Confinement : des conséquences économiques inégales selon les ménages
Le confinement de la population mis en place entre le 17 mars et le 11 mai 2020 s’est traduit par une contraction sans précédent de l’activité économique en France. En mai 2020, un quart des personnes déclarent que leur situation financière s’est dégradée, et cette proportion est d’autant plus élevée que le niveau de vie du ménage était initialement bas.
Les ménages avec enfants sont aussi plus touchés que les ménages sans enfant. Les dispositifs de maintien d’activité ont amorti les effets de la chute de l’activité économique sur les ménages de manière inégale selon leur profil. La moitié des ouvriers, et un quart des cadres, déclarent être passés, au moins en partie, par le chômage technique ou partiel entre le début du confinement et le mois de mai. Les cadres ont plus souvent travaillé à distance : 80 % des cadres en activité en mai ont eu recours au moins partiellement au télétravail, contre 35 % des employés et seulement 6 % des ouvriers. Un quart des personnes ayant télétravaillé ont le sentiment que leur temps de travail a augmenté. Si ces dispositifs ont permis de maintenir les relations d’emploi, au moins à court terme, pour la majorité des salariés, les jeunes ont été bien plus exposés aux conséquences de la chute de l’activité économique.
- Avec le confinement, une chute brutale de l’activité économique
- En mai, un quart des ménages déclare que leur situation financière s’est dégradée à la suite du confinement
- Les ménages avec enfants déclarent plus souvent que les ménages sans enfant que la situation financière de leur foyer s’est dégradée depuis le confinement
- En mai, un tiers des personnes en emploi sont passées par le chômage technique ou partiel depuis le début du confinement
- Parmi les jeunes en emploi avant le confinement, plus d’un tiers ne travaillent pas en mai
- Encadré - Mesure du télétravail
Avec le confinement, une chute brutale de l’activité économique
L’accélération de la pandémie de Covid-19 en France au cours du mois de mars a abouti au confinement de la population, du 17 mars au 11 mai 2020, avec une restriction des déplacements au strict nécessaire. La levée de ces restrictions à partir du 11 mai s’est faite progressivement.
Si la progression de l’épidémie de Covid-19 a été contenue, le confinement a frappé de plein fouet l’économie française. L’activité économique a reculé de 19 % au deuxième trimestre 2020 par rapport au deuxième trimestre 2019 [Insee, 2020]. Les mesures exceptionnelles de soutien à l’activité, notamment le recours au chômage partiel, ont permis d’amortir les conséquences pour les ménages : la baisse du revenu disponible brut des ménages n’a été que de 2,6 % au deuxième trimestre 2020. Néanmoins, les disparités entre les ménages sont marquées. L’enquête EpiCov (sources), dont la première vague a eu lieu en mai 2020, permet d’analyser les conséquences pour les ménages du confinement, notamment sur leur situation financière.
En mai, un quart des ménages déclare que leur situation financière s’est dégradée à la suite du confinement
En mai 2020, 23 % des ménages déclarent que leur situation financière s’est dégradée depuis le début du confinement. À l’inverse, seulement 2 % déclarent que leur situation financière s’est améliorée, tandis que pour les deux tiers, elle est restée stable.
Cette dégradation est d’autant plus forte que les revenus des ménages étaient initialement faibles. Parmi les 10 % de ménages les plus pauvres (ceux dont le niveau de vie se situait en dessous du premier décile), 35 % perçoivent une dégradation de leur situation financière. Cette proportion est deux fois plus faible pour les 10 % de ménages les plus aisés (figure 1).
Cette dégradation de la situation financière a pu se traduire par des difficultés concrètes pour de nombreux foyers. Parmi les ménages qui ont perçu une détérioration de leur situation financière au moment du confinement, 42 % déclarent en mai que « leur situation financière est juste et qu’il faut faire attention » (contre 34 % pour l’ensemble de la population), 27 % que leur situation financière est « difficile » (contre 11 % pour l’ensemble de la population) et 7 % qu’ ils « ne peuvent pas s’en sortir sans s’endetter » (2 % pour l’ensemble de la population).
