Insee Conjoncture Auvergne-Rhône-AlpesL’économie régionale encore sous le choc Note de conjoncture régionale - 1ᵉʳ trimestre 2020

Stéphanie Depil, Bertrand Kauffmann, Frédéric Lahi, Annelise Robert (Insee)

La crise sanitaire et la mise à l’arrêt d’une partie des activités ont plongé l’économie française dans une récession économique. Pendant le confinement, le nombre de salariés en situation de travail effectif baisse de 33 %. Côté emploi, les premiers effets se ressentent sur l’intérim, qui chute de 40 % fin mars. Malgré les aides et les reports de charges, le nombre de demandeurs d’emploi sans activité atteint un niveau inédit, avec une croissance de 26 % en avril dans la région. Malmenées jusqu’en avril, les créations d’entreprises repartent tout de même à la hausse en mai.

Rédaction achevée le 08 juillet 2020

Insee Conjoncture Auvergne-Rhône-Alpes
No 23
Paru le :Paru le15/07/2020
Stéphanie Depil, Bertrand Kauffmann, Frédéric Lahi, Annelise Robert (Insee)
Insee Conjoncture Auvergne-Rhône-Alpes No 23- Juillet 2020

Les mesures prises pour endiguer la propagation de la Covid-19, notamment le confinement de la population entre le 16 mars et le 11 mai, ont entraîné une brusque chute de l’activité économique. Le PIB du second trimestre est ainsi estimé en baisse de 17 % (après – 5,3 % au premier trimestre). Ce serait la plus forte récession depuis 1948 (pour en savoir plus).

L’activité économique repart, mais en mode dégradé

Après ce coup d’arrêt brutal, le redémarrage est très net depuis la mi-mai, date de la fin du confinement, mais l’activité reste encore inférieure à la situation d’avant crise. Après une perte d’activité économique estimée à 30 % en avril, puis à 22 % en mai, l’activité resterait dégradée de 12 % en juin.

Figure 1Une activité économique extrêmement ralentie jusqu’à fin avril, qui se reprend par la suiteEstimation de la perte d’activité liée aux mesures de confinement par grands secteurs d’activité, en France

en %
Une activité économique extrêmement ralentie jusqu’à fin avril, qui se reprend par la suite (en %) - Note de lecture : en juin 2020, en France, l’activité économique aurait diminué de 12 % par rapport à une situation normale.
Agriculture Industrie Construction Services princip. marchands Services princip. non marchands Ensemble
Mars -4,5 -15,7 -46,6 -16,0 -11,7 -16,5
Avril -12,3 -31,7 -60,7 -29,1 -25,2 -30,0
Mai -7,7 -19,2 -46,9 -21,6 -19,3 -21,9
Juin -4,0 -13,8 -30,7 -12,9 -6,6 -12,5
  • Note de lecture : en juin 2020, en France, l’activité économique aurait diminué de 12 % par rapport à une situation normale.
  • Source : calculs Insee à partir de sources diverses.

Figure 1Une activité économique extrêmement ralentie jusqu’à fin avril, qui se reprend par la suiteEstimation de la perte d’activité liée aux mesures de confinement par grands secteurs d’activité, en France

  • Note de lecture : en juin 2020, en France, l’activité économique aurait diminué de 12 % par rapport à une situation normale.
  • Source : calculs Insee à partir de sources diverses.

La reprise progressive de l’activité économique s’observe dans l’ensemble des branches (figure 1). Les secteurs de la fabrication de matériels de transports et de la construction restent avec une activité de respectivement 41 % et 31 % plus faible que la « normale ». L’hébergement-restauration redémarre nettement (– 20 % en juin) après une mise quasi à l’arrêt. Dans la région, seuls un cinquième des hôtels étaient ouverts en avril. Les stations de ski ont été fermées un mois plus tôt que d’habitude. Les territoires centrés sur le thermalisme sont aussi très fortement touchés, peu d’hôtels y ayant rouvert avant fin juin, voire début juillet. La production industrielle resterait encore affectée par une demande internationale toujours en berne et d’importants stocks à écouler notamment.

Pendant le confinement, Auvergne-Rhône-Alpes aurait été l’une des régions structurellement les plus durement touchées du fait de ses particularités économiques : industrie, hôtellerie-restauration, etc. En juin, l’estimation de la perte d’activité au niveau local est plus fragile, en raison de reprises différenciées selon les établissements. On peut estimer cependant que pour les départements et pour la région, elle serait à un niveau comparable à celle de la France. La région abrite aussi certaines activités peu affectées par la crise (activités financières et d’assurances, fabrication de denrées alimentaires, par exemple). Cette diversité du tissu productif serait un atout pour absorber le choc économique dans les trimestres à venir.

