Concilier développement économique et transformation sociale : un enjeu pour l’Ouest guyanais
La plupart des problématiques démographiques, sociales et économiques propres à la Guyane touchent l’Ouest guyanais souvent de manière plus prononcée : forte croissance démographique, communes isolées, dépendance à l’emploi public et faible relais du secteur privé, tissu productif peu développé. L’histoire récente de son peuplement en fait un territoire en évolution très rapide et en pleine transformation urbaine pour Saint-Laurent-du-Maroni et Maripasoula. Les enjeux sont multiples : éduquer un nombre croissant de jeunes, développer les emplois au travers de nouveaux moteurs économiques, structurer l’économie formelle, lutter contre l’habitat informel. Savoir concilier ces enjeux à un rythme soutenu en maintenant intacte une cohésion sociale pluriethnique et traditionnelle est un défi majeur.
- Une croissance démographique exceptionnelle, fruit d’une forte natalité et de pics de migrations
- Des échanges migratoires fortement tournés vers l’Hexagone
- La poursuite d’études, un fort enjeu pour un territoire jeune
- L’emploi repose sur le secteur public
- Entre fragilité sociale et mode de vie traditionnel
Au 1er janvier 2013, la Communauté de Communes de l’Ouest Guyanais (CCOG) compte 83 400 habitants. Forte de ses 41 000 km², elle occupe la moitié de la superficie de la Guyane et se positionne sur tout l’ouest, du nord au sud. L’Ouest guyanais est un ensemble de huit communes aux profils assez hétérogènes. Il contient à la fois le deuxième pôle urbain de Guyane, sous-préfecture du département, Saint-Laurent-du-Maroni et les communes dites « isolées », les plus peuplées de Guyane, notamment Maripasoula et Grand-Santi. Cinq des dix communes les plus étendues de France se situent dans l’Ouest guyanais, avec en tête Maripasoula et ses 18 000 km², (15 km² en moyenne pour une commune française). Le fleuve Maroni fait office de frontière avec le Suriname.
Une croissance démographique exceptionnelle, fruit d’une forte natalité et de pics de migrations
La croissance démographique de la Guyane, exceptionnelle à l’échelle nationale, est due à 70 % à la croissance démographique de l’Ouest. Entre 2008 et 2013, la population de l’Ouest croît en moyenne de 4,8 % par an, alors que la population du reste de la Guyane augmente de 0,9 % sur la même période (figure 1). Le solde naturel (différence entre le nombre de naissances et le nombre de décès) est le principal moteur de cette croissance (+ 3,3 % en moyenne par an). La population de la CCOG est plus jeune que celle du reste de la Guyane : la moitié a moins de 20 ans, alors que l’âge médian est de 27 ans dans le reste de la Guyane. Cette population jeune est très féconde avec un nombre d’enfants par femme très supérieur à la moyenne guyanaise (4,1 enfants dans l’Ouest, contre 3,1 dans la Communauté d’Agglomération du Centre Littoral), particulièrement chez les adolescentes. Les naissances sont chaque année plus nombreuses. L’Ouest enregistre 2 600 naissances en moyenne par an entre 2008 et 2013.
tableauFigure 1 – La CCOG maintient une forte croissance démographiqueÉvolution de la population de la CCOG depuis 1962 (Indice, base 100 en 1962)
CCOG | Bassin de Saint-Laurent-du-Maroni | Autres communes de la CCOG | Reste de la Guyane | |
---|---|---|---|---|
1962 | 100,0 | 100,0 | 100,0 | 100,0 |
1968 | 123,6 | 87,0 | 139,6 | 134,7 |
1975 | 140,5 | 123,1 | 148,1 | 170,4 |
1982 | 174,0 | 106,6 | 203,4 | 228,7 |
1990 | 395,6 | 218,1 | 472,8 | 329,3 |
1999 | 571,6 | 420,6 | 637,3 | 444,3 |
2008 | 1003,3 | 693,6 | 1138,1 | 569,3 |
2013 | 1269,6 | 1169,3 | 1313,2 | 596,6 |
- Source : Insee, Recensements de la population.
graphiqueFigure 1 – La CCOG maintient une forte croissance démographiqueÉvolution de la population de la CCOG depuis 1962 (Indice, base 100 en 1962)
Outre le solde naturel, la CCOG est un territoire qui se peuple fortement du fait d’arrivées extérieures. Le solde des entrées-sorties est positif depuis presque 40 ans et contribue au dynamisme de cette croissance. Le premier boom démographique de la CCOG intervient dans les années 1980. Il est dû aux arrivées massives de réfugiés surinamais fuyant la guerre civile.