Cette situation s’explique essentiellement par la chute de l’activité économique. Ainsi, les retraités paraissent préservés de cette situation, tandis qu’un tiers des actifs déclarent une perte de revenu. De nombreux autres facteurs sont également corrélés avec le fait d’avoir perçu une dégradation des revenus. Alors que la plupart des commerces (hors alimentaire), des services personnels et des hôtels-cafés-restaurants ont été fermés pendant le confinement, les artisans et les commerçants ont été les plus directement touchés par la chute de l’activité. Plus de la moitié des indépendants déclarent une dégradation de leur situation financière. Les ouvriers sont ensuite les plus affectés, avec 37 % de ménages déclarant une perte de revenu. Pour les autres catégories socioprofessionnelles, ces proportions se situent entre 25 % (pour les cadres et professions intellectuelles supérieures, qui incluent les professions libérales) et 30 % (pour les agriculteurs).
tableauFigure 1 – Dégradation de la situation financière selon le décile de niveau de vie des ménages
Inférieur au 1er décile | 34,8 |
---|---|
Du 1er au 3e décile | 29,7 |
Du 3e au 5e décile | 23,5 |
Du 5e au 7e décile | 19,0 |
Du 7e au 9e décile | 16,0 |
Supérieur au 9e décile | 15,5 |
- Lecture : en mai 2020, parmi les 10 % de ménages dont le niveau de vie est le plus faible, 35 % déclarent que leur niveau de vie a baissé depuis le début du confinement.
- Champ : personnes âgées de 15 ans ou plus, résidant hors Ehpad, maisons de retraite et prisons, en France métropolitaine, en Martinique, en Guadeloupe et à la Réunion.
- Source : Inserm-Drees, enquête EpiCov, vague 1.
graphiqueFigure 1 – Dégradation de la situation financière selon le décile de niveau de vie des ménages
Les ménages avec enfants déclarent plus souvent que les ménages sans enfant que la situation financière de leur foyer s’est dégradée depuis le confinement
Ces écarts observés entre catégories socioprofessionnelles s’expliquent en partie par le fait que les mesures visant à maintenir l’emploi et les revenus ne sont pas accessibles à tous de la même façon. Le recours au travail à distance facilite la continuité de l’activité, ce qui explique que les salariés qui ont télétravaillé (encadré) sont moins nombreux à déclarer une perte financière liée au confinement, même une fois tenu compte de leur situation financière initiale et de leur catégorie socioprofessionnelle. En revanche, si le chômage partiel permet de maintenir la relation d’emploi, la rémunération peut baisser pour les salariés : si la rémunération en activité partielle ne pouvait être inférieure au Smic, le minimum garanti pendant le confinement correspondait à 84 % du salaire net.
Les ménages avec enfants sont plus nombreux à déclarer une dégradation de leur situation financière. C’est le cas de 33 % d’entre eux, contre 18 % des ménages sans enfant. Même en tenant compte de l’âge, de la catégorie socioprofessionnelle, du niveau de vie et du fait d’être passé par le chômage partiel ou d’avoir télétravaillé, cette surreprésentation des ménages avec enfants parmi ceux dont la situation financière s’est dégradée demeure. Au moins deux éléments peuvent l’expliquer. La fermeture des établissements scolaires, contraignant les parents à assurer la garde et le suivi scolaire de leurs enfants, a pu les obliger à restreindre leur temps de travail. Les droits aux arrêts de travail pour garde d’enfants ont notamment été généralisés à la suite de la fermeture des établissements scolaires. Ces derniers sont rémunérés par l’assurance maladie, et à partir du 1er mai, selon les modalités de l’activité partielle, ce qui peut se traduire par une perte de revenu. De plus, la fermeture des cantines scolaires a pu entraîner des frais, les familles ayant dû prendre en charge ces repas, sans bénéficier des subventions que constituent les tarifs sociaux.
