Insee Analyses NormandieLes nouvelles zones d’emploi normandes : des profils économiques divers

Camille Hurard, Martial Maillard (Insee)

Les zones d’emploi constituent un maillage géographique adapté pour conduire les diagnostics économiques à un niveau territorial fin. En 2020, la refonte nationale de ce zonage par l’Insee et la Direction statistique du Ministère en charge du travail et de l’emploi (Dares) aboutit à 24 zones d’emploi incluant des territoires normands. Dans la région, l’une des plus industrielles de France métropolitaine, l’analyse de l’orientation économique de ces nouvelles zones d’emploi fait apparaître les différentes facettes de la géographie de l’appareil productif normand. Ainsi, les zones d’emploi englobant les quatre principales agglomérations normandes présentent des économies plus diversifiées. Les autres zones, de taille plus modeste, sont quant à elles davantage spécialisées et tournées soit vers l’industrie (dans le nord de la Seine-Maritime et l’Orne), soit vers l’agriculture (dans la Manche et l’Orne) ou encore vers le tourisme sur certains littoraux calvadosiens ou manchois. Enfin, certaines zones d’emploi comptent moins d’emplois que d’actifs résidents et se caractérisent par une identité plus résidentielle.

Insee Analyses Normandie
No 83
Paru le :Paru le10/09/2020
Camille Hurard, Martial Maillard (Insee)
Insee Analyses Normandie No 83- Septembre 2020

Une zone d’emploi est un territoire à l’intérieur duquel la plupart des actifs résident et travaillent (encadré). Les établissements y trouvent ainsi l’essentiel de la main-d’œuvre nécessaire pour occuper les emplois offerts. Puisqu’ils sont conçus à cet effet, ces espaces sont souvent les plus pertinents pour établir des diagnostics économiques locaux, particulièrement en matière de fonctionnement du marché du travail.

Apparu en 1984, le découpage en zones d’emploi est, depuis lors, régulièrement actualisé, la version précédente datant de 2010. En 2020, la refonte de ce zonage s’appuie sur deux principes. D’une part, les navettes domicile-travail issues du recensement de la population de 2016 sont prises en compte. D’autre part, une méthodologie harmonisée au niveau européen a été adoptée.

Ce nouveau zonage conduit à 24 zones d’emploi incluant des territoires normands, contre 23 auparavant. Cinq de ces zones sont multi-régionales, trois parmi celles-ci l’étaient déjà en 2010 (La Vallée de la Bresle - Vimeu, Nogent-le-Rotrou, Alençon), et s’y ajoutent maintenant les zones de Beauvais et de Dreux, qui s’étendent désormais en Normandie. Au regard de la concentration de l’emploi dans quelques grands pôles d’activité, les zones d’emploi de la région sont de tailles très diverses, allant de 42 800 habitants et 15 000 emplois pour celle d’Argentan, la plus petite, à 725 200 habitants et 293 200 emplois pour celle de Rouen, la plus grande de la région.

La part d’actifs qui occupent un emploi dans la zone d’emploi où ils résident est très variable selon les territoires

Même si les zones d’emploi sont construites de manière à ce que la part d’actifs occupés qui résident et travaillent dans la même zone («  ») soit la plus élevée possible, l’attractivité des différentes zones est très variable et reflète des fonctionnements du marché du travail très différents (figure 1).

Du fait de la concentration des emplois dans les grandes agglomérations, les taux de stables sont les plus élevés dans les zones d’emploi structurées par Rouen, Le Havre, Caen et Cherbourg-en-Cotentin où ils atteignent ou dépassent 87 % en 2017. Le taux de stables est un peu plus faible, tout en étant supérieur à 67 %, dans les autres zones d’emploi de l’ouest et du sud de la Normandie, ainsi que dans les zones de Dieppe - Caux maritime et de La Vallée de la Bresle - Vimeu. Ces espaces sont structurés par des villes moyennes ou petites, et sont peu soumis à des influences extérieures. En revanche, moins de 67 % des actifs travaillent dans leur zone de résidence dans un ensemble de territoires situés dans la partie est de la région, entre les grandes agglomérations du Havre, de Rouen et de Paris. La zone d’emploi de Vernon-Gisors est ainsi soumise à l’attractivité de l’Île-de-France, lieu de travail de plus de 15 000 « navetteurs » normands, et celles d’Yvetot - Vallée du Commerce, d’Honfleur Pont-Audemer et de Bernay sont sous influence des zones de Rouen et du Havre.