Au sein de la CCOG, les comportements démographiques diffèrent. Dans les communes du Bassin saint-laurentais, la croissance a fortement ralenti, passant d’une moyenne de 6,7 % par an entre 1999 et 2008 à 2,9 % entre 2008 et 2013. Cette croissance est exclusivement tirée par les fortes naissances, alors que le solde d’entrées-sorties est négatif entre 2008 et 2013. Dans les communes isolées, la tendance est inversée : la croissance passe de 5,7 % par an la première période à 11 % par an la seconde période. Cet envol de la croissance s’explique par un volume d’entrées important, notamment d’orpailleurs.
L’Ouest guyanais et, particulièrement, Saint-Laurent-du-Maroni et Maripasoula jouent un rôle structurant le long de la frontière. En face, l’Est du Suriname est beaucoup moins peuplé et sa croissance démographique est faible voire nulle (figure 2). Albina, ville miroir de Saint-Laurent-du-Maroni, est sept fois moins peuplée que celle-ci.
graphiqueFigure 2 – L’Ouest guyanais plus dynamique que l’est du SurinameCroissance démographique annuelle moyenne entre 2004 et 2012 au Suriname et entre 2009 et 2013 en Guyane (en %) (nombre d’habitants par commune et ressort)
Des échanges migratoires fortement tournés vers l’Hexagone
En 2013, 36 % de la population de l’Ouest est immigrée (personne née étrangère à l’étranger) contre 26 % pour le reste de la Guyane. Cette proportion a augmenté de cinq points sur les deux territoires depuis 1999. Illustration de migrations économiques suivies par une forte sédentarisation, les immigrés sont très présents parmi la population en âge de travailler, alors que l’essentiel des natifs de Guyane se concentrent chez les enfants. L’immigration historique de ces dernières décennies engendre aujourd’hui un fort effet de structure sur la population vivant dans la CCOG. En 2013, la majorité des immigrés y vivant viennent du Suriname (55 %) et du Brésil (33 %). Les immigrés nés au Suriname sont majoritaires dans toutes les tranches d’âge, mais sont particulièrement nombreux parmi les enfants (85 %) et les personnes âgées de plus de 50 ans (78 %). L’immigration en provenance du Brésil concerne plus fréquemment des personnes en âge de travailler (entre 15 et 49 ans), une partie importante d’entre eux résident dans les zones d’orpaillage.
Dans l’Ouest guyanais, les échanges de population s’effectuent avec trois zones : le reste de la Guyane, la France et les autres DOM et enfin avec l’étranger, notamment le Surinam. Les migrations résidentielles avec le reste de la région sont assez limitées : il s’agit souvent d’étudiants allant poursuivre leurs études à Cayenne et des personnes en emploi (figure 3). Les échanges avec le reste de la France sont un peu plus importants : on trouve, dans le sens des départs, des étudiants et des jeunes chômeurs et dans le sens des arrivées, du personnel qualifié, œuvrant souvent dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Les échanges avec l’étranger sont structurés par la frontière avec le Surinam. Le Maroni est en effet à la fois une frontière et un bassin de vie. La population vivant de part et d’autre du fleuve partage un grand nombre de caractéristiques sociales et culturelles. Les échanges entre les deux rives sont intenses et réguliers mais en grande partie non mesurables.
