Insee Analyses Bourgogne-Franche-ComtéL’emploi culturel en Bourgogne-Franche-Comté : une mosaïque de professions en développement

Mélanie Chassard, Philippe Rossignol, Insee

La Bourgogne-Franche-Comté compte quelque 15 000 professionnels de la culture en 2013. Ils représentent 1,4 % de l’emploi régional. Comptant plus d’un tiers d’emplois non-salariés et une part très élevée de salariés multi-actifs, les métiers de la culture se distinguent nettement des autres emplois régionaux. Par ailleurs, présents sur tout le territoire, ils se déclinent selon une grande variété de professions, d’environnements de travail, de lieux d’implantation.

Les artistes des spectacles côtoient d’autres professions culturelles dans des structures entièrement consacrées à leur activité. Les créatifs des arts visuels quant à eux occupent plus souvent des métiers de niche dans des structures de type industriel ou commercial que dans des établissements culturels. La culture se décline aussi selon les métiers de l’archivage, de la conservation et de la documentation, emplois publics pour la plupart, dédiés à la protection d’un patrimoine riche et diffus.

Mélanie Chassard, Philippe Rossignol, Insee
Insee Analyses Bourgogne-Franche-Comté No 16- Juillet 2017

En Bourgogne-Franche-Comté, comme ailleurs, la culture est un vecteur de développement économique, permettant de renforcer l’identité régionale et la visibilité du territoire. Les politiques culturelles, portées au niveau régional par la Direction régionale des affaires culturelles et les collectivités territoriales, se sont considérablement développées pour protéger, promouvoir et développer les différentes dimensions d’un univers composite. Les professions de la culture se déclinent en effet selon un large panel de métiers : artistes des spectacles, techniciens de l’avant-scène, artistes plasticiens, ou encore professionnels de la conservation du patrimoine en sont sans doute les professions les plus connues. Le contour de l’emploi culturel s’étend également aux professions liées aux arts visuels telles que photographes ou designers, architectes ou enseignants ; il englobe enfin les professions littéraires, dont les métiers de presse constituent la plus grande part ().

Au total, quelque 15 000 professionnels exercent une activité culturelle dans la région en 2013 (figure 2). L’emploi culturel, 1,4 % de l’emploi régional, se développe. Il a progressé de 6 % entre 2008 et 2013, à un rythme un peu moins soutenu qu’en France de province (+ 10 %), mais plus fortement que l’emploi total régional (+ 1,5 %). Ce sont les professions techniques, supports de l’activité artistique, qui se développent le plus, témoignant d’une structuration et d’une professionnalisation du secteur.

Plusieurs caractéristiques distinguent l’emploi culturel des autres emplois régionaux : plus d’un tiers de ces professionnels sont non-salariés (38 %), contre 12 % pour l’ensemble des emplois. Les emplois salariés purement culturels sont généralement peu nombreux au sein des établissements de la région ; ils côtoient diverses professions support de leur activité. Ils s’exercent dans des secteurs variés : 59 % sont présents dans des établissements dont l’activité principale n’est pas culturelle. L’emploi dans la culture prend ainsi des formes variées, de métiers, de statuts, d’environnements de travail. Il s’exerce aussi bien dans des entreprises individuelles, dans des structures collectives à but lucratif, dans le domaine de l’économie sociale et solidaire que dans l’administration publique. Cette morphologie composite explique qu’en dépit d’un poids global des professions culturelles plutôt faible dans l’emploi régional, l’emploi culturel soit présent sur tout le territoire (figure 1).

Figure 1Des professionnels de la culture présents sur tout le territoire

  • Source : Insee, Recensement de la population 2013 – exploitation complémentaire (au lieu de travail)

Figure 2Près de 15 000 emplois culturels en Bourgogne-Franche-Comté, dont 38 % non-salariésEffectifs et répartition des actifs exerçant un métier culturel en 2013

