Insee PremièreUne pauvreté marquée dans les DOM, notamment en Guyane et à Mayotte

Ludovic Audoux, Claude Mallemanche, Pascal Prévot (mission appui DOM, Insee)

En 2017, les habitants des DOM ont globalement un niveau de vie plus faible qu’en métropole et les inégalités sont plus marquées, surtout en Guyane et bien plus encore à Mayotte. Le taux de pauvreté monétaire au seuil national est deux à quatre fois plus élevé dans les DOM historiques qu’en France métropolitaine, et cinq fois plus à Mayotte. Les chômeurs, les personnes non diplômées, les jeunes et les familles monoparentales sont les plus touchés par la pauvreté. La proportion des prestations sociales dans le revenu des ménages est sensiblement plus forte qu’en métropole.

Ludovic Audoux, Claude Mallemanche, Pascal Prévot (mission appui DOM, Insee)
Insee Première No 1804- Juillet 2020

Dans les départements d’outre-mer (DOM), le des habitants est globalement inférieur à celui de la population métropolitaine (figure 1). En 2017, en Martinique et en Guadeloupe, le niveau de vie médian, qui partage la population en deux parties égales, se situe respectivement à 1 360 et 1 310 euros mensuels. Cela correspond à des de 2 870 et de 2 760 euros par mois pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans. Ces niveaux de vie médians sont inférieurs de 20 % et 23 % à celui observé en France métropolitaine (1 700 euros par mois). Celui de La Réunion (1 160 euros mensuels) est inférieur d’un tiers au niveau de vie médian de métropole et celui de la Guyane de moitié (920 euros). À Mayotte (260 euros), il ne représente qu’un sixième de la valeur métropolitaine.

En bas de la distribution des revenus, le niveau de vie plafond des 30 % les plus modestes est proche aux Antilles et à La Réunion et se situe environ un tiers en deçà de celui de la métropole. Pour la Guyane, il lui est inférieur de plus de 50 %. Trois personnes sur dix ont un niveau de vie inférieur à 950 euros par mois aux Antilles, 850 euros à La Réunion et à 640 euros en Guyane, contre 1 340 euros en métropole.

Les écarts se réduisent en revanche pour les hauts revenus. Les 10 % des personnes les plus aisées ont un niveau de vie supérieur à 2 800 euros par mois dans les DOM historiques (Guadeloupe, Martinique, Guyane et La Réunion), comme en métropole. Mayotte se démarque : seuls 10 % des habitants perçoivent plus de 1 800 euros par mois et 3 % plus de 3 000 euros par mois.

Figure 1 - Déciles de niveau de vie mensuel en 2017

en euros
Figure 1 - Déciles de niveau de vie mensuel en 2017 (en euros) - Lecture : en 2017, 20 % des individus (2e décile) de Guadeloupe ont un niveau de vie inférieur à 800 euros par mois.
1er décile 2e décile 3e décile 4e décile Médiane 6e décile 7e décile 8e décile 9e décile
Guadeloupe 600 800 950 1 100 1 310 1 530 1 880 2 260 2 940
Martinique 630 800 930 1 190 1 360 1 620 1 890 2 320 3 100
Guyane 360 510 640 780 920 1 190 1 630 2 050 2 810
La Réunion 630 760 850 970 1 160 1 360 1 610 2 030 2 810
Mayotte 0 30 70 140 260 410 740 1 090 1 770
France métropolitaine 900 1 130 1 340 1 520 1 700 1 900 2 130 2 440 3 010
  • Lecture : en 2017, 20 % des individus (2e décile) de Guadeloupe ont un niveau de vie inférieur à 800 euros par mois.
  • Source : Insee, Budget de famille 2017.

Figure 1 - Déciles de niveau de vie mensuel en 2017

  • Lecture : en 2017, 20 % des individus (2e décile) de Guadeloupe ont un niveau de vie inférieur à 800 euros par mois.
  • Source : Insee, Budget de famille 2017.

