Insee Flash Bourgogne-Franche-Comté ·
Juillet 2021 · n° 137
Les amortisseurs sociaux fortement sollicités pendant la crise de la Covid-19 Bourgogne-Franche-Comté
La crise économique engendrée par la Covid-19 a eu des répercussions sociales importantes. Les dispositifs servant d’amortisseurs sociaux ont très vite été davantage sollicités et ont permis de limiter ses effets. Les nombres de demandeurs d’emploi indemnisés, des bénéficiaires de l’allocation pour ceux arrivant en fin de droits et des allocataires percevant le RSA ont fortement augmenté. Les jeunes ont été plus particulièrement touchés par la crise. Les suppressions d’emploi notamment dans l’intérim et la restauration ont fait reculer le niveau de vie de certains d’entre eux.
- Davantage de demandeurs d’emploi et de chômeurs en fin de droits
- Davantage de personnes bénéficiant du RSA
- L’impact social apparaît, dans la région, proche de la moyenne nationale
- Le Jura, le Doubs et le Territoire de Belfort sont les départements les plus touchés dans la région
- Encadré - Les jeunes ont été particulièrement touchés par les conséquences de la crise sanitaire
La fermeture de commerces et les restrictions de déplacements mises en place en France depuis mars 2020 pour juguler l’épidémie de la Covid-19 ont eu de graves conséquences financières pour une partie de la population. Les amortisseurs sociaux ont permis de limiter l’impact sur les niveaux de vie. Leur suivi permet de dresser un premier bilan social de la crise sanitaire.
Davantage de demandeurs d’emploi et de chômeurs en fin de droits
Dès mars 2020, l’activité partielle a permis de maintenir tout ou partie des revenus de nombreux salariés ne pouvant exercer intégralement leur activité. Début avril 2020, elle a concerné jusqu’à 30 % des salariés de Bourgogne-Franche-Comté. Le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté fortement, surtout à cause de l’interruption de missions d’intérim et du gel des recrutements. En outre, les conditions d’éligibilité à l’allocation chômage ont été temporairement assouplies en début de crise. Ainsi, les droits des demandeurs d’emploi ont été prolongés, le contrôle de la recherche d’emploi a été suspendu et la durée d’affiliation minimale a été réduite à 4 mois.
Le nombre de bénéficiaires de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) s’est contracté, en mai 2020, sous l’effet de la prolongation des droits des chômeurs. Il a ensuite fortement augmenté, permettant à certaines personnes d’entrer dans le dispositif et de limiter leurs pertes de revenus. Il a atteint son niveau le plus haut avec 13 460 bénéficiaires fin septembre 2020, soit 10,1 % de plus que fin février 2020 (figure 1).
tableauFigure 1 – Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires du RSA et de l’ASS en Bourgogne-Franche-Comté
Année | Mois | RSA | ASS |
---|---|---|---|
Bourgogne-Franche-Comté | Bourgogne-Franche-Comté | ||
2019 | janvier | 98 | 109 |
février | 98 | 108 | |
mars | 98 | 108 | |
avril | 98 | 108 | |
mai | 98 | 106 | |
juin | 98 | 105 | |
juillet | 98 | 105 | |
août | 97 | 106 | |
septembre | 98 | 101 | |
octobre | 98 | 101 | |
novembre | 99 | 100 | |
décembre | 99 | 99 | |
2020 | janvier | 99 | 100 |
février | 100 | 100 | |
mars | 101 | 99 | |
avril | 102 | 99 | |
mai | 104 | 97 | |
juin | 106 | 105 | |
juillet | 107 | 108 | |
août | 107 | 110 | |
septembre | 108 | 110 | |
octobre | 108 | 109 | |
novembre | 109 | 105 | |
décembre | 108 | 102 | |
2021 | janvier | 107 | 98 |
février | 106 | 96 | |
mars | 105 |
- RSA : Revenu de Solidarité Active / ASS : Allocation Spécifique de Solidarité
- Note : les données des derniers mois sont estimées et susceptibles d’être révisées.
- Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA
graphiqueFigure 1 – Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires du RSA et de l’ASS en Bourgogne-Franche-Comté

- RSA : Revenu de Solidarité Active / ASS : Allocation Spécifique de Solidarité
- Note : les données des derniers mois sont estimées et susceptibles d’être révisées.
- Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA
Davantage de personnes bénéficiant du RSA
Les conséquences sociales de la crise se traduisent par une augmentation importante du nombre de bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA). Il a crû de 8,5 % entre février et novembre 2020, pour culminer à 64 830 allocataires. Il a permis de compléter les ressources des foyers fragilisés financièrement par la détérioration du marché de l’emploi. En 2020, peu de personnes sont sorties de ce dispositif, car la crise n’a pas permis à leurs ressources de s’améliorer. En revanche, les nouveaux bénéficiaires du RSA ont été plus nombreux, en partie des personnes revenues dans le dispositif après en être sorties.
