Insee Analyses Grand EstPauvreté et concentration des ménages fragiles dans les grandes agglomérations et les zones en difficulté économique

Noël Gascard, Clément Gass, Florent Isel, Insee

En 2014, plus de 750 000 habitants vivent sous le seuil de pauvreté dans le Grand Est. Les personnes dépendantes des indemnités chômage, les jeunes, les locataires, les familles monoparentales et les familles nombreuses constituent les catégories les plus sujettes à la pauvreté. Les territoires au passé industriel important sont les plus marqués par la pauvreté monétaire. Les ménages les plus fragiles y sont plus nombreux et plus pauvres. La pauvreté sévit également dans les agglomérations en touchant notamment une grande part de jeunes et de familles monoparentales. Dans ces territoires se concentrent le plus d’inégalités concernant les revenus et l’accès à la propriété est plus difficile. De nombreux territoires peu denses en stagnation économique se trouvent aussi dans une situation défavorable vis-à-vis de la pauvreté. À l’inverse des agglomérations, les jeunes y sont moins présents et la part de propriétaires y est importante.

Noël Gascard, Clément Gass, Florent Isel, Insee
Insee Analyses Grand Est No 75- Juillet 2018

Dans le Grand Est, 14 habitants sur 100 sont pauvres au sens monétaire, soit plus de 750 000 personnes vivant dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté (1 008 euros par mois et par unité de consommation). La région présente un taux comparable à la moyenne nationale. La pauvreté est un enjeu majeur pour les politiques publiques. Identifier les catégories de populations pauvres constitue ainsi un point d’entrée primordial afin de déployer des actions sanitaires et sociales vers ce public.

Si la pauvreté touche un vaste éventail de la population, certains ménages au profil particulier sont plus concernés (figure 1). À travers l'analyse des ressources selon différentes caractéristiques des ménages (origine des revenus, âge, type de famille...), il apparaît que le risque de pauvreté est plus élevé pour les ménages aux revenus essentiellement composés d’indemnités chômage, les familles monoparentales, les locataires, les familles nombreuses (au moins trois enfants) et les jeunes.

Figure 1Chômeurs, jeunes, locataires, familles monoparentales et nombreuses : cinq profils de population plus sujets à la pauvreté

Chômeurs, jeunes, locataires, familles monoparentales et nombreuses : cinq profils de population plus sujets à la pauvreté
Ménages dont l’origine principale des revenus du référent sont les indemnités chômage Familles monoparentales Locataires Familles nombreuses Moins de 30 ans Grand Est France métropolitaine
Taux de pauvreté (en %) 58,5 32,5 27,8 26,6 24,8 14,2 15,4
Nombre de personnes 186 942 576 231 1 968 172 650 244 382 215 5 334 048 64 363 723
Nombre de personnes pauvres 109 450 187 013 547 763 173 036 94 683 758 102 9 884 645
  • Avertissement : les colonnes ne peuvent pas être additionnées car les profils peuvent se recouvrir ; par exemple, les familles monoparentales peuvent contenir des jeunes de moins de 30 ans.
  • Source : Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2014.

Les chômeurs et les jeunes très concernés

Parmi les ménages qui ont les indemnités chômage comme source principale de revenu, près de 60 % de personnes sont pauvres, soit 110 000. Dans la Communauté de Communes (CC) Ardennes Thiérache, cette part est la plus forte, atteignant 74 %.

L’âge du référent fiscal du ménage est un autre déterminant important de la pauvreté. C'est lorsqu'il est inférieur à 30 ans que les ménages sont le plus souvent concernés, avec près d’un quart des membres de ces ménages sous le seuil de pauvreté, soit 95 000 personnes. La pauvreté décroît en fonction de l’âge (figure 2), passant de 18,4 % pour les 30-39 ans à 6,9 % pour les plus de 75 ans.

Figure 2La pauvreté plus forte chez les jeunesTaux de pauvreté selon l’âge (en %)

La pauvreté plus forte chez les jeunes - Lecture : 18,4 % de personnes vivant dans un ménage dont la personne de référence a entre 30 et 39 ans sont sous le seuil de pauvreté.
Taux de pauvreté
Moins de 30 ans 24,8
30-39 ans 18,4
40-49 ans 17,0
50-59 ans 12,6
60-74 ans 8,3
75 ans et plus 6,9
  • Lecture : 18,4 % de personnes vivant dans un ménage dont la personne de référence a entre 30 et 39 ans sont sous le seuil de pauvreté.
  • Source : Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2014.

