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Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'Azur · Mars 2021 · n° 73
Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'AzurFemmes créatrices d'entreprises – Une part assez stable mais les profils évoluent

Frédéric Châtel, Virginie Mora (Insee)

Au premier semestre 2018, 29 % des nouvelles entreprises « classiques » ont été créées par des femmes en Provence-Alpes-Côte d’Azur, ainsi que 39 % des nouvelles micro-entreprises. Ces proportions ont peu évolué depuis 2010. Comme pour l’emploi salarié, la part des femmes varie fortement selon les secteurs. Elles sont largement majoritaires dans la santé-action sociale, secteur où les créations se sont fortement développées au cours de la décennie. Elles demeurent en revanche très rares dans les secteurs de la construction et de l’information-communication.

Les créatrices d’entreprises sont plus diplômées que les créateurs et cette tendance s’est accentuée depuis 2010. Par ailleurs, la création relève plus fréquemment d’une reconversion professionnelle pour les créatrices et il s’agit plus souvent de leur première entreprise. Elles sont plus nombreuses que les créateurs à diriger de façon partagée leur entreprise.

Insee Flash Provence-Alpes-Côte d'Azur
No 73
Paru le :Paru le08/03/2021

En 2018, 29 % de femmes à la tête des nouvelles entreprises « classiques »

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, au cours du premier semestre 2018, 29 % des créateurs d’entreprises « classiques » (hors régime de micro-entrepreneur) sont des femmes, alors que ces dernières occupent la moitié des emplois salariés. En baisse en 2014 (- 3 points), la part des créatrices « classiques » retrouve son niveau de 2010. Il est proche de celui de la plupart des autres régions de province, à l'exception de la Nouvelle-Aquitaine, où les femmes sont à la tête de 34 % des créations. L'Île-de-France est en retrait, en revanche, avec seulement 25 % de créatrices. L'un des objectifs de l'accord-cadre national en faveur de l’entrepreneuriat des femmes, signé le 6 octobre 2017, est de porter ce taux à 40 %.

Des créations majoritairement féminines dans la santé-action sociale

Selon les secteurs d’activité, les femmes sont inégalement présentes parmi les créateurs d’entreprises. La santé-action sociale se distingue nettement : avec deux créations sur trois réalisées par des femmes, elles y sont nettement majoritaires (figure 1). Elles sont également proches de la parité dans le commerce de détail, l’hébergement-restauration et dans les autres activités de services, qui regroupent notamment les activités de coiffure et d’esthétique. À l’inverse, les femmes restent rares parmi les créateurs d’entreprises de la construction ou de l’information-communication.

Ces disparités sont à l’image de celles qui existent dans les emplois salariés : 81 % des salariés du secteur de la santé et de l’action sociale sont des femmes contre 15 % de ceux de la construction. Dans tous les secteurs cependant, les femmes sont moins représentées parmi les créateurs d’entreprise que parmi les salariés.

Entre 2010 et 2018, certains secteurs ont gagné ou, au contraire, perdu de l’importance. Chez les créatrices, le secteur santé-social, qui ne rassemblait que 11 % des créations en 2010, en représente 22 % en 2018. Les parts de créations dans les activités spécialisées scientifiques et techniques et dans l’hôtellerie-restauration ont également progressé mais de façon moins appuyée. À l’inverse, comme c’est le cas pour les créateurs, les créations se font moins souvent qu’en 2018 dans le commerce de détail et la construction.

Figure 1Part d’entreprises créées par des femmes parmi les entreprises créées en Provence-Alpes-Côte d’Azur

en %
Part d’entreprises créées par des femmes parmi les entreprises créées en Provence-Alpes-Côte d’Azur (en %) - Lecture : 67 % des entreprises créées au 1ᵉʳ semestre de 2018 dans le secteur de la santé-action sociale ont été créées par des femmes.
Secteur ou regroupement de secteur d’activité (A21) Part de créatrices
Santé-action sociale 67
Commerce de détail (alimentaire ou hors alimentaire) 45
Autres activités de services (coiffure, esthétique…) 41
Hébergement-restauration 36
Enseignement, arts, spectacles et activités récréatives 35
Activités spécialisées scientifiques et techniques 31
Activités financières, d’assurance ou immobilières 29
Ensemble des secteurs d’activité 29
Industrie manufacturière, extractive, eau et électricité 25
Activités de services admin. et de soutien 23
Réparation automobile et commerce hors détail 20
Transports-entreposage 18
Information-communication 14
Construction 3
  • Lecture : 67 % des entreprises créées au 1ᵉʳ semestre de 2018 dans le secteur de la santé-action sociale ont été créées par des femmes.
  • Champ : unités légales marchandes exploitantes créées au 1ᵉʳ semestre 2018, hors activités agricoles, de location et certaines formes de société civile. Créations « classiques » hors régime du micro-entrepreneur.
  • Source : Insee, Sine 2018

