Insee Analyses Bourgogne-Franche-ComtéLa Bourgogne-Franche-Comté, des services qui restent accessibles dans une région peu dense

Pierre-Stéphane Lèbre, Marie Léger (Insee)

En Bourgogne-Franche-Comté, la densité de population est deux fois moindre qu’en moyenne métropolitaine. L’armature urbaine de la région est composée de villes de densité intermédiaire qui rassemblent plus du quart de la population régionale. Ces villes jouent le rôle de centre de services pour les communes environnantes. Seules Dijon, Besançon et Belfort sont considérées comme densément peuplées. Les couronnes des villes, qui rassemblent 40 % de la population de la région, sont largement composées de communes de faible densité. C’est ainsi qu’il est possible de résider à la campagne tout en ayant un accès facile à la ville. Cependant, les habitants des territoires peu denses, soit une grande partie de l’espace régional, accèdent plus ou moins rapidement aux services selon leur âge. Ainsi, les services destinés de façon plus spécifique aux jeunes sont plus difficiles à atteindre que ceux destinés aux seniors.

Insee Analyses Bourgogne-Franche-Comté
No 01
Paru le :Paru le06/01/2016
Pierre-Stéphane Lèbre, Marie Léger (Insee)
Insee Analyses Bourgogne-Franche-Comté No 01- Janvier 2016

Figure 1Une armature urbaine composée de communes à densité intermédiaire

La Bourgogne-Franche-Comté concilie un habitat peu dense et un accès relativement rapide aux équipements de base. Pour la moitié des habitants, les services de la vie courante sont accessibles en moins de quatre minutes par la route. Couvrant 47 800 km2 pour seulement 2,8 millions d’habitants, la région est pourtant une des moins denses de France : la densité y est deux fois plus faible qu’au niveau national.

Une densité faible accroît souvent les distances aux services et aux équipements et donc les temps d’accès. La distance intervient moins dans les espaces très denses, mais d’autres facteurs comme l’absence de dessertes de transports, la saturation du réseau ou encore le délai d’attente sont de nature à limiter aussi l’accessibilité.

Seulement 13 % de la population régionale en zone dense

En Bourgogne-Franche-Comté, 373 000 habitants résident dans une commune dense selon une grille de densité définie au niveau européen et complétée par l’Insee (cf. méthodologie). Quatre degrés de densité sont définis : dense, intermédiaire, peu dense et très peu dense. Avec 13 % d’habitants en , la région est loin du niveau national (35 %). Et les zones denses de la région ne comptent que 2 200 habitants au km², là où les communes denses de France atteignent plus de 3 000 habitants au km². Paris contribue pour beaucoup à ces niveaux nationaux. La France de province présente une densité plus proche de celle de Bourgogne-Franche-Comté (figure 2).

Figure 2Plus de la moitié de la population dans les zones faiblement denses

Plus de la moitié de la population dans les zones faiblement denses
Degré de densité de la commune Population régionale Part de la population (%) Part de la superficie (en %)
Bourgogne-Franche-Comté France de province Bourgogne-Franche-Comté France de province
Dense 373 175 13,2 24,6 0,4 1,0
Intermédiaire 880 409 31,3 33,1 4,4 7,8
Peu dense 1 222 578 43,4 37,3 46,6 56,4
Très peu dense 340 652 12,1 5,0 48,7 34,7
Total 2 816 814 100 100 100 100
  • Source : Insee, Recensement de la population 2012.

Dix communes seulement sont qualifiées de denses. Il s’agit des grandes villes de la région, Dijon, Besançon et Belfort ainsi que de certaines communes de leur banlieue : Chenôve, Talant, Fontaine-lès-Dijon, Saint Apollinaire autour de Dijon et Bavilliers, Essert et Valdoie à côté de Belfort.