Figure 2La pauvreté plus forte chez les jeunesTaux de pauvreté selon l’âge (en %)

  • Lecture : 18,4 % de personnes vivant dans un ménage dont la personne de référence a entre 30 et 39 ans sont sous le seuil de pauvreté.
  • Source : Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2014.

Les parents isolés et les ménages avec au moins trois enfants sont plus exposés au risque de pauvreté

Un tiers des membres de familles monoparentales sont en situation de pauvreté et plus de la moitié, dès lors que le foyer compte au moins deux enfants (58 %). Au sein de l’ensemble de ces familles vivent 187 000 personnes pauvres, dont 120 000 enfants.

Être en couple avec trois enfants ou plus expose aussi au risque de pauvreté. Plus du quart des membres de ces familles nombreuses sont sous le seuil de pauvreté, soit 173 000 personnes, dont 110 000 enfants.

La pauvreté accrue de ces familles va souvent de pair avec un accès à la propriété plus difficile. Dans la mesure où elles ont besoin de plus d’espace pour se loger, les familles nombreuses sont particulièrement concernées par cette problématique à laquelle n’échappe cependant aucune catégorie de population pauvre. Ainsi dans le Grand Est, 72 % des personnes en situation de pauvreté sont locataires, contre seulement 37 % de la population régionale. Alors que seuls 6 % des propriétaires sont pauvres, c'est le cas de 28 % des locataires.

Afin de mieux caractériser les différents Établissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) de la région, une typologie en a été réalisée : elle repose sur des indicateurs socioéconomiques et démographiques au cours des quinze dernières années. Elle met en évidence neuf types de territoires et deux EPCI particuliers. L’Insee Analyses Grand Est n° 74 présente ces différents types de territoires. La mise en relation des catégories de populations fragiles avec leur taux de pauvreté (figure 3 et figure 4) montre que les territoires marqués par une forte présence de populations fragiles sont également ceux où les taux de pauvreté de ces catégories sont les plus importants. Trois groupes d'EPCI, les métropoles socialement fragiles, les bassins industriels en déclin et les zones en stagnation présentent à la fois une forte part de populations vulnérables et un fort taux de pauvreté de ces populations.

Figure 3Onze types de trajectoires sociales pour les EPCI du Grand Est

  • Lecture : l'EPCI de Strasbourg fait partie des métropoles socialement fragiles.
  • Source : Insee, recensements de la population 1975-2014, RFL 2002-2011, Filosofi 2014, BPE 2016 ; CAF, Données 2002-2015.

Figure 4Trois types de territoires particulièrement touchés par la pauvreté

Trois types de territoires particulièrement touchés par la pauvreté
Chômeurs Familles monoparentales Jeunes Familles nombreuses Locataires
Taux de pauvreté Part dans la population Taux de pauvreté Part dans la population Taux de pauvreté Part dans la population Taux de pauvreté Part dans la population Taux de pauvreté Part dans la population
Pauvreté du déclin industriel + + + + + + + + + +
Métropoles socialement fragiles + + + + + + + - - +
En stagnation et pauvre + + + + + - + + + -
Verdun + - + + + + + - + +
Suippes + - + - - + - + - -
Villes champenoises modestes + - - - - + - + - -
Revenus agricoles en déclin + - - - - - - + + -
Frontalier inégalitaire + - - - - - - - + -
Cadre de vie rural favorable - - - - - - - + - -
Périurbain dense et riche - - - - - - - - - -
Riche par redistribution frontalière - - - - - - - - - -
  • Avertissement : les différentes catégories de population fragile peuvent se recouvrir.
  • Lecture : les indicateurs en rouge correspondent à des valeurs supérieures à la moyenne du Grand Est, ceux en bleu correspondent à des valeurs inférieures à la moyenne du Grand Est, c’est-à-dire respectivement à des situations moins favorables et à des situations plus favorables dans le territoire considéré que dans le Grand Est.
  • Pris dans leur ensemble, les territoires de type « Revenus agricoles en déclin » ont un taux de pauvreté des chômeurs supérieur à celui du Grand Est pour les chômeurs, mais ils ont une part de chômeurs plus faible dans leur population.
  • Source : Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2014.