Figure 1Selon les territoires, entre 52 % et 93 % des actifs travaillent dans la zone d’emploi où ils résidentPart des actifs qui travaillent dans la zone d’emploi où ils résident (taux de stables 2017, en %) par zone d’emploi et principaux flux domicile-travail entre communes en 2016

Selon les territoires, entre 52 % et 93 % des actifs travaillent dans la zone d’emploi où ils résident
ZE 2020 Libellé Taux de stables 2017
0051 Alençon 82,3
0054 Beauvais 63,4
0057 Dreux 51,9
0058 La Vallée de la Bresle - Vimeu 78,6
0061 Nogent-le -Rotrou 70,7
1101 Cergy-Vexin 43,7
1103 Etampes 38,8
1104 Evry 44,7
1109 Paris 89,4
1111 Rambouillet 35,2
1112 Roissy 44,3
1113 Saclay 47,0
1114 Seine-Yvelinoise 44,8
1115 Versailles-Saint-Quentin 56,8
2403 Chartres 69,2
2404 Châteaudun 69,5
2411 Pithiviers 59,4
2801 Argentan 71,6
2802 Avranches 80,8
2803 Bernay 62,8
2804 Caen 90,6
2805 Cherbourg en Cotentin 92,9
2806 Coutances 73,0
2807 Dieppe-Caux maritime 76,2
2808 Evreux 68,9
2809 Flers 84,1
2810 Granville 73,1
2811 Honfleur Pont-Audemer 65,3
2812 L’Aigle 72,1
2813 Le Havre 89,7
2814 Lisieux 74,1
2815 Rouen 87,3
2816 Saint-Lô 79,0
2817 Vernon - Gisors 54,1
2818 Vire Normandie 72,0
2819 Yvetot - Vallée du Commerce 56,5
3201 Abbeville 69,4
3202 Amiens 86,4
3211 Creil 57,3
5208 La Ferté-Bernard 68,2
5211 Laval 82,5
5212 Le Mans 87,5
5215 Mayenne 77,8
5304 Dinan 65,4
5305 Fougères 70,0
5315 Rennes 90,0
5317 Saint-Malo 79,1
5319 Vitré 66,6
  • Note de lecture : 63 % des actifs résidant dans la zone d’emploi de Bernay travaillent également dans cette zone et 37 % en sortent pour travailler.
  • Les flux domicile-travail entre communes qui concernent au moins 150 actifs sont représentés par un segment de couleur jaune.
  • Source : Insee, recensements de la population 2016 et 2017

Figure 1Selon les territoires, entre 52 % et 93 % des actifs travaillent dans la zone d’emploi où ils résidentPart des actifs qui travaillent dans la zone d’emploi où ils résident (taux de stables 2017, en %) par zone d’emploi et principaux flux domicile-travail entre communes en 2016

  • Note de lecture : 63 % des actifs résidant dans la zone d’emploi de Bernay travaillent également dans cette zone et 37 % en sortent pour travailler.
  • Les flux domicile-travail entre communes qui concernent au moins 150 actifs sont représentés par un segment de couleur jaune.
  • Source : Insee, recensements de la population 2016 et 2017

La diversité des profils des zones d’emploi provient également de leur orientation économique. Au niveau national, les 306 zones d’emploi peuvent se répartir en sept groupes, en fonction des activités économiques présentes et de l’implantation de grands établissements (pour comprendre). Six de ces groupes sont représentés en Normandie. La région ne compte en effet aucune zone d’emploi rattachée à la classe des « Grandes agglomérations à forte concentration de fonctions métropolitaines » (elles sont 18 au niveau national). Les plus grandes villes normandes pâtissent en effet à la fois de la proximité de Paris et d’une dispersion des fonctions entre elles. De ce fait, ces villes concentrent moins de fonctions métropolitaines que d’autres grandes villes françaises, à l’image de Lille, Rennes ou Nantes.

Dans un contexte de tertiarisation croissante de l’économie française, la Normandie reste, en 2017, la 3e région industrielle avec 16,0 % des emplois dans ce secteur, derrière la Bourgogne-Franche-Comté et les Pays de la Loire. Cette proportion est de 12,1 % au plan national. Au-delà des spécificités identifiées dans certaines zones d’emploi normandes, l’industrie reste très présente et occupe toujours plus de 18 % des actifs dans la moitié d’entre elles.

