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Insee Flash Auvergne-Rhône-Alpes · Mars 2021 · n° 86
Insee Flash Auvergne-Rhône-AlpesEntrepreneuriat féminin : la parité avance à petits pas

Nicole Danis, Yann Leurs (Insee)

En 2018, 35 % des entreprises créées sont dirigées par des femmes. Ce chiffre progresse peu. Depuis 2010, il a gagné trois points, porté par l’essor du régime du micro-entrepreneur. La part des femmes dans les créations de sociétés, en revanche, stagne. Dans le choix des activités exercées, certains stéréotypes de genre perdurent. Les créatrices d’entreprises sont plus diplômées que les créateurs, et portent des projets plus modestes. Ces différences s’expliquent notamment par le choix des activités exercées et le statut des entreprises créées.

Insee Flash Auvergne-Rhône-Alpes
No 86
Paru le :Paru le08/03/2021

En 2018, 82 000 entreprises ont été créées dans le secteur marchand non agricole en Auvergne-Rhône-Alpes, soit 12 % des créations nationales. Ce taux est conforme au poids économique de la région. L’entrepreneuriat féminin est encore loin de la parité et évolue lentement. Dans la région, parmi les créateurs d’entreprises du premier semestre 2018 (sources), 35 % sont des femmes. Elles étaient 32 % au 1er semestre 2014, comme en 2010. Cette évolution est similaire à celle constatée au niveau national.

La progression de l’entrepreneuriat féminin est portée par l’essor des micro-entreprises

Les nouvelles immatriculations d’entreprises sous le régime du micro-entrepreneur ont augmenté de moitié depuis 2014, et sont devenues nettement majoritaires. Elles représentent 66 % de l’ensemble, tous statuts confondus, au 1er semestre 2018. Cette part s’établissait à 51 % au 1er semestre 2014. La part des femmes y atteint 37 %, comme sur le territoire national (figure 1). Elle progresse peu à peu : 36 % en 2014 et 34 % en 2010 (régime d’auto-entrepreneur).

Les créateurs, plus massivement que les créatrices, se sont détournés du statut d’entreprise individuelle classique. Ce sont désormais six femmes pour quatre hommes qui choisissent ce statut à la création de leur entreprise. C’était l’inverse en 2014. L’explication se trouve dans la nature des métiers exercés. Trois créatrices d’entreprise individuelle classique sur quatre exercent dans des secteurs où les professions libérales réglementées sont bien représentées (activités de santé humaine et juridique), contre un tiers pour les créateurs. Or, les professions réglementées ne sont pas éligibles au régime fiscal simplifié.

Au final, sur l’ensemble des entreprises individuelles (y compris micro-entrepreneurs), la part des femmes s’élève à 39 % en 2018, soit un gain de cinq points sur huit ans. Dans les sociétés, statut juridique où les créatrices sont le moins présentes (23 % des créations), leur part n’a pas varié et reste à son niveau de 2010.

Figure 1Répartition des créations d’entreprise selon le type d’entreprise et le sexe

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Répartition des créations d’entreprise selon le type d’entreprise et le sexe (en %)
Type d’entreprise Année Femmes Hommes
Micro-entrepreneurs 2010 34 66
2014 36 64
2018 37 63
Entreprises individuelles classiques 2010 33 67
2014 38 62
2018 56 44
Sociétés 2010 23 77
2014 20 80
2018 23 77
  • Source : Insee, enquête Sine 2018

Figure 1Répartition des créations d’entreprise selon le type d’entreprise et le sexe

  • Source : Insee, enquête Sine 2018

La parité est encore loin d’être atteinte dans les métiers exercés

Les secteurs d’activité qui attirent le plus les créatrices sont les « activités spécialisées, scientifiques et techniques » (19 %) puis la « santé humaine et l’action sociale » (16 %). Ces deux secteurs concentrent un tiers des nouvelles entreprises dirigées par des femmes (figure 2). En particulier, le « conseil en gestion » et le « conseil en relations publiques et communication » totalisent presque la moitié des créations féminines du secteur des « activités spécialisées, scientifiques et techniques ». Les métiers de ce secteur sont surtout exercés sous le régime de la micro-entreprise (75 % des créations) tandis que pour le secteur de la santé, le statut classique reste la règle (proche des 100 %).

Figure 2Activité principale de l’entreprise à la création, selon le sexe du créateur

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Activité principale de l’entreprise à la création, selon le sexe du créateur (en %)
Secteurs d’activité Femmes Hommes
Construction 2 98
Transports et entreposage 8 92
Information et communication 18 82
Activités financières et d'assurance 19 81
Hébergement et restauration 30 70
Commerce ; réparation d'automobiles et de motocycles 33 67
Ensemble des activités 35 65
Activités spécialisées, scientifiques et techniques 39 61
Arts, spectacles et activités récréatives 39 61
Activités de services administratifs et de soutien 40 60
Activités immobilières 41 59
Industrie manufacturière 48 52
Enseignement 48 52
Autres activités de services 68 32
Santé humaine et action sociale 75 25
  • Source :Insee, enquête Sine 2018

Figure 2Activité principale de l’entreprise à la création, selon le sexe du créateur

  • Source : Insee, enquête Sine 2018

Pour les hommes, le premier secteur est celui de la construction (19 %). Les activités spécialisées, scientifiques et techniques suivent avec une part de 16 %. Ils n’exercent cependant pas tout à fait les mêmes activités au sein de ce secteur. Si le conseil en gestion est choisi également par les hommes, ce sont ensuite les études techniques et l’ingénierie qui sont préférées. L’engouement pour le régime de la micro-entreprise est un peu moins marqué, notamment dans la construction, où un bon tiers des créateurs optent pour la forme sociétale.

