Insee Analyses Normandie · Avril 2023 · n° 112

Dans les 50 prochaines années, la Normandie pourrait perdre 222 000 jeunes de 3 à 18 ans, dont déjà 93 000 d’ici 2030

La population normande pourrait passer de 3,3 millions d’habitants en 2018 à 2,9 millions en 2070 (pour en savoir plus), une évolution qui place la Normandie en avant-dernière position parmi les treize régions de France métropolitaine en devançant seulement la Bourgogne-Franche-Comté. Cette trajectoire, essentiellement due à un solde naturel négatif, se traduirait par une baisse importante du nombre de jeunes (-222 000). De nombreux enjeux découlent de ces évolutions démographiques, qu’il s’agisse de la gestion des établissements et des personnels qui les entretiennent, des équipes pédagogiques intervenant auprès des élèves ou encore de l’impact sur les transports scolaires ou sur les associations à destination de ces jeunes.

En 2018, les jeunes de 3 à 18 ans représentaient 661 000 habitants normands. Si les tendances démographiques récentes se poursuivaient (pour comprendre), ils ne seraient plus que 439 000 en 2070, soit une baisse de 34 % en un peu plus de cinquante ans (figure 1). À cet horizon, la diminution du nombre de jeunes pourrait être nettement plus marquée en Normandie que pour la France métropolitaine dans son ensemble où elle serait limitée à 18 %. Sur la période 2018-2070, la Normandie perdrait en moyenne 4 300 jeunes par an, soit -0,8 % par an.

Cette évolution interviendrait en trois temps. Entre 2018 et 2040, le nombre de jeunes de 3 à 18 ans devrait tout d’abord diminuer fortement, de 6 700 en moyenne par an (-1,1 % par an). Cette trajectoire résulterait essentiellement de la diminution des naissances intervenue en Normandie au cours de la décennie 2010. Le nombre de jeunes devrait ensuite se stabiliser au cours de la décennie 2040-2050 avec une diminution limitée à 600 jeunes par an (-0,1 % par an). Cette relative stabilité proviendrait du maintien de l’indice conjoncturel de fécondité à un niveau constant (1,8 enfant par femme). Enfin, sur la période 2050-2070, au vu du vieillissement de la population et de la baisse du nombre de femmes en âge de procréer, le nombre de jeunes de 3 à 18 ans devrait à nouveau diminuer, mais de façon plus modérée avec -3 500 jeunes par an (-0,7 % en moyenne par an).

Si les tendances démographiques récentes se poursuivaient, la baisse du nombre de jeunes scolarisables, couplée à la hausse du nombre de seniors, provoquerait une modification importante de la structure par âge de la population normande. La part de jeunes dans la population régionale devrait continuer de baisser et pourrait être divisée par deux en un siècle (15 % en 2070 contre 30 % en 1968 ; figure 2). D’ici 2030, la Normandie pourrait déjà perdre près de 93 000 jeunes en âge d’être scolarisés pour atteindre une part de 17 % dans l’ensemble de la population contre 20 % en 2018. Cette part devrait continuer de diminuer légèrement jusqu’en 2040 pour atteindre 16 %, elle resterait ensuite relativement stable jusqu’en 2060, avant de débuter une nouvelle baisse (15 % en 2070).

Même si la baisse du nombre de jeunes devrait toucher l’ensemble de la région, les départements normands ne seraient pas affectés de manière uniforme. Cette trajectoire serait plus marquée dans les départements plus ruraux, comme l’Eure, l’Orne et la Manche, avec une baisse du nombre de jeunes comprise entre 40 et 42 % à l’horizon 2070 (figure 3). Dans le Calvados et la Seine-Maritime, plus urbanisés, la diminution pourrait être plus modérée, de l’ordre de 30 %, mais resterait très supérieure à celle de la France métropolitaine dans son ensemble (-18 %). Les trois temps d’inflexion se retrouveraient également pour chaque département, avec une première forte baisse d’ici 2040 suivie d’une période de stabilité de 10 ans, et avant une nouvelle baisse significative entre 2050 et 2070. À cette échéance, la part de jeunes pourrait diminuer pour atteindre 16 % en Seine-Maritime et dans l’Eure, 15 % dans le Calvados, 14 % dans l’Orne et 13 % dans la Manche.

En 2018, 115 900 enfants âgés de 3 à 5 ans résidaient en Normandie. En 2070, ils ne seraient plus que 77 000, soit une baisse de près de 34 % (figure 4) (-20 % pour la France métropolitaine). L’essentiel de cette évolution régionale interviendrait d’ici 2030 avec une chute de près de 20 % à cet horizon, soit 22 800 enfants de 3 à 5 ans en moins (figure 5). Pour cette première sous-période, le nombre de jeunes scolarisables en pré-élémentaire diminuerait ainsi de 1 900 enfants en moyenne chaque année (-1,8 % par an ; pour en savoir plus). Par la suite, entre 2030 et 2045, le nombre d’enfants de 3 à 5 ans resterait stable, avant de diminuer de nouveau entre 2045 et 2070 (-600 enfants par an, soit -0,7 % par an). Globalement, sur la période 2018-2070, le nombre d’enfants âgés de 3 à 5 ans pourrait diminuer de 39 000 en Normandie.