L’emploi intérimaire premier touché dès fin mars

Les effets de la pandémie sur l’emploi se font déjà sentir à la fin du premier trimestre. Fin mars 2020, l’emploi salarié total dévisse pour la première fois depuis 10 ans en France alors que le confinement est mis en place depuis tout juste quinze jours. Toutes les régions sont concernées. En Auvergne-Rhône-Alpes, il chute de 2,2 %, plus fortement qu’au plan national (– 2,0 %), après cinq ans de hausse régulière (figure 2). La région fait ainsi partie des plus touchées en métropole par le début de la crise sanitaire, derrière la Normandie, le Centre-Val de Loire et la Bourgogne-Franche-Comté. Dans la région, 67 400 emplois ont disparu sur le trimestre, essentiellement dans le secteur privé qui recule de 2,8 %. Le secteur public parvient à se maintenir (+ 0,1 %).

Figure 2L’emploi salarié chute fortementÉvolution de l'emploi salarié

indice base 100 au 4ᵉ trimestre 2010
L’emploi salarié chute fortement (indice base 100 au 4ᵉ trimestre 2010)
Emploi salarié total - Auvergne-Rhône-Alpes Emploi salarié total - France hors Mayotte Emploi salarié privé - Auvergne-Rhône-Alpes Emploi salarié privé - France hors Mayotte
T4 2010 100 100 100 100
T1 2011 100,2 100,2 100,31 100,27
T2 2011 100,32 100,3 100,46 100,4
T3 2011 100,14 100,25 100,36 100,41
T4 2011 100,31 100,3 100,45 100,43
T1 2012 100,42 100,32 100,53 100,4
T2 2012 100,43 100,29 100,45 100,33
T3 2012 100,65 100,14 100,62 100,07
T4 2012 100,44 100,03 100,29 99,95
T1 2013 100,59 100,04 100,32 99,91
T2 2013 100,68 99,92 100,31 99,66
T3 2013 100,86 100,09 100,7 99,81
T4 2013 101,23 100,37 100,94 99,95
T1 2014 101,18 100,41 100,91 99,9
T2 2014 101,17 100,44 100,81 99,93
T3 2014 101,04 100,34 100,63 99,77
T4 2014 101,37 100,43 100,91 99,83
T1 2015 101,17 100,38 100,68 99,78
T2 2015 101,41 100,61 100,92 99,99
T3 2015 101,58 100,7 101,12 100,12
T4 2015 101,86 100,89 101,47 100,35
T1 2016 102 101,06 101,67 100,54
T2 2016 102,31 101,32 102 100,84
T3 2016 102,79 101,6 102,55 101,15
T4 2016 102,78 101,7 102,62 101,29
T1 2017 103,31 102,1 103,29 101,79
T2 2017 103,73 102,44 103,84 102,22
T3 2017 104,24 102,7 104,45 102,63
T4 2017 104,66 103,08 105,07 103,18
T1 2018 104,85 103,27 105,27 103,41
T2 2018 104,87 103,32 105,36 103,56
T3 2018 104,99 103,43 105,55 103,7
T4 2018 105,46 103,73 106,09 104,05
T1 2019 105,77 104,1 106,47 104,51
T2 2019 105,87 104,33 106,55 104,75
T3 2019 106,03 104,52 106,76 104,96
T4 2019 106,52 104,91 107,42 105,48
T1 2020 104,17 102,85 104,4 102,82
  • Notes : données CVS, en fin de trimestre. Les données du dernier trimestre affiché sont provisoires.
  • Champ : emploi salarié total.
  • Sources : Insee, estimations d'emploi ; estimations trimestrielles Acoss-Urssaf, Dares, Insee.

Figure 2L’emploi salarié chute fortementÉvolution de l'emploi salarié

  • Notes : données CVS, en fin de trimestre. Les données du dernier trimestre affiché sont provisoires.
  • Champ : emploi salarié total.
  • Sources : Insee, estimations d'emploi ; estimations trimestrielles Acoss-Urssaf, Dares, Insee.

Au sein de la région, les départements savoyards et l’Ain pâtissent plus nettement de l’effet du confinement (avec une baisse dépassant – 2,7 %). La Loire est également en deçà de la moyenne régionale (– 2,5 %). À l’inverse, l’Ardèche, le Cantal, le Puy-de-Dôme et la Haute-Loire subissent une perte légèrement plus modérée (entre – 1,6 % et – 1,9 %).

