Insee Flash Mayotte · Novembre 2024 · n° 184

Produit intérieur brut : +8,4 % à Mayotte en 2022 dans un contexte de forte hausse des prix Produit intérieur brut 2022 à Mayotte (résultats provisoires)

L’année 2022 est marquée par un contexte inflationniste inédit, conséquence du déclenchement de la guerre en Ukraine fin février, et plus largement d’une évolution des circuits mondiaux de circulation des biens et des services. L’inflation annuelle s’établit à 5 % en moyenne à Mayotte (5,2 % au niveau national).

Cependant, l’activité économique continue de progresser à Mayotte : le produit intérieur brut (PIB) augmente de 8,4 % en euros courants pour s’établir à 3,1 milliards d’euros (figure 1). Cette croissance est toutefois nettement moindre qu’en 2021 où le PIB avait crû fortement de 11,5 % dans un contexte d’inflation plus contenue (+2 %). Ce rebond faisait suite au net ralentissement de 2020 — le PIB n’avait augmenté que de 4,1 % cette année-là —, en lien avec la crise sanitaire de la Covid-19.

La croissance de l’économie mahoraise en 2022 reste plus soutenue qu’au niveau national (+5,5 % en euros courants) et que dans les autres départements et régions d’Outre-mer (Drom) : de +2,5 % en Guyane à +7,7 % en Guadeloupe.

Avec une population qui augmente toujours fortement à Mayotte, le PIB par habitant croît quant à lui relativement modérément (+4,7 % par rapport à 2021) au regard du niveau national (+5,1 %). Estimé à 10 300 euros en 2022, le PIB par habitant de Mayotte ne représente que 26 % du PIB par habitant en France.

Que ce soit par la valeur ajoutée produite ou leurs dépenses de consommation, les administrations restent les principaux moteurs de la croissance du PIB mahorais.

Leur valeur ajoutée progresse de 10 % avec l’augmentation de la masse salariale des agents du secteur public grâce en partie à la hausse du point d’indice de la fonction publique (figure 2). Elle atteint 1,6 milliard d’euros et représente la moitié du PIB de Mayotte (17 % en France).

Leur dépense de consommation finale s’élève à 2 milliards d’euros en 2022. Elle constitue 63 % du PIB à Mayotte contre 25 % en France. Elle contribue pour 4,9 points à l’augmentation du PIB.

Les administrations publiques investissent aussi davantage en 2022. La construction et la réhabilitation d’établissements d’enseignement se poursuivent. L’année 2022 est aussi celle du lancement d’un grand projet de restructuration et de modernisation du centre hospitalier. La formation brute de capital fixe augmente ainsi à Mayotte de 15 % en 2022 et contribue à une hausse du PIB de 3,5 points.

La consommation finale des ménages augmente de 7 % en 2022, pour atteindre 1,5 milliard d’euros. Cette hausse contribue pour 3,6 points à la croissance du PIB.

La progression de la consommation des ménages est liée à la hausse du revenu disponible de l’ensemble des ménages (+9 %). La rémunération des salariés augmente en effet de 10 %. Outre la hausse du point d’indice dans le public, des revalorisations successives et mécaniques du Smic dans le privé ont été actées dans le sillage de la forte inflation en France. Cette dernière a aussi entraîné des mesures exceptionnelles concernant les prestations sociales. qui croissent ainsi de 9 % [Abdouni et al., 2023 ; pour en savoir plus (2)]. Dans le même temps, les ménages n’épargnent pas d’avantage qu’en 2021 : les actifs financiers détenus (comme les dépôts à vue ou l’épargne) progressent seulement de 2 % en 2022, contre +29 % en 2020, marquée par la Covid-19 [Iedom, 2023 ; pour en savoir plus (4)].

Mais cette hausse du revenu disponible brut global ne peut pas rendre compte des fortes inégalités de revenu entre ménages qui subsistent à Mayotte [Merceron, 2020 ; pour en savoir plus (8)]. En 2022, le pouvoir d’achat individuel des habitants est stable tout comme sur l’ensemble de la France. En effet, en plus de la forte croissance démographique, l’inflation se fait davantage ressentir.

La production des entreprises mahoraises progresse fortement en valeur en 2022 : +19 % après +20 % en 2021. Mais la valeur ajoutée des entreprises, différence entre la production des biens et services et les consommations intermédiaires nécessaires à les produire, progresse seulement de 11 %. Elle atteint le milliard d’euros en 2022, et contribue à une hausse du PIB de 3,4 points.

Les coûts de production augmentent en effet considérablement : les consommations intermédiaires des entreprises croissent de 26 % en 2022 (contre +15 % en 2021). Ces dernières sont confrontées notamment à un net renchérissement des prix de l’énergie (+19 % en moyenne contre +13 % en 2021) et des prix des biens importés.

En outre, après le record de 2021, le nombre de créations d’entreprises baisse légèrement à Mayotte en 2022 (-2 %) sous l’effet du recul des créations d’entreprises individuelles classiques. En revanche, les créations d’entreprises individuelles sous le régime de micro-entrepreneur mis en place en 2020 continuent de progresser, comme celles des sociétés.

Alors que les impôts sur produits stagnent, les subventions d’exploitation sont en forte hausse (+27 %). Elles ont notamment permis de compenser les surcoûts de production d’énergie, électrique en particulier. Ainsi, les impôts nets de subventions sur produits reculent de 59 % et contribuent négativement à l’évolution du PIB (-1,1 point).

En 2022, Mayotte importe pour plus d’1 milliard d’euros de biens et services. Ces importations progressent fortement par rapport à 2021 : +17 % en valeur. Mais cette hausse traduit aussi le net renchérissement de certains produits importés. Par exemple, 156 millions d’euros de gazole sont importés en 2022, soit 18 % de plus qu’en 2021. Pourtant, la quantité importée est quasi stable. De même, les importations de viande augmentent de 35 % en valeur mais de 13 % en volume.

Avec 8 millions d’euros d’exportations (+15 % en valeur), la balance commerciale reste très déficitaire, comme dans les autres Drom. Les exportations couvrent en effet seulement 0,7 % des importations à Mayotte.

Considérées comme des exportations, les dépenses des touristes à Mayotte sont toujours nettement supérieures à celles des résidents hors du territoire, appréciées elles comme des importations. Au final, le solde des échanges avec l’extérieur contribue négativement à la croissance du PIB (-3,5 points).

Les données de cette étude reposent essentiellement sur les comptes régionaux annuels en base 2020 : il s’agit de comptes définitifs annuels jusqu’en 2019 puis, pour 2020, 2021 et 2022, d’estimations provisoires obtenues à partir des données disponibles. Les estimations pourront faire l’objet d’une révision lorsque la totalité des données de chacune de ces années seront connues.

Des données en base 2020 :

En septembre 2024, les comptes régionaux comme nationaux changent de « base » : ils passent en base 2020. Le changement de base permet de recaler l’intégralité des séries des comptes nationaux et régionaux sur de meilleures sources et de modifier certaines méthodes afin de mieux décrire le fonctionnement de l’économie.

Pour Mayotte, les indicateurs sont issus des comptes régionaux annuels en base 2020 : il s’agit de comptes définitifs annuels jusqu’en 2019, puis d’estimations provisoires du PIB pour les années 2020 à 2022. Les comptes 2019 en nouvelle base seront mis en ligne prochainement.