De fortes inégalités de niveau de vie en Guyane et à Mayotte

Conséquence de niveaux de revenus très faibles dans le bas de la distribution, les inégalités de niveaux de vie sont plus prononcées dans les DOM qu’en métropole. Elles sont exacerbées à Mayotte, où une partie de la population ne dispose d’aucun revenu stable. Les inégalités les plus fortes concernent ensuite la Guyane, puis viennent les Antilles et La Réunion, où elles sont un peu moins marquées. Cette hiérarchie entre les DOM historiques reste la même, quel que soit l’indicateur considéré.

Aux Antilles et à La Réunion, les personnes sous le niveau de vie médian, soit la moitié de la population, disposent de 27 % de l’ensemble des niveaux de vie. Les 20 % les plus aisées en disposent de plus de 40 %, soit entre 5,4 et 5,9 fois plus que les 20 % les moins dotées () (figure 2). En Guyane, les inégalités sont plus marquées. Les individus sous le niveau de vie médian ne détiennent que 21 % de l’ensemble des niveaux de vie. Les 20 % les plus aisés en détiennent 47 %, soit 10,5 fois plus que les 20 % les plus pauvres. À Mayotte, la valeur extrême de cet indicateur témoigne du très faible revenu des plus défavorisés, parmi lesquels une population immigrée nombreuse, souvent de nationalité étrangère et en situation irrégulière.

Figure 2 – Taux de pauvreté et indicateur d’inégalités en 2017

Figure 2 – Taux de pauvreté et indicateur d’inégalités en 2017 - Lecture : en 2017, 34 % des Guadeloupéens sont pauvres au seuil national (60 % du niveau de vie médian en France). En Guadeloupe, la masse des niveaux de vie détenue par les 20 % des personnes les plus aisées est 5,9 fois plus élevée que celle détenue par les 20 % les plus pauvres (S80/S20). Le seuil de pauvreté local (60 % du niveau de vie médian départemental) est de 790 euros en Guadeloupe, 19 % des Guadeloupéens ont un niveau de vie inférieur à ce seuil.
Taux de pauvreté  Seuil national (en %) Indicateur d’inégalités : S80/S20 Seuil local
Seuil mensuel (en euros) Taux de pauvreté (en %)
Guadeloupe 34 5,9 790 19
Martinique 33 5,7 820 21
Guyane 53 10,5 550 23
La Réunion 42 5,4 700 16
Mayotte 77 > 80 160 42
France métropolitaine 14 4,0 1 020 15
  • Lecture : en 2017, 34 % des Guadeloupéens sont pauvres au seuil national (60 % du niveau de vie médian en France). En Guadeloupe, la masse des niveaux de vie détenue par les 20 % des personnes les plus aisées est 5,9 fois plus élevée que celle détenue par les 20 % les plus pauvres (S80/S20). Le seuil de pauvreté local (60 % du niveau de vie médian départemental) est de 790 euros en Guadeloupe, 19 % des Guadeloupéens ont un niveau de vie inférieur à ce seuil.
  • Source : Insee, Budget de famille 2017.

Les habitants des DOM plus exposés à la pauvreté

Les niveaux de vie y étant faibles, la pauvreté est plus répandue dans les DOM qu’en métropole (figure 2). Calculé en référence au niveau de vie médian national, le s’élève à un tiers en Guadeloupe et en Martinique, contre 14 % en métropole. Est ainsi considérée comme pauvre en 2017 une personne seule qui vit avec moins de 1 010 euros par mois, 1 515 euros par mois pour un couple sans enfant ou 2 120 euros par mois pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans. La pauvreté est encore plus marquée dans les autres DOM : elle touche quatre personnes sur dix à La Réunion, une sur deux en Guyane et trois quarts des Mahorais. En métropole, seul le département de la Seine-Saint-Denis est confronté à un taux de pauvreté proche de ceux des DOM (28 %).