Le repli brutal de l’emploi est particulièrement lié au sévère recul de l’intérim qui décroche de 40,2 %, tendance similaire à celle du niveau national. Cela correspond à une perte de 44 200 intérimaires dans la région. En période de crise, l’intérim est traditionnellement le premier secteur affecté. La Drôme et l’Isère, où travaillent plus d’un quart des intérimaires de la région, sont légèrement moins touchées avec respectivement – 35,6 % et – 34,4 %. À l’opposé, l’Ain subit une perte de – 47,8 %.

Hors intérim, les secteurs de la construction, de l’industrie ainsi que le tertiaire non marchand connaissent des baisses très modérées, comprises entre – 0,1 % et – 0,3 %. Cependant, le tertiaire marchand (hors intérim), en hausse continue depuis plus de trois ans, subit dès le premier trimestre les dommages liés au confinement. L’emploi du secteur diminue de 1,5 %, une baisse plus importante qu’en France (– 1,3 %). L’hébergement-restauration perd 7 300 salariés, soit une chute de 5,3 % plus notable qu’au national (– 4,4 %). La baisse est plus conséquente dans les départements savoyards (autour de – 8 %), en lien avec l’arrêt des activités touristiques. L’emploi dans les autres activités de services, comprenant notamment les arts, spectacles et activités créatives, diminue de – 3,1 %. En Isère, ce secteur chute de – 4,3 %. Le commerce, tout comme le transport et l’entreposage, ne voient pas si nettement les conséquences de la crise en fin de premier trimestre et ne se replient que de 1,0 %. Les emplois dans l’information et la communication tirent leur épingle du jeu avec une légère augmentation de 0,4 %.

Un tiers de salariés en moins en situation de travail effectif

Divers dispositifs ont été mis en place pour aider les ménages et les entreprises à traverser la période de confinement. L’économie est certes mise provisoirement en sommeil, mais dans des conditions qui rendent un redémarrage possible. Les établissements ont ainsi la possibilité de demander la mise en activité partielle de leurs salariés, en particulier lorsqu’ils sont confrontés à des pertes d’activité liées à la crise sanitaire. D’autres personnes sont en congé pour garder leurs enfants ou pour maladie.

Dans la région, comme ailleurs en France, au cours de la semaine du 23 au 27 mars, l’activité partielle et les arrêts pour maladie et garde d’enfants ont contribué à réduire le nombre de salariés en situation de travail effectif de 33 % par rapport à la semaine de référence avant le confinement (du 2 au 6 mars). L’impact s’est ensuite légèrement réduit, à – 28 % fin avril. L’activité partielle concerne environ trois fois plus de salariés que les arrêts de travail pour cause de maladie ou de garde d’enfants.

Confrontées à la fin prématurée de la saison touristique, les deux Savoie sont les départements de la région où l’activité partielle et les arrêts de travail sont proportionnellement les plus fréquents en début de confinement (figure 3), avec une baisse de – 40 % du nombre de salariés en situation de travail effectif la semaine du 23 mars. En avril, la baisse d’activité par rapport à une situation normale est plus faible, le tourisme ayant moins d’impact à cette période. Au contraire, l’impact aurait été plus faible dans le Rhône (– 30 %), s’expliquant sans doute par un recours au télétravail plus important dans les secteurs tertiaires. La réduction des déplacements matinaux en est la preuve (encadré 1). Dans le secteur de la construction, les recours à l’activité partielle et, dans une moindre mesure, aux arrêts de travail, ont été importants. Plus la taille de l’établissement est faible plus la part de l’activité partielle dans l’emploi salarié est massive.

Figure 3Les départements savoyards ont eu plus recours à l’activité partielle en marsEffet de l’activité partielle et des arrêts pour maladie et garde d’enfants sur le nombre de salariés en situation de travail effectif en Auvergne-Rhône-Alpes