Près de 15 000 emplois culturels en Bourgogne-Franche-Comté, dont 38 % non-salariés ( ) -
Emplois culturels Bourgogne-Franche-Comté France de province
Nombre Part non-salariés Répartition Évolution 2013/2008 Répartition Évolution 2013/2008
(%) (%) (%) (%) (%)
Artistes des spectacles 1 500 27 10 + 2 13 + 6
Artistes de la musique et du chant 700 30 5 + 7 6 + 2
Artistes dramatiques, de la danse, du cirque et des spectacles divers 800 24 5 - 3 7 + 10
Cadres, techniciens et ouvriers des spectacles 2 800 22 19 + 21 18 + 15
Directeurs, responsables de programmation et de production de l'audiovisuel et des spectacles 500 7 3 + 25 3 + 10
Cadres artistiques et technico-artistiques de la réalisation de l'audiovisuel et des spectacles 400 24 3 + 38 4 + 56
Assistants techniques de la réalisation des spectacles vivants et audiovisuels 1 200 10 8 + 25 7 + 11
Ouvriers et techniciens des spectacles vivants et audiovisuels, indépendants gestionnaires de spectacle & service récréatif 700 55 5 + 4 4 + 4
Professions littéraires 1 700 35 12 - 9 12 + 10
Journalistes et cadres de l'édition 1 200 19 8 - 12 8 + 7
Auteurs littéraires et traducteurs 500 74 4 - 1 4 + 15
Professions des arts plastiques et métiers d'art 5 000 53 33 + 8 32 + 12
Artisans et ouvriers d'art 1 000 48 7 - 5 5 0
Artistes plasticiens 1 000 86 7 + 16 6 + 6
Concepteurs et assistants techniques des arts graphiques, de la mode et de la décoration 2 300 38 16 + 17 17 + 17
Photographes (indépendants et salariés) 600 68 3 - 8 4 + 18
Architectes 1 100 74 7 + 12 10 + 14
Professions de l’archivage, de la conservation et de la documentation 900 1 6 - 8 4 - 9
Professeurs d’art (hors établissements scolaires) 1 900 24 13 + 7 11 + 11
Ensemble des métiers culturels 14 900 38 100 + 6 100 + 10
  • Source : Insee, Recensements de la population 2008 et 2013 - exploitation complémentaire (au lieu de travail)

Métiers du spectacle, un assemblage de professions culturelles

Les métiers du spectacle comprennent les professionnels de la scène que sont les artistes dramatiques, de la danse, de la musique, du théâtre, ainsi que les métiers d’avant-scène, techniques et de gestion (accessoiristes, techniciens du son, gestionnaires de salles). Ensemble, ils représentent quelque 4 300 emplois en 2013, soit près de 30 % des emplois culturels de la région. Parmi eux, 1 500 sont des emplois d’artistes. Depuis 2008, ces emplois se développent dans la région : les effectifs ont progressé de 2 %, moins toutefois qu’ailleurs en province.

Le métier d’artiste des spectacles, contrairement à d’autres professions culturelles plus transversales, s’exerce majoritairement en qualité de profession salariée des entreprises du spectacle vivant, autrement dit, dans des structures culturelles entièrement dédiées à leur activité (figure 3). Ces établissements sont souvent de petite taille et de type associatif ; ils sont nombreux, 700 dans la région. Les emplois d’artistes se concentrent surtout dans les grands pôles urbains comme Dijon et Besançon. Ils sont également bien représentés dans l’Yonne et la Saône-et-Loire, eut égard à leur poids dans l’emploi départemental.

La multi-activité caractérise ces métiers : plus de 80 % des artistes cumulent plusieurs contrats salariés, culturels ou non, pour constituer leur revenu. Les contrats s’enchaînent au fil des saisons culturelles, au rythme des festivals et des événements qui reposent sur une multiplicité de prestations. Pour autant, ils n’assurent qu’une partie de la rémunération des artistes. En effet, plus de la moitié de leur salaire provient d’une activité non culturelle.

Les professions de soutien au spectacle en plein essor

Le métier d’artiste des spectacles s’exerce généralement aux côtés des métiers d’avant-scène et de ceux de soutien technique et de gestion de la réalisation des spectacles. Près de 2 800 professionnels occupent ainsi dans la région les fonctions de cadre, technicien ou ouvrier de la réalisation des spectacles, ou de gestionnaire de salle. Au même titre que les artistes, près de 80 % de ces professionnels sont multi-actifs et leur activité culturelle assure en moyenne la moitié de leur salaire. Ces emplois sont dédiés au spectacle vivant, au secteur de l’audiovisuel, mais interviennent aussi en dehors du champ de la culture, dans des activités récréatives ou associatives. Ainsi, leurs environnements de travail sont très variés : médias, collectivités territoriales, lieux de scène, leur permettant d’être présents sur tout le territoire.

Ces métiers sont en plein essor. L’emploi a en effet progressé de 21 % entre 2008 et 2013, plus fortement que dans les autres régions. Le secteur semble se structurer de plus en plus : le développement des technologies les plus pointues tend vers une professionnalisation de ces métiers qui bénéficient aussi d’une augmentation importante des lieux de scène.

