Insee Analyses Grand Est · Juin 2023 · n° 160

Hébergements touristiques proposés par des particuliers via des plateformes : un essor freiné par la pandémie de Covid-19

Dans le Grand Est, la fréquentation des hébergements touristiques réservés chez des particuliers via les quatre plateformes Airbnb, Booking, Expedia Group et Tripadvisor représente près de cinq millions de nuitées en 2021. À titre de comparaison, bien que les données soient collectées de manière différente, les hôtels et les campings de la région totalisent 11,2 millions de nuitées.

Le Grand Est arrive en 8^e position des régions pour le nombre de nuitées réservées via ces plateformes comme pour celles réservées dans les hébergements proposés par des professionnels (notamment les hôtels et les campings). Elle se classe au 11^e rang pour le nombre de nuitées par habitant, devant l’Île-de-France et les Hauts-de-France. Si la taille des groupes de touristes optant pour des hébergements chez des particuliers est similaire à la moyenne française (2,8 personnes), la durée des séjours est en moyenne un peu plus courte (3,2 jours, contre 3,9 jours).

L’utilisation de ces plateformes Internet est en plein essor : entre 2018 et 2019, le nombre de nuitées ainsi réalisées chez des particuliers a augmenté de 25 % dans le Grand Est (figure 1) alors que la fréquentation des hôtels et campings de la région est restée quasiment stable (+1 %).

La crise sanitaire n’a toutefois pas épargné ce mode d’hébergement. Entre 2019 et 2020, la fréquentation de ces logements est en repli de 34 % au niveau régional et de 25 % au niveau national. Le Grand Est est la 3^e région la plus touchée après l’Île-de-France et la Corse.

En 2021, le nombre de nuitées réalisées dans le Grand Est retrouve son niveau de 2019 (+1 %). Il progresse de 10 % dans l’ensemble de la Province. En revanche, l’Île-de-France, qui enregistrait près de 15 millions de nuitées en 2019, en compte moitié moins en 2021.

Au cours de l’année 2021, le nombre de nuitées enregistrées chaque mois chez des particuliers de la région est supérieur à celui observé au même mois en 2018 et en 2019, à l’exception des mois d’avril, mai et juin en raison des restrictions sanitaires (confinement du 3 avril au 3 mai, couvre-feu du 19 mai au 30 juin, fermeture des frontières) (figure 2). En dehors de ces périodes de restriction, le nombre de nuitées a tendance à augmenter d’année en année. En 2022, il est à son plus haut niveau comparé aux mêmes mois les années précédentes.

En 2018 et en 2019, dans le Grand Est, la moitié des nuitées réservées via ce mode sont réalisées par la clientèle non résidente. En 2020 et en 2021, la crise sanitaire entraîne une baisse de la fréquentation des non-résidents. À l’inverse, en 2021, les nuitées résidentes sont en nette augmentation, notamment par rapport au niveau d’avant-crise en 2019. La part de nuitées non résidentes chute ainsi à 35 % en 2020 puis à 30 % en 2021. Ce taux reste toutefois le plus fort des régions après l’Île-de-France (46 % en 2021), nettement supérieur à celui observé dans l’ensemble de la province (18 %).

Le Grand Est, qui partage ses frontières avec quatre pays (Allemagne, Luxembourg, Italie, Suisse), attire principalement une clientèle étrangère en provenance du continent européen : cette dernière représente 91 % des nuitées non résidentes en 2021 (soit huit points de plus qu’en 2019). La clientèle américaine et la clientèle asiatique représentent ensuite respectivement 6 % et 2 % des nuitées. Dans l’ensemble de la province, ces différentes clientèles en réalisent respectivement 88 %, 9 % et 2 % en 2021.

En 2021, 44 % des nuitées réalisées dans le Grand Est le sont dans les départements alsaciens, 36 % dans ceux de l’ancienne région Lorraine, et 21 % dans ceux de Champagne-Ardenne. Le Haut-Rhin, les Vosges et le Bas-Rhin sont dans l’ordre décroissant les trois départements les plus prisés : plus de trois millions de nuitées y ont été passées, soit les deux tiers des nuitées de la région. La Meuse et la Haute-Marne sont les moins fréquentés avec un peu moins de 90 000 nuitées chacun (figure 3).

En 2019, les Vosges concentraient 18 % des nuitées effectuées dans le Grand Est via les plateformes pour moins de 10 % des nuitées passées dans les hôtels et campings. Cet écart peut s’expliquer par la saisonnalité du tourisme dans ce département et la présence de nombreuses résidences secondaires : l’économie collaborative y semble bien adaptée à la demande. La situation est similaire dans le Haut-Rhin, tandis qu’elle est inverse en Moselle, avec un poids du département plus important parmi les nuitées dans les hôtels et campings de la région que parmi les nuitées proposées par des particuliers via les plateformes.

Les nuitées réalisées chez les particuliers suivent la même saisonnalité que celle des hébergements touristiques proposés par des professionnels tels que les hôtels et les campings. Les mois de juillet-août sont globalement les plus prisés, ainsi que le mois de décembre en Alsace. Ce mois concentre près de 20 % des nuitées annuelles alsaciennes grâce à l’attractivité des marchés de Noël. Les sports d’hiver engendrent un afflux de touristes en hiver dans le massif des Vosges, notamment au mois de février. L’œnotourisme attire également une clientèle en automne en Champagne-Ardenne et en Alsace (figure 4).

L’évolution du nombre de nuitées effectuées via les principales plateformes Internet ces dernières années dépend en partie de la maturité du marché : dans les territoires où cette offre d’hébergement se développe encore, l’augmentation est plus forte que dans ceux où elle est déjà bien implantée. La proportion de clients non résidents joue aussi, en 2021 leur fréquentation n’est pas encore revenue à son niveau d’avant-crise.

Ainsi, entre 2019 et 2021, les deux départements alsaciens sont les seuls où le nombre de nuitées diminue avec -23 % dans le Bas-Rhin et -14 % dans le Haut-Rhin. L’offre d’hébergement chez des particuliers y était sans doute déjà bien développée en 2019 et la clientèle était majoritairement non résidente. La conjugaison de ces facteurs explique probablement la forte baisse de fréquentation de ces hébergements en Alsace après la crise sanitaire, notamment dans les cities de Strasbourg et de Colmar (encadré 1).

À l’inverse, le nombre de nuitées chez des particuliers a fortement augmenté dans les Ardennes, la Haute-Marne et l’Aube. Il a également progressé dans les départements lorrains. Dans tous ces départements, hormis les Ardennes, la clientèle est majoritairement résidente et l’offre d’hébergement via les plateformes a sans doute aussi continué à s’y développer.