En moyenne par semaine, référence la semaine du 2 au 6 mars
Les départements savoyards ont eu plus recours à l’activité partielle en mars (En moyenne par semaine, référence la semaine du 2 au 6 mars) - Note de lecture : en Auvergne-Rhône-Alpes, en moyenne durant la semaine ouvrée commençant le 23 mars, l’activité partielle et les arrêts pour maladie et garde d’enfants ont contribué à réduire le nombre de salariés en situation de travail effectif de – 33 % par rapport à la semaine ouvrée du 2 au 6 mars.
Semaine France métroplitaine Auvergne-Rhône-Alpes Ain Allier Ardèche Cantal Drôme Isère Loire Haute-Loire Puy-de-Dôme Rhône Savoie Haute-Savoie
2 mars 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0
9 mars -0,6 -0,4 -0,4 -0,3 -0,5 -0,4 -0,4 -0,4 -0,5 -0,4 -0,3 -0,5 -0,3 -0,5
16 mars -22,8 -23,2 -23,1 -23,5 -23,9 -22,6 -24,4 -22,3 -24,4 -24,0 -22,9 -21,0 -26,6 -27,5
23 mars -32,1 -33,5 -35,1 -33,4 -34,9 -32,1 -34,9 -32,5 -35,2 -34,9 -32,4 -30,1 -39,6 -39,1
30 mars -32,8 -33,7 -35,6 -34,5 -35,0 -32,4 -34,6 -32,6 -35,6 -34,7 -32,8 -30,6 -39,5 -38,1
6 avril -32,2 -32,9 -34,2 -34,2 -34,0 -31,5 -34,1 -31,6 -34,6 -32,5 -32,2 -30,7 -37,7 -36,1
13 avril -31,1 -31,9 -32,8 -32,7 -33,4 -29,2 -33,1 -30,5 -33,3 -30,7 -31,3 -30,2 -34,4 -35,5
20 avril -30,3 -29,7 -30,7 -31,0 -32,0 -26,9 -30,8 -28,3 -30,8 -28,6 -29,2 -28,9 -28,6 -32,8
27 avril -29,2 -28,0 -28,5 -29,1 -30,1 -25,3 -29,0 -26,8 -29,1 -26,4 -27,5 -27,7 -25,6 -31,0
  • Note de lecture : en Auvergne-Rhône-Alpes, en moyenne durant la semaine ouvrée commençant le 23 mars, l’activité partielle et les arrêts pour maladie et garde d’enfants ont contribué à réduire le nombre de salariés en situation de travail effectif de – 33 % par rapport à la semaine ouvrée du 2 au 6 mars.
  • Source : DSN 2020.

Figure 3Les départements savoyards ont eu plus recours à l’activité partielle en marsEffet de l’activité partielle et des arrêts pour maladie et garde d’enfants sur le nombre de salariés en situation de travail effectif en Auvergne-Rhône-Alpes

  • Note de lecture : en Auvergne-Rhône-Alpes, en moyenne durant la semaine ouvrée commençant le 23 mars, l’activité partielle et les arrêts pour maladie et garde d’enfants ont contribué à réduire le nombre de salariés en situation de travail effectif de – 33 % par rapport à la semaine ouvrée du 2 au 6 mars.
  • Source : DSN 2020.

Des aides et des reports de paiements possibles

Le choc économique est amorti par d’autres dispositifs comme la mobilisation de fonds de solidarité. Cela a été le cas pour les non-salariés. En Auvergne-Rhône-Alpes, près de 155 200 personnes relevant du régime complémentaire des indépendants ont pu bénéficier d’une aide avant le 4 juin. Cela représente un versement global de 136 millions d’euros, pour une aide de 878 euros en moyenne par bénéficiaire, plus élevée de 30 euros que dans l’ensemble de la France. Un cinquième de l’aide globale a été versé dans le département du Rhône. Le secteur de la construction, qui ne représente que 13 % de l’emploi non salarié, en a perçu près de 25 %. Le commerce, comptant pour 16 % des personnes exerçant en indépendant, en a encaissé plus de 20 %. Le secteur de l’hébergement-restauration compte deux fois moins de bénéficiaires. L’aide versée représente 10 % de la dotation globale.

Par ailleurs, le réseau des Urssaf a permis aux entreprises en grande difficulté de trésorerie de décaler de trois mois le paiement de tout ou partie des cotisations patronales ou salariales. Dans la région, 5,4 millions d’euros devaient être versés aux Urssaf entre le 15 mars et le 15 mai. 32,6 % de ces charges ont fait l’objet d’une demande de report. Les demandes ont été plus importantes pour les cotisations de mars et avril. En mai, elles ne concernent plus que 26,7 % des charges. En avril, 42 % des établissements ont fait des démarches pour obtenir des délais, contre 30 % en mai. Le secteur de l’hôtellerie et de la restauration est le plus concerné. Les reports portent sur 63,4 % des charges. Les commerces non alimentaires ont demandé un report pour 38,7 % des cotisations et dans l’intérim des délais ont été accordés pour 37 % du montant.