Figure 1Part d’entreprises créées par des femmes parmi les entreprises créées en Provence-Alpes-Côte d’Azur

  • Lecture : 67 % des entreprises créées au 1ᵉʳ semestre de 2018 dans le secteur de la santé-action sociale ont été créées par des femmes.
  • Champ : unités légales marchandes exploitantes créées au 1ᵉʳ semestre 2018, hors activités agricoles, de location et certaines formes de société civile. Créations « classiques » hors régime du micro-entrepreneur.
  • Source : Insee, Sine 2018

Des créatrices d’entreprises plus diplômées que les créateurs

Les créatrices d’entreprises sont nettement plus souvent diplômées de l’enseignement supérieur que les créateurs : 67 % contre 45 % (figure 2). Cela tient en partie à des répartitions bien différentes selon les sexes entre secteurs. Le surcroît de créatrices dans le secteur de la santé, où la part de diplômés de niveau supérieur au baccalauréat est massive, va ainsi de pair avec leur faible représentation dans la construction, où la possession de diplômes de l’enseignement supérieur est nettement plus rare. Cependant, au sein même de la plupart des secteurs d’activité, les créatrices sont autant, et souvent davantage diplômées de l’enseignement supérieur que les créateurs. C’est le cas notamment de l'hébergement-restauration, où 47 % des créatrices d'entreprises sont diplômées de l’enseignement supérieur contre 32 % des créateurs. Elles le sont également plus souvent que les salariées. Chez les hommes, ce surcroît existe mais il est moins marqué.

Enfin, les créatrices d’entreprises sont aussi davantage diplômées qu’en 2010, évolution plus appuyée là aussi que chez les créateurs. L’évolution de la structure des créations par secteurs, en faveur de la santé notamment et au détriment du commerce de détail, explique un peu moins de la moitié de la forte progression du niveau de diplôme des créatrices au cours de la décennie.

Créatrices et créateurs sont en revanche d'âges comparables : un peu moins d'un sur cinq a moins de 30 ans et près d'un sur quatre plus de cinquante ans. Il n'en allait pas de même en 2010 : l'âge moyen des créatrices de la région s'est élevé tandis que celui des créateurs est resté stable.

Enfin, 55 % des hommes comme des femmes qui créent une entreprise ont des enfants à charge. Les situations de monoparentalité concernent 12 % des créatrices, une proportion comparable à celle qui prévaut pour les salariées en emploi (10 %).

Figure 2Profil des créatrices et des créateurs d’entreprises de Provence-Alpes-Côte d’Azur

Profil des créatrices et des créateurs d’entreprises de Provence-Alpes-Côte d’Azur - Lecture : 67 % des créatrices d’entreprises de 2018 en Provence-Alpes-Côte d’Azur possèdent un diplôme de niveau supérieur au baccalauréat.
Part de créateurs concernés en 2018 (%) Part de créateurs concernés en 2010 (%)
Créatrices Créateurs Créatrices Créateurs
Possession d’un diplôme de niveau supérieur au baccalauréat 67 45 46 34
Créateurs de moins de 30 ans 18 18 22 17
Créateurs de 50 ans ou plus 23 26 15 22
Direction de l’entreprise effectuée par le seul créateur 64 71 69 73
Absence d’emploi invoquée comme l’une des raisons de création 17 14 24 23
Montant nécessaire pour démarrer inférieur à 2000 euros 31 32 23 19
Première entreprise créée 76 60 74 63
Activité de l’entreprise créée différente du métier principal du créateur 41 33 43 35
Présence de chefs d’entreprises ou de personnes à leur compte dans l’entourage 70 73 72 69
Absence de salariés (hors créateur) quelques mois après la création (*) 82 73 83 82
  • (*) au moment de l’enquête, en novembre 2010 ou 2018
  • Lecture : 67 % des créatrices d’entreprises de 2018 en Provence-Alpes-Côte d’Azur possèdent un diplôme de niveau supérieur au baccalauréat.
  • Champ : unités légales marchandes exploitantes créées au 1ᵉʳ semestre 2010 et au 1ᵉʳ semestre 2018, hors activités agricoles, de location et certaines formes de société civile. Créations « classiques » hors régime du micro-entrepreneur.
  • Source : Insee, Sine 2010 et 2018

Une direction plus souvent partagée

Qu’elle soit créée par un homme ou une femme, une entreprise sur dix est dirigée en couple. En revanche, les créatrices adoptent plus souvent que les créateurs d'autres formes de direction partagée (familiale ou non) et déclarent ainsi moins souvent diriger leur entreprise seule (64 % contre 71 %).