Les ménages fragiles sont nombreux et plus souvent pauvres dans les territoires industriels

Sur les trois types aux situations les plus défavorables, le groupe d’EPCI Pauvreté du déclin industriel est le plus touché par la pauvreté monétaire. Parmi les 725 000 habitants que compte ce groupe, 136 000 personnes vivent sous le seuil de pauvreté. La part de personnes fragiles dans la population est plus importante et celles-ci sont nettement plus pauvres que dans l’ensemble du Grand Est.

Ce constat est particulièrement prononcé pour les personnes dépendantes des indemnités chômage, dans ces EPCI très affectés par le recul de l’emploi industriel. Ainsi, cinq des huit EPCI du groupe font partie des dix EPCI concentrant le plus de personnes vivant principalement des indemnités chômage, la Communauté de Communes (CC) de Freyming-Merlebach figurant au premier rang de ce classement. Les taux de pauvreté de cette catégorie de population sont beaucoup plus élevés dans ce groupe que dans le reste de la région. Au final, 21 400 personnes vivant des indemnités chômage ont des ressources inférieures au seuil de pauvreté.

La situation diffère pour les jeunes de ces EPCI : ils sont nettement plus pauvres que dans l’ensemble du Grand Est. La Communauté d’Agglomération (CA) Ardenne Métropole, la CC des Portes de Romilly-sur-Seine et la CC de Freyming-Merlebach présentent des taux de pauvreté des moins de 30 ans les plus importants de la région. Pour la plupart, ces EPCI fortement confrontés au déclin de l’industrie comptent cependant peu de jeunes ; ces derniers se révèlent plus nombreux qu’en moyenne dans la région seulement dans les CA Troyes Champagne Métropole et Ardenne Métropole.

Respectivement 33 600 et 35 400 personnes vivent dans des familles monoparentales et des familles nombreuses. Les familles monoparentales sont très représentées dans chacun des EPCI du groupe, à commencer par les CA Troyes Champagne Métropole et Ardenne Métropole, et la CC des Portes de Romilly-sur-Seine. Les taux de pauvreté y sont très élevés, au-dessus de 42 % pour deux EPCI des Ardennes et la CC des Portes de Romilly-sur-Seine, contre 32 % dans le Grand Est.

Les familles nombreuses sont quant à elles particulièrement présentes dans la CC des Portes de Romilly-sur-Seine et la CA Mulhouse Alsace Agglomération à l’inverse des CA Troyes Champagne Métropole et Forbach Porte de France. Les taux de pauvreté de ces familles sont très nettement supérieurs au niveau régional. Ainsi, sur les dix EPCI du Grand Est où les familles nombreuses sont le plus souvent pauvres, six relèvent de ce type industriel. Dans les CC de Freyming-Merlebach et du Warndt, les CA de Forbach Porte de France et d’Ardenne Métropole, plus de 40 % de personnes appartiennent à des familles nombreuses vivant sous le seuil de pauvreté.

Le groupe, majoritairement urbain, se caractérise aussi par une moins grande part de propriétaires par rapport au reste de la région.

Figure 5Une pauvreté qui n’épargne aucun département

  • Lecture : une situation défavorable concernant le taux de pauvreté correspond à un taux de pauvreté de l’EPCI supérieur à celui du Grand Est dans la catégorie de population considérée. De la même manière, une situation défavorable concernant la part de population fragile dans l’ensemble de la population correspond à une part de population fragile de l’EPCI supérieure à celle du Grand Est. Le nombre de situations défavorables est calculé sur les 5 catégories de populations fragiles (chômeurs, jeunes, locataires, familles monoparentales et nombreuses).
  • L’EPCI de Reims compte 3 situations défavorables concernant les taux de pauvreté et au moins 3 situations défavorables concernant les parts de population fragile.
  • Source : Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2014.

