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Insee Flash Grand Est · Mars 2024 · n° 88
Insee Flash Grand EstUne ségrégation résidentielle aussi importante en 2019 qu’en 2004 dans l’agglomération de Metz, malgré quelques évolutions

Julia Hédoux, Vincent Monchâtre, Virginie Pic (Insee)

Le niveau de disparité dans le pôle de l’aire d’attraction de Metz en 2019 est similaire à celui de 2004 mais la distribution des groupes sociaux évolue différemment selon les territoires. La répartition est la plus inégale pour les groupes sociaux extrêmes, c’est-à-dire les populations les plus aisées et les plus modestes.

Les quartiers prioritaires contribuent moins qu’il y a quinze ans au phénomène de ségrégation. L’agglomération de Metz se ségrègue parce que les populations en dehors de ces quartiers sont de moins en moins homogènes au sein de leur territoire.

Insee Flash Grand Est
No 88
Paru le :Paru le14/03/2024

Cette étude fait partie d'une série de publications sur la ségrégation résidentielle dans le Grand Est.

L’agglomération de Metz est autant ségréguée en 2019 qu’en 2004

Les différents d’un territoire ne sont pas présents partout dans les mêmes proportions. Cette répartition spatiale inégale est appelée , notion qui s’oppose à celle de mixité sociale. Dans une , certains quartiers présentent une surreprésentation ou une sous-représentation d’un groupe social.

Le pôle de l’ de Metz est composé de six communes et 166 000 habitants. Le niveau de ségrégation, mesurée à partir du , dans l’agglomération de Metz est similaire en 2004 et en 2019. Cependant des variations ont lieu au cours de la période. De 2004 à 2008, elle baisse fortement comme dans la plupart des agglomérations du Grand Est. Puis elle s’accroît pour devenir, en 2015 et durant trois ans, plus prononcée qu’en 2004. Depuis 2018, la ségrégation est de même ampleur qu’en début de période.

Au niveau national, Metz est la 22e agglomération la plus ségréguée (sur 53), proche de Reims et Nancy, respectivement classées 23e et 24e.

La ségrégation de Metz est liée à la répartition hétérogène des plus aisés et des plus modestes

L’indice de ségrégation de l’agglomération est décomposable en indices de ségrégation pour chaque groupe social. Cette décomposition permet de quantifier la contribution d’un groupe donné à la ségrégation totale.

Les groupes sociaux « modestes » et « aisés » ont les composantes de ségrégation les plus élevées (figure 1). Il existe donc des sous-territoires où ces groupes sociaux sont fortement sur- ou sous-représentés. Ainsi, quelle que soit l’année, les individus aux revenus extrêmes (les 20 % les plus riches et les 20 % les plus pauvres) portent la ségrégation de l’agglomération de Metz.

La contribution des « modestes », supérieure en 2004 à celle des « aisés », diminue au cours de la période : en 2019, les deux contributions sont identiques.

Parallèlement à la baisse de l’indice de ségrégation des « modestes » et des « moyens », la contribution des trois autres groupes augmente légèrement (« moyens-modestes ») ou très légèrement.

Figure 1Évolution de l’indice de ségrégation de chaque groupe social de 2004 à 2019 dans l’agglomération de Metz

