Vue d'ensemble

Note de conjoncture
Paru le :Paru le01/07/2021
Note de conjoncture- Juillet 2021

Un printemps 2021 contrasté, après un long hiver

Encadré par deux confinements (en novembre 2020 puis avril 2021), l’hiver 2021 a été marqué par les restrictions sanitaires. Au total, pendant 7 mois, entre novembre 2020 et mai 2021, l’économie française a plafonné en deçà de 96 % de son niveau d’avant-crise (soit, par convention, le niveau du dernier trimestre 2019). La perte cumulée d’activité sur cette période se serait élevée à environ 3 points de PIB annuel (contre 6 points de PIB annuel perdus entre mars et juin 2020, lors de la première vague épidémique).

Depuis début mai néanmoins, tous les indicateurs, qu’il s’agisse des enquêtes mensuelles de conjoncture ou des données à plus haute fréquence, indiquent une vive reprise, au rythme graduel du déconfinement. Au mois le mois, le profil du deuxième trimestre 2021 serait ainsi très contrasté. Après un mois d’avril confiné, à 5½ % sous le niveau d’avant-crise, l’activité du mois de mai serait revenue à environ 4 % sous ce niveau puis celle de juin à 2 ½ %. Ces estimations sont globalement inchangées par rapport à la précédente Note de conjoncture publiée début mai.

Au total et compte tenu des révisions intervenues sur la série passée des comptes nationaux, le PIB français aurait progressé de 0,7 % au deuxième trimestre par rapport au premier (après – 0,1 %). Un rebond essentiellement porté par celui de la consommation des ménages, largement moins bridée à la fin du trimestre qu’au début. Comme l’an dernier à pareille époque, le rebond serait ainsi rapide et ample – soit l’image inversée des chutes soudaines d’activité liées aux mesures d’endiguement sanitaire.

Fin 2021, l’économie française retrouverait à peu près son niveau d’avant-crise

Selon les enquêtes de conjoncture, tant les chefs d’entreprises que les ménages semblent balayer les doutes qui peuvent subsister quant à l’éventuelle persistance de la pandémie et des mesures de restrictions : l’espoir représenté par la vaccination passe devant la menace de nouveaux variants. En juin, la confiance des ménages a ainsi retrouvé son niveau d’avant-crise, et le climat des affaires se situe au plus haut depuis 2007.

Une résurgence de l’épidémie n’est certes pas exclue, mais les agents économiques semblent considérer qu’elle n’entraînerait pas forcément de mesures de restrictions aussi sévères que lors des vagues précédentes. Sous cette hypothèse, l’activité économique française pourrait retrouver à peu près son niveau d’avant-crise dès la fin 2021.

L’Allemagne retrouverait également son niveau d’avant-crise d’ici la fin 2021, précédée par les États-Unis qui l’auraient atteint dès ce printemps. Parmi les grandes économies européennes, l’Espagne resterait la plus affectée (à 3 % sous son niveau d’avant-crise en fin d’année), tandis que l’Italie et le Royaume-Uni seraient dans une situation intermédiaire.

L’économie française ne serait néanmoins pas, fin 2021, le calque de ce qu’elle était fin 2019

Elle en serait plutôt un reflet déformé par les recompositions sectorielles liées à la crise. Les services marchands retrouveraient globalement leur niveau d’avant-crise, mais les branches les plus affectées par les mesures sanitaires (hébergement-restauration, transports, etc.) resteraient tout de même en deçà – même si l’écart à l’avant-crise serait sans commune mesure avec celui mesuré pendant les confinements. D’autres branches des services (information et communication par exemple) dépasseraient nettement leur niveau d’activité de fin 2019. Dans l’industrie, la fabrication de matériels de transports resterait affectée.

Du côté de la demande, la consommation des ménages et l’investissement des entreprises dépasseraient fin 2021 d’environ 1 % leur niveau mesuré deux ans plus tôt, et les importations retrouveraient le leur. En revanche, les exportations resteraient à 4 % sous leur niveau du dernier trimestre 2019.

Au total, les croissances trimestrielles prévues au troisième (+ 3,4 %) puis au quatrième trimestre 2021 (+ 0,7 %) témoigneraient d’une reprise relativement rapide. En moyenne annuelle, le PIB progresserait de 6,0 % en 2021 (après – 8,0 % en 2020), porté essentiellement par la demande intérieure et notamment la consommation des ménages (+ 5,2 % prévu, après – 7,2 % en 2020). La contribution des échanges extérieurs à la croissance annuelle serait quant à elle légèrement négative.

Le taux de chômage ne connaîtrait pas de nouveau pic

Pendant la crise sanitaire, l’emploi salarié a beaucoup moins chuté que l’activité économique, protégé notamment par un recours massif au dispositif d’activité partielle. D’ici la fin 2021, ce dispositif serait progressivement resserré, mais le rebond de l’emploi salarié (assez vif dès le premier trimestre) accompagnerait celui de l’activité économique. Au total, l’emploi salarié augmenterait de plus de 300 000 en 2021, retrouvant lui aussi fin 2021 son niveau d’avant-crise.

