Une augmentation limitée des décès en Normandie depuis le début de la pandémie de
Covid-19
En Normandie, la surmortalité observée depuis le début de la pandémie de Covid-19 est restée limitée. L’Eure, avec un pic de décès dans la première quinzaine d’avril, fait partie du tiers des départements les plus impactés de France, mais sans commune mesure avec les départements du Grand-Est ou de l’Île-de-France. Les hommes de 85 ans et plus ont été davantage touchés en proportion, même si ce sont les femmes qui ont connu l’augmentation du nombre de décès la plus significative. Les décès sont plus survenus à domicile ou dans les maisons de retraites qu’habituellement.
Le suivi des statistiques de décès, communiquées chaque jour à l’Insee par les communes, permet d’apprécier dans un délai relativement court la surmortalité pendant la crise de Covid-19, même si ces relevés ne permettent pas de distinguer les causes des décès.
Une première approche, simple mais permettant des comparaisons rapides entre régions et départements, consiste à mesurer le surplus éventuel de décès sur les mois de mars et d’avril 2020 par rapport aux mêmes mois de 2019 (sources).
Dans cette approche, l’augmentation du nombre de décès sur la période du 1er mars au 30 avril 2020 a été relativement modérée en Normandie. Avec environ 660 décès supplémentaires enregistrés, 12 % de plus qu’en 2019, la région se situe dans la médiane des régions françaises. La situation est toutefois contrastée entre les départements normands (figure 1) car l’Eure, proche de l’Île-de-France (+ 93 %), a enregistré une hausse de 160 décès, soit + 18 %. Elle fait ainsi partie du tiers des départements ayant connu la plus forte hausse, tout en restant très loin des effets constatés dans les départements les plus touchés (Seine-Saint-Denis à + 128 %, Haut-Rhin à + 124 %), et même de la moyenne nationale (+ 26 %). La Seine-Maritime, compte-tenu de son poids démographique, connaît une hausse de 310 décès. Elle se situe dans le milieu des départements français (+ 16 %), avec la Manche (+ 13 %). L’Orne et le Calvados font quant à eux partie des départements n’ayant vu pratiquement aucune hausse de décès sur les deux mois observés (+ 3 % et + 4 %).
tableauFigure 1 – La Normandie diversement concernéeComparaison des décès entre 2019 et 2020 – 1ᵉʳ mars au 30 avril
Département | Taux d’évolution 2019/2020 |
---|---|
93 | 1,28 |
68 | 1,25 |
92 | 1,05 |
94 | 1,00 |
95 | 0,99 |
75 | 0,92 |
91 | 0,89 |
88 | 0,83 |
78 | 0,68 |
77 | 0,66 |
60 | 0,59 |
67 | 0,57 |
90 | 0,56 |
57 | 0,55 |
25 | 0,50 |
02 | 0,45 |
69 | 0,43 |
51 | 0,40 |
70 | 0,35 |
36 | 0,35 |
54 | 0,34 |
21 | 0,33 |
74 | 0,30 |
28 | 0,30 |
2A | 0,28 |
55 | 0,28 |
52 | 0,28 |
80 | 0,27 |
01 | 0,26 |
07 | 0,25 |
59 | 0,22 |
13 | 0,21 |
49 | 0,18 |
39 | 0,18 |
27 | 0,18 |
73 | 0,17 |
08 | 0,17 |
79 | 0,17 |
42 | 0,17 |
10 | 0,16 |
11 | 0,16 |
76 | 0,16 |
58 | 0,15 |
18 | 0,14 |
41 | 0,14 |
62 | 0,13 |
50 | 0,13 |
34 | 0,12 |
38 | 0,12 |
06 | 0,12 |
71 | 0,12 |
72 | 0,11 |
26 | 0,11 |
30 | 0,11 |
45 | 0,10 |
53 | 0,10 |
44 | 0,10 |
12 | 0,09 |
47 | 0,09 |
89 | 0,09 |
83 | 0,09 |
65 | 0,08 |
56 | 0,07 |
37 | 0,06 |
46 | 0,06 |
31 | 0,06 |
17 | 0,06 |
84 | 0,05 |
29 | 0,05 |
35 | 0,05 |
85 | 0,05 |
14 | 0,04 |
40 | 0,04 |
22 | 0,03 |
86 | 0,03 |
32 | 0,03 |
61 | 0,03 |
33 | 0,02 |
23 | 0,01 |
63 | 0,01 |
66 | 0,00 |
97 | 0,00 |
03 | -0,01 |
64 | -0,01 |
19 | -0,02 |
87 | -0,03 |
16 | -0,04 |
24 | -0,07 |
43 | -0,07 |
04 | -0,07 |
15 | -0,07 |
09 | -0,07 |
82 | -0,09 |
81 | -0,10 |
05 | -0,11 |
2B | -0,13 |
48 | -0,16 |
- Source : Insee, État Civil
graphiqueFigure 1 – La Normandie diversement concernéeComparaison des décès entre 2019 et 2020 – 1ᵉʳ mars au 30 avril

