Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes · Janvier 2025 · n° 189

Orientation post-bac : les bacheliers préfèrent la filière à la proximité Enseignement supérieur en Auvergne-Rhône-Alpes

En 2022, 79 800 personnes ont obtenu leur baccalauréat en Auvergne‑Rhône‑Alpes. Parmi elles, 66 900 ont formulé au moins un vœu dans Parcoursup (sources), hors vœux d’apprentissage. L’analyse des vœux exprimés sur Parcoursup, selon le profil des bacheliers, permet de dégager des tendances sur l’expression de leurs préférences d’orientation et sur les mobilités qu’ils sont prêts à accomplir. Les résultats présentés ici concernent 56 900 néobacheliers : 41 800 de la voie générale et 15 100 de la voie technologique. Les bacheliers des voies professionnelles (y compris agricole) utilisent moins Parcoursup, puisque plus de la moitié d’entre eux se dirige vers l’apprentissage ou une insertion directe sur le marché du travail.

En Auvergne‑Rhône‑Alpes, la demande calculée des néobacheliers généraux et technologiques vise principalement les établissements du supérieur de la région (82 %). L’Île‑de‑France et l’Occitanie sont les deux autres régions les plus demandées (4 % chacune). Symétriquement, la demande reçue par les établissements d’Auvergne‑Rhône‑Alpes provient surtout des étudiants de la région (77 %). Auvergne‑Rhône‑Alpes reçoit 13 % de l’ensemble de la demande des néobacheliers en France, deuxième région après l’Île‑de‑France (24 %), et devant les Hauts‑de‑France et l’Occitanie (9 %).

La demande calculée des néobacheliers généraux et technologiques se dirige en premier lieu vers les licences (34 %), puis vers les bachelors universitaires de technologie (BUT, 17 %) et les brevets de technicien supérieur (BTS, 15 %).

Les filières du supérieur souhaitées varient toutefois fortement selon la voie choisie au baccalauréat (figure 1). Alors que les néobacheliers de la voie technologique représentent 27 % des effectifs, ils sont à l’origine de 72 % de la demande dirigée vers des BTS, 49 % de celle vers les diplômes d’État (DE) sanitaire et social, et 44 % vers les BUT. Un objectif de la réforme des diplômes universitaires de technologie (DUT) de 2021, actant la création des BUT, est d’accueillir 50 % de bacheliers technologiques dans ces formations.

Inversement, les licences (9 %), les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE, 6 %) et surtout les parcours d’accès spécifique santé (PASS, 2 %) sont les filières qui recueillent la moindre part de la demande des néobacheliers issus de la voie technologique. Parmi ces néobacheliers, les sortants des différentes séries empruntent des chemins variés. Parmi les néobacheliers technologiques, les sciences et technologies du management et de la gestion (STMG, 50 % des effectifs), représentent 60 % de la demande calculée vers un BTS, et 7 % de la demande vers un DE sanitaire et social. Parmi ces mêmes néobacheliers, les sciences et technologies de l’industrie et du développement durable (STI2D) avec les sciences et technologies de laboratoire (STL), 27 % des effectifs de la voie technologique, représentent 53 % de la demande vers une CPGE, et 7 % de celle vers un DE sanitaire et social. Les autres séries technologiques représentent 31 % de la demande vers une licence, et 5 % de celle vers un BUT.

En Auvergne‑Rhône‑Alpes, 48 % des néobacheliers (hors voie professionnelle) sont d’origine sociale très favorisée, d’après la catégorie socioprofessionnelle de leurs parents ; 17 % sont favorisés, 24 % assez défavorisés et 11 % défavorisés. Ces différences d’origine sociale se manifestent lors du choix de la voie suivie au lycée, générale ou technologique, et par ricochet, de nouveau lors des choix d’orientation dans le supérieur.

La demande calculée confirme le lien fort entre origine sociale et orientation, avant même les admissions. Par exemple, la demande des néobacheliers très favorisés cible à 12 % les CPGE, contre 4 % pour celle des néobacheliers défavorisés. Les BTS rassemblent 10 % de la demande des très favorisés contre 24 % des défavorisés. L’influence de l’origine sociale est presque aussi forte pour les PASS que pour les CPGE.