Les demandeurs d’emploi sans activité à un niveau inédit

Les dispositifs d’activité partielle ou d’aides aux entreprises visaient à limiter au maximum la croissance du chômage ou de l’inactivité. Mais ces dispositifs n’ont pas pu l’empêcher, avec un arrêt des embauches et un non-renouvellement des contrats. Dans la région, à la fin du mois de mai 2020, le nombre de demandeurs d’emploi sans activité (catégorie A) s’élève à 475 260 personnes. C’est un niveau jamais vu avant la crise sanitaire, correspondant pratiquement à la population d’un département comme la Savoie. Après une croissance déjà très marquée en mars (+ 8,7 %), le mois d’avril a fait exploser le nombre de demandeurs d’emplois avec une poussée de 25,7 %, trois points de plus qu’au niveau national. Toutefois, la baisse s’amorce en mai suite au déconfinement, avec – 4,5 %, un rythme un peu plus rapide qu’en France.

Entre mars et mai, le nombre de demandeurs d’emploi dans la région affiche un bond de 29,7 %. Au niveau départemental, la Haute-Savoie encaisse une hausse de 40,5 %, une des plus marquées de France, suivie par l’Ain et le Cantal (respectivement + 36,2 % et + 38,7 %). Ce dernier, contrairement aux autres départements de la région, n’enregistre pas de repli du nombre de demandeurs d’emploi en mai. La Drôme affiche la plus faible hausse, bien que substantielle, de 25,5 %.

Le nombre de demandeurs d’emploi des catégories A, B et C, qui inclut en plus les demandeurs d’emploi en activité partielle, augmente plus modérément. En Auvergne-Rhône-Alpes, il progresse de 4,4 % en mars, de 4,1 % en avril et de 0,3 % en mai. Ce contraste avec les demandeurs d’emploi sans activité démontre un transfert des personnes des catégories B et C vers la catégorie A en mars et en avril. En d’autres termes, un grand nombre de demandeurs d’emploi en activité réduite se sont retrouvés sans aucun emploi durant le confinement. La tendance s’inverse à partir de mai, où le nombre de demandeurs d’emplois des catégories B et C repart à la hausse. Au niveau départemental, c’est encore la Haute-Savoie qui affiche la plus forte progression entre février et mai sur l’ensemble des trois catégories (+ 6,8 %).

Malmenées durant le confinement, les créations d'entreprises repartent à la hausse en mai

Compte tenu du contexte sanitaire, les créations d’entreprises en Auvergne-Rhône-Alpes ont fortement reculé. Sur la période allant de mars à mai, les créations sont en repli de 31 % par rapport à une année 2019 exceptionnellement élevée (figure 6). Le creux est encore plus marqué sur le mois d’avril au cœur du confinement (– 46 %). La reprise s’amorce en mai avec un niveau de créations approchant celui de 2018, mais restant bien en deçà de celui de 2019.

Figure 6Les créations augmentent à nouveau en mai 2020Créations mensuelles d’entreprises de 2018 à 2020 entre janvier et mai en Auvergne-Rhône-Alpes

Les créations augmentent à nouveau en mai 2020
2018 2019 2020
janvier 7 809 9 544 10 356
février 6 697 8 173 9 102
mars 7 288 8 734 6 732
avril 6 243 8 249 4 430
mai 6 287 7 740 5 832
  • Note : données brutes.
  • Source : REE, Insee.

Figure 6Les créations augmentent à nouveau en mai 2020Créations mensuelles d’entreprises de 2018 à 2020 entre janvier et mai en Auvergne-Rhône-Alpes

  • Note : données brutes.
  • Source : REE, Insee.

Les créations de sociétés pâtissent davantage de la crise à partir d’avril, avec un niveau de nouvelles immatriculations deux fois moins important que l’année précédente. La reprise des créations en mai y est d’ailleurs nettement moins visible (– 35 % par rapport à mai 2019). À l’inverse, les créations de micro-entreprises ont gardé des valeurs proches de celles de 2018 en mars et en avril, avant de repartir à la hausse en mai, tout en demeurant sous les niveaux records de 2019. Globalement, la crise a un peu moins affecté les créations des micro-entreprises avec une baisse de 26 % sur la période mars-mai par rapport à 2019.

Encadré 1 - Une reprise générale du trafic routier, mais des déplacements matinaux encore en recul

Le trafic routier a décru très rapidement dès la mise en place du confinement. En moyenne, par rapport à une situation d’avant crise, le trafic routier a reculé de 60 % pour l’ensemble des véhicules. Le trafic poids lourds a moins régressé (– 42 %), pour assurer l’approvisionnement de certains commerces prioritaires. La baisse est plus nette pour les déplacements matinaux entre deux intercommunalités, pouvant s’apparenter à des trajets du domicile vers le lieu de travail. Par rapport à la semaine du 3 au 7 février, la première semaine de confinement a vu le nombre d’arrivées baisser d’environ 58 % dans les intercommunalités du Cantal et de la Haute-Loire et de plus de 80 % dans celles du Rhône. Les autres départements se situent entre ces deux extrêmes.

