Hausse des prix immobiliers et mesure du niveau de vie
Les déflateurs utilisés dans le calcul des mesures usuelles de pouvoir d’achat et de niveau de vie ne retracent qu’une partie de la forte augmentation des prix de l’immobilier observée depuis la fin des années 1990. L’absence de prise en compte des prix immobiliers dans ces mesures serait sans incidence si ces prix n’avaient pas d’effet sur le bien-être agrégé. Trois arguments sont fréquemment avancés en ce sens : neutralité entre ménages (la hausse des prix réduit le pouvoir d’achat des acheteurs mais accroît symétriquement celui des vendeurs), neutralité sur le cycle de vie du ménage (l’effort d’épargne supplémentaire dû à la hausse des prix est compensé par un surcroît de pouvoir d’achat plus tard dans le cycle de vie), compensation par les taux d’intérêt (la baisse des taux compense l’effet de la hausse des prix). Nous reprenons le cadre d’analyse de Bajari et al. (2005) et montrons que la validité de l’hypothèse de neutralité entre ménages dépend du caractère temporaire ou permanent de la hausse des prix. La neutralité sur le cycle de vie est examinée dans le cadre d’un modèle stylisé : elle n’est vérifiée qu’à condition que le logement n’ait pas de valeur d’usage. Lorsqu’elle compense les effets de la hausse des prix pendant la période d’accession à la propriété, la baisse des taux d’intérêt entraîne un surcroît de pouvoir d’achat plus tard dans le cycle de vie. Les effets d’une hausse des prix immobiliers sont hétérogènes selon le revenu en raison de contraintes spécifiques (d’endettement et de surface minimale). Les pertes de bien-être présentent ainsi un profil en marche d’escalier ou en U inversé, et sont maximales pour des revenus intermédiaires. Un indice à utilité constante reflète imparfaitement cette hétérogénéité lorsque la hausse des prix induit un effet d’éviction du marché immobilier.