16 % à 23 % d’individus sous le seuil de pauvreté local dans les DOM historiques

La pauvreté est une notion relative qui peut aussi se définir en fonction de la situation socio-économique de l’environnement territorial de résidence immédiat. Le taux de pauvreté au seuil « local », fixé à 60 % du niveau de vie médian du département (et non pas national), permet de repérer les décrochages au sein du territoire considéré.

Aux Antilles et en Guyane, une personne sur cinq vit en dessous de ce seuil de pauvreté local, qui s’établit à 820 euros mensuels en Martinique, 790 euros en Guadeloupe, mais seulement 550 euros en Guyane (contre 1 020 euros pour le seuil métropolitain) (figure 2). À La Réunion, avec un seuil de 700 euros par mois, c’est le cas de 16 % de la population. Mayotte se démarque : quatre habitants sur dix vivent en dessous du seuil de pauvreté local, malgré la faiblesse de celui-ci (160 euros mensuels).

Ces personnes pauvres sont dans des situations financières très précaires. Elles sont fréquemment sans emploi, pas ou peu diplômées et sont surreprésentées dans les familles monoparentales et parmi les personnes vivant seules.

Les chômeurs durement touchés

La structure de la population et l’environnement économique propres à chaque territoire renforcent leur exposition à la pauvreté. Les caractéristiques des personnes pauvres dans les DOM sont les mêmes qu’en métropole, mais à des niveaux d’intensité souvent plus élevés. Les personnes vivant dans les dont la est sans emploi (chômeur ou inactif) sont les plus fortement touchées par la pauvreté (figure 3), quel que soit le seuil considéré, national ou local. Au moins 80 % d’entre elles ont un niveau de vie inférieur au seuil national de pauvreté aux Antilles et à La Réunion, 93 % en Guyane et la quasi-totalité à Mayotte. Les ménages dont la personne de référence est en emploi ne sont pas pour autant à l’abri de la pauvreté monétaire, même s’ils sont moins touchés (de ‒ 11 points par rapport à la moyenne en Guadeloupe à ‒ 25 points en Guyane). Les retraités ont un taux de pauvreté proche de la moyenne, hormis en Guadeloupe et en Guyane où il est plus modéré.

Les écarts de pauvreté selon le diplôme sont particulièrement marqués dans les DOM. Moins de 10 % des personnes vivant dans un ménage dont la personne de référence est diplômée du supérieur sont pauvres. À l’inverse, près de la moitié des peu ou pas diplômés sont pauvres au seuil national aux Antilles, et ce taux atteint 59 % à La Réunion, 77 % en Guyane et 91 % à Mayotte.

Autre constante dans tous les DOM, comme en métropole, la pauvreté est plus fréquente pour les ménages jeunes, dont la personne de référence a moins de 35 ans.

Les familles monoparentales sont les plus exposées à la pauvreté. Cette précarité est due au fait que le parent isolé, souvent la mère, assure fréquemment l’intégralité des revenus du ménage ; elle est renforcée par une situation sociale souvent fragile, le parent étant plus souvent sans emploi ou peu diplômé que dans les autres types de ménages. Les ménages complexes (ménages comportant plusieurs familles, plusieurs générations, etc.) sont plus touchés par la pauvreté en Guyane et à Mayotte, département où ils sont les plus nombreux. À l’opposé, les couples avec enfants ont des taux inférieurs à la moyenne, de 3 à 13 points selon les départements. Ce sont les couples sans enfant qui ont le risque de pauvreté monétaire le plus faible, dans tous les DOM, comme en métropole.