Le déconfinement a marqué une reprise rapide du trafic de véhicules. La fin de la règle dite « des 100 km » début juin a densifié le trafic routier, notamment les week-ends. Les déplacements matinaux entre intercommunalités reprennent plus progressivement, étant encore en recul sur la dernière semaine de mai. Selon les départements, entre un déplacement sur deux (dans le Rhône) et un déplacement sur trois (en Haute-Loire ou dans le Cantal) n’a pas été observé par rapport à la semaine de référence.

Figure 4Des déplacements matinaux encore en recul dans le RhôneÉvolution des déplacements matinaux selon le lieu l’arrivée

en %
Des déplacements matinaux encore en recul dans le Rhône (en %)
Ain Allier Ardèche Cantal Drôme Isère Loire Haute-Loire Puy-de-Dôme Rhône Savoie Haute-Savoie Auvergne-Rhône-Alpes
2 au 8 mars -26,62 -29,89 -31,13 -26,98 -22,79 -24,67 -27,91 -31,79 -26,60 -24,93 -23,05 -14,82 -24,88
9 au 15 mars -0,85 1,98 1,82 6,84 2,59 4,39 1,30 3,18 5,54 1,78 0,90 2,31 2,45
16 au 22 mars -59,13 -59,84 -61,40 -55,59 -59,24 -62,67 -60,31 -57,77 -63,22 -69,53 -62,98 -61,33 -63,01
23 au 29 mars -74,70 -73,86 -73,10 -68,30 -72,81 -76,56 -73,70 -70,00 -76,40 -80,93 -78,32 -77,93 -76,53
30 mars au 5 avril -73,98 -75,20 -73,44 -68,94 -72,27 -76,54 -74,36 -70,88 -77,00 -81,59 -78,32 -76,39 -76,65
6 au 12 avril -72,50 -72,67 -71,21 -65,53 -70,23 -74,16 -71,90 -66,56 -75,30 -81,04 -75,15 -75,57 -74,88
13 au 19 avril -69,58 -69,81 -67,95 -61,98 -67,51 -72,80 -69,60 -63,04 -72,57 -79,58 -72,13 -72,16 -72,54
20 au 26 avril -69,08 -69,88 -69,30 -61,64 -66,68 -73,13 -70,10 -63,84 -72,91 -80,05 -72,17 -71,52 -72,70
27 avril au 3 mai -63,62 -65,08 -63,70 -57,95 -61,17 -68,00 -64,59 -59,42 -67,90 -75,94 -66,89 -64,54 -67,57
4 au 10 mai -57,95 -58,79 -57,24 -49,87 -54,65 -61,52 -59,23 -53,27 -62,19 -71,69 -61,52 -58,45 -61,93
11 au 17 mai -45,91 -41,66 -45,01 -34,06 -41,62 -48,52 -43,89 -38,28 -46,61 -58,31 -46,03 -47,49 -48,30
18 au 24 mai -48,47 -44,13 -46,76 -35,03 -42,64 -50,70 -45,67 -40,81 -48,23 -60,14 -46,20 -47,88 -49,96
25 au 31 mai -38,49 -33,75 -36,56 -27,49 -33,27 -41,56 -37,06 -30,19 -39,01 -51,71 -39,69 -39,79 -41,09
  • Source : Orange, calculs Insee.

Figure 4Des déplacements matinaux encore en recul dans le RhôneÉvolution des déplacements matinaux selon le lieu l’arrivée

  • Source : Orange, calculs Insee.

Encadré 2 - Le montant des transactions bancaires retrouve un niveau proche d’avant la crise

Contrairement à l’activité qui reste en retrait, les dépenses par carte bancaire ont retrouvé un niveau normal. La première semaine de déconfinement, entre le 11 et le 17 mai, a même vu un fort rebond de la consommation des ménages. Celui-ci se reflète dans le montant total de transactions par carte bancaire, en augmentation cette semaine-là, avec la reprise de pratiques de consommation plus habituelles. Depuis, il reste globalement à ce niveau, proche de celui de 2019.

Pendant le confinement, le département de la Savoie a connu une baisse des transactions plus marquée que les autres départements (– 75 % en semaine 13, du 23 au 29 mars), en raison de la fermeture des stations de ski et du départ des touristes. Ce moindre volume perdure jusque fin avril, avant d’atteindre à nouveau le niveau régional. Le Rhône enregistre également moins de transactions, en raison d’une concentration de commerces soumis à fermeture. Ce niveau plus faible, constaté jusqu’au 25 mai, est lié au plus faible nombre d’actifs revenus travailler en présentiel sur le département, et à la fermeture prolongée de grands centres commerciaux. Dans les départements de la Haute-Loire, de l’Ain et de l’Ardèche, le montant de transactions a mieux résisté à la baisse.