En mai, un tiers des personnes en emploi sont passées par le chômage technique ou partiel depuis le début du confinement
Parmi les personnes en emploi avant le début du confinement, 16 % déclarent en mai être passées totalement, et 20 % en partie, par le chômage technique ou partiel (figure 2). Depuis le début du confinement, le recours par les entreprises aux dispositifs d’activité partielle ont été facilités. La réduction d’activité était le plus souvent liée à des pertes de débouchés [Ouvrir dans un nouvel ongletDares, 2020]. Outre la baisse drastique de la demande, il a pu être difficile pour certaines entreprises de maintenir des conditions de travail garantissant la sécurité sanitaire, selon les modes de production et les secteurs d’activité. De même, à l’intérieur des entreprises, certaines catégories d’emploi ont été plus directement touchées que d’autres. De fait, alors que 24 % des ouvriers sont passés totalement au chômage partiel ou technique entre mi-mars et mai, cette proportion est de seulement 8 % pour les cadres. Cet écart s’explique en partie par les possibilités différenciées de recours au travail à distance.
tableauFigure 2 - Passage par le chômage partiel ou technique selon la catégorie socioprofessionnelle
En partie | Totalement | |
---|---|---|
Ouvriers | 30,2 | 23,7 |
Employés | 17,9 | 18,4 |
Professions intermédiaires | 20,3 | 12,5 |
Cadres et professions intellectuelles supérieures | 17,8 | 7,8 |
Artisans, commerçants | 14,7 | 20,3 |
Agriculteurs | 2,9 | 0,7 |
Ensemble | 20,1 | 15,5 |
- Lecture : en mai 2020, 16 % des personnes en emploi avant le confinement déclarent être passées totalement par un dispositif de chômage partiel ou technique, et 20 % en partie.
- Champ : personnes âgées de 15 ans ou plus, en emploi avant le début du confinement et résidant hors Ehpad, maisons de retraite et prisons, en France métropolitaine, en Martinique, en Guadeloupe et à la Réunion.
- Source : Inserm-Drees, enquête EpiCov, vague 1.
graphiqueFigure 2 - Passage par le chômage partiel ou technique selon la catégorie socioprofessionnelle
Alors que 80 % des cadres en activité déclarent télétravailler la semaine avant l’enquête (57 % travaillant exclusivement depuis leur domicile), c’est le cas seulement de 6 % des ouvriers (figure 3). Cependant, si avant le confinement le recours au télétravail était surtout le fait des cadres [Ouvrir dans un nouvel ongletHallépée, Mauroux, 2019], ce dispositif s’est élargi à d’autres salariés avec le confinement. Ainsi, parmi les salariés qui ont travaillé au moins une heure la semaine précédant l’enquête en mai, 28 % des professions intermédiaires et 21 % des employés ont travaillé exclusivement depuis leur domicile. Au total, 28 % des personnes en emploi qui ont travaillé la semaine précédant l’enquête l’ont fait exclusivement depuis leur domicile, et 16 % partiellement. À l’inverse, 56 % ont travaillé uniquement en dehors de leur domicile.
Parmi les personnes qui ont exclusivement télétravaillé la semaine précédant l’enquête, 25 % déclarent que leur temps de travail a augmenté pendant le confinement, contre 16 % parmi celles qui n’ont pas télétravaillé. Même en tenant compte du nombre d’enfants, du fait de télétravailler ou pas, ainsi que du genre, relativement aux autres catégories socioprofessionnelles, les cadres, et dans une moindre mesure les professions intermédiaires, sont plus nombreux à déclarer une augmentation de leur temps de travail depuis le début du confinement. Les salariés passés au télétravail exclusif sont aussi plus nombreux à déclarer travailler plus. Néanmoins, sans surprise, la présence de jeunes enfants dans le ménage réduit nettement la probabilité de déclarer une augmentation de son temps de travail.
Les femmes sont plus nombreuses à déclarer que leur temps de travail a augmenté : c’est le cas de 23 % d’entre elles, contre 15 % des hommes. Cela peut s’expliquer en partie par la surreprésentation des femmes parmi les professions qui ont été particulièrement mobilisées pendant le confinement, comme les professions de santé, les caissiers ou encore les enseignants, qui, pour assurer une continuité pédagogique à distance, ont dû renouveler profondément leurs modes de travail. À l’inverse, plus d’un tiers des actifs, hommes ou femmes, déclaraient que leur temps de travail avait diminué pendant le confinement, qu’ils aient travaillé depuis leur domicile ou non.
tableauFigure 3 - Recours au télétravail selon la catégorie socioprofessionnelle
Partiel | Exclusif | |
---|---|---|
Ouvriers | 5,0 | 1,5 |
Employés | 13,9 | 20,7 |
Professions intermédiaires | 18,8 | 28,0 |
Cadres et professions intellectuelles supérieures | 22,8 | 57,3 |
Artisans, commerçants | 13,3 | 7,9 |
Agriculteurs | 4,8 | 0,6 |
Ensemble | 15,8 | 28,1 |
- Lecture : en mai 2020, 28 % des personnes qui avaient travaillé la semaine précédant l’enquête déclarent avoir exclusivement télétravaillé, 16 % en partie.