De grandes agglomérations qui concentrent une large part de la population et de l’emploi

Les zones d’emploi de Rouen, Caen, Le Havre et Cherbourg-en-Cotentin font partie des « Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs » (figure 2). Ces quatre territoires se singularisent par leur taille et concentrent 49 % de l’emploi total et 46 % de la population des zones d’emploi présentes en Normandie. Leur système productif est davantage structuré par les grands établissements puisqu’il rassemble 58 % des effectifs des établissements de plus de 250 salariés des zones d’emploi normandes. Il s’agit essentiellement d’implantations industrielles majeures au sein de ces berceaux historiques de la fabrication, mais aussi de centres hospitaliers. Ces territoires possèdent en effet une vocation tertiaire affirmée et concentrent 58 % des des zones normandes.

Du fait de leur taille importante et des fonctions de leur ville-centre, l’activité économique de ces zones d’emploi apparaît relativement diversifiée, même si ces territoires possèdent des spécificités sectorielles. L’industrie est assez présente dans celles de Rouen et du Havre où elle pèse plus de 14 % des emplois. Plus singulièrement, l’industrie pharmaceutique est bien implantée dans la zone de Rouen, le raffinage du pétrole et l’industrie chimique dans celle du Havre. Chacune de ces zones d’emploi possède également un Grand Port Maritime situé sur la Seine et autour duquel s’est développée la filière logistique. L’empreinte de l’industrie reste marquée dans la zone d’emploi de Cherbourg-en-Cotentin (19 % de l’emploi), autour de la filière nucléaire et de la construction navale, mais cette zone se démarque aussi par le poids de l’agriculture et du tourisme. Celle de Caen est, quant à elle, moins orientée vers l’industrie et la en général. Elle bénéficie d’une économie touristique en lien avec le littoral (Côte de Nacre et Côte Fleurie) et le tourisme de mémoire (plages du Débarquement), dont les retombées stimulent la .

Figure 2Six orientations économiques différentes selon les zones d’emploiOrientation économique des zones d’emploi présentes en Normandie

Six orientations économiques différentes selon les zones d’emploi
ZE 2020 Libellé Classe
0051 Alençon Économie diversifiée
0054 Beauvais Résidentielles
0057 Dreux Résidentielles
0058 La Vallée de la Bresle - Vimeu Spécialisées dans l'industrie
0061 Nogent-le -Rotrou Spécialisées dans l'industrie
1101 Cergy-Vexin Résidentielles
1103 Etampes Résidentielles
1104 Evry Grandes agglomérations à forte concentration de fonctions métropolitaines
1109 Paris Grandes agglomérations à forte concentration de fonctions métropolitaines
1111 Rambouillet Résidentielles
1112 Roissy Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs
1113 Saclay Grandes agglomérations à forte concentration de fonctions métropolitaines
1114 Seine-Yvelinoise Grandes agglomérations à forte concentration de fonctions métropolitaines
1115 Versailles-Saint-Quentin Grandes agglomérations à forte concentration de fonctions métropolitaines
2403 Chartres Résidentielles
2404 Châteaudun Économie diversifiée
2411 Pithiviers Résidentielles
2801 Argentan Spécialisées dans l'agriculture
2802 Avranches Spécialisées dans l'agriculture
2803 Bernay Résidentielles
2804 Caen Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs
2805 Cherbourg en Cotentin Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs
2806 Coutances Spécialisées dans l'agriculture
2807 Dieppe-Caux maritime Spécialisées dans l'industrie
2808 Evreux Économie diversifiée
2809 Flers Spécialisées dans l'industrie
2810 Granville À forte orientation touristique
2811 Honfleur Pont-Audemer À forte orientation touristique
2812 L’Aigle Spécialisées dans l'industrie
2813 Le Havre Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs
2814 Lisieux Économie diversifiée
2815 Rouen Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs
2816 Saint-Lô Économie diversifiée
2817 Vernon - Gisors Résidentielles
2818 Vire Normandie Spécialisées dans l'agriculture
2819 Yvetot - Vallée du Commerce Résidentielles
3201 Abbeville À forte orientation touristique
3202 Amiens Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs
3211 Creil Résidentielles
5208 La Ferté-Bernard Spécialisées dans l'industrie
5211 Laval Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs
5212 Le Mans Autres grandes agglomérations dotées de gros employeurs
5215 Mayenne Spécialisées dans l'industrie
5304 Dinan À forte orientation touristique
5305 Fougères Spécialisées dans l'industrie
5315 Rennes Grandes agglomérations à forte concentration de fonctions métropolitaines
5317 Saint-Malo À forte orientation touristique
5319 Vitré Spécialisées dans l'industrie
  • Sources : Insee, recensement de la population 2016, Clap 2015, Enquêtes de fréquentation touristique 2019