Les métiers de la presse écrite en repli

En Bourgogne-Franche-Comté, 1 700 personnes exercent en 2013 une profession littéraire. Cet autre pan des métiers culturels regroupe les métiers de presse, de l’édition, les auteurs et les traducteurs. Les journalistes et les cadres de l’édition en représentent plus des deux tiers. Contrairement à la plupart des autres emplois culturels, ces derniers affichent des effectifs en retrait sur la période récente (– 12 %) alors que la tendance est à la hausse dans les autres régions de province (+ 7 % en moyenne). Les emplois de journalistes et cadres de l’édition sont peu présents sur le territoire régional en dehors des chefs-lieux de département. En effet, ils sont surtout concentrés dans quelques établissements de la région, appartenant à des médias nationaux de la presse écrite, ou plus marginalement de l’audiovisuel. Le groupe EBRA, le groupe Centre France, France Télévisions, ou encore Radio France rassemblent à eux seuls les deux tiers de ces emplois. Les métiers culturels sont assez minoritaires dans ces structures, où les professions support, de type livreurs, métiers du secrétariat, des services administratifs et financiers, sont bien plus nombreuses, faisant de la presse écrite le principal employeur du monde de la culture en Bourgogne-Franche-Comté (encadré).

Les arts plastiques et métiers d’art : de multiples environnements de travail

Près d’un tiers des emplois de la culture, soit environ 5 000 emplois, relèvent en 2013 de la famille très composite des professions des arts visuels. Elle réunit en effet des métiers aussi différents qu’artiste plasticien, ouvrier et artisan d’art, photographe, ou bien concepteur des arts graphiques. La région compte ainsi quelque 1 000 artistes plasticiens, dont les professions les plus typiques sont les peintres, sculpteurs, graveurs, ou encore les dessinateurs de presse. Le métier d’artiste plasticien s’exerce le plus souvent sous le statut d’indépendant non salarié. Leurs effectifs ont progressé de 16 % entre 2008 et 2013, de manière plus soutenue que dans les autres régions de province. Le travail non-salarié est également le statut le plus fréquent des quelque 600 photographes de la région.

En revanche, le travail salarié est plus répandu pour les artisans et ouvriers d’art, comme les orfèvres, les ébénistes d’art ou encore les facteurs d’orgues, et surtout pour les concepteurs et assistants techniques des arts graphiques, de la mode et de la décoration. Ces derniers représentent à eux seuls presque la moitié des professionnels des arts visuels. Ils sont graphistes, designers, illustrateurs, ou encore dessinateurs publicitaires. Ces métiers des arts graphiques ont la particularité de s’exercer de manière isolée aux côtés de métiers très variés dans des entreprises elles-mêmes assez diversifiées et dont l’activité principale est plus rarement culturelle : un tiers des concepteurs et assistants techniques travaillent dans l’industrie, 17 % dans le commerce.

Dans le contexte global de développement des métiers de la culture, les métiers des arts visuels progressent de 8 %, à un rythme un peu moins soutenu que dans les autres régions de province (+ 12 %). Ces métiers présents sur tout le territoire bénéficient notamment de l’essor du design, ou du webdesign en entreprise.

La région compte également quelque 1 100 architectes qui, pour les trois quarts exercent leur activité sous le statut non-salarié. Pour eux aussi, l’emploi a significativement progressé sur la période récente (+ 12 %), à un rythme proche de celui des autres régions. Comparés à l’ensemble des professionnels de la culture, les architectes sont plus âgés et plus diplômés : 82 % sont diplômés du supérieur. Ils perçoivent le niveau de revenu moyen le plus élevé des professions culturelles.

Figure 3Parmi les 5 000 professionnels des arts plastiques et métiers d'art, 61 % exercent leur métier dans un établissement dont l'activité principale n'est pas culturelleRépartition des professions définies comme culturelles, selon le secteur d’activité où elles s’exercent, en Bourgogne-Franche-Comté

  • Note de lecture : pour chacune des 7 familles de professions appartenant au champ de la culture, sont représentés les principaux secteurs d'activité où elles s'exercent. Les secteurs d'activité définis comme culturels apparaissent en couleurs vives, les autres secteurs sont en gris. Cette représentation permet d'apprécier la variété des secteurs d'activité où s'exercent les différents métiers de la culture, ainsi que la part qui s'exercent hors du champ des établissements culturels.
  • Ainsi, les artistes des spectacles exercent leurs professions dans 4 secteurs d'activité : dans le spectacle vivant majoritairement (section rose), dans l'audiovisuel/multimédia (section rouge), dans l'enseignement artistique (section bleue) et dans les arts visuels (section verte). Seuls 29% exercent leur profession dans un établissement hors du champ culturel.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2013 - exploitation complémentaire (au lieu de travail)

Les métiers du patrimoine : des emplois publics principalement

Les métiers de la conservation du patrimoine et de l’enseignement artistique constituent la dernière facette des métiers de la culture. Les 1 900 professeurs d’art exerçant hors établissements scolaires, représentent 13 % des emplois culturels. Ils interviennent le plus souvent sous contrat privé pour des collectivités territoriales ou dans des associations, et cumulent plusieurs contrats salariés : 86 % sont multi-actifs, et l’enseignement ne leur assure en moyenne que 60 % de leur revenu.