Tous secteurs d’activité confondus, les conditions de la création ne diffèrent pas de façon majeure. Parmi les raisons les ayant conduites à créer une entreprise, 17 % des créatrices évoquent le fait qu'elles n'avaient pas d'emploi contre 14 % des créateurs. De même, les moyens engagés pour démarrer l’activité sont dans l'ensemble comparables : 31 % des unes et des autres ont démarré avec moins de 2 000 euros. D’un secteur à l’autre, les moyens nécessaires pour démarrer l’activité de l’entreprise varient fortement. Ils sont nettement plus élevés dans le commerce de détail ou la restauration-hébergement que dans la santé. Toutefois, à secteur donné, les montants engagés ne diffèrent pas sensiblement entre créateurs et créatrices. Entre 2010 et 2018, la part d'entreprises s'appuyant sur un investissement de départ modeste s'est nettement accrue. Cela reflète là aussi l'évolution enregistrée sur les secteurs de création.

Plus de « primo-créations » et de reconversions chez les créatrices

Les femmes sont bien plus souvent « primo-créatrices » que les hommes : 76 % n’avaient jamais créé d’entreprise auparavant contre 60 % des hommes. Cet écart se retrouve dans la plupart des secteurs.

En outre, et y compris à caractéristiques comparables, la création d'entreprise correspond plus souvent à une reconversion professionnelle pour les créatrices que pour les créateurs. Dans la région, 40 % des créatrices déclarent ainsi que l’activité de l’entreprise créée diffère du principal métier exercé jusque-là, contre 33 % des créateurs. Ce surcroît de reconversion des créatrices est très marqué dans le commerce de détail, où plus des trois quarts des femmes sont concernées, contre moins de la moitié des hommes.

Enfin, les femmes créatrices ont aussi souvent que les hommes des chefs d’entreprises ou des personnes à leur compte dans leur entourage.

Pour les femmes comme pour les hommes, la situation n’a pas varié sur ces points entre 2010 et 2018.

Moins d’embauches dans les entreprises créées par les femmes

Lorsqu’elles créent des entreprises, les femmes embauchent moins souvent des salariés dès le début de leur activité : quelques mois après leur création, 82 % des entreprises créées par des femmes n’emploient aucun salarié contre 74 % pour les créateurs. Ces proportions varient fortement entre les secteurs. Au niveau national, cette moindre embauche précoce par les créatrices se retrouve également. Elle s'explique par les différences existant par ailleurs entre créations d’entreprises des femmes et des hommes. En particulier, à caractéristiques comparables, les embauches sont plus importantes dans les secteurs de la construction et de l'hébergement-restauration ainsi qu'en l'absence de reconversion professionnelle.

Encadré 1 - Pérennité des entreprises : de forts écarts selon les secteurs

En France, trois ans après leur création, 73 % des entreprises créées par des femmes restent pérennes, contre 76 % de celles créées par des hommes. Cet écart disparaît si l’on tient compte des différences existant d’emblée entre les projets des uns et des autres. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, c’est-à-dire si l’on tient compte notamment du secteur de création, de la catégorie juridique des entreprises créées, de l’expérience acquise dans le métier avant la création, des moyens engagés au moment de la création ou encore de la présence de salariés dès l’année de création, la pérennité des entreprises ne diffère plus significativement selon le sexe du créateur.

Parmi les entreprises créées par des femmes, en France comme dans la région, certaines ont plus de chance d’être toujours actives trois ans après la création. À caractéristiques semblables, il s’agit notamment de celles créées dans les secteurs de la santé, de l’industrie, des activités spécialisées scientifiques et techniques à l'inverse de celles dans l’hôtellerie-restauration et plus encore dans le commerce, de détail ou pas. Les entreprises créées pour faire pièce à des difficultés d’emploi sont moins pérennes que les autres, à l'inverse de celles où les montants engagés au départ sont importants. Et toujours à caractéristiques comparables, les entreprises qui comptent au moins un salarié dès les premiers mois d’activité et celles qui ne sont pas créées dans un contexte de reconversion s’avèrent sensiblement plus pérennes.

