant un emploi) et les chômeurs.

Le taux d’activité est le rapport entre le nombre d’actifs (actifs occupés et chômeurs) et l’ensemble de la population correspondante. On peut par exemple calculer des taux d’activité par classe d’âges.

Les migrations résidentielles correspondent à des changements de domicile.

Une zone d’emploi est un espace à l’intérieur duquel la plupart des actifs résident et travaillent.

Les navettes sont les déplacements quotidiens entre la zone d’emploi de résidence et la zone d’emploi de travail.

Le nombre d’emplois pour 100 actifs occupés rapporte le nombre d'emplois au lieu de travail au nombre d'actifs occupés au lieu de résidence de la zone. Un taux supérieur à 100 indique une zone qui est pôle d'emploi, un taux inférieur à 100 est le signe d'une zone résidentielle.

Pour en savoir plus

Van Lu A., Delahaye M., Estragnat C., « Les marchés locaux du travail organisés selon quatre réseaux d’échanges », Insee Analyses Grand Est no 24, octobre 2016.

Frey G., Richard M., Villaume S., « Dans le Grand Est, un actif entrant sur quatre arrive de l’étranger », Insee Flash Grand Est no 95, juillet 2024.