tableauFigure 3 – Peu d'échanges avec le reste de la GuyaneMigrations résidentielles 2012-2013, entre la CCOG et le reste de la France, par tranches d'âge (en nombre)
Âge | Entrants | Sortants | Solde | ||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Entrées depuis un autreEPCI de Guyane | Entrées depuis la France hors Guyane | Entrées depuis unpays étranger | Sorties vers un autre EPCI de Guyane | Sorties vers la Francehors Guyane | Solde des flux avec les autresEPCI de Guyane | solde des flux avecla France (hors Guyane, hors étranger) | |
0 | 33 | 54 | 12 | -64 | -69 | -30 | -15 |
5 | 29 | 52 | 13 | -41 | -48 | -12 | 4 |
10 | 27 | 38 | 14 | -34 | -34 | -7 | 5 |
15 | 28 | 28 | 70 | -67 | -74 | -40 | -45 |
20 | 45 | 50 | 393 | -66 | -115 | -21 | -65 |
25 | 53 | 84 | 520 | -49 | -71 | 5 | 13 |
30 | 61 | 97 | 228 | -51 | -81 | 9 | 16 |
35 | 62 | 85 | 240 | -44 | -37 | 19 | 48 |
40 | 67 | 52 | 106 | -34 | -31 | 33 | 21 |
45 | 17 | 35 | 35 | -20 | -24 | -3 | 11 |
50 | 20 | 39 | 4 | -7 | -6 | 13 | 33 |
55 | 9 | 17 | 3 | -6 | -16 | 3 | 1 |
60 | 9 | 11 | 3 | -9 | -27 | 0 | -15 |
- Source : Recensement de la population 2013 (Exploitations principales)
graphiqueFigure 3 – Peu d'échanges avec le reste de la GuyaneMigrations résidentielles 2012-2013, entre la CCOG et le reste de la France, par tranches d'âge (en nombre)
Dans les migrations résidentielles, les actifs en emploi sont surreprésentés : la moitié des entrants-sortants sont des actifs en emploi, alors qu’ils représentent 22 % des habitants de l’Ouest. Les diplômés du supérieur sont également largement surreprésentés. Ils sont 38 % parmi les sortants et 56 % parmi les arrivants, alors que seuls 7 % de la population de l’Ouest possèdent un diplôme du supérieur.
L’Ouest est faiblement doté en équipements structurants. Ainsi, la formation post-bac est très limitée. Les jeunes souhaitant poursuivre leurs études doivent se rendre à Cayenne ou ailleurs en France. Sur dix départs de la CCOG, quatre sont des jeunes de moins de 25 ans. En outre, le manque de perspectives en termes d’emploi pourrait pousser les jeunes de l’Ouest à poursuivre leur recherche d’emploi ailleurs. Un tiers des départs concerne des étudiants, des inactifs ou chômeurs n’ayant jamais travaillé.
La poursuite d’études, un fort enjeu pour un territoire jeune
L’éducation et la formation sont des enjeux forts pour l’Ouest. La forte pression démographique sature prématurément les équipements scolaires et surcharge les classes. Les enfants sont de plus en plus nombreux et les infrastructures scolaires souvent éloignées. Les taux de scolarisation des enfants de l’Ouest guyanais sont nettement en dessous des taux de scolarisation observés au niveau national comme au niveau régional. Autant les écoles primaires sont implantées au plus près des populations, dans les bourgs comme dans les écarts, autant les collèges ne sont présents que dans les bourgs et les lycées sur le littoral (Saint-Laurent-du Maroni et Mana) ce qui complique le parcours scolaire. Les jeunes de l’Ouest sont structurellement davantage vulnérables au décrochage scolaire. Sept jeunes sur dix âgés de 18 à 24 ans ont quitté le système scolaire avec au plus le brevet des collèges. Ils sont 46 % dans ce cas ailleurs en Guyane. Outre ces phénomènes, les sorties précoces s’expliquent aussi par l’important effet structurel de l’immigration, avec un grand nombre de jeunes, fils d’immigrés de première génération, pour qui la scolarisation en langue française peut encore poser un souci.
Conséquence directe du décrochage scolaire, 7 000 jeunes de 15 à 24 ans, soit 47 % d’entre eux, ne sont pas inscrits dans un établissement d’enseignement et ne sont ni en emploi, ni en stage en 2013. Cette proportion est deux fois moins élevée dans le reste de la Guyane. L’importance du décrochage scolaire, l’absence de lycée de proximité et de formation post-Bac sur l’Ouest accentuent le déficit structurel de diplômés dans la CCOG. De plus, les jeunes qui partent poursuivre leurs études ne reviennent pas forcément une fois diplômés. Les trois quarts des plus de 15 ans non scolarisés sont non-diplômés, contre moins de la moitié dans le reste de la Guyane. Seuls 7 % d’entre eux possèdent un diplôme du supérieur contre 20 % dans le reste de la Guyane.