Les familles nombreuses et monoparentales davantage en difficulté dans les agglomérations

Le type Métropoles socialement fragiles, qui rassemble le plus d’habitants du Grand Est, réunit également le plus de personnes pauvres. La situation de ce groupe vis-à-vis de la pauvreté reste cependant moins défavorable qu’au sein du type Pauvreté du déclin industriel. On compte 210 000 personnes sous le seuil de pauvreté parmi les 1 250 000 habitants qui vivent dans ces métropoles socialement fragiles. Cet ensemble est en outre celui où existent les plus fortes inégalités, car la part de personnes à revenus élevés est également importante.

Ces EPCI urbains se caractérisent aussi par une proportion de locataires beaucoup plus grande que dans le reste de la région. À cet égard, l’Eurométropole de Strasbourg constitue l’EPCI où l’accès à la propriété est le plus difficile. L’accès au logement est rendu encore plus délicat pour les familles nombreuses, dont la présence est particulièrement forte au sein de l’Eurométropole de Strasbourg. Elles regroupent 20 000 personnes pauvres, dont 16 500 enfants.

Les familles monoparentales sont également très répandues dans ces grandes agglomérations. Avec des taux de pauvreté élevés, notamment à Reims et Strasbourg, elles rassemblent 53 000 personnes pauvres.

Les moins de 30 ans sont aussi surreprésentés. Les EPCI de Nancy, Reims et Strasbourg sont, dans cet ordre, ceux de la région où les jeunes ont le plus grand poids dans la population. Ces jeunes y sont plus pauvres que dans l’ensemble du Grand Est. La Métropole du Grand Nancy est l’EPCI du groupe où les jeunes s’avèrent à la fois les plus nombreux et les plus souvent touchés par la pauvreté.

La Communauté d’Agglomération de Colmar est moins concernée par la pauvreté que les autres zones du groupe.

Forte présence des catégories fragiles dans les zones peu denses en stagnation

Le type En stagnation et pauvre compte 31 EPCI, dont 21 sont très exposés à la pauvreté par la composition de leur population. Ces EPCI avec de fortes difficultés socioéconomiques se situent dans les Vosges, au sud-est de la Meurthe-et-Moselle, au sud et au nord-ouest de la Meuse, au nord de la Haute-Marne et à la frontière allemande de la Moselle. Ce sont 100 000 des 590 000 habitants de ces EPCI qui vivent sous le seuil de pauvreté. Ce groupe fait état d’une grande hétérogénéité face à la pauvreté, de sorte que les profils de personnes pauvres ne sont pas les mêmes d’un EPCI à l’autre.

En effet, si la population de certains EPCI du groupe est constituée d’une importante proportion de personnes dépendantes des indemnités chômage, d’autres ne correspondent pas à ce descriptif. À l’échelle du Grand Est, les dix EPCI situés dans les zones en stagnation font partie tout de même des vingt EPCI les plus touchés par le chômage : ils sont surtout localisés dans les Vosges et en Moselle. Avec une forte représentation de personnes vivant des indemnités chômage et un taux de pauvreté élevé pour celles-ci, la CC de la Région de Rambervillers est particulièrement concernée, au deuxième rang régional derrière la CC de Freyming-Merlebach, qui appartient au type industriel. Dans les CC d’Ardennes Thiérache, Pays de Stenay, Val Dunois, Pays de Montmédy ou encore Bassin de Joinville en Champagne, la population est plus souvent en emploi, mais la situation de chômage s'accompagne presque systématiquement de pauvreté. Ainsi, avec 74 % de personnes pauvres parmi celles qui dépendent des indemnités chômage, la CC Ardennes Thiérache arrive en tête du Grand Est, devant les CC de Commercy - Void - Vaucouleurs et du Bassin de Joinville en Champagne (69 % chacune). La CC des Ballons des Hautes-Vosges, qui bénéficie d’emplois saisonniers liés au tourisme, présente un taux de pauvreté en deçà de la moyenne régionale pour les chômeurs qui sont dans cette situation lors de périodes relativement courtes.