La région compte aussi 900 professionnels de l’archivage, de la documentation, bibliothécaires notamment et de la conservation du patrimoine. Autant de professions dédiées à la protection d’un patrimoine riche et diffus qui comprend, en particulier, 102 musées de France répartis sur tout le territoire ainsi que huit inscriptions au patrimoine mondial de l’Unesco, en qualité de biens ou paysages culturels. Ces inscriptions concernent onze sites ponctuels ou ensembles territoriaux, sélectionnés pour eux-mêmes ou dans le cadre d’une série (figure 4),(). Comme dans les autres régions de province, ces emplois sont plutôt en repli (– 8 %). Emplois publics des collectivités territoriales pour la plupart, ils suivent la tendance générale de baisse des effectifs de la fonction publique. Relativement peu nombreux, ils représentent 6 % des emplois culturels de la région et sont essentiellement implantés dans les chefs-lieux de département.

Figure 411 sites inscrits au patrimoine mondial de l'Unesco et 102 musées de France

  • Source : DRAC

Une minorité de métiers culturels dans les établissements de la culture

Une autre manière d’aborder l’emploi culturel, consiste à étudier l’activité des établissements. Ceux dont l’activité principale s’inscrit dans le champ de la culture, génèrent en 2013 environ 16 800 emplois. Au sein de ces établissements, 7 200 emplois sont des métiers spécifiques de la culture, soit 43 % des effectifs. Selon les secteurs, spectacle vivant, patrimoine ou encore édition écrite, le profil des professions exercées est très variable.

Les agences de publicité emploient ainsi très peu de professionnels de la culture : seulement 9 % des emplois sont des métiers des arts visuels, graphistes ou illustrateurs, tandis que 91 % des emplois restant sont des fonctions support de l’activité. Dans la presse écrite, qui est le plus grand employeur culturel de la région avec 3 900 emplois, le poids des métiers culturels, professions littéraires essentiellement, est également faible (24 %).

À l’inverse, dans les établissements du spectacle vivant ou de l’audiovisuel, les métiers de la culture sont majoritaires et diversifiés.

Décomposition des secteurs d’activité définis comme culturels selon les professions qui les composent

  • Note de lecture : pour chacun des 8 secteurs d’activité appartenant au champ de la culture, sont ici représentées les principales professions qui les composent. Les professions définies comme culturelles apparaissent en couleurs vives, les autres professions sont en gris. Cette représentation permet d’apprécier la variété de professions culturelles qui peuvent coexister dans un même secteur d’activité, leur poids dans l’emploi total et a contrario le poids des autres professions.
  • Ainsi, dans le secteur culturel des arts visuels, qui compte 2 100 emplois, plusieurs types de professions culturelles se côtoient : les professions des arts plastiques et métiers d’art, largement majoritaires, (partie verte) et les professions littéraires (partie orange). Enfin, les autres professions, comme par exemple les emplois administratifs, y représentent 25 % des emplois.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2013 – exploitation complémentaire (au lieu de travail)

Définitions

Le champ de la culture est défini par le ministère en charge de la culture selon deux approches : l’une réalisée à partir des activités extraites de la nomenclature d’activités françaises (NAF rév. 2, 2008), l’autre d’après les professions issues de la nomenclature des professions et catégories socioprofessionnelles (PCS 2003). Ces définitions sont validées au niveau européen et par le Conseil national de l’information statistique.

L’appellation « Musée de France » a été instaurée par la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France. Cette appellation peut être accordée aux musées appartenant à l’État, à une personne morale de droit public ou à une personne de droit privé à but non lucratif. Elle est attribuée par décision du ministre chargé de la culture, après avis du Haut conseil des musées de France.

Pour en savoir plus

L. Bisault, Insee, T. Picard, Deps, ministère de la Culture et de la communication, « La culture : une activité capitale », Insee Première n° 1644, avril 2014.

V. Deroin, Deps, ministère de la Culture et de la communication, « Ouvrir dans un nouvel onglet Conceptualisation statistique du champ de la culture, », lCulture méthodes 2011-3, décembre 2011.