L’emploi repose sur le secteur public
Le tissu productif et l’emploi salarié privé sont peu développés. Alors que plus d’un tiers de la population guyanaise habite dans l’Ouest, les actifs occupés représentent 17 % des actifs occupés de Guyane. Les taux d’activité et d’emploi sont faibles et masquent une économie informelle intense, non mesurable par les dispositifs d’observation statistiques. À peine la moitié des personnes en âge de travailler se déclare active (en emploi ou au chômage) alors qu’elles sont 68 % dans le reste de la Guyane (figure 4). Dans l’Ouest, seuls 22 % des 15-64 ans occupent un emploi. Le taux de chômage déclaré au recensement est de 54 %, contre 26 % dans le reste de la Guyane. Le nombre important d’inactifs s’explique en partie par le fait que les personnes travaillant de manière informelle ne déclarent pas toujours leur activité. C’est notamment le cas pour les activités agricoles dans les abattis. Les demandeurs d’emplois sont proportionnellement peu nombreux dans l’Ouest.
L’emploi salarié est estimé à 7 000 emplois, soit 13 % des emplois salariés formels de Guyane en 2014. Les emplois de l’Ouest sont essentiellement portés par le secteur public (70 % des emplois, 42 % dans le reste de la Guyane). L’emploi privé ne représente que 30 % des postes alors qu’il est majoritaire dans le reste de la Guyane (58 %). Dans l’Ouest comme dans le reste de la Guyane, les établissements privés sont petits et comptent souvent une seule personne, le chef d’entreprise. L’emploi salarié est porté essentiellement par le tertiaire (90 %). Les emplois restants se répartissent sur l’industrie (6 %), la construction (4 %) et l’agriculture (1 %).
tableauFigure 4 – Des taux d'activité et d'emploi plus bas que dans le reste de la GuyaneTaux d'activité, taux d'emploi et taux de chômage chez les 15-64 ans déclarés en 2008 et 2013 (en %)
CCOG | Reste de la Guyane | |||
---|---|---|---|---|
2008 | 2013 | 2008 | 2013 | |
Taux d'activité | 52 | 48 | 65 | 68 |
Taux d'emploi | 27 | 22 | 49 | 51 |
Taux de chômage | 48 | 54 | 25 | 26 |
- Lecture : en 2013, 48 % des habitants de l'Ouest âgés de 15 à 64 ans sont actifs, 22 % déclarent occuper un emploi, 54 % des actifs se déclarent au chômage.
- Source : Recensement de la population 2008 et 2013 (exploitations principales).
Conséquence de la prépondérance du secteur public et de la jeunesse de la population, la proportion des postes de travail liés à l’enseignement est 2,5 fois plus élevée que dans le reste de la Guyane (figure 5). De même, les activités relevant de la santé humaine sont proportionnellement 1,5 fois plus élevées. Le relais des emplois privés est assuré par l’industrie extractive, spécificité de l’Ouest, avec près de 2,5 fois plus de postes que dans le reste de la Guyane. L’agriculture, la sylviculture et la pêche sont très légèrement surreprésentées.