Figure 2Six orientations économiques différentes selon les zones d’emploiOrientation économique des zones d’emploi présentes en Normandie

  • Sources : Insee, recensement de la population 2016, Clap 2015, Enquêtes de fréquentation touristique 2019

Autour de villes de taille intermédiaire, une économie diversifiée

À l’image de ce que l’on observe dans les grandes agglomérations, quatre autres zones d’emploi normandes se caractérisent également par une économie diversifiée. Elles se différencient toutefois par une moindre présence de cadres des fonctions métropolitaines. Parmi ces quatre zones, trois d’entre elles ont pour ville-centre un chef-lieu de département : Alençon, Évreux et Saint-Lô, Lisieux étant un chef-lieu d’arrondissement. Même si l’économie y apparaît diversifiée, ces zones d’emploi présentent néanmoins quelques spécificités. Ainsi, dans celle d’Évreux, l’emploi public occupe une place plus large (39 % contre 37 % dans les zones de cette classe au niveau national), tout comme l’agriculture dans celles d’Alençon (élevage et cultures céréalières) et de Saint-Lô (élevage laitier, filière ostréicole et pêche), où ce secteur pèse 7 % contre 5 % dans ces territoires au plan national. La zone d’emploi de Lisieux est légèrement orientée vers l’industrie (17 % contre 14 %), en particulier agro-alimentaire, et vers le tourisme, grâce notamment à la proximité de la Côte Fleurie et au tourisme religieux (Basilique Sainte-Thérèse de Lisieux).

L’industrie reste très présente dans cinq zones d’emploi

L’industrie est la spécialité de cinq zones d’emploi, situées aux franges de la région, au sein desquelles ce secteur représente entre 23 % et 37 % de l’emploi (figure 2). Spécialisée dans la verrerie, la Vallée de la Bresle - Vimeu est la deuxième zone d’emploi de France pour le poids de l’emploi industriel, derrière celle d’Oyonnax dans l’Ain. Structuré par le site de la « Glass Vallée », ce territoire constitue le premier pôle mondial dans le flaconnage de luxe, qui réalise 70 % de la production. Avec 42 % des emplois, soit 10 points de plus que dans l’ensemble des zones d’emploi spécialisées dans l’industrie au niveau national, il se singularise aussi par une proportion élevée d’ouvriers. Celle de Flers, qui compte 25,5 % de ses emplois dans l’industrie, vient ensuite. L’agriculture, en particulier l’élevage, y est également très présente et explique la forte implantation de l’industrie agro-alimentaire, notamment l’abattage et la transformation des viandes. Le secteur de l’équipement automobile est également très présent avec Faurecia, premier employeur de la zone. Le caractère industriel de la zone d’emploi de L’Aigle provient principalement de la métallurgie, qui apporte plus de 11 % des emplois de ce territoire. Dans la zone d’emploi de Dieppe - Caux Maritime, les principales implantations industrielles relèvent de la production électronucléaire, mais aussi du secteur agro-alimentaire. Enfin, autour de Nogent-le-Rotrou, l’industrie est plus diversifiée et repose sur la plasturgie, la métallurgie ou encore la fabrication de matériel de transport.

Les zones d’emploi proches des grands pôles sont plus dépendantes de l’extérieur en matière d’emploi

Voisines des grandes agglomérations de Rouen, du Havre et de Paris, les zones d’emploi d’Yvetot - Vallée du Commerce, Bernay, Vernon - Gisors, ainsi que les zones multi-régionales de Dreux et de Beauvais offrent beaucoup moins d’emplois qu’elles ne comptent d’actifs résidents. Bien que les zones d’emploi soient construites de façon à ce que le taux de stables soit maximisé, ce dernier est en moyenne plus faible dans cette classe de territoires (59 % contre 79 % en moyenne dans la région). Avec seulement 57 % de stables, celle d’Yvetot - Vallée du Commerce, située entre les zones de Rouen et du Havre, est en effet très dépendante de ces deux territoires en termes d’emplois.