Figure 3a - Proportion de personnes dont le niveau de vie est en dessous des seuils de pauvreté selon les caractéristiques de la personne de référence du ménage ou du type de ménage en Guadeloupe en 2017

en %
Figure 3a - Proportion de personnes dont le niveau de vie est en dessous des seuils de pauvreté selon les caractéristiques de la personne de référence du ménage ou du type de ménage en Guadeloupe en 2017 (en %) - Lecture : en Guadeloupe, en 2017, 83 % des personnes vivant dans un ménage dont la personne de référence est chômeur sont pauvres au seuil national. Avec le seuil local, 55 % des personnes dans cette situation sont pauvres. 15 % des individus vivent dans un ménage dont la personne de référence est chômeur.
Seuil national Seuil local Répartition des individus selon les caractéristiques de la personne de référence du ménage
Ensemble 34 19 100
En emploi 23 11 59
Chômeur 83 55 15
Retraité 27 10 20
Autres inactifs 57 38 6
Diplôme de l'enseignement supérieur 9 6 21
Baccalauréat 26 15 15
CAP BEP 39 17 23
Pas ou peu diplômé 48 27 41
Moins de 35 ans 45 21 12
De 35 à 49 ans 36 21 37
De 50 à 64 ans 33 21 31
65 ans ou plus 27 11 20
Personne seule 42 25 15
Famille monoparentale 49 26 22
Couple sans enfant 15 6 14
Couple avec au moins un enfant 31 17 35
Ménage complexe 32 16 14
  • Lecture : en Guadeloupe, en 2017, 83 % des personnes vivant dans un ménage dont la personne de référence est chômeur sont pauvres au seuil national. Avec le seuil local, 55 % des personnes dans cette situation sont pauvres. 15 % des individus vivent dans un ménage dont la personne de référence est chômeur.
  • Source : Insee, Budget de famille 2017.

Figure 3a - Proportion de personnes dont le niveau de vie est en dessous des seuils de pauvreté selon les caractéristiques de la personne de référence du ménage ou du type de ménage en Guadeloupe en 2017

  • Lecture : en Guadeloupe, en 2017, 83 % des personnes vivant dans un ménage dont la personne de référence est chômeur sont pauvres au seuil national. Avec le seuil local, 55 % des personnes dans cette situation sont pauvres.
  • Source : Insee, Budget de famille 2017.

Les bas revenus fortement dépendants des prestations sociales

Dans les DOM historiques, les prestations sociales non contributives (distinctes de celles accordées en contrepartie de cotisations, comme les allocations chômage, les pensions de retraite, etc.) représentent plus de la moitié du revenu disponible des 20 % des ménages les plus modestes. Cette part atteint même 70 % en Guyane (figure 4). La part de ces prestations sociales diminue quand on monte dans l’échelle des niveaux de vie : au-delà du 3e , elles entrent peu en compte dans la composition du revenu. Les prestations amortissent les inégalités, même si elles ne suffisent pas à éviter le décrochage des plus pauvres.

À Mayotte, malgré des revenus très faibles, les prestations sociales pèsent assez peu dans le revenu disponible, notamment pour les plus pauvres, en grande partie des étrangers : le RSA et les allocations familiales ne sont pas accessibles à la population étrangère non régularisée ou régularisée depuis moins de 15 ans. Ainsi, seules 16 000 personnes bénéficient du RSA à Mayotte en décembre 2018, soit 6 % de la population, contre 24 % dans l’ensemble des autres DOM. De surcroît, malgré les rattrapages de ces dernières années, le niveau des prestations sociales y reste inférieur à la métropole (par exemple, ‒ 50 % pour le RSA). De ce fait, ces prestations ont un effet plus marqué sur le taux de pauvreté au seuil local que sur le taux de pauvreté défini en référence au revenu médian national. Les prestations sociales et les impôts ne font baisser le taux de pauvreté au seuil national que de 1 point à Mayotte, contre 7 points en métropole et environ 10 points dans les autres DOM.