Encadré 2 - Les femmes, davantage présentes dans les micro-entreprises

En Provence-Alpes-Côte d’Azur 39 % des créateurs d’entreprises créées sous le régime de micro-entrepreneur en 2018 sont des femmes, une part comparable à celle de la province. Les micro-entreprises sont donc plus souvent créées par des femmes que ne le sont les entreprises « classiques ».

Parmi les entreprises créées en 2014, les micro-entreprises sont moins nombreuses que les entreprises classiques à être encore actives trois ans après leur création et elles permettent moins souvent de dégager des revenus suffisants pour vivre. En Provence-Alpes-Côte d’Azur comme en France, plus de trois quarts des micro-entrepreneurs qui ont créé leur entreprise en 2014 et sont encore actifs trois ans plus tard, dégagent moins de 15 000 euros de chiffre d'affaires annuel, contre un peu plus d’un quart des entrepreneurs individuels classiques. L'activité exercée sous le régime de micro-entrepreneur constitue bien plus fréquemment qu'en entreprise classique une activité complémentaire ou ponctuelle.

En France, les créations d’entreprises sous le régime de micro-entrepreneur sont en fort développement depuis 2017. Elles représentent 65 % de l’ensemble des créations d’entreprises de 2020, contre 52 % en 2016.

Encadré 3 - Partenariat

Cette étude a été réalisée en partenariat avec la Direction régionale aux droits des femmes et à l’égalité (DRDFE).

Publication rédigée par :Frédéric Châtel, Virginie Mora (Insee)

Pour comprendre

Les entreprises dites classiques dans cette étude sont les entreprises individuelles hors celles créées sous le statut de micro-entrepreneur, ainsi que les sociétés.

Les caractéristiques du créateur sont celles concernant la personne « responsable de l’entreprise » qui a rempli le questionnaire, y compris lorsque la direction de l’entreprise est partagée (par le responsable et son conjoint, ou le responsable et d’autres personnes).

Le dispositif Sine concerne les unités légales marchandes exploitantes enregistrées dans le répertoire Sirene. Il exclut les activités agricoles, ainsi que les activités de locations et certaines formes de sociétés civiles.

Les secteurs d’activité sont exprimés à partir de la nomenclature agrégée en 21 postes (niveau A 21) associée à la NAF rév. 2. Dans le secteur commerce et réparation automobile (G) une distinction est faite entre commerce de détail (y compris sur les marchés, hors pharmacies et hors véhicules et accessoires automobiles) d'une part, et d'autre part la réparation automobile et autres activités de commerce, ces deux sous-ensembles se caractérisant par des parts très différentes de femmes parmi les créations. Pour des raisons de lisibilité, certains secteurs ont, à l’inverse, été réunis. Ils présentent des taux de féminisation de la création d'entreprise comparables ou bien comportent très peu de créations.

Sources

Le dispositif Sine (système d’information sur les nouvelles entreprises) permet de suivre un échantillon d’entreprises nouvellement créées sur les cinq premières années de vie. Une nouvelle cohorte est enquêtée tous les quatre ans. Les entreprises sont enquêtées quelques mois après leur création, puis trois ans et cinq ans après. Dans cette étude, les enquêtes Sine portant sur les créations de 2010, 2014 et 2018 sont mobilisées. Les entreprises décrites dans la partie principale de l’étude ont été créées au 1ᵉʳ semestre 2018 et enquêtées pour la première fois à l’automne 2018. Elles sont comparées à celles créées en 2010. Les entreprises décrites dans l’encadré 1 sont celles qui ont été créées en 2014. Elles ont été enquêtées pour la première fois à la fin de 2014, puis en 2017.

Pour en savoir plus

Dorolle A., « Les créateurs d’entreprises de 2018 : deux sur trois sont seuls à l’origine du projet de création », Insee Première n° 1818, septembre 2020

D’Andriat A, Gabarret I., « Ouvrir dans un nouvel ongletFemmes et entrepreneurs : trente ans de recherche en motivation entrepreneuriale féminine », Revue de l’entrepreneuriat, n° 3-4, vol. 15, 2016

Le Loarne-Lemaire S., « Ouvrir dans un nouvel ongletIntrouvable diversité entrepreneuriale... », Entreprendre et Innover, De Boeck supérieur, 2014/1 n° 20