Comme l’origine sociale, le niveau scolaire (approché par la mention au baccalauréat) est corrélé à la demande calculée. Bien que liés, les effets de l’origine sociale et du niveau scolaire ne sont toutefois pas équivalents : la demande des lycéens obtenant les meilleurs résultats est davantage surreprésentée en PASS qu’en CPGE. Les BTS sont surreprésentés dans des proportions proches dans la demande des néobacheliers d’origine sociale défavorisée (24 %) et celle des néobacheliers sans mention (27 %).

Par nature, la filière « Autres formations » est hétérogène (écoles d’architecture, diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques d’assistant juridique…). Pourtant, l’origine sociale y a une influence notoire : cette filière est l’objet de 19 % de la demande des néobacheliers très favorisés, le double de celle émanant des néobacheliers d’origine intermédiaire, et presque le triple pour ceux défavorisés. Le caractère onéreux de certains établissements qui composent cet ensemble explique cet écart.

À ces effets, viennent s’ajouter ceux du sexe du bachelier. À l’instar de l’origine sociale, le sexe a une influence précoce dans le parcours scolaire du candidat : les filles représentent 55 % des néobacheliers de la région, 57 % des effectifs de la voie générale et 42 % seulement de la demande en CPGE.

Toutes les filières sont genrées, mais certaines plus que d’autres : les filles représentent 65 % de la demande totale en licence, 70 % de celle en PASS, 86 % de celle en DE sanitaire et social.

L’offre de formation dans la zone où résident les bacheliers au moment de leur candidature dans Parcoursup est hétérogène : certaines zones comme Lyon proposent une grande diversité de formations, d’autres nettement moins. Ces lieux de résidence ont été répartis en sept classes, selon une typologie nationale (encadré 1), en fonction de l’offre de formation disponible par zone d’emploi. Pour l’ensemble des classes, les demandes des néobacheliers résidants diffèrent peu en matière de filières (figure 2).

Les filières de formation sont donc demandées de manière assez homogène dans la région, quel que soit le type de zone d’emploi de résidence, alors que l’implantation des établissements du supérieur est très concentrée. Cet écart géographique entre offre et demande va impliquer des demandes de mobilité. Ainsi, les écarts de demande calculée vers les filières sont faibles entre les types de zone de résidence. Les quelques écarts constatés peuvent en partie s’expliquer par des choix de proximité, une fois la sélection de la filière effectuée. Globalement, la demande vers les filières implantées localement est légèrement surreprésentée (sauf pour les licences qui peuvent relever d’un choix de repli). Par exemple, si un néobachelier peut obtenir une filière qu’il souhaite, il privilégiera un établissement proche de son lieu de résidence familiale. Dans l’éventualité de ne pas obtenir l’une des filières visées, il émettra un vœu vers un établissement d’une filière de recours, de préférence à proximité de son lieu de résidence. Ce choix de repli permet ainsi de réduire le coût social (familial, amical…) et économique (loyer, transport…) des études.

En Auvergne‑Rhône‑Alpes, 83 % de la demande vers le supérieur se concentre vers les zones de la classe « offre universitaire large ». Mais seulement la moitié des néobacheliers des voies générale et technologique y résident. Pour maximiser leur chance d’obtenir la filière qu’ils préfèrent, les néobacheliers formulent des choix dans plusieurs établissements, parfois de plusieurs zones, quel que soit leur lieu de résidence. L’offre de formation étant très disparate d’une zone d’emploi à l’autre, cela crée de fortes disparités dans leurs demandes de mobilité. Les néobacheliers habitant une zone à offre large vont pouvoir demander plusieurs établissements correspondant à leurs souhaits au sein de leur zone. Certains visent aussi des établissements mieux côtés en dehors de leur zone, comme certaines CPGE.

La demande est ainsi dirigée, à hauteur de 64 %, vers une zone d’emploi différente de celle de résidence à l’obtention du baccalauréat. La voie joue un rôle fort dans les demandes de mobilité : les BTS, bien répartis sur l’ensemble du territoire, impliquent moins de demande de mobilité, ce qui joue à la baisse sur le taux de mobilité des néobacheliers de la voie technologique. Ces derniers demandent moins de mobilité (58 %) que ceux de la voie générale (65 %), dont les filières de prédilection sont absentes de nombreuses zones.