Par ailleurs, le caractère résidentiel de ces cinq zones favorise le développement de la sphère présentielle, répondant aux besoins de la population présente. Néanmoins, la sphère productive reste plus implantée dans les zones d’emploi résidentielles normandes. En particulier, l’industrie offre 20 % des emplois contre 17 % dans les territoires de ce groupe au niveau national. Ainsi, la zone d’emploi d’Yvetot - Vallée du Commerce reste une des principales implantations nationales du raffinage du pétrole et de la pétrochimie, autour d’ExxonMobil à Port-Jérôme-sur-Seine. Celle de Vernon - Gisors bénéficie, quant à elle, de la présence de gros employeurs dans le domaine aéronautique (Safran, Collins Aerospace).

L’emploi agricole reste plus présent dans les zones rurales de l’ouest de la région

Situées à l’ouest de la région, les zones d’emploi d’Avranches, de Coutances, de Vire Normandie et d’Argentan possèdent une économie dans laquelle l’agriculture offre encore entre 8,2 % et 10,6 % des emplois, soit entre trois et quatre fois plus qu’au niveau national. L’élevage bovin laitier prédomine dans ces territoires, et trouve son débouché dans la production de beurre, de crème et de fromage (AOP Camembert de Normandie et Pont-l’Évêque). Déjà très présente au niveau régional, la filière équine l’est particulièrement dans la zone d’emploi d’Argentan, avec notamment le Haras National du Pin, qui génère une centaine d’emplois. Au-delà de la filière agricole, l’activité industrielle est toutefois bien implantée dans les zones d’Avranches, de Coutances et de Vire Normandie, autour de l’agro-alimentaire et de la métallurgie, et pèse entre 16 % et 20 % de l’emploi contre 14 % dans cette classe de territoires au plan national. Les zones d’Avranches et de Coutances sont également orientées vers le tourisme, en particulier dans la Baie du Mont-Saint-Michel et sur la Côte des Havres.

Une attractivité touristique majeure pour deux zones d’emploi

La Normandie possède 640 kilomètres de côtes le long de la Manche. Ce caractère littoral confère une forte orientation touristique aux zones d’emploi d’Honfleur - Pont-Audemer et de Granville. Dans la première, l’orientation touristique est quasi-exclusivement due à sa partie occidentale, située le long de la Côte Fleurie et de la Côte de Grâce, et bénéficie de la présence de stations balnéaires réputées telles que Deauville ou Trouville-sur-Mer. Représentant 32 % des logements contre 7 % dans l’ensemble de la France, les résidences secondaires sont très présentes. Elles attirent essentiellement des Franciliens (77 %). Moins affirmé, le caractère touristique de la zone d’emploi de Granville est lié aux activités balnéaires de la Côte des Havres et à la navigation de plaisance. Le port de Granville offre aussi des liaisons maritimes vers les îles anglo-normandes de Jersey et Guernesey. L’économie agricole joue parallèlement un rôle encore important dans ce territoire.

Encadré - La nouvelle méthode de constitution des zones d’emploi

Les zones d’emploi forment un zonage d’étude pour la France entière qui existe depuis 1984, régulièrement mis à jour pour tenir compte de l’évolution de l’économie locale. Construite à partir des déplacements domicile-travail, une zone d’emploi est un ensemble de communes dans lequel la plupart des actifs résident et travaillent. En 2020, l’Insee et la Direction statistique du Ministère en charge du travail et de l’emploi (Dares) ont révisé ce zonage en s’appuyant sur une méthodologie développée par Eurostat permettant les comparaisons entre pays européens. Un autre objectif est d’avoir une méthode la plus homogène possible sur le territoire. Les nouvelles zones sont issues de paramètres nationaux. Seules font exception les DOM et la Corse en raison de leur particularité géographique, les déplacements domicile-travail étant de fait limités. L’Île-de-France a également fait l’objet d’un traitement différent pour tenir compte de la très forte polarisation des flux vers Paris.