Évolution de l’indice de ségrégation de chaque groupe social de 2004 à 2019 dans l’agglomération de Metz
Année Modestes Moyens-modestes Moyens Moyens-aisés Aisés
2004 0,206 0,046 0,036 0,065 0,159
2005 0,201 0,047 0,034 0,064 0,157
2006 0,190 0,048 0,036 0,062 0,158
2007 0,177 0,046 0,035 0,061 0,152
2008 0,179 0,043 0,032 0,059 0,151
2009 0,184 0,044 0,032 0,061 0,158
2010 0,181 0,047 0,033 0,060 0,157
2011 0,183 0,048 0,034 0,060 0,156
2012 0,186 0,048 0,037 0,064 0,157
2013 0,183 0,048 0,035 0,064 0,158
2014 0,187 0,049 0,035 0,063 0,158
2015 0,192 0,053 0,036 0,068 0,165
2016 0,192 0,053 0,034 0,067 0,165
2017 0,188 0,057 0,033 0,069 0,166
2018 0,183 0,056 0,032 0,067 0,166
2019 0,172 0,057 0,030 0,070 0,171
  • Note : L’indice de ségrégation du territoire peut se décomposer en indices de ségrégation pour chaque groupe social. Ces composantes binaires permettent de quantifier l’apport de chaque groupe à la ségrégation totale mais ne sont pas sommables.
  • Source : Insee, RFL 2004-2011 et Filosofi 2012-2019.

Figure 1Évolution de l’indice de ségrégation de chaque groupe social de 2004 à 2019 dans l’agglomération de Metz

  • Note : L’indice de ségrégation du territoire peut se décomposer en indices de ségrégation pour chaque groupe social. Ces composantes binaires permettent de quantifier l’apport de chaque groupe à la ségrégation totale mais ne sont pas sommables.
  • Source : Insee, RFL 2004-2011 et Filosofi 2012-2019.

Quelques quartiers contribuent à la ségrégation du territoire

Au sein de l’agglomération de Metz (figure 2), les quartiers Borny, Impérial et Plantières-Queuleu de Metz, ainsi que le quartier Saint-Eloy - Boileau-Pré Génie à cheval sur les communes de Metz et Woippy contribuent fortement à la ségrégation du territoire.

Figure 2Contribution à la ségrégation totale de chaque carreau de 200 m dans l’agglomération de Metz

  • Note : Les données de cette carte ne sont pas diffusables.
  • Source : Insee, Filosofi 2019.

La ségrégation dans les diminue entre 2004 et 2019, à l’inverse des autres quartiers où la ségrégation augmente. Entre 2004 et 2008, la baisse de la ségrégation totale est principalement due à la déségrégation des QPV, alors que la hausse qui s’ensuit est portée par l’accroissement de la ségrégation des autres quartiers. La ségrégation due à la différence de profil entre les deux types de territoires suit les variations de la ségrégation totale entre 2004 et 2019.

En 2019, 18 % de la population étudiée vit dans les QPV. Entre 2004 et 2019, la part du groupe social des « modestes » y reste stable et représente 48 % des habitants des quartiers prioritaires (figure 3). La part cumulée des « moyens-modestes » et des « moyens » y augmente de 2 points en quinze ans pour atteindre 43 % de la population, tandis que seuls 9 % des habitants appartiennent aux groupes des « aisés » ou « moyens-aisés », en baisse d’un cinquième.

La situation financière des groupes sociaux les plus défavorisés s’est dégradée entre 2004 et 2019. Le revenu médian du groupe des « modestes » a diminué d’un huitième (en euros courants). Alors qu’en 2004, il est inférieur de 71 % au revenu médian de l’agglomération, en 2019, cette différence atteint 80 %.

Figure 3Répartition des groupes sociaux en 2004 et 2019 dans les quartiers de la politique de la ville de l’agglomération de Metz

(en %)
Répartition des groupes sociaux en 2004 et 2019 dans les quartiers de la politique de la ville de l’agglomération de Metz ((en %)) - Lecture : En 2004, 47,9 % des ménages des QPV appartenaient au groupe social des « modestes » alors qu’ils sont 47,7 % en 2019.
Groupe social Modestes Moyens-modestes Moyens Moyens-aisés Aisés
2004 47,9 27,1 13,7 8,2 3,2
2019 47,7 29,2 14,1 6,8 2,3
  • Lecture : En 2004, 47,9 % des ménages des QPV appartenaient au groupe social des « modestes » alors qu’ils sont 47,7 % en 2019.
  • Source : Insee, RFL 2004 et Filosofi 2019.