tableauFigure 5 – Les emplois liés à l'enseignement et à l'industrie extractive deux fois et demi plus présents dans l'Ouest que dans le reste de la GuyaneIndice de spécificité sectorielle en NA38 pour les 20 principaux secteurs
Principaux secteurs d'activité | Indice de spécificité | Rang |
---|---|---|
Enseignement | 2,59 | 1 |
Industries extractives | 2,42 | 2 |
Activités pour la santé humaine | 1,62 | 3 |
Agriculture, sylviculture, pêche | 1,05 | 4 |
Administration publique | 0,97 | 5 |
Transports et entreposage | 0,96 | 6 |
Hébergement médico-social & social & action sociale sans hébergement | 0,70 | 7 |
Fabrication produits caoutchouc et plastique, autres produits minéraux non métalliques | 0,62 | 8 |
Production et distribution d'électricité, de gaz, de vapeur et d'air conditionné | 0,59 | 9 |
Gestion eau, déchets & dépollution | 0,59 | 10 |
Autres activités de service | 0,53 | 11 |
Commerce, réparation automobile | 0,47 | 12 |
Hébergement et restauration | 0,47 | 13 |
Arts, spectacles & activité récréatives | 0,45 | 14 |
Construction | 0,40 | 15 |
Activité financières et assurances | 0,39 | 16 |
Travail bois, industrie du papier et imprimerie | 0,39 | 17 |
Fabrication aliments, boissons et produits à base de tabac | 0,32 | 18 |
Activités de services administratifs | 0,23 | 19 |
Activités juridiques, comptables, gestion… | 0,20 | 20 |
- Lecture : La proportion de postes relevant des activités pour la santé humaine est une fois et demi plus élevée que dans le reste de la Guyane
- Source : Insee, Clap 2014
graphiqueFigure 5 – Les emplois liés à l'enseignement et à l'industrie extractive deux fois et demi plus présents dans l'Ouest que dans le reste de la GuyaneIndice de spécificité sectorielle en NA38 pour les 20 principaux secteurs
Alternative au chômage et à l’inactivité sur un territoire où il y a peu d’emplois, les créateurs d’entreprises sont proportionnellement davantage présents dans l’Ouest. Les emplois non salariés représentent 22 % des emplois de l’Ouest contre 12 % dans le reste de la Guyane. Dans les communes non routières, près de la moitié de l’ensemble des emplois sont non salariés (47 %).
L’agriculture est un secteur privé très spécifique de l’Ouest. Bien que peu structurée, son développement et sa structuration seraient à même de créer des opportunités d’emplois. Entre tradition, économie de subsistance et complément de revenu, ce secteur joue un rôle important dans le quotidien des habitants. L’agriculture sur abattis est très répandue dans l’Ouest guyanais et notamment sur le fleuve, même si elle s’effectue sur de petites surfaces et génère de faibles chiffres d’affaires. Les nombreuses exploitations agricoles du fleuve sont encore cultivées de manière traditionnelle et ont du mal à s’insérer dans une démarche de production. Dans les communes du littoral, notamment à Mana, l’agriculture est plus intensive et fournit les marchés, celui de Saint-Laurent-du-Maroni, comme ceux de Kourou ou de l’île de Cayenne.
Entre fragilité sociale et mode de vie traditionnel
Les ménages de l’Ouest ont des caractéristiques particulières : ils sont en moyenne plus grands que ceux du reste de la Guyane (4,9 personnes contre 2,9). De même, les familles nombreuses sont aussi plus présentes puisque 35 % des familles ont plus de quatre enfants, contre 11 % ailleurs en Guyane. Un ménage sur trois dans l’Ouest est une famille monoparentale, contre un sur quatre dans le reste de la Guyane.
Le marché du travail faiblement développé et le faible niveau de qualification de la population dans l’Ouest augmente la vulnérabilité sociale de ses habitants : 72 des enfants vivent dans une famille dont les parents n’ont pas d’emploi (et ne sont ni retraité, ni étudiants) ; ils sont 35 % dans le reste de la Guyane. Beaucoup de familles ont conservé un mode de fonctionnement traditionnel, surtout dans les communes isolées, et les notions de vulnérabilité sociale sont pour elles toutes relatives.
Une part importante de la population est cependant dépendante des transferts sociaux. La Caisse d’Allocations Familiales (Caf), à travers ses prestations, compense partiellement les difficultés des ménages allocataires. En 2014, la CCOG concentre un quart des allocataires de la Guyane. Les allocataires de l’Ouest ont une plus grande fragilité financière. Pour 65 % d’entre eux les prestations de la Caf représentent la totalité de leurs revenus (39 % dans le reste de la Guyane). Pour 72 % il s’agit d’au moins des trois quarts de leurs revenus (48 % reste de la Guyane) (figure 6). Près de 21 % de la population est couverte par le Revenu de Solidarité Active socle non majoré, attribué aux foyers à faibles revenus, contre 18 % dans le reste de la Guyane.