- Champ : personnes âgées de 15 ans ou plus, ayant travaillé au moins une heure la semaine précédant l’enquête et résidant hors Ehpad, maisons de retraite et prisons, en France métropolitaine, en Martinique, en Guadeloupe et à la Réunion.
- Source : Inserm-Drees, enquête EpiCov, vague 1.
graphiqueFigure 3 - Recours au télétravail selon la catégorie socioprofessionnelle
Parmi les jeunes en emploi avant le confinement, plus d’un tiers ne travaillent pas en mai
Tous les salariés n’ont pas bénéficié des dispositifs de maintien dans l’emploi. Parmi les personnes en emploi au début du confinement interrogées en mai, 3 % ont perdu leur emploi du fait d’une fin de contrat ou d’un licenciement, et la très grande majorité d’entre eux (80 %) n’avait pas retrouvé d’emploi au moment de l’enquête. Plus généralement, 27 % des personnes en emploi avant le confinement déclarent ne pas avoir travaillé la semaine avant l’enquête, ce qui s’explique aussi par la pose de congés ou le recours au chômage technique ou partiel.
Les disparités sont marquées selon les profils de salariés, notamment en fonction de l’âge (figure 4). Ainsi, 9 % des personnes en emploi avant le confinement âgées de 15 à 24 ans ont perdu leur emploi contre moins de 2 % des actifs de 40 ans à 65 ans. Parmi les jeunes de moins de 25 ans qui étaient en emploi avant le confinement, 37 % déclarent ne pas avoir travaillé la semaine précédant l’enquête en mai.
Étant les plus à risque d’occuper des emplois temporaires, les jeunes récemment entrés sur le marché du travail ont été les premières victimes de la chute brutale de l’activité économique. En effet, face à la baisse de l’activité et à l’incertitude sur leurs débouchés, les entreprises ont pu préférer ne pas pérenniser leur main d’œuvre temporaire (CDD ou intérim) ou réduire leurs embauches. D’après les premières enquêtes conjoncturelles menées par la Dares, fin mars, 11 % des entreprises déclaraient une baisse de leurs effectifs. En outre, l’emploi intérimaire s’est contracté de 54 % entre fin décembre 2019 et fin avril 2020 [Ouvrir dans un nouvel ongletMaillard, 2020], et les embauches en CDD pour les dix derniers jours de mars se situent environ 60 % en deçà de leur niveau de fin mars 2019 [Ouvrir dans un nouvel ongletMilin, 2020].
tableauFigure 4 - Part des fins de contrat selon l’âge
15-24 ans | 8,6 |
---|---|
25-29 ans | 4,1 |
30-39 ans | 2,8 |
40-49 ans | 1,8 |
50 ans ou plus | 1,3 |
- Lecture : en mai 2020, 8,6 % des 15-24 ans qui avaient un emploi avant le confinement ont perdu leur emploi à la suite d’une fin de contrat ou d’un licenciement.
- Champ : personnes âgées de 15 ans ou plus, en emploi avant le début du confinement et résidant hors Ehpad, maisons de retraite et prisons, en France métropolitaine, en Martinique, en Guadeloupe et à la Réunion.
- Source : Inserm-Drees, enquête EpiCov, vague 1.
graphiqueFigure 4 - Part des fins de contrat selon l’âge
Encadré - Mesure du télétravail
Dans l’enquête EpiCov, il était demandé aux personnes qui avaient travaillé au moins une heure la semaine précédente si elles télétravaillaient avant le confinement, et pour celles qui n’avaient jamais télétravaillé, si elles avaient commencé à télétravailler depuis le confinement. Parmi celles qui étaient dans l’un ou l’autre cas, il était ensuite demandé de préciser si les 7 jours précédents, elles avaient « travaillé exclusivement depuis leur domicile » (désigné ici comme du télétravail exclusif), ou si « il leur était arrivé de se rendre sur leur lieu de travail » (télétravail partiel).