Figure 4 - Part des prestations sociales dans le revenu disponible des ménages selon le quintile de niveau de vie en 2017

en %
Figure 4 - Part des prestations sociales dans le revenu disponible des ménages selon le quintile de niveau de vie en 2017 (en %) - Lecture : en Guyane, en 2017, les prestations représentent 70 % du revenu disponible des ménages dont le niveau de vie est inférieur au premier quintile.
Guadeloupe Martinique Guyane La Réunion Mayotte France métropolitaine
Inférieur au 1er quintile 58,8 54,4 70,0 59,9 24,9 33,0
Entre le 1er et le 2e quintile 38,0 39,8 61,1 47,3 37,3 10,8
Entre le 2e et le 3e quintile 20,0 15,4 41,5 27,9 30,0 4,6
Entre le 3e et le 4e quintile 6,5 4,8 12,6 9,2 8,1 2,9
Supérieur au 4e quintile 1,6 1,9 2,3 2,0 1,7 0,9
  • Lecture : en Guyane, en 2017, les prestations représentent 70 % du revenu disponible des ménages dont le niveau de vie est inférieur au premier quintile.
  • Source : Insee, Budget de famille 2017.

Figure 4 - Part des prestations sociales dans le revenu disponible des ménages selon le quintile de niveau de vie en 2017

  • Lecture : en Guyane, en 2017, les prestations représentent 70 % du revenu disponible des ménages dont le niveau de vie est inférieur au premier quintile.
  • Source : Insee, Budget de famille 2017.

De nombreux enfants vivent au sein d’un ménage pauvre

Les enfants de moins de 18 ans sont davantage touchés par la pauvreté que les adultes : 8 enfants sur 10 à Mayotte, 6 sur 10 en Guyane, près de 5 sur 10 à La Réunion et de 4 sur 10 dans les Antilles vivent dans un ménage en situation de pauvreté monétaire. C’est en Guyane que l’écart entre le taux de pauvreté des enfants de moins de 18 ans et celui de l’ensemble de la population est le plus grand : 9 points. Il atteint 6 points à La Réunion et en Guadeloupe, comme en métropole. Il est légèrement inférieur en Martinique et à Mayotte (respectivement 4 et 3 points).

La pauvreté des enfants dépend fortement de la situation de leurs parents sur le marché du travail. Dans les DOM, pour plus de la moitié des enfants pauvres, aucun de leurs parents n’est en emploi et pour un tiers, un seul de leurs parents travaille. La situation familiale influe aussi : les enfants pauvres vivent plus souvent dans des familles monoparentales, particulièrement aux Antilles. En Guyane, à La Réunion et à Mayotte, ils sont aussi surreprésentés dans les ménages complexes.

Encadré 1 - Les sources statistiques sur la pauvreté et le revenu disponible

Plusieurs sources statistiques permettent d’observer la pauvreté monétaire et les inégalités de revenu disponible.

Au niveau national, pour la France métropolitaine, l’enquête Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) est la source de référence. Au niveau infra-national, le Fichier localisé social et fiscal (Filosofi), basé sur un rapprochement des fichiers fiscaux et sociaux est la référence pour les régions de métropole, ainsi que pour la Martinique et La Réunion.

Du fait de la moindre qualité des sources administratives (notamment des adresses manquantes ou incomplètes), la Guadeloupe, la Guyane et Mayotte n’ont pour l’instant pas pu être intégrées dans Filosofi.

Pour pallier ce problème, l’enquête Budget de famille (BDF) réalisée par l’Insee dans tous les DOM en 2017 a été mobilisée. Elle permet notamment de calculer l’ensemble des indicateurs de pauvreté et d’inégalités monétaires sur tous les DOM et de comparer ces territoires entre eux et avec la France métropolitaine. Cette enquête permet également d’analyser la pauvreté en fonction de variables socio-démographiques (catégorie socio professionnelle, diplôme, etc.).

Les résultats présentés ici sont exclusivement issus de l’enquête Budget de famille, afin de permettre des comparaisons entre tous les DOM.