tableauFigure 6 – Des allocataires très dépendants des prestationsIndicateurs de fragilité sociale et caractéristiques des allocataires en 2014–2015
CCOG | Reste de la Guyane | |
---|---|---|
Nombre d'allocataires CAF | 11 786 | 35 411 |
Population couverte | 44 240 | 103 740 |
Taux de couverture (en %) | 50,3 | 63,1 |
Nombre d'allocataires à bas revenus | 104 52 | 23 377 |
Population couverte par le RSA socle non majoré | 15 726 | 25 335 |
Part de la population couverte par le RSA socle non majoré (en %) | 20,5 | 17,8 |
Part des allocataires vivant avec un bas revenu (en %) | 88,7 | 66,0 |
Part des allocataires Caf avec prestations > 75 % du revenu (en %) | 71,6 | 48,0 |
- Champ : ensemble des ressources du foyer (revenus d'activité, revenus de remplacement, prestations sociales, etc.) avant impôts (impôt sur le revenu, taxe d'habitation, CSG non déductible, CRDS et prime pour l'emploi) observées au niveau national.
- Source : Caisse Nationale d’Allocations Familiales (CNAF), 2014-2015.
Les ménages de l’Ouest sont plus souvent non imposables que ceux du reste de la Guyane. Le revenu net annuel moyen déclaré par les habitants de l’Ouest est de 9 700 €, deux fois moins que celui des habitants du reste de la Guyane. Les foyers fiscaux non imposables de la CCOG déclarent des revenus plus bas que ceux du reste de la Guyane et les foyers imposables sont moins riches, donc payent moins d’impôts. La dépendance aux transferts sociaux et le faible niveau de revenus se répercutent sur le potentiel fiscal du territoire, autrement dit la capacité des collectivités locales à collecter des ressources fiscales et donc à investir. Le faible potentiel fiscal impacte les capacités d’investissement des collectivités de l’Ouest guyanais et freine le développement du territoire. Les recettes fiscales de ces dernières ne sont pas suffisantes pour couvrir les besoins, notamment les investissements nécessaires à l’accompagnement de la croissance démographique.
Pour comprendre
L’Insee Antilles-Guyane, la CCOG et la Préfecture réalisent, dans le cadre d’un partenariat, un diagnostic de l’Ouest guyanais. Il vise à mettre en évidence les caractéristiques du territoire, sous les angles économique et socio-démographique. Les résultats sont majoritairement issus de l’exploitation du kit Synthèses Locales version 17.1 de l’Insee.
Afin de dégager les caractéristiques de la CCOG, un territoire comparable a été choisi parmi les 18 EPCI de Guadeloupe, Martinique, Guyane et La Réunion. Compte tenu de la proximité des caractéristiques démographiques, de l’habitat, des migrations résidentielles, des conditions de vie, du marché de l’emploi et de l’économie, le reste de la Guyane a été retenu.
Sources
Les principales sources mobilisées sont :
- Recensements de la population 2008 et 2013 principalement ;
- Base de données communales (BDCOM) 2014 ;
- État civil ;
- Données du rectorat – Base élèves.
Définitions
Taux d’activité
Le taux d’activité est le rapport entre le nombre d’actifs (actifs occupés et chômeurs) et l’ensemble de la population en âge de travailler (de 15 à 64 ans).
Taux d’emploi
Le taux d’emploi d’une classe d’individus est calculé en rapportant le nombre d’individus de la classe ayant un emploi, au nombre total d’individus dans la classe. Il peut être calculé sur l’ensemble de la population d’un pays, mais on se limite le plus souvent à la population en âge de travailler (généralement les 15 à 64 ans).
Taux de chômage
Le taux de chômage au sens du Recensement de la population est le pourcentage de chômeurs dans la population active (actifs occupés + chômeurs). Le taux de chômage diffère de la part du chômage qui mesure la proportion de chômeurs dans l’ensemble de la population.
Pour en savoir plus
Lauvaux M., « Concilier développement économique et transformation sociale : un enjeu pour l’Ouest guyanais », Insee dossier n° 7, décembre 2017.
Camesella C., Hurpeau B., « La communauté de communes de l’Ouest Guyanais : un territoire jeune et attractif à développer », Insee, juin 2009.