Pour les profils familiaux vulnérables, deux situations se présentent : une partie des EPCI du groupe comprend beaucoup de familles monoparentales et peu de familles nombreuses, l’autre partie connaît la situation inverse. Le premier cas concerne des zones situés à l’est des Vosges (CA d'Épinal, CA de Saint-Dié-Des-Vosges) et aux alentours (CC du Territoire de Lunéville à Baccarat et CC du Val d'Argent), tandis que le second renvoie à des intercommunalités telles que la Région de Rambervillers, Ardennes Thiérache, Bruyères-Vallons des Vosges, Vezouze en Piémont ou encore Commercy - Void - Vaucouleurs. Quel que soit l’EPCI considéré, les familles monoparentales sont confrontées plus fréquemment à la pauvreté que dans la région. Ainsi, six de ces EPCI font partie des dix intercommunalités où les familles monoparentales sont le plus souvent pauvres. Aux deux premiers rangs se classent la CC de la Région de Rambervillers et celle du Bassin de Joinville en Champagne (45 % et 44 %).

La CC du Warndt et la CA de Saint-Dizier Der et Blaise sont quant à elles les EPCI en stagnation où les familles nombreuses sont les plus représentées. Ici, la pauvreté touche respectivement 42 % et 38 % de cette population. Au contraire, les CC Pays de Montmédy, Commercy - Void - Vaucouleurs, Sammiellois et Val d'Argent se distinguent avec des taux inférieurs à la moyenne du Grand Est.

La catégorie des moins de 30 ans est en revanche assez homogène. À l’exception de la CC du Territoire de Lunéville à Baccarat, l’ensemble des EPCI du groupe fait apparaître une proportion de jeunes inférieure au niveau régional. Ils comptent aussi peu de locataires, dans un espace où le marché immobilier n'est pas aussi tendu qu'en zone urbaine.

Les ménages fragiles moins présents dans les territoires dynamiques

Plus rarement, des territoires relevant d'autres groupes que les trois déjà cités sont aussi concernés par la surreprésentation et la pauvreté des ménages fragiles. En Moselle, des EPCI du type Frontalier inégalitaire sont dans des situations proches du type Pauvreté du déclin industriel. Sont notamment dans ce cas la CA du Val de Fensch (Hayange, Florange), celle de Longwy et la CC de Damvillers Spincourt, qui sont d'anciens territoires de sidérurgie et de mines. Un peu plus à l’ouest, la CA de Verdun comprend un nombre important de familles monoparentales pauvres. Enfin, encore plus à l'ouest, deux EPCI du type Revenus agricoles en déclin - la CC de l'Argonne Ardennaise et la CC des Crêtes Préardennaises - s’ajoutent à la liste des territoires en difficulté du département des Ardennes.

En revanche, tous les EPCI du type Riche par redistribution frontalière situés à la frontière suisse mais aussi dans la couronne périurbaine de Strasbourg, sont plutôt à l'écart de la problématique de la pauvreté. La Plaine d’Alsace et le Sillon lorrain, à travers les EPCI du type Périurbain dense et riche, sont également épargnés. Quelques territoires du groupe Frontalier inégalitaire tirent également leur épingle du jeu. Enfin, les EPCI du type Cadre de vie rural favorable, dans l’Aube et la Marne, comptent peu de personnes sous le seuil de pauvreté.

Dans l'ensemble, les zones bénéficiant de la dynamique résidentielle périurbaine, voire rurale, n'accueillent que peu de personnes des catégories les plus sujettes à la pauvreté. D'une part, les chômeurs, jeunes ou parents isolés n'ont pas les moyens de résider en ces lieux prisés par des accédants plus favorisés ; d'autre part, les résidents de ces territoires aux trajectoires favorables sont moins exposés au risque de pauvreté.

Figure 6Relativement peu de personnes fragiles dans les zones périurbainesRépartition de la population pauvre selon les types de territoires