Ces communes denses sont bien équipées et offrent un accès rapide à l’ensemble des services. Il faut ainsi compter seulement trois minutes par la route pour accéder aux équipements de base. Les habitants peuvent aussi rapidement quitter la ville : les zones peu denses leur sont directement contiguës. Dans ces pôles, la population est relativement jeune. Plus d’un tiers des habitants ont moins de 25 ans. Ils mettent cinq minutes pour accéder aux équipements qui leur sont plus spécifiques (cf. méthodologie).

Un habitant sur quatre dans les pôles de densité intermédiaire

Comptant 770 000 personnes, la population résidant dans les pôles de densité intermédiaire est plus du double de celle vivant dans les villes denses (figure 3).

Figure 3Un accès rapide aux équipements de la vie courante même dans les communes peu denses

Un accès rapide aux équipements de la vie courante même dans les communes peu denses - Lecture : les temps d’accès désignent la durée de trajet médiane pour la population considérée. Dans les communes peu denses d’un pôle, la moitié de la population accède aux équipements de la vie courante en moins de 4 minutes.
Commune Densité de la commune Nombre de communes Population Accès vie courante (minutes)
D'un pôle dense 10 373 200 3
intermédiaire 127 773 700 2,9
peu dense 91 171 600 4
D'une couronne intermédiaire 50 106 700 3,7
peu dense 1 348 868 300 6,3
très peu dense 1 229 224 300 9,5
Hors influence d'un pôle peu dense 245 182 600 5,6
très peu dense 730 116 200 10,6
Bourgogne-Franche-Comté 3 830 2 816 600 4,2
  • Note : une commune très peu dense d’un pôle n’a pas été prise en compte dans le tableau
  • Lecture : les temps d’accès désignent la durée de trajet médiane pour la population considérée. Dans les communes peu denses d’un pôle, la moitié de la population accède aux équipements de la vie courante en moins de 4 minutes.
  • Sources : Insee, BPE 2013, Distancier Métric, RP 2012

Plus d’un quart de la population régionale réside dans ces pôles où la densité moyenne atteint 460 habitants au km², ce qui reste cependant inférieur aux densités de l’Île-de-France ou de la vallée du Rhône. Bien qu’intermédiaires en densité, ces villes jouent un rôle important au sein des territoires qu’elles animent. Avec plus de 10 000 emplois, les pôles comme Chalon-sur-Saône, Nevers, Auxerre, Mâcon, Montbéliard, Sens, Dole, forment l’armature urbaine de la région. Les espaces peu denses s’étendent dans les interstices de ce maillage, en particulier le long des cours d’eau principaux, de la Saône au Doubs, mais aussi en descendant l’Yonne depuis Auxerre ou la Loire depuis Nevers (figure 1).

Dans ces villes de densité intermédiaire, les temps d’accès aux équipements sont proches de ceux des villes denses. Toutefois, les jeunes et les parents mettent plus de temps pour se rendre aux services qui les concernent de façon plus spécifique.

Pour les espaces peu denses situés à proximité, ces villes jouent le rôle de centre de services sportifs, culturels ou encore de santé, offrant aux habitants de ces espaces un accès facile aux équipements.

Ce maillage urbain est complété par des pôles d’emploi de taille plus modeste et à faible densité comme Arbois, Montbard ou encore Champagnole et Tonnerre. Plus de 6 % de la population régionale réside dans ces petites villes peu denses (124 habitants au km²).

Dans toutes ces communes qui constituent des pôles d’emploi locaux, faible densité rime avec accès rapide aux équipements. Le temps de trajet se limite à quatre minutes pour les services de la vie courante. En revanche, l’accès aux services les plus rares, dits de la gamme supérieure comme le lycée, l’hôpital ou encore l’hypermarché, est plus long que dans les territoires plus denses.

Les seniors sont très présents dans les pôles de densité faible ou intermédiaire, où 22 % de la population a plus de 65 ans, une part supérieure de cinq points à celle des villes denses ; ils y sont même sur-représentés par rapport à la moyenne régionale. Dans ces villes de densité intermédiaire, ils accèdent aux services aussi rapidement que dans les villes denses (figure 5).