Dans l’enquête EpiCov, en mai 2020, 17 % des personnes en emploi déclarent qu’elles télétravaillaient avant le confinement. Cette proportion est beaucoup plus élevée que celles des dernières enquêtes Surveillance médicale des expositions des salariés aux risques professionnels (Sumer) et Relations professionnelles et Négociations d’entreprise (Réponse). Selon ces enquêtes, en 2017, seuls 3 % des salariés pratiquaient régulièrement le télétravail et 7 % au moins occasionnellement [Ouvrir dans un nouvel ongletHallépée, Mauroux, 2019].
Plusieurs raisons expliquent ces différences. Dans l’enquête EpiCov, les questions concernant le télétravail n’étaient posées qu’aux personnes ayant déclaré avoir travaillé au moins une heure la semaine précédant l’enquête. Or, parmi les personnes s’étant déclaré en emploi, seulement 73 % ont travaillé la semaine précédant l’enquête. Cette situation peut s’expliquer, au moins en partie, par le fait que certaines étaient au chômage partiel ou en congés au moment de l’enquête. Il est cependant probable que les salariés pour lesquels le télétravail n’était pas possible sont plus à risque de connaître une réduction d’activité, entraînant une surreprésentation des télétravailleurs parmi les personnes qui travaillaient juste avant l’enquête. Néanmoins, même en faisant l’hypothèse extrême que l’ensemble des actifs qui avaient un emploi mais n’ont pas travaillé au moins une heure la semaine précédant l’enquête n’ont jamais télétravaillé, la proportion de télétravailleurs avant le confinement serait estimée à 12 %. Cet écart résiduel peut provenir aussi d’une différence de mesure : dans l’enquête EpiCov, le télétravail est mesuré uniquement sur un mode déclaratif. ll peut simplement désigner du travail à la maison, ce qui ne répond pas à la définition stricte du télétravail dans le Code du travail. Selon celui-ci, le télétravail correspond au fait de recourir à des technologies de l’information et de la communication pour effectuer, hors des locaux de l’employeur, le travail qui aurait pu être réalisé sur le poste du travail habituel, ce qui était la définition retenue dans les enquêtes Reponse et Sumer 2017. À titre de comparaison, dans l’enquête Emploi, 47 % des personnes en emploi au sens du BIT déclarent avoir travaillé à domicile dans les quatre semaines précédant l'enquête, contre seulement 23 % sur la période équivalente en 2019 [Jauneau, Vidalenc, 2020]. Enfin, les ordonnances sur le travail du 22 septembre 2017 ont assoupli les conditions de recours au télétravail jusque-là limité à une pratique régulière et conditionné à une mention dans le contrat de travail ou en avenant à celui-ci (article L1222-9). Si des enquêtes spécifiques seront nécessaires pour le vérifier, il est possible que ces ordonnances en aient favorisé la pratique, au moins occasionnelle, d’autant plus que la fin de l’année 2019 a été marquée par des grèves longues des transports qui ont pu accélérer le recours au travail à distance.
Sources
L’enquête Épidémiologie et conditions de vie (EpiCov) a été mise en place par la Drees, l’Inserm, Santé Publique France et l’Insee dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Son objectif est double : estimer la dynamique de l’épidémie à un niveau national et départemental [Ouvrir dans un nouvel ongletDrees, 2020] et étudier l’effet du confinement et de l’épidémie sur les conditions de vie.
La première vague de l’enquête s’est déroulée entre le 2 mai et le 2 juin 2020, à cheval entre le confinement de la population et le début du déconfinement. 135 000 personnes âgées de 15 ans ou plus au 1er janvier 2020, résidant hors Ehpad, maisons de retraite et prisons, en France métropolitaine, en Martinique, en Guadeloupe et à la Réunion, ont été sélectionnées dans la base Fidéli 2018 de l’Insee et interrogées. L’enquête s’est déroulée principalement sur Internet mais aussi par téléphone : le recours à ce second mode permettant d’augmenter le taux de participation et d’interroger des personnes sans accès Internet ou en ayant un usage limité, et d’assurer ainsi la représentativité des réponses recueillies. Les niveaux de vie sont connus grâce à la base Fidéli.