Relativement peu de personnes fragiles dans les zones périurbaines
Nombre de personnes Nombre de personnes pauvres Nombre de locataires pauvres Nombre de personnes pauvres dépendantes des indemnités chômage Nombre de jeunes pauvres Nombre de personnes pauvres vivant dans une famille nombreuse Nombre de personnes pauvres vivant dans une famille monoparentale
Taux de pauvreté (en %) Taux de pauvreté (en %) Taux de pauvreté (en %) Taux de pauvreté (en %) Taux de pauvreté (en %) Taux de pauvreté (en %)
Métropoles socialement fragiles 1 251 209 211 425 183 222 31 448 33 194 46 666 52 676
16,9 27,8 60,6 28,5 30,6 33,6
Frontalier inégalitaire 346 725 49 724 30 369 7 149 4 768 10 217 11 660
14,4 28,1 61,7 21,6 25,3 31,6
Riche par redistribution frontalière 293 160 19 977 11 409 2 609 1 770 4 246 4 613
6,8 16,9 40 11,8 13,1 19,6
Périurbain dense et riche 1 143 455 109 758 68 991 14 812 11 733 24 584 27 153
9,6 21,7 50,1 17,2 18,6 25,9
Villes champenoises modestes 379 426 51 173 35 402 6 571 6 702 10 980 13 070
13,5 26,6 59,8 23,7 23,3 32,4
En stagnation et pauvre 887 797 139 857 90 927 20 944 15 824 32 174 35 499
15,8 31,5 60,6 26,7 29,2 36,1
Cadre de vie rural favorable 105 569 10 400 5 157 1 254 810 2 359 2 287
9,9 22,8 52,5 13,3 15,9 25,8
Revenus agricoles en déclin 169 489 24 266 11 309 2 618 2 225 5 358 4 724
14,3 29,1 60,1 21,9 25,5 31,3
Pauvreté du déclin industriel 723 674 136 121 106 772 21 398 16 828 35 427 33 565
18,8 33,6 62,6 31,4 36,9 38,3
Grand Est 5 334 048 758 102 547 763 109 450 94 683 173 036 187 013
14,2 27,8 58,5 24,8 26,6 32,5
  • Avertissement : pour un même type de territoires, les colonnes ne peuvent pas être additionnées car les différentes catégories de personnes fragiles peuvent se recouvrir ; par exemple, les personnes pauvres dépendantes des indemnités chômage peuvent aussi être des jeunes pauvres.
  • Source : Fichier localisé social et fiscal (Filosofi) 2014.

Partenariat

L’étude a été réalisée dans le cadre d’un partenariat entre la Direction régionale de l’Insee Grand Est et la Direction régionale et départementale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale du Grand Est.

Sources

Le fichier localisé social et fiscal (Filosofi) est issu du rapprochement des données fiscales exhaustives en provenance de la direction générale des Finances publiques (déclaration de revenus des personnes physiques, taxe d’habitation et fichier d’imposition des personnes physiques) et des données sur les prestations sociales émanant des principaux organismes gestionnaires de ces prestations (Cnaf, Cnav, CCMSA). Le champ couvert est celui de l’ensemble des ménages fiscaux ordinaires : il exclut les personnes sans domicile ou vivant en institution (prison, foyer, maison de retraite…).

Définitions

Un ménage fiscal correspond à l’ensemble des foyers fiscaux répertoriés dans un même logement. Les personnes ne disposant pas de leur indépendance fiscale (essentiellement des étudiants) sont comptabilisées au sein des ménages où elles déclarent leurs revenus même si elles occupent un logement indépendant. Un ménage jeune est un ménage dont le référent fiscal (personne identifiée en tant que payeur de la taxe d’habitation au sein du ménage fiscal) est âgé de moins de 30 ans.

Les EPCI (établissements publics de coopération intercommunale) étudiés ici sont ceux définis au 1er janvier 2017.

Une personne est considérée comme pauvre au sens monétaire lorsque le niveau de vie de son ménage d'appartenance est inférieur au seuil de pauvreté. Selon les conventions européennes, ce seuil est fixé à 60 % du niveau de vie médian par unité de consommation. En France métropolitaine, il est estimé à partir de la source Filosofi à 12 090 euros annuels en 2014 pour une personne seule, soit 1 008 euros par mois.

Pour en savoir plus

Gascard N., Gass C., Isel F., « Métropoles, villes industrielles et sud du Grand Est fragilisés par la pauvreté », Insee Analyses Grand Est n° 74, juillet 2018.

« Ouvrir dans un nouvel ongletFamille monoparentale rime souvent avec pauvreté », Observatoire des inégalités, Données, novembre 2017.

Blanpin N., Lincot L. « Avoir trois enfants ou plus à la maison », Insee Première n° 1531, janvier 2015.

Les conditions de logement en France, Insee Références, février 2017.