Ponctuellement, d’autres aides sociales liées aux ressources des ménages ont été davantage sollicitées. En 2020, un peu plus de personnes ont bénéficié de la prime d’activité pendant les confinements : + 1,1 % en mai et + 1,7 % en décembre par rapport au mois de février. Les entreprises ont massivement recouru au chômage partiel. Les ressources de certains salariés ont ainsi diminué, les rendant éligibles à cette prime.
Le nombre de bénéficiaires de l’aide au logement a surtout augmenté au second semestre 2020. Il a atteint son plus haut niveau en novembre avec 247 250 bénéficiaires, soit 6,3 % de plus qu’en février, en raison des pertes ponctuelles de revenus observées parmi certains ménages. Le nombre de bénéficiaires de l’aide au logement est toutefois en baisse de 2,5 % en un an (figure 2).
tableauFigure 2 – Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires d’autres aides sociales en Bourgogne-Franche-Comté
Année | Mois | Prime d’activité | Aides au logement | Garantie jeunes |
---|---|---|---|---|
2019 | janvier | 87 | 101 | 97 |
février | 93 | 102 | 97 | |
mars | 95 | 102 | 98 | |
avril | 95 | 102 | 100 | |
mai | 96 | 102 | 101 | |
juin | 97 | 101 | 104 | |
juillet | 96 | 99 | 104 | |
août | 97 | 99 | 104 | |
septembre | 98 | 101 | 103 | |
octobre | 99 | 104 | 105 | |
novembre | 100 | 105 | 103 | |
décembre | 101 | 105 | 99 | |
2020 | janvier | 100 | 100 | 100 |
février | 100 | 100 | 100 | |
mars | 100 | 100 | 95 | |
avril | 100 | 102 | 91 | |
mai | 101 | 102 | 84 | |
juin | 102 | 101 | 81 | |
juillet | 99 | 100 | 84 | |
août | 98 | 100 | 85 | |
septembre | 98 | 102 | 85 | |
octobre | 99 | 105 | 86 | |
novembre | 101 | 106 | 85 | |
décembre | 102 | 106 | 90 | |
2021 | janvier | 100 | 98 | 92 |
février | 100 | 97 | 95 | |
mars | 100 | 97 |
- Note : les données des derniers mois sont estimées et susceptibles d’être révisées.
- Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA ; I-Milo, traitement Dares.
graphiqueFigure 2 – Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires d’autres aides sociales en Bourgogne-Franche-Comté

- Note : les données des derniers mois sont estimées et susceptibles d’être révisées.
- Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA ; I-Milo, traitement Dares.
L’impact social apparaît, dans la région, proche de la moyenne nationale
Après plus d’un an de crise, le RSA est encore très sollicité. Par rapport à février 2020, davantage de personnes de Bourgogne-Franche-Comté en bénéficient (+ 4,6 %) (figure 3).
La région subit à ce titre une dégradation de sa situation sociale proche de la moyenne nationale. Elle est la plus forte en Corse, en Île-de-France et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, où le nombre de bénéficiaires du RSA progresse de plus de 6 %.
Certaines sont des régions très touristiques, très touchées par la crise dans ce secteur. La dégradation est la moins forte dans les DOM et les Hauts-de-France, régions où le recours au RSA est en temps habituel déjà important.
tableauFigure 3 – Évolution du nombre de bénéficiaires de certaines aides sociales entre février 2020 et mars 2021
Bourgogne-Franche-Comté | France | ||
---|---|---|---|
Nombre de bénéficiaires en février ou mars 2021 (voir note) | Évolution depuis février 2020 (%) | Évolution depuis février 2020 (%) | |
Minima sociaux | |||
ASS | 11 700 | - 4,3 | - 3,8 |
RSA* | 62 470 | + 4,6 | + 3,7 |
Ensemble | 74 170 | + 3,1 | + 2,5 |
Autres aides sociales | |||
Prime d’activité* | 180 630 | - 0,2 | + 0,0 |
Aides au logement** | 226 700 | - 2,5 | - 1,9 |
Garantie jeunes | 2 840 | - 4,9 | + 3,3 |
- RSA : Revenu de Solidarité Active / ASS : Allocation Spécifique de Solidarité
- * tous régimes (Cnaf et MSA)
- ** régime général (Cnaf), soit 97 % des allocataires
- Note : le nombre de bénéficiaires est estimé pour mars 2021, sauf pour l’ASS et la Garantie jeunes (pour février 2021). L’évolution est calculée depuis février 2020.
- Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA ; I-Milo, traitement Dares.
Le Jura, le Doubs et le Territoire de Belfort sont les départements les plus touchés dans la région
En un an, le nombre de personnes fragilisées financièrement et pouvant prétendre au RSA a augmenté le plus fortement dans le Jura, + 9 %, le Doubs, + 6 %, et le Territoire de Belfort, + 6 %.
La dégradation a été moins forte en Côte-d’Or et dans la Nièvre,+ 4 à 5 %. C’est en Haute-Saône, Saône-et-Loire et surtout dans l’Yonne qu’elle est la plus contenue, + 2 à 4 %.
Encadré - Les jeunes ont été particulièrement touchés par les conséquences de la crise sanitaire
Les étudiants subissent de plein fouet les conséquences économiques et sociales de la pandémie. Leurs conditions d’études ont été mises à mal. Les 84 700 étudiants de la région ont dû suivre une bonne partie des enseignements et même passer leurs examens à distance. Si habituellement, 25 % d’entre eux travaillent pendant leurs études, la crise a fragilisé leurs ressources en affectant les secteurs qui les emploient : commerce, restauration, animation culturelle et sportive. Certains jeunes ont eu beaucoup de difficultés à trouver des stages. Toutefois, certains ont pu bénéficier d’une aide financière, 4 étudiants sur 10 ont perçu une bourse sur critères sociaux. Par ailleurs, près de 40 % des étudiants vivent chez leurs parents, limitant ainsi leurs frais. Lorsqu’ils sont indépendants, 61 % bénéficient d’une aide au logement de la Caf. En outre, des mesures temporaires ont été prises afin de les soutenir. Depuis la rentrée 2020, les Crous ont mis en place des repas complets à 1 € dans les restaurants universitaires, d’abord réservés aux boursiers puis étendus à l’ensemble des étudiants. En Bourgogne-Franche-Comté, 420 000 repas ont été distribués à ce tarif entre septembre 2020 et mars 2021. Enfin, une aide spécifique ponctuelle (ASAP) a concerné quelques étudiants en formation initiale pour un montant total de 800 000 euros au premier trimestre 2021. Elle s’adresse à des étudiants, boursiers ou non, qui rencontrent d’importantes difficultés financières.
La crise a aussi grandement affecté les activités des missions locales en 2020 qui ont dû fermer lors du confinement du printemps 2020. Les entrées en Garantie jeunes, réservées aux jeunes en situation de grande précarité, ont alors été suspendues. Ensuite, avec la mise en place de protocoles sanitaires adéquats, leur nombre est reparti à la hausse, sans pour autant retrouver le niveau du nombre de bénéficiaires d’avant la crise.
Définitions
L’allocation de solidarité spécifique (ASS) est une allocation pour les demandeurs d’emploi ayant épuisé leurs droits à l’assurance chômage et qui justifient d’au moins cinq années d’activité salariée au cours des dix dernières années précédant la rupture de leur contrat de travail.
Le revenu de solidarité active (RSA) est une allocation qui s’adresse aux personnes d’au moins 25 ans ou assumant la charge d’au moins un enfant né ou à naître. Il complète les ressources du foyer pour qu’elles atteignent le seuil d’un revenu garanti, ou montant forfaitaire, dont le barème varie selon la composition familiale. Une majoration (RSA majoré) peut être accordée, sous condition et temporairement à un parent isolé assumant la charge d’enfant(s) ou à une femme enceinte isolée.
La prime d’activité est un complément de revenus d’activité s’adressant, sous conditions de ressources, aux travailleurs majeurs non étudiants percevant des revenus modestes, issus d’une activité professionnelle salariée ou non-salariée. Elle peut être temporairement majorée, sous les mêmes conditions que le RSA.
Les aides au logement sont l’aide personnalisée au logement (APL), l’allocation de logement familiale (ALF) et l’allocation de logement sociale (ALS). Elles ne sont pas cumulables et versées sous condition de ressources, en soutien des locataires, des résidents en foyer et des accédants à la propriété, dans leur effort financier pour se loger.
La Garantie jeunes s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans qui ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation et qui se trouvent en situation de précarité. Elle leur offre un accompagnement intensif assuré par une mission locale et souvent une allocation, pendant douze mois, et peut être prolongée pour une durée maximum de six mois.
Pour en savoir plus
Brion D., Simon ML., « Confinement du printemps 2020 : les plus modestes plus fragilisés », Insee Flash Bourgogne-Franche-Comté n° 124, mai 2021.