Cependant, des différences existent entre les revenus issus de l’enquête Budget de famille et ceux issus de Filosofi ou de l’ERFS, notamment sur les plus bas revenus, ce qui conduit à un taux de pauvreté supérieur (figure). Pour la Martinique et La Réunion, le taux de pauvreté issu de Budget de famille est supérieur d’environ 4 points à celui de Filosofi ; pour la métropole, l’écart est de 0,4 point entre Budget de famille et ERFS. Du fait de la différence de traitement des revenus pour Mayotte, le taux de pauvreté est estimé avec une fourchette de 4 points (entre 74 % et 78 %).

Par ailleurs, quelle que soit la source, les niveaux de vie ne sont pas corrigés des écarts de niveau des prix entre territoires.

Figure - Taux de pauvreté selon les différentes sources en 2017

en %
Figure - Taux de pauvreté selon les différentes sources en 2017 (en %)
Budget de famille Filosofi ERFS
Mayotte 77,3
Guyane 52,9
La Réunion 41,9 38,3
Guadeloupe 34,5
Martinique 33,4 28,6
Métropole 14,5 14,1
  • Sources : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) 2017, Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2017 ; Insee, Budget de famille 2017.

Figure - Taux de pauvreté selon les différentes sources en 2017

  • Sources : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) 2017, Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2017 ; Insee, Budget de famille 2017.

Encadré 2 - Mesurer la pauvreté : seuil national ou local ?

La mesure de la pauvreté monétaire retenue en Europe est une approche relative. Pour cela, est retenue dans la distribution statistique des niveaux de vie une position de référence, jugée la plus représentative de la situation des personnes dans l’économie : le niveau de vie médian. Le seuil de pauvreté correspond usuellement à 60 % de ce niveau.

Deux approches complémentaires permettent de comparer les territoires : soit avec un seuil spécifique à chaque territoire, soit avec un seuil commun.

Le taux de pauvreté au seuil national est calculé à partir du niveau de vie de l’ensemble de la population française. Il permet notamment de comparer les territoires, à partir d’un seuil identique (60 % du revenu médian national). Cette approche reflète notamment les différences de développement entre territoires. Par construction, les niveaux de vie ne sont pas corrigés des différences de pouvoir d'achat entre territoires.

Le taux de pauvreté au seuil local est calculé à partir du seuil propre à chaque DOM (60 % du revenu médian départemental). Il reflète les inégalités monétaires au sein de la région considérée et vise plutôt à mesurer le « décrochage » au sein du département.

Sources

L’enquête Budget de famille (BDF) vise à étudier les dépenses et les ressources des ménages résidant en France. L’enquête est menée auprès d’un échantillon de ménages ordinaires, hors population vivant en collectivités (foyers, hôpitaux, maisons de retraite, etc.).

Afin d’alléger le questionnement et obtenir des chiffres plus précis sur les revenus et les prélèvements obligatoires, l’enquête 2017 a été appariée avec des fichiers administratifs, tels que les fichiers fiscaux et ceux issus de la Caisse nationale d’allocations familiales, pour la métropole et les quatre DOM historiques. De ce fait, les revenus sont supérieurs de 15 % aux revenus déclarés. Toutefois, Mayotte ne bénéficie pas de cette méthodologie, du fait de fichiers administratifs très incomplets ; les revenus restent donc mesurés, comme en 2011, à partir des réponses à l’enquête (qui incluent les revenus procurés par des activités secondaires ou occasionnelles).

Dans le cadre d’un partenariat entre l’Insee et la Direction générale des Outre-mer (DGOM), l’enquête Budget de famille 2017 a bénéficié d’une extension d’échantillon dans chaque DOM afin de fournir des résultats significatifs par département. La collecte s’est déroulée d’octobre 2016 à octobre 2017 en métropole et dans les DOM hors Mayotte et d’octobre 2017 à octobre 2018 à Mayotte.

Les données sur la Guyane ne concernent que les 15 communes de la Guyane « côtière étendue » parmi les 22 que compte la Guyane (Apatou, Saint-Laurent-du-Maroni, Awala-Yalimapo, Mana, Iracoubo, Sinnamary, Kourou, Macouria, Montsinéry-Tonnegrande, Cayenne, Matoury, Remire-Montjoly, Roura, Régina et Saint-Georges).