Les femmes se lancent très rarement dans les activités traditionnellement masculinisées

De nombreuses activités, dont le poids est important parmi les nouvelles entreprises, restent majoritairement genrées. Ainsi, dans les activités du bâtiment (plâtrier, peintre, menuisier et maçon) qui totalisent 8 % des créations d’entreprises, on ne trouve que 2 % de femmes. Chez les livreurs (activités de poste et de courrier), autre métier répandu (5 % des créations), elles ne sont que 6 % et parmi les programmeurs informatiques (2 % des créations), les créatrices représentent seulement 14 %.

Le contraste est moins prononcé parmi les activités féminisées, où les hommes sont présents au moins à hauteur de 16 %, excepté dans les soins de beauté où ils ne sont que 1 %. C’est le cas des infirmiers et sages-femmes, et ensuite des autres activités de « santé humaine non classées ailleurs » comme les psychologues, psychomotriciens, diététiciens, kinésiologues… Les hommes y représentent 18 % des créateurs d’entreprises.

Les créatrices sont plus diplômées que les créateurs (figure 3). Les différences s’expliquent notamment par la nature des principaux métiers exercés. Quatre femmes sur dix possèdent au moins un diplôme de deuxième cycle (exemple majeur des métiers du conseil et de la santé), contre deux sur dix chez les hommes. À l’opposé, quatre hommes sur dix ont au plus un niveau CAP, brevet ou BEP (par exemple dans les activités du bâtiment) contre deux sur dix chez les femmes.

Figure 3Diplôme le plus élevé obtenu par les créateurs d’entreprise, selon le sexe

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Diplôme le plus élevé obtenu par les créateurs d’entreprise, selon le sexe (en %)
Diplôme Femmes Hommes
Aucun diplôme 4,7 11,9
CEP, BEPC 3,5 4,7
CAP, BEP 10,3 18,9
Bac technologique ou professionnel 11,5 13,1
Bac général 9,4 8,6
BTS, DUT 11,7 11,7
1ᵉʳ cycle général, prof sociales et santé 6,2 1,5
École niveau licence 4,2 3,3
2ᵉ cycle universitaire 14,6 9,1
3ᵉ cycle universitaire 19,5 10,5
Diplôme d’ingénieur, d’une grande école 4,4 6,8
  • Source : Insee, enquête Sine 2018

Figure 3Diplôme le plus élevé obtenu par les créateurs d’entreprise, selon le sexe

en %
  • Source : Insee, enquête Sine 2018

Les micro-entrepreneuses démarrent plus souvent l’activité dans l’année

Lorsqu’elles choisissent le régime de la micro-entreprise, les femmes sont relativement plus nombreuses que les hommes à démarrer l’activité dans les mois suivant l’acte de création. 68 % d’entre elles avaient déclaré un chiffre d’affaires positif pour la première année, contre 59 % chez les hommes. La part des femmes parmi les nouveaux micro-entrepreneurs passe ainsi de 37 % à 40 % lorsque l’on se limite aux entreprises réellement actives après la création.

Les créatrices investissent un peu moins à la création que leurs homologues masculins. 58 % dépensent moins de 1 000 euros contre 51 % pour les hommes. Inversement, elles ne sont que 13 % à dépenser plus de 16 000 euros, contre 16 % chez les hommes. Il faut cependant noter que les moyens engagés dépendent surtout du secteur d’activité et de la catégorie juridique. Ainsi, 68 % des entreprises individuelles débutent avec moins de 1 000 euros alors que ce n’est le cas que de 11 % des sociétés.

Publication rédigée par :Nicole Danis, Yann Leurs (Insee)

Sources

Le système d’information sur les nouvelles entreprises (Sine) est un dispositif permanent d’observation d’une génération de nouvelles entreprises tous les quatre ans. Le champ de l’enquête Sine couvre l’ensemble des créations d’entreprises du premier semestre qui ont vécu plus d’un mois dans l’ensemble des activités économiques marchandes non agricoles.

Les entreprises créées sous le régime du micro-entrepreneur font l’objet d’une enquête spécifique. Dans le cadre de l’enquête Sine micro-entrepreneurs 2018, un compte est dit démarré au moment de l’enquête s’il existe une déclaration de chiffre d’affaires positif pour 2018.

Définitions

Une création d’entreprise correspond à la mise en œuvre de nouveaux moyens de production. Ce concept, harmonisé au niveau européen, inclut aussi la réactivation d’entreprise après une interruption de plus d’un an et la reprise d’entreprise s’il n’y a pas continuité entre la situation du cédant et celle du repreneur, du point de vue de l’activité et de la localisation.

La notion de création d’entreprise dans les enquêtes Sine est un peu plus restrictive. En effet, sont exclues les entreprises ayant vécu moins d’un mois et les « activations économiques » correspondant à des immatriculations dans Sirene (système informatisé du répertoire national des entreprises et des établissements) effectuées avant le 1er janvier de l’année de la génération considérée.