Le taux de demande de mobilité est faible dans les zones d’emploi dotées des plus larges offres de formation de la région : 26 % à Lyon, deuxième taux national le plus faible après Paris, 38 % à Grenoble et Clermont‑Ferrand, 49 % à Saint‑Étienne. Dans les zones d’emploi à offre universitaire restreinte ou spécifique, ce taux oscille entre 72 % et 88 % ; dans celles à très peu d’établissements (sauf Vichy), le taux de demande de mobilité dépasse 95 %. Les néobacheliers habitant une zone où la filière souhaitée est manquante sont évidemment contraints de demander un établissement ailleurs. Au final, plus de la moitié des zones d’emploi de la région (quatre sur dix en France métropolitaine) a un taux de demande de mobilité supérieur à 95 % (figure 3).

Par rapport aux autres régions, l’organisation géographique d’Auvergne‑Rhône‑Alpes favorise les demandes de mobilité ; elle possède de grands centres universitaires accessibles en moins d’une heure de voiture pour la plupart des bacheliers. Toutes les zones d’emploi, y compris les plus excentrées, sont majoritairement tournées vers l’intérieur de la région. Cette inclination régionale se justifie en partie par la prise en compte, dans Parcoursup, de critères géographiques pour certaines formations. La zone d’emploi d’Aurillac est la plus tournée vers l’extérieur, avec 22 % des demandes vers l’Occitanie (10 % vers Toulouse) et 11 % vers la Nouvelle Aquitaine, mais aussi 60 % en Auvergne‑Rhône‑Alpes (39 % vers Clermont‑Ferrand).

L’offre de formation supérieure de la zone d’emploi de résidence des néobacheliers influence très fortement leur probabilité de demander ou non une mobilité. Une modélisation, visant à estimer l’effet de plusieurs paramètres (lieu de résidence, origine sociale, mention, filière demandée, taux de pauvreté de la zone d’emploi, série de baccalauréat) sur la demande de mobilité, a été menée. Elle permet de déterminer dans quelle mesure chacun de ces paramètres, indépendamment des autres, agit sur le fait de demander un établissement hors de sa zone d’emploi de résidence, plutôt que de ne pas en demander ; mais aussi à quel point cet effet est significatif statistiquement [données complémentaires ; pour en savoir plus (1)].

Ainsi, les néobacheliers vivant dans une zone d’emploi avec « très peu d’établissements (surtout BTS) » sont nettement plus enclins à demander des établissements hors de leur zone d’emploi, que de ne pas en demander (97 fois plus pour les néobacheliers de la voie générale, 18 fois plus en voie technologique), par rapport à ceux résidant dans une zone « offre universitaire large ». Le fait de résider dans une zone d’emploi avec une « offre peu diversifiée (BTS majoritaires) » a également un fort impact sur la mobilité, toutes choses égales par ailleurs (65 fois plus pour la voie générale, 15 fois plus pour la voie technologique).

D’autres effets moins forts agissent sur la demande de mobilité, comme le choix de filière. Toutes choses égales par ailleurs, par rapport aux licences, les « autres formations » triplent les chances de demander une mobilité, que de ne pas en demander, pour les néobacheliers de voie générale, et les doublent pour leurs homologues de voie technologique. La sélectivité ou la rareté de certains établissements de cette catégorie expliquent cette différence. De même, les CPGE augmentent aussi la probabilité de demander un établissement distant (+77 % pour la voie générale et +69 % pour la voie technologique). C’est également le cas pour les DE sanitaires ou sociaux (+40 % en voie générale), mais davantage en raison de leur absence de nombreuses zones d’emploi, forçant ainsi à la mobilité.

La probabilité de demander une mobilité diminue avec le caractère défavorisé de l’origine sociale : -38 % pour les néobacheliers issus d’un milieu défavorisé par rapport à ceux très favorisés en voie générale, -33 % en voie technologique.

Au niveau national, plus une zone d’emploi a un taux de pauvreté élevé, plus la demande de mobilité est forte. Au niveau régional, cet effet est plus difficile à mettre en évidence : le taux de pauvreté a une influence qui semble masquée par une dynamique plus forte, celle des différences d’offres.