Insee
Insee Flash Réunion · Octobre 2021 · n° 211
Insee Flash RéunionAméliorations économiques et sociales, dégradation environnementale Objectifs de développement durable à La Réunion

Aurore Fleuret (Insee), Caroline Coudrin (Direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement)

Depuis le début des années 2000, La Réunion poursuit son développement économique, tout en consommant de plus en plus d'énergie et en générant davantage de déchets. Sa population est en meilleure santé et est mieux logée que par le passé. Cependant, les milieux naturels se dégradent malgré les mesures de protection des espaces et des espèces.

La crise sanitaire de la Covid-19 en cours pourrait néanmoins infléchir ces trajectoires, positivement ou non selon les cas, et rappelle les liens forts entre la santé humaine et le respect des équilibres environnementaux.

À travers l'Ouvrir dans un nouvel ongletAgenda 2030, la France s'est engagée à atteindre 17 objectifs de développement durable pour répondre aux enjeux inédits auxquels le monde fait actuellement face, exacerbés par la crise sanitaire de la Covid-19. Depuis 20 ans, La Réunion connaît des transformations sociales, économiques et environnementales importantes, mais la plupart des cibles fixées par la loi ou d’autres textes réglementaires restent encore lointaines.

Cette présente publication constitue la synthèse d’un ensemble d’études sur les évolutions en matière de développement durable à La Réunion depuis 20 ans (Pour en savoir plus).

Le territoire s'enrichit, mais consomme de plus en plus d'énergie et produit davantage de déchets

Sur le plan social, les avancées sont notoires ces dernières années. En particulier, les personnes nées à La Réunion sont de plus en plus diplômées et occupent plus fréquemment que par le passé les postes de cadres. L’accès au marché du travail s’améliore légèrement entre 2007 et 2018, même si à peine la moitié des personnes en âge de travailler occupent un emploi. Conséquence notamment de la hausse de l'emploi, les richesses produites sur le territoire augmentent (figure 1), et la pauvreté se réduit entre 2007 et 2018. Les inégalités de revenus diminuent, sous l’effet de la hausse des revenus des ménages les plus pauvres, tout comme les inégalités entre les femmes et les hommes. Ces inégalités restent néanmoins importantes.

Figure 1 Évolution de la consommation d'énergie finale et du PIB par habitant à La Réunion

indice base 100 en 2006
Évolution de la consommation d'énergie finale et du PIB par habitant à La Réunion (indice base 100 en 2006)
Consommation d'énergie finale / habitant PIB / habitant
2006 100,0 100,0
2007 101,7 105,3
2008 101,4 108,5
2009 105,5 103,6
2010 109,0 103,5
2011 108,6 107,5
2012 108,1 109,1
2013 105,9 109,5
2014 107,0 111,4
2015 109,4 114,5
2016 110,3 117,6
2017 114,7 120,7
2018 114,5 123,4
2019* 115,7 126,7
  • * estimation pour le PIB / habitant.
  • Sources : Observatoire Energie Réunion ; Insee, comptes nationaux base 2014 - Comptes régionaux base 2014 jusqu’en 2017, puis estimations Cerom 2018-2020.

Figure 1 Évolution de la consommation d'énergie finale et du PIB par habitant à La Réunion

  • * estimation pour le PIB / habitant.
  • Sources : Observatoire Energie Réunion ; Insee, comptes nationaux base 2014 - Comptes régionaux base 2014 jusqu’en 2017, puis estimations Cerom 2018-2020.

Ces avancées sociales et économiques ont un impact environnemental : l’énergie consommée et les déchets produits par habitant augmentent. À cela s'ajoutent une population qui s’accroît et des déplacements qui continuent à se faire majoritairement en voiture. Ces besoins grandissants en électricité et en carburants génèrent une hausse de la consommation des énergies fossiles. Or celle-ci est responsable de la majorité des émissions de , principale cause du réchauffement climatique. Ce phénomène mondial n’épargne pas La Réunion : depuis 50 ans, les températures moyennes y ont augmenté de près de 1 degré.

Pour limiter les impacts sur le climat, La Réunion s’est lancée dans la transformation de son mix électrique. À l’horizon 2023, l’électricité devrait provenir uniquement d’énergies renouvelables alors que la part de l’énergie renouvelable dans le ne dépasse pas 38 % depuis 10 ans. De plus, le tri, le réemploi et le recyclage se développent. La quantité de déchets produits est amenée à diminuer, par la transition vers une économie circulaire.

Une population en meilleure santé et mieux logée, mais un environnement qui se dégrade

Les conditions de vie sur l’île s’améliorent depuis plusieurs décennies. L’espérance de vie notamment augmente considérablement depuis le début des années 1950, même si cette hausse ralentit depuis 2011. Les décès prématurés avant 65 ans demeurent néanmoins toujours plus fréquents qu’en métropole et certaines maladies chroniques comme le diabète sont plus répandues. L’agriculture biologique se développe timidement et reste moins implantée qu’en métropole, même si les pesticides sont moins utilisés. Les enjeux d’approvisionnement en eau potable se renforcent : la consommation individuelle baisse mais le rendement des réseaux d’eau, déjà médiocre, se détériore. Sous l'impulsion du plan eau DOM, les logements sont plus souvent raccordés à l’assainissement collectif et des efforts sont réalisés sur les stations d’épuration. L’état des masses d’eau superficielles et littorales se dégrade avec des ruptures importantes de continuité écologique de cours d’eau. Les récifs coralliens ne sont pas en bon état et leur situation se détériore depuis les années 1970. Les Schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage) visent la remise en bon état des masses d’eau, y compris des récifs.