Définitions

Le niveau de vie prend en compte les revenus et les prélèvements obligatoires des membres du ménage ainsi que la composition du ménage : il donne une indication sur ce dont dispose chaque personne du ménage pour faire face aux dépenses d’alimentation, de logement, d’habillement, de transports, de loisirs, etc. Il est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d’unités de consommation (UC) du ménage. Le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d’un même ménage.

Le revenu disponible d’un ménage comprend les revenus d’activité et du patrimoine ainsi que les transferts réguliers en provenance d’autres ménages et les prestations sociales (y compris les pensions de retraite et les indemnités de chômage), nets des cotisations sociales et des impôts directs.

Le ratio S80/S20 mesure la disparité relative de la distribution d’une grandeur donnée (salaire, revenu, niveau de vie, etc.). Ainsi, pour une distribution de niveaux de vie, S80/S20 rapporte la masse des niveaux de vie détenue par les 20 % d’individus les plus riches à celle détenue par les 20 % des personnes les plus pauvres.

Le taux de pauvreté monétaire correspond à la proportion d’individus (ou de ménages) dont le niveau de vie est inférieur pour une année donnée à un seuil, dénommé seuil de pauvreté (exprimé en euros). Le seuil de pauvreté est déterminé par rapport à la distribution des niveaux de vie de l’ensemble de la population. On privilégie en Europe le seuil de 60 % du niveau de vie médian.

Est considéré comme un ménage l’ensemble des personnes (apparentées ou non) qui partagent de manière habituelle un même logement (que celui-ci soit ou non leur résidence principale) et qui ont un budget en commun.

La personne de référence du ménage est déterminée à partir de la structure familiale du ménage et des caractéristiques des individus qui le composent. Parmi les personnes du ménage apportant des revenus, la personne de référence est en priorité celle qui est active, puis retraitée, puis inactive. À statut égal, on prend la plus âgée.

Les déciles (respectivement quintiles) sont les valeurs-seuils d’une variable (ici le niveau de vie) qui, lorsque l’on ordonne la population selon les valeurs de la variable, la partitionnent en 10 (respectivement 5) sous- populations de taille identique.

Les unités de consommation sont calculées selon l’échelle d’équivalence dite de l’OCDE modifiée qui attribue 1 UC au premier adulte du ménage, 0,5 UC aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 UC aux enfants de moins de 14 ans.

Pour en savoir plus

Demougeot L., Kempf N., Raimbaud B., « Niveaux de vie en 2017 : la pauvreté touche un tiers de la population guadeloupéenne », Insee Analyses Guadeloupe n° 43, juillet 2020.

Raimbaud B., « Niveau de vie en Martinique en 2017 : 29 % des Martiniquais vivent sous le seuil de pauvreté », Insee Analyses Martinique n° 39, juillet 2020. 

Raimbaud B., Demougeot L., Kempf N., « Niveaux de vie en Guyane en 2017 : la moitié des Guyanais vivent sous le seuil de pauvreté », Insee Analyses Guyane n° 46, juillet 2020.

Besson L., « Niveaux de vie et pauvreté à La Réunion en 2017 : un taux de pauvreté élevé mais en baisse depuis 10 ans », Insee Flash La Réunion n° 169, janvier 2020.

Merceron S., « Revenus et pauvreté à Mayotte en 2018 : les inégalités de niveau de vie se sont creusées », Insee Analyses Mayotte n° 25, juillet 2020. 

Fiche Niveaux de vie et redistribution, France, portrait social, Insee Références, édition 2019.

Blasco J., Guillaneuf J., « En 2017, les niveaux de vie progressent légèrement, les inégalités sont quasi stables », Insee Première n° 1772, septembre 2019.

Jaluzot L., Malaval F., Rateau G., « En 2015, les prix dans les DOM restent plus élevés qu'en métropole », Insee Première n° 1589, avril 2016.