Tous les départements normands devraient être affectés par cette évolution mais l’Eure pourrait l’être davantage et plus rapidement. Pour ce département, le nombre d’enfants âgés de 3 à 5 ans baisserait de 29 % d’ici 2030 et, à l’horizon 2070, leur nombre pourrait être divisé quasiment par deux (-46 %). Avec respectivement -23 % et -24 %, la Manche et l’Orne pourraient également subir une forte baisse sur la période 2018-2030 et, à l’horizon 2070, le nombre d’enfants de 3 à 5 ans diminuerait de l’ordre de 40 % pour ces deux départements.

Pour le Calvados et en Seine-Maritime, le recul serait un peu moins marqué avec respectivement -29 % et -26 % à l’horizon 2070.

En 2018, 207 200 enfants étaient âgés de 6 à 10 ans en Normandie. Cette classe d’âge devrait être la plus affectée par la baisse de ses effectifs d’ici 2070, en volume (-75 000 enfants) comme en proportion (-36 %, contre -22 % pour la France métropolitaine). La diminution pourrait être déjà très marquée à l’horizon 2030 avec un recul de l’ordre de 43 100 enfants (-21 %). Pour cette première période, le nombre d’enfants scolarisables en élémentaire déclinerait en moyenne de 3 600 enfants chaque année (-1,9 % par an). À partir de 2035 et jusqu’en 2050, leur nombre resterait ensuite stable, avant de diminuer à nouveau jusqu’en 2070.

L’Eure, l’Orne et la Manche pourraient connaître une baisse de l’ordre de 40 % d’ici 2070, celle-ci serait limitée à 30 % dans le Calvados et en Seine-Maritime. Le recul serait déjà très marqué entre 2018 et 2030 pour les départements de l’Orne (-29 %), l’Eure (-25 %) et la Manche (-21 %).

Les jeunes âgés de 11 à 14 ans représentent très majoritairement la classe d’âge des collégiens. Leur nombre s’élevait à 167 300 personnes en 2018 et leurs effectifs pourraient diminuer d’un tiers d’ici 2070 (soit de 55 600 jeunes), près de deux fois plus qu’en France métropolitaine (-17 %).

La baisse du nombre de jeunes âgés de 11 à 14 ans ne débuterait significativement qu’à partir de 2025 et pourrait se poursuivre jusqu’en 2040. Entre 2018 et 2040, le nombre de collégiens potentiels pourrait chuter de 23 % (-38 200 jeunes, soit -1 700 en moyenne chaque année). Cette première période de forte baisse devrait être suivie d’une stabilité au cours de la période 2040-2055, avant une nouvelle période de baisse jusqu’en 2070.

À cet horizon, les départements de l’Orne, de l’Eure et de la Manche pourraient connaître une diminution de près de 40 % des effectifs de la classe d’âge des 11-14 ans. Pour le Calvados et la Seine-Maritime, les baisses devraient être moins marquées (-31 % et -27 %). Dans le Calvados, la Manche et l’Orne, le nombre de jeunes âgés de 11 à 14 ans devrait décroître déjà assez fortement d’ici 2030 (entre -13 % et -19 %).

Entre 2018 et 2070, la baisse relative du nombre de jeunes âgés de 15 à 18 ans devrait être à peine moins forte que celles des autres tranches d’âge. Cette classe d’âge pourrait ainsi passer de 170 200 à 117 700 jeunes (-31 %). Pour autant, cette diminution reste plus marquée que celle que pourrait connaître la France métropolitaine (-13 %). En Normandie, ce recul devrait essentiellement intervenir au cours de la période 2030-2040. Le nombre potentiel de lycéens normands ne diminuerait que de 5 % entre 2018 et 2030, avant une accélération lors de la décennie suivante (-20 %). Entre 2030 et 2040, la baisse moyenne de 2 % par an pourrait conduire à une diminution de 3 000 lycéens potentiels chaque année. Après cette période de baisse, une relative stabilité devrait être observée jusqu’en 2060, avant que ne débute une nouvelle diminution, moins marquée toutefois.

L’Eure bénéficierait entre 2018 et 2030 de la hausse des naissances intervenue sur la période 2006-2012 et verrait donc le nombre de jeunes âgés de 15 à 18 ans augmenter jusqu’en 2028 avant qu’une baisse ne débute. À l’inverse, le recul pourrait être conséquent dans l’Orne (-14 % sur cette première période) et un peu plus limité en Seine-Maritime, dans la Manche et le Calvados (inférieur à -8 %). Entre 2030 et 2040, la baisse du nombre de jeunes de 15 à 18 ans devrait s’accentuer pour tous les départements normands (de -16 % dans le Calvados et en Seine-Maritime à -23 % dans l’Eure). À l’horizon de l’année 2070, l’Orne pourrait être, en proportion, le département le plus affecté par cette tendance démographique (-40 %), suivi de la Manche (-37 %), de l’Eure (-34 %), du Calvados (-30 %) et de la Seine-Maritime (-26 %).