Figure 5Un retour à la normale, après un rebond post-confinementVariation hebdomadaire des montants de transactions par carte bancaire par rapport à l’année précédente (en %)

Un retour à la normale, après un rebond post-confinement
Département Ain Ardèche Haute-Loire Rhône Savoie Auvergne-Rhône-Alpes
du 24/02 au 1ᵉʳ/03 1,1 1,1 4,6 0,4 -12,9 -2,4
du 02/03 au 08/03 3,1 2,1 8,1 -2,7 -4,8 -0,1
du 09/03 au 15/03 15,1 14,8 16,2 5,0 0,5 7,7
du 16/03 au 22/03 -29,0 -22,9 -22,5 -49,3 -65,7 -44,5
du 23/03 au 29/03 -50,0 -44,1 -44,2 -65,0 -74,5 -60,0
du 30/03 au 05/04 -44,5 -41,6 -41,4 -62,4 -69,3 -56,4
du 06/04 au 12/04 -32,6 -31,6 -30,9 -55,3 -63,4 -47,6
du 13/04 au 19/04 -33,6 -34,4 -30,3 -55,3 -62,1 -48,0
du 20/04 au 26/04 -27,2 -28,8 -27,2 -48,8 -53,3 -41,1
du 27/04 au 03/05 -34,9 -33,7 -30,6 -53,8 -48,2 -44,8
du 04/05 au 10/05 -22,6 -21,5 -20,9 -42,9 -34,1 -33,5
du 11/05 au 17/05 10,0 12,1 14,1 -6,1 7,7 4,5
du 18/05 au 24/05 4,1 5,8 8,1 -11,8 0,0 -1,2
du 25/05 au 31/05 9,6 -4,2 9,7 -0,4 5,5 5,3
du 1ᵉʳ/06 au 07/06 3,9 -1,0 2,9 -1,2 -0,3 1,8
du 8/06 au 14/06 7,0 8,4 7,1 3,5 4,3 6,1
du 15/06 au 21/06 7,5 10,4 13,4 -0,3 6,0 5,3
  • Source : Cartes Bancaires CB, calculs Insee.

Figure 5Un retour à la normale, après un rebond post-confinementVariation hebdomadaire des montants de transactions par carte bancaire par rapport à l’année précédente (en %)

  • Source : Cartes Bancaires CB, calculs Insee.

Encadré 3 - Appréhender les trajets du domicile au travail à l’aide des données de téléphonie mobile

Les résultats présentés dans cet éclairage s’appuient sur des estimations de mobilité réalisées par Orange Business Services France à partir de son offre existante Flux Vision, qu’Orange a décidé de communiquer à l’Insee au vu de la situation exceptionnelle de crise sanitaire. Les algorithmes utilisés par Flux Vision garantissent une anonymisation irréversible en supprimant toute donnée à caractère personnel et en rendant impossible l’identification d’une personne physique. Cet outil statistique permet de mesurer les multiples déplacements de la population résidant en France, entre le 1er janvier et le 31 mai 2020. Les distances parcourues et les horaires de ces déplacements sont variés, pouvant traduire des motifs différents de déplacement. Afin de cibler au mieux les trajets entre le domicile et le lieu de travail, lesquels sont directement reliés à des motifs d’activité professionnelle, seuls sont considérés ici les déplacements se terminant entre 7 heures et 9 heures chaque matin, suivis d’une période de stabilité d’au moins 3 heures. Les indicateurs analysés somment ainsi l’ensemble de ces déplacements. Ces indicateurs ont été préalablement redressés par Orange afin d’être rendus représentatifs de la population résidente et non uniquement des utilisateurs de mobile Orange. Ensuite, tous les résultats présentés ici, visant à traduire un niveau d’activité durant la crise sanitaire, sont relatifs à une semaine de travail de référence dont l’activité est considérée « normale ». Cette semaine ouvrée de référence s’étend du lundi au vendredi de la première semaine de février 2020 (semaine 6 ouvrée) qui a précédé les vacances scolaires d’hiver et n’était plus affectée par les mouvements sociaux dans les transports ayant perduré jusqu’à la fin janvier.

Géographiquement, les déplacements sont attribués au lieu d’arrivée du trajet, que l'on suppose être, dans la plupart des cas, le lieu d'activité professionnelle. Puis ils sont agrégés au niveau de chaque établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Les données de déplacement par EPCI d’arrivée sont ensuite agrégés au niveau départemental et moyennés sur tous les jours ouvrés de la semaine. Ainsi, l’indicateur exploité ici traduit les évolutions du nombre moyen de déplacements quotidiens selon le lieu d’arrivée.