Figure 5Seniors : des temps d’accès plus longs dans le Châtillonnais et le Morvan

Plus d’un million d’habitants dans les espaces périurbains à faible densité

Dans les couronnes des villes, les communes sont, dans leur majorité, de faible densité. Plus d’un million d’habitants résident dans les communes périphériques peu denses ou très peu denses, soit 40 % de la population régionale. Avec 37 habitants au km², ces territoires périurbains attirent des ménages en quête d’espace. En contrepartie, l’accès aux équipements est moins rapide qu’en ville.

Pour les jeunes, les temps d’accès dépendent de la densité de la couronne : de 11 minutes dans la couronne intermédiaire, ces temps doublent dans les communes très peu denses où pour la moitié des jeunes, il faut compter plus de 20 minutes pour accéder aux équipements qui les concernent (figure 4).

Figure 4Communes isolées peu denses, des services moins accessibles pour les jeunes et les familles

  • Sources : Insee, BPE 2013, Distancier Métric, RP 2012

La population âgée de 25 à 65 ans est sur-représentée dans ces espaces périurbains. Ces personnes, le plus souvent actives, sont aussi plus mobiles, ne serait-ce que pour aller travailler. Ces déplacements quotidiens leur donnent aussi accès aux services implantés entre leur domicile et leur lieu de travail. C’est une facilité d’autant plus appréciable pour les services de la vie courante que, dans le périurbain très peu dense, les temps d’accès se révèlent plus longs que dans les communes isolées peu denses. C’est aussi le cas pour les services plus spécifiques aux seniors, mais ces derniers sont peu présents dans le périurbain le moins dense, préférant habiter soit la ville, soit l’espace isolé hors d’influence des pôles.

Un accès plus long dans les zones très peu denses loin des pôles

Hors de l’influence des villes, 10 % de la population réside dans une commune peu dense ou très peu dense. Cette part est deux fois plus élevée en Bourgogne-Franche-Comté qu’au niveau national.

Ces communes se situent pour partie aux marges de la région, le long de la frontière suisse dans le Doubs et le Jura, au nord de la Haute-Saône vers les Vosges et au sud de la Saône-et-Loire, mais elles sont surtout très présentes à l’ouest du Morvan, dans le Châtillonnais et la Puisaye.

Bien qu’isolées, les communes peu denses offrent des temps d’accès raisonnables aux services de la vie courante, moins de six minutes pour la moitié de la population, et moins de douze minutes pour les équipements destinés aux seniors. Pour les jeunes comme pour les parents, les équipements sont plus éloignés, autour de 20 minutes.

En revanche, les communes isolées très peu denses sont les plus éloignées de tous les types d’équipement. La moitié de la population se trouve ainsi à plus de dix minutes des équipements de la vie courante, à seize minutes des services plus spécifiques aux personnes âgées. Ces dernières sont pourtant nombreuses dans ces communes : un habitant sur quatre a plus de 65 ans.

Pour comprendre

La Commission européenne a mis au point une typologie des communes en fonction de leur degré d’urbanisation. Les communes sont classées selon trois degrés de densité. À partir de carreaux de 1 km de côté, on forme des mailles urbaines, agrégations de carreaux contigus qui remplissent deux conditions : une densité de population au carreau d’au moins 300 habitants par km² et un minimum de 5 000 habitants après agrégation. Dans une démarche identique et pour définir l’urbain dense, on forme ensuite des mailles urbaines denses qui remplissent deux conditions : une densité de population au carreau d’au moins 1 500 habitants par km² et un minimum de 50 000 habitants après agrégation.

Cette typologie européenne est complétée par la définition de mailles peu denses qui remplissent deux conditions : une densité de population au carreau d’au moins 25 habitants par km² et un minimum de 300 habitants après agrégation. Les autres carreaux sont considérés comme très peu denses. Au final, on obtient quatre types de carreaux, du très dense au très peu dense. Ensuite, chaque commune est classée selon la part majoritaire de sa population vivant dans l’un des quatre types de carreaux.