L’enquête comprend des questions détaillées sur la situation vis-à-vis de l’emploi (notamment sur l’activité partielle), les conditions de travail, en particulier le recours au télétravail (encadré) et le temps de travail. Afin de réduire le temps de passation de l’enquête, certaines questions, comme celles portant sur l’évolution ressentie du temps de travail, n’ont été posées qu’à environ 10 % des enquêtés. Ce sous-échantillon reste représentatif de la population cible, mais la précision de la mesure sur ces questions peut être plus faible.
Définitions
Le niveau de vie est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d’unités de consommation (UC). Le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d’un même ménage. Les unités de consommation sont généralement calculées selon l’échelle d’équivalence dite de l’OCDE modifiée qui attribue 1 UC au premier adulte du ménage, 0,5 UC aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 UC aux enfants de moins de 14 ans.
Si on ordonne la distribution des niveaux de vie, les déciles sont les valeurs qui partagent cette distribution en dix parties égales. Ainsi, le premier décile est le niveau de vie au-dessous duquel se situent 10 % des niveaux de vie ; le neuvième décile est le niveau de vie au-dessous duquel se situent 90 % des niveaux de vie.
L’activité partielle est un dispositif qui permet à l’employeur en difficulté de faire prendre en charge tout ou partie du coût de la rémunération des salariés. Pour réduire les conséquences économiques liées à la crise sanitaire, le décret n° 2020-325 du 25 mars 2020 relatif à l’activité partielle a largement étendu la possibilité de recours à ce dispositif, réduit le délai d’acceptation et augmenté l’allocation compensatrice versée aux entreprises. Pendant la période de confinement, un salarié en activité partielle percevait au minimum 70 % de sa rémunération brute (environ 84 % du salaire net), sans que ce montant puisse être inférieur au Smic.
Pour en savoir plus
Des données complémentaires sont disponibles en téléchargement avec cette publication.
Jauneau Y., Vidalenc J., « Durée travaillée et travail à domicile pendant le confinement : des différences marquées selon les professions », Insee Focus n° 207, octobre 2020.
Bajos N. et al., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes inégalités sociales au temps du Covid-19 », Questions de santé publique n° 40, IReSP, octobre 2020.
Warszawski J. et al., « Ouvrir dans un nouvel ongletEn mai 2020, 4,5 % de la population vivant en France métropolitaine a développé des anticorps contre le SARS-CoV-2. Premiers résultats de l’enquête nationale EpiCov », Drees, Études et Résultats n° 1167, octobre 2020.
« Ouvrir dans un nouvel ongletEpiCov : Connaître le statut immunitaire de la population pour guider la décision publique », Communiqué de presse, Drees, avril 2020.
Albouy V., Legleye S., « Conditions de vie pendant le confinement : des écarts selon le niveau de vie et la catégorie socioprofessionnelle », Insee Focus n° 197, juin 2020.
Maillard S., « Ouvrir dans un nouvel ongletL’emploi intérimaire recule de 40,4 % au 1er trimestre 2020 », Dares Indicateurs n° 018, juin 2020.
Milin K., « Ouvrir dans un nouvel ongletForte contraction des embauches et des fins de contrat au premier trimestre 2020 », Dares Indicateurs n° 023, juillet 2020.
Insee, « Au deuxième trimestre 2020, le revenu disponible brut des ménages recule mais le taux d’épargne bondit », Informations Rapides n° 216, août 2020.
Hallépée S., Mauroux A., « Ouvrir dans un nouvel ongletQuels sont les salariés concernés par le télétravail ? », Dares Analyses n° 051, novembre 2019.
Pisarik J., Rochereau T., Célant N., « Ouvrir dans un nouvel ongletÉtat de santé des Français et facteurs de risque. Premiers résultats de l’Enquête santé européenne-Enquête santé et protection sociale 2014 », Études et Résultats n° 998, Drees, mars 2017.