La méthode repose sur un procédé itératif fondé sur l’analyse des déplacements domicile-travail entre les différentes zones : à chaque étape, des communes (ou groupes de communes agrégées précédemment) sont agrégées en fonction des échanges domicile-travail. L’un des intérêts de cet algorithme est la prise en compte des flux sortants d’une zone mais aussi des flux entrants. De ce fait, certaines communes qui peuvent sembler dépendantes en termes d’emplois d’un pôle peuvent se voir affectées à une autre zone si de nombreux actifs viennent y travailler. Un ensemble de communes agrégées constitue une zone d’emploi dès lors qu’elle satisfait à des critères de taille (nombre d’emplois) et de stabilité (part élevée d’actifs travaillant et résidant dans la zone). Ainsi en France métropolitaine (hors Corse), les zones d’emploi comptent au moins 14 100 emplois dans la zone (celle de Saint-Flour dans le Cantal) et au moins 36 % d’actifs travaillant et résidant sur ce même territoire (celle de Rambouillet dans les Yvelines).

Cette nouvelle méthode de constitution a permis un rééquilibrage des zones d’emploi en nombre d’actifs. C’est particulièrement vrai autour des grandes métropoles qui, en 2010, agrégeaient de nombreuses communes. Cette refonte permet de limiter la taille des zones d’emploi, par la construction d’autres zones autour de ces grands pôles.

Au niveau national, le nombre total de zones d’emploi est en légère diminution : 306 (dont une pour Mayotte) contre 318 pour le zonage de 2010. Le nombre de zones multi-régionales passe de 10 en 2010 à 14 en 2020.

Pour comprendre

Afin de dégager la principale orientation économique des territoires, une typologie des 306 zones d’emploi de France entière a été réalisée. Celle-ci s’appuie sur des indicateurs de spécialisation économique mesurée par le rapport entre la part de l’emploi dans un secteur et cette même part mesurée France entière. Ces indicateurs portent sur l’économie productive et présentielle, l’industrie, l’administration publique, l’emploi dans les grands ou petits établissements et des indicateurs d’activité touristique. Pour parvenir à la typologie des zones d’emploi, une analyse en composantes principales (ACP) a été réalisée dans une première étape, permettant de donner du sens au positionnement des zones d’emploi dans l’espace des variables. Dans une seconde étape, une classification ascendante hiérarchique (CAH) a permis de regrouper les zones d’emploi selon un faisceau de caractéristiques communes.

Sources

Cette étude s’appuie sur les exploitations principale et complémentaire des recensements de la population 2016 et 2017, à l’exception des données relatives à la taille des établissements qui sont issues de la source Clap (millésime 2015), et des données relatives au nombre de nuitées qui sont issues des enquêtes tourisme.

Définitions

Le taux de stables rapporte le nombre d’actifs habitant et travaillant dans une zone, au nombre total d’actifs occupés dans la zone.

Sont considérés comme cadres des fonctions métropolitaines les emplois « stratégiques » plus spécifiquement présents dans les grandes aires urbaines. Il s’agit des cadres ou chefs d’entreprises de dix salariés ou plus des fonctions conception-recherche, prestations intellectuelles, commerce inter-entreprises, gestion et culture-loisirs.

La sphère productive recouvre les activités qui produisent des biens majoritairement consommés hors de la zone et des activités de services tournées principalement vers les entreprises de cette sphère.

Dans cette étude, le secteur de l’agriculture est exclu de la sphère productive.

La sphère présentielle recouvre les activités mises en œuvre localement pour la production de biens et de services visant la satisfaction des besoins de personnes présentes dans la zone, résidents ou non-résidents.

Dans cette étude, les secteurs de l’administration, l’enseignement, la santé humaine et l’action sociale sont exclus de cette sphère.

Pour en savoir plus

Levy D. , Dubois M., Lefebvre M. , « L’orientation économique des zones d’emploi : entre spécialisation et diversification des économies locales », Insee Première, n°1814, septembre 2020.

Baktavatsalou R., Marajda J., « Les nouvelles zones d’emploi de 2010 », Aval, Insee Haute-Normandie, n°109, novembre 2011.

Brendler J., Mounchit N., Rochelle S. , Faure S., Le Goff F. , « Les mobilités dans le Bassin parisien à trois âges de la vie : faire ses études, aller travailler, prendre sa retraite », Insee Dossier Île-de-France, n° 5, novembre 2019.

Navellou É., «  Zones d’emploi : une vocation présentielle prédominante », E pour cent, Insee Basse-Normandie, n°49, novembre 2011.