Figure 3Répartition des groupes sociaux en 2004 et 2019 dans les quartiers de la politique de la ville de l’agglomération de Metz

  • Lecture : En 2004, 47,9 % des ménages des QPV appartenaient au groupe social des « modestes » alors qu’ils sont 47,7 % en 2019.
  • Source : Insee, RFL 2004 et Filosofi 2019.
Publication rédigée par :Julia Hédoux, Vincent Monchâtre, Virginie Pic (Insee)

Pour comprendre

Les données mobilisées dans cette étude sont issues du dispositif revenus fiscaux localisés des ménages (RFL), et du dispositif sur les revenus localisés sociaux et fiscaux (Filosofi) entre 2004 et 2019.

La ségrégation est mesurée chaque année pour les pôles des 53 plus grandes aires d’attraction des villes de France, parmi lesquels six se trouvent dans le Grand Est : Metz, Mulhouse, Nancy, Reims, Strasbourg et Troyes.

Le territoire d’étude correspond au pôle de l’aire d’attraction de Metz, découpé en carreaux de 200 m de côté. Les carreaux qui comptent moins de vingt ménages sont écartés pour des raisons de diffusibilité.

L’indice de ségrégation de Theil quantifie l’écart entre la mixité d’un carreau et celle observée au sein de la population du territoire dans sa globalité (agglomération ou ensemble des QPV). Ainsi, la valeur de l’indice est d’autant plus forte que la distribution des groupes sociaux de chaque carreau s’écarte de celle de l’ensemble du territoire.

Définitions

Les groupes sociaux sont définis en fonction des quintiles de revenus déclarés par unité de consommation de l’ensemble des habitants du pôle de l’aire d’attraction de Metz. Ainsi, on obtient cinq groupes d’individus de taille semblable (20 % de la population du pôle de l’aire d’attraction).

La ségrégation correspond à l’état de séparation des personnes appartenant à des groupes sociaux différents, mesurés ici par le revenu.

Figure 4Illustration de la notion de ségrégation

Illustration de la notion de ségrégation
Sous-territoire Population Mixité totale Ségrégation intermédiaire Ségrégation totale
Sous-territoire 1 Population Rond 2 3 4
Population Carré 2 1 0
Sous-territoire 2 Population Rond 2 1 0
Population Carré 2 3 4
  • Source : Insee.

Figure 4Illustration de la notion de ségrégation

  • Source : Insee.

Dans cette étude, l’agglomération considérée correspond aux communes du pôle principal de l’aire d’attraction de Metz. L’aire d’attraction d’une ville est l’ensemble de communes, d’un seul tenant et sans enclave, constitué d’un pôle de population et d’emploi, et d’une couronne qui regroupe les communes dont au moins 15 % des actifs travaillent dans le pôle. L’agglomération de Metz est donc composée des communes de Le Ban-Saint-Martin, Longeville-lès-Metz, Metz, Montigny-lès-Metz, Saint-Julien-lès-Metz et Woippy.

Dans cette étude, le revenu est égal au revenu déclaré du ménage divisé par le nombre d'unités de consommation (UC) : 1 UC pour le premier adulte du ménage, 0,5 UC pour les autres personnes de 14 ans ou plus, 0,3 UC pour les enfants de moins de 14 ans. Le revenu est donc le même pour tous les individus d'un même ménage.

Les quartiers prioritaires ou quartiers de la politique de la ville (QPV) sont des territoires d’intervention du ministère chargé de la ville, définis par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014. Ils ont été identifiés selon un critère unique, celui du revenu par habitant. Les périmètres des QPV sont fixés par le décret n° 2014-1750 du 30 décembre 2014.

Le revenu déclaré du ménage (au sens fiscal) est constitué des ressources mentionnées sur la déclaration des revenus n° 2042. Il comprend donc les revenus d’activité salariée ou non salariée, les indemnités de chômage, de maladie, les pensions d’invalidité ou de retraite ainsi qu’une partie des revenus du patrimoine.

Pour en savoir plus