Encadré 4 - Contexte international – Une récession mondiale soudaine et de grande ampleur

La crise sanitaire a touché la majorité des pays du monde et la quasi-totalité des économies avancées, paralysant l’activité du fait des mesures d’endiguement mises en place. Dans les économies avancées, la chute de l’activité a débuté globalement à la mi-mars pour se prolonger au mois d’avril. Depuis lors, l’activité se rétablit graduellement dans les pays où l’épidémie a pu être maîtrisée, au rythme des calendriers d’allègement des mesures de restriction. L’environnement international reste toutefois très incertain, et ce durablement, d’autant que la menace d’une deuxième vague épidémique continue de planer dans certains pays.

Encadré 5 - Contexte national – Après avoir chuté lourdement pendant la période de confinement, l’activité se rétablit progressivement

Les mesures prises pour endiguer la propagation du Covid-19, notamment le confinement de la population entre le 16 mars et le 11 mai, ont entraîné une brusque chute de l’activité économique : pendant la période de confinement, elle se serait située à environ un tiers en deçà de la normale. La consommation des ménages a chuté dans des proportions similaires.

La sortie graduelle du confinement a permis le rebond de la consommation et le redémarrage plus progressif de l’activité. En juin, la consommation serait « seulement » de 3 % en deçà de son niveau d’avant crise. L’activité resterait plus dégradée, de 12 % inférieure à la normale en juin. La production industrielle, notamment, pâtirait d’une demande internationale en berne et d’importants stocks à écouler. Certains services en revanche auraient vu leur activité se redresser nettement en juin (hébergement-restauration). Au deuxième trimestre, le PIB aurait ainsi diminué de 17 %, après - 5,3 % au premier. La dynamique de reprise amorcée en mai puis juin anticiperait une baisse du PIB d’environ 9 % sur l’année 2020.

Pour comprendre

Parmi les indicateurs « haute fréquence » renseignant sur les évolutions de la consommation des ménages pendant la période de confinement, les données de transactions par carte bancaire constituent une source privilégiée. Elles sont tirées d’une extraction de transactions anonymisées et agrégées à l’échelle départementale afin de respecter les exigences de confidentialité. Ces informations sont sujettes à certaines limites. Les données utilisées concernent tout détenteur de carte bancaire CB sur le territoire français, ce qui, outre les ménages, peut recouvrir aussi des entreprises. Ces données ne recouvrent pas les transactions réalisées par d’autres moyens de paiement (espèces, chèque, ticket restaurant, etc.). De plus, à l’inverse des données utilisées à l’échelle nationale, notamment dans l’estimation de la perte de consommation des ménages, les données départementales intègrent certaines transactions non assimilables à de la consommation (dons à des associations, achat de timbres fiscaux, etc.). Enfin, les transactions à distance (notamment celles sur internet) ne sont pas prises en compte.

Elles permettent d’illustrer de façon journalière les comportements d’achat des ménages, tant au niveau de tous les produits qu’à un niveau plus fin, et permettent dès lors d’identifier les catégories de produits présentant un profil de consommation moins atone que les autres.

Sources

À l’entrée de l’été, la disponibilité de certains indicateurs économiques permet d’affiner l’impact de la crise sanitaire sur l’économie nationale et régionale. Des données provisoires et révélatrices de cette situation sont présentées dans ce point de conjoncture.

L’activité économique a été mesurée au regard d’une situation « normale ». Cette situation correspond à l’année 2015. La variation de l’activité économique est mesuré selon la variation du PIB. Les résultats sur l’activité économique française proviennent des différents points de conjoncture nationale de l’Insee.

La période de confinement s’étend du 17 mars au 10 mai 2020.

Définitions

Demandeurs d'emploi en fin de mois / DEFM : Les demandeurs d'emploi en fin de mois (DEFM) sont les personnes inscrites à « Pôle emploi » et ayant une demande en cours au dernier jour du mois.

Déclaration sociale nominative / DSN : Depuis le 1er janvier 2017, la DSN est le seul mode déclaratif pour transmettre les déclarations périodiques adressées par les employeurs aux organismes de protection sociale et signaler des événements (maladie, garde d’enfants, attestation employeur destinée à « Pôle emploi »...). Cette déclaration unique, mensuelle et dématérialisées remplace la majorité des déclarations sociales. Elle permet de remonter rapidement les informations concernant l’activité partielle ainsi que les arrêts maladie et garde d’enfants.