La typologie de l’Insee complète ainsi la nomenclature européenne pour proposer quatre niveaux de densité :

  1. les communes densément peuplées ;
  2. les communes de densité intermédiaire ;
  3. les communes peu denses ;
  4. les communes très peu denses.

Avec la Base Permanente des Équipements (BPE), quatre paniers d’équipements et de services ont été constitués en fonction de la proximité, de la mobilité qu’ils impliquent, de l’importance qui leur est donnée au quotidien et de leur fréquence d’usage. Le panier de « vie courante » se compose des banques et caisses d’épargne, écoles de conduite, coiffeurs, restaurants, polices et gendarmeries, bureaux de poste, relais poste et agences postales, épiceries-supérettes, supermarchés, boulangeries, librairies, papeteries journaux, stations-service, écoles maternelles et élémentaires, collèges, médecins omnipraticiens, chirurgiens-dentistes, infirmiers, pharmacies, laboratoires d’analyses médicales, services d’aide pour personnes âgées, gardes enfants d’âge préscolaire, salles ou terrains multisports.

Le panier « jeunes » se compose des agences de proximité Pôle emploi (APE), écoles de conduite, agences de travail temporaire, centres de formation d’apprentis (hors agriculture), maternités, gynécologues, gares sous convention avec les conseils régionaux, bassins de natation, terrains de tennis, d’athlétisme, plateaux extérieurs ou salles multisports, salles ou terrains spécialisés, cinémas.

Le panier « parents » Le panier se compose des écoles maternelles et élémentaires, collèges et lycées, agences de proximité Pôle emploi (APE), urgences, maternités, gynécologues, pédiatres, sages-femmes, orthophonistes, orthoptistes, gardes enfants d’âge préscolaire, soins à domicile pour les enfants handicapés, gares sous convention avec les conseils régionaux, bassins de natation, terrains de tennis, d’athlétisme, plateaux extérieurs ou salles multisports, terrains de grands jeux, salles ou terrains spécialisés, cinémas.

Le panier « seniors » se compose des urgences, médecins omnipraticiens, cardiologues, infirmiers, masseurs kinésithérapeutes, pharmacies, laboratoires d’analyses médicales, magasins d’optique, hébergements, soins à domicile et services d’aide pour personnes âgées, bassins de natation, boulodromes, tennis, plateaux extérieurs ou salles multisports, cinémas.

Calcul des temps d’accès aux équipements et services

Les temps d’accès aux équipements et services sont calculés à partir des distances routières fournies par le distancier Métric de l’Insee. Ils ont donc un caractère théorique car, en pratique, les trajets ne se font pas forcément en voiture, et certains critères ne sont pas pris en compte dans la modélisation (recherche d’une place de parking, feux rouges…). Ils permettent cependant d’appréhender des situations très diverses en matière d’accessibilité et d’enclavement des territoires.

Pour chaque commune, le temps d’accès à un équipement, par exemple un supermarché, est le temps d’accès entre le chef-lieu de la commune et celui de la commune équipée la plus proche. Lorsque l’équipement est présent dans la commune, on calcule la moyenne des temps de trajet entre chaque carreau de 200 m de côté de la commune et celui de l’équipement.

Le temps d’accès à un panier d’équipements est la moyenne des temps d’accès à chacun de ses équipements. Le temps médian d’accès à un panier calculé pour un territoire – par exemple une région – représente la médiane des temps d’accès communaux de ce territoire. La population de chaque commune est prise en compte de sorte qu’une commune très peuplée pèse davantage dans le calcul qu’une commune moins peuplée.

Pour en savoir plus

L'accès aux services, une question de densité des territoires, Insee Première n° 1579 - Janvier 2016

Bertrand M., Accès aux services au public en Côte-d’Or : un enjeu pour des territoires ruraux, parfois en croissance démographique, Insee Analyses Bourgogne n°15 - Décembre 2015

Une nouvelle approche sur les espaces à faible et forte densité, La France et ses territoires, Insee Références, Édition 2015

La méthode de construction de la grille de densité (typologie européenne), Site Insee.fr, Nomenclatures, définitions et méthodes