- Source : Insee, État Civil
La Normandie subit un impact modéré et tardif
Les liens entre l’évolution de la mortalité générale et l’impact de la pandémie sont encore difficiles à établir, en particulier dans les territoires relativement peu touchés. Une analyse détaillée de la chronologie des décès permet toutefois d’identifier des évolutions inhabituelles, susceptibles de recouvrir certains effets de la pandémie. Les premiers pics de mortalité sont enregistrés dès le début du mois de mars dans certains départements de l’Est de la France, puis vers le 10 mars en Île-de-France. La courbe de mortalité ne commence à s’élever qu’autour du 25 mars dans les départements normands les plus touchés, l’Eure et la Seine-Maritime (figure 2). Les nombres de décès les plus élevés sont enregistrés lors des semaines 14 et 15, soit entre le 30 mars et le 13 avril. Si on compare cette période « haute » avec les semaines où l’impact de la pandémie ne s’observe pas encore et avec celles suivant le « retour à la normale » (à partir de la fin avril), le surplus de décès est de l’ordre de + 70 % dans l’Eure et de + 35 % en Seine-Maritime.
Dans l’Orne, on constate un « pic » plus court et portant sur des effectifs limités (environ 30 décès supplémentaires en semaine 14). Le département de la Manche présente quant à lui une mortalité sur les mois de mars et avril 2020 sensiblement supérieure aux mêmes mois de l’année 2019, mais la chronologie des décès ne fait apparaître qu’un effet tardif et de faible ampleur (2ème semaine d’avril). Enfin, le Calvados apparaît comme le département normand le moins impacté, sans effet significatif apparent.
tableauFigure 2 – Un effet visible de la pandémie surtout dans l’Eure et en Seine-MaritimeÉvolution du nombre de décès hebdomadaire par département – 2020
Semaine | Calvados | Eure | Manche | Orne | Seine-Maritime |
---|---|---|---|---|---|
10 | 150 | 93 | 119 | 59 | 245 |
11 | 167 | 83 | 121 | 77 | 280 |
12 | 159 | 71 | 121 | 52 | 282 |
13 | 144 | 119 | 124 | 71 | 288 |
14 | 152 | 145 | 117 | 89 | 343 |
15 | 171 | 142 | 137 | 71 | 311 |
16 | 124 | 119 | 122 | 68 | 296 |
17 | 134 | 89 | 112 | 55 | 231 |
18 | 118 | 84 | 95 | 54 | 226 |
- Source : Insee, État Civil
graphiqueFigure 2 – Un effet visible de la pandémie surtout dans l’Eure et en Seine-MaritimeÉvolution du nombre de décès hebdomadaire par département – 2020

- Source : Insee, État Civil
Une majorité des décès supplémentaires concerne les plus de 85 ans
La surmortalité sur la période n’a pratiquement pas atteint les classes d’âges les plus jeunes, jusqu’à 64 ans (figure 3). En revanche, en proportion, toutes les classes d’âge supérieures ont été touchées à des niveaux similaires, avec une hausse des décès de 14 à 15 % par rapport à 2019.
La tranche des 85 ans ou plus couvre ainsi 56 % des décès supplémentaires alors que sa part habituelle dans les décès n’est que de 45 %.
tableauFigure 3 – Les personnes de plus de 65 ans particulièrement touchéesDécès par tranches d’âges en Normandie – 1ᵉʳ mars et 30 avril
Classe d’âge | 2019 | 2020 |
---|---|---|
- de 45 ans | 164 | 136 |
45 à 64 ans | 783 | 792 |
65 à 74 ans | 894 | 1 018 |
75 à 84 ans | 1 190 | 1 376 |
85 ans et plus | 2 554 | 2 925 |
- Source : Insee, État Civil
graphiqueFigure 3 – Les personnes de plus de 65 ans particulièrement touchéesDécès par tranches d’âges en Normandie – 1ᵉʳ mars et 30 avril

- Source : Insee, État Civil
Les femmes ont été plus impactées que les hommes dans l’ensemble (+ 13 % contre + 11 %) car la part des femmes parmi les personnes de 85 ans ou plus est supérieure à celle des hommes (60 % contre 30 %). En proportion de cette tranche d’âge, les hommes ont été particulièrement touchés, avec une hausse des décès supérieure à 18 % (13 % pour les femmes).
Dans ce contexte de pandémie, le nombre de décès recensés dans les hôpitaux et les cliniques a logiquement augmenté (environ + 150, soit + 5 %), mais dans des proportions plus fortes encore dans les maisons de retraite (+ 32 %, + 220 décès) et même au domicile des défunts (+ 22 %, + 280 décès ; figure 4). Cette tendance s’observe dans chacun des départements significativement touchés et est similaire aux évolutions constatées au niveau national.
tableauFigure 4 – Un surplus de décès plus important à domicile et dans les maisons de retraiteNombre de décès par type de lieu en 2020 et 2019 – 1ᵉʳ mars et 30 avril
Domicile | Maisons de retraite | Hôpitaux / Cliniques | Autres / Inconnu | |
---|---|---|---|---|
2019 | 1287 | 671 | 2890 | 737 |
2020 | 1571 | 887 | 3037 | 752 |
- Source : Insee, État Civil
graphiqueFigure 4 – Un surplus de décès plus important à domicile et dans les maisons de retraiteNombre de décès par type de lieu en 2020 et 2019 – 1ᵉʳ mars et 30 avril

- Source : Insee, État Civil
Sources
Cette étude utilise les données de décès enregistrés dans les statistiques d’état civil en 2019 et 2020. Les statistiques diffusées sont provisoires pour l’année 2020. Elles sont issues du fichier en date du 27 mai et l’analyse s’arrête au 30 avril de manière à assurer une remontée quasi exhaustive des décès survenus. L’année 2019 constitue une bonne référence car ne comportant pas d’épisode sanitaire notable.
Les décès sont ici comptabilisés dans la commune de résidence du défunt et non au lieu de décès. Tous les décès sont comptabilisés, quels que soient la cause ou le type de lieu où ils surviennent.
Pour en savoir plus
Nombre de décès quotidiens par département
Bayet A., Le Minez S., Roux V., « Statistiques sur les décès : le mode d’emploi des données de l’Insee en 7 questions/réponses »
Gascard N., Kauffmann B., Labosse A., « 26 % de décès supplémentaires entre début mars et mi-avril 2020 : les communes denses sont les plus touchées », Insee Focus n° 191, mai 2020