Les conditions de logement continuent de s’améliorer mais les besoins en logements, en particulier sociaux, restent importants. Pour un territoire insulaire, un des enjeux est d’équilibrer le partage du territoire entre ces besoins en logements, le développement de l’activité économique mais aussi la préservation des espaces naturels et agricoles. La transition écologique de La Réunion est en effet indissociable de la préservation de sa biodiversité riche de nombreuses espèces et de milieux naturels uniques, certains menacés. Actuellement, 44 % de la surface terrestre de l’île est protégée mais les pressions sont fortes, entre propagation des espèces invasives et extension de la tache urbaine (figure 2). Les objectifs poursuivis de l’autonomie alimentaire et énergétique nécessiteront de conserver un équilibre entre les espaces urbanisés, agricoles et naturels.

Figure 2Évolution des espaces de protection réglementaire et de la tache urbaine

  • Note : la tache urbaine est une modélisation automatisée de l'emprise du tissu urbain bâti. Elle est obtenue grâce à la création d'une zone tampon de 50 mètres autour des éléments bâtis de la BDTopo.
  • Source : Deal, fond @IGN.

Pour relever ces enjeux, l’implication citoyenne est nécessaire mais son évolution est contrastée. Alors que la participation électorale baisse, le milieu associatif est en plein essor, avec un tiers des jeunes faisant régulièrement du bénévolat. Cette solidarité s'exerce aussi plus largement au sein de la zone océan Indien, avec des programmes de coopération interrégionale axés notamment sur la recherche et le développement. Les métiers liés à l'innovation restent cependant plus rares à La Réunion que dans l'Hexagone.

Une crise sanitaire dont l'impact est à suivre

Avec la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19, les améliorations sociales et économiques des dernières années pourraient être remises en cause. Par exemple, alors que les violences diminuent jusqu'en 2019 à La Réunion, elles augmentent à nouveau en 2020 dans un contexte de pandémie et de confinement. En parallèle, la diminution des déplacements pendant le premier confinement a visiblement limité les émissions de gaz à effet de serre.

Plus largement, les crises sanitaires auxquelles La Réunion est exposée – chikungunya, dengue, Covid-19 – interpellent sur les liens forts entre la santé humaine et le respect des équilibres environnementaux. Elles rappellent aussi le lien entre les activités humaines, notamment économiques, et le changement climatique lorsque les restrictions sanitaires imposent de réduire les déplacements, générant ainsi une baisse de la pollution.

Encadré 1 - Partenariat

Cette étude a été menée en partenariat entre l’Insee et la Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Deal) de La Réunion.

Publication rédigée par :Aurore Fleuret (Insee), Caroline Coudrin (Direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement)

Définitions

Les émissions de gaz à effet de serre considérées ici prennent en compte uniquement les émissions occasionnées par les activités humaines.

Pour satisfaire ses besoins énergétiques, chaque pays utilise dans des proportions différentes les énergies dont il dispose pour produire de l’électricité : c’est ce qu’on appelle le mix électrique.

Pour en savoir plus

Fleuret A., Grangé C., « Objectifs de développement durable à La Réunion – Une économie en croissance, une pauvreté et des inégalités en baisse, mais toujours peu d’emplois », Insee Analyses La Réunion n° 60, octobre 2021.

Fleuret A., « Objectifs de développement durable à La Réunion – Une population davantage diplômée, une vie associative en essor, des violences plus fréquentes qu’ailleurs mais en baisse », Insee Analyses La Réunion n° 61, octobre 2021.

Coudrin C., Fleuret A., « Objectifs de développement durable à La Réunion – Santé et conditions de logement s’améliorent, mais les enjeux d’environnement et d’accompagnement du vieillissement restent forts », Insee Analyses La Réunion n° 62, octobre 2021.

Coudrin C., Mariotti S., « Objectifs de développement durable à La Réunion – La Réunion face au défi du changement climatique : entre constats et solutions », Insee Analyses La Réunion n° 63, octobre 2021.

Coudrin C., Mariotti S., « Objectifs de développement durable à La Réunion – Malgré les efforts de protection, la biodiversité est de plus en plus menacée », Insee Analyses La Réunion n° 64, octobre 2021.

Deal, Insee, « Ouvrir dans un nouvel ongletLes indicateurs du développement durable à La Réunion : un premier état des lieux », 2012.

Insee, Sdes, « Indicateurs territoriaux du développement durable », Base de données, août 2021.

Le compte Twitter de l’Insee La Réunion-Mayotte : Ouvrir dans un nouvel onglet@InseeOI.