La levée des restrictions sanitaires permettrait à certaines personnes qui s’en étaient éloignées de revenir sur le marché du travail. Le nombre d’actifs rebondirait ainsi nettement, notamment au second semestre 2021. La remontée conjointe du nombre d’actifs et du nombre de personnes en emploi conduirait à une quasi-stabilité du taux de chômage (8,2 % prévu fin 2021, après 8,1 % début 2021, un niveau proche de celui d’avant-crise).

L’inflation serait relativement dynamique mais le pouvoir d’achat des ménages accélérerait tout de même

L’inflation a été très faible en 2020, sous l’effet notamment de la baisse des prix de l’énergie. La reprise mondiale a fait monter les cours du pétrole et ainsi rebondir l’inflation : à +1,5 % en glissement annuel en juin 2021, elle atteindrait 2 % pendant l’été, avant de s’atténuer légèrement, l’inflation sous-jacente s’établissant quant à elle autour de 1 %.

Dans les enquêtes de conjoncture, le solde d’opinion des industriels sur les perspectives générales de prix de vente dans leur secteur a atteint en juin son plus haut historique, reflétant les hausses de prix d’intrants et, parfois, les tensions sur l’approvisionnement. Néanmoins, ces tensions ne se répercuteraient que modérément sur les prix à la consommation d’ici la fin de l’année, dans un contexte où les taux de marge ont été globalement préservés pendant la crise. Par ailleurs, d’éventuels effets de «second tour» venant accélérer les salaires sont peu probables à l’horizon de notre prévision (fin 2021).

Les revenus des ménages seraient tout de même dynamiques en 2021 : les revenus d’activité se redresseraient tandis que les prestations sociales diminueraient progressivement. En moyenne sur l’année, malgré la hausse de l’inflation, le pouvoir d’achat du revenu disponible brut des ménages accélérerait (+ 1,8 %, après + 0,4 % en 2020). Compte tenu de la vigueur de la consommation, le taux d’épargne des ménages, après avoir atteint des sommets en 2020, retrouverait fin 2021 un niveau proche de celui d’avant-crise, un peu au-dessus de 15 %.

Le «terrain perdu» par rapport à la trajectoire tendancielle d’avant-crise se limiterait à environ un point et demi de PIB

Fin 2021, l’économie française serait globalement revenue à son niveau de fin 2019 : elle se situerait alors 2 à 2½ points de PIB sous le niveau que l’on aurait pu attendre si la trajectoire tendancielle d’avant la crise avait pu se prolonger pendant ces deux années. Cette mesure du «terrain perdu» n’est cependant pas définitive. À plus long terme, on peut tenter de simuler, à un niveau sectoriel fin, les effets des changements de préférences qui persisteraient au-delà de la crise.

L’exercice suppose de mobiliser les tendances propres à chaque secteur avant la crise et d’élaborer des hypothèses sur leurs différents degrés de résilience. Au total, ces estimations sont cohérentes avec une perte de PIB agrégé de l’ordre de 1,6 point par rapport au PIB tendanciel d’avant-crise. Plus de la moitié de cette perte proviendrait de secteurs représentant seulement un peu plus de 15 % de la valeur ajoutée totale (dont la fabrication de matériels de transports, l’hébergement-restauration, les services de transport, etc.).

Ceci étant, au-delà des effets sectoriels, le tendanciel de productivité de l’économie en sortie de crise est entouré d’aléas importants: certains jouent plutôt à la hausse, comme l’adoption accélérée des technologies numériques, et d’autres à la baisse comme l’affaiblissement du capital humain lié à la fermeture des écoles et aux difficultés qu’a pu engendrer l’enseignement à distance.

Aléas de la prévision : tous ne sont pas négatifs

Comme depuis le début de la crise, les prévisions présentées dans cette Note sont conditionnées à une stabilisation de la situation sanitaire, ou du moins à l’hypothèse qu’une éventuelle dégradation ne conduirait pas à mettre en œuvre des restrictions aussi fortes que pour les trois premières vagues épidémiques.

Les signes de surchauffe ponctuelle dans certains secteurs, en particulier les tensions sur l’approvisionnement, constituent autant de points de vigilance. À ce stade, c’est surtout la production automobile, en rechute depuis quelques mois, qui a été affectée. D’autres secteurs pourraient l’être à leur tour, même si ces difficultés sont essentiellement liées à la «remise en marche» de l’économie mondiale et devraient donc se résorber pour la plupart.

Enfin, en supposant que l’épidémie soit jugulée, il n’est pas exclu que l’activité au second semestre excède les prévisions, dans un contexte où tant le revenu des ménages que le tissu productif ont été globalement préservés. Les réponses à la pandémie de Covid-19 apparaissent en effet exceptionnelles à plusieurs titres : l’ampleur et la soudaineté des mesures d’endiguement, mais aussi, en parallèle, l’ampleur et la rapidité des réponses de politique économique, et enfin l’ampleur et la rapidité du déploiement des vaccins. L’ensemble de ces mesures pourrait créer les conditions d’une reprise plus vive que prévu.