Auto-entrepreneurs Au bout de trois ans, 90 % dégagent un revenu inférieur au Smic au titre de leur activité non salariée
En 2009, 328 000 personnes ont créé une auto-entreprise, dont la moitié exerce une activité économique effective. Ces auto-entrepreneurs actifs sont proches des créateurs d’entreprises « classiques » par leurs caractéristiques, mais ils tirent de leur activité un revenu très inférieur : en moyenne, 4 300 euros de revenu annualisé la première année, soit trois fois moins que les créateurs classiques. Ils exercent souvent en parallèle une activité salariée. Deux ans plus tard, fin 2011, 102 000 sont toujours actifs économiquement, mais seuls 79 000 ont pu dégager un revenu positif de façon continue sur les trois ans. En moyenne, le revenu qu’ils tirent de leur activité a progressé, mais pour neuf sur dix, il demeure inférieur au Smic. Si une petite moitié a pérennisé son activité en développant son chiffre d’affaires, moins d’un sur dix perçoit un revenu comparable à celui des autres non-salariés de son secteur. Peu ont quitté l’auto-entrepreneuriat pour rejoindre le régime non salarié classique.
- Fin 2009, 174 000 auto-entrepreneurs sont économiquement actifs
- Une population jeune et concentrée dans les services
- Des revenus non salariaux trois fois plus faibles que ceux des créateurs d’entreprises classiques
- Au démarrage de l’auto-entreprise, les plus âgés dégagent les revenus les plus élevés
- Cinq trimestres en moyenne avant de réaliser un chiffre d’affaires
- 58 % sont toujours actifs fin 2011
- Après deux ans, les revenus demeurent faibles
- Modèle de durée
Fin 2009, 174 000 auto-entrepreneurs sont économiquement actifs
Au cours de l’année 2009, 328 000 personnes sont devenues auto-entrepreneurs. Ces derniers représentent plus de la moitié des créateurs d’entreprises de l’année, deux tiers des non-salariés nouvellement installés, et 13 % de l’ensemble des non-salariés. Parmi ces auto-entrepreneurs, 53 % (soit 174 000 personnes) ont dégagé un chiffre d’affaires positif dans un délai de quatre trimestres après leur entrée dans le régime : on les considère comme économiquement actifs (tableau 1).
La moitié des auto-entrepreneurs, économiquement actifs ou non, exercent aussi en 2009 une activité salariée, qu’elle soit simultanée ou non. Cette proportion est la même parmi les créateurs d’entreprises classiques. En outre, pour 93 % des auto-entrepreneurs pluriactifs, le revenu salarial est plus élevé que le revenu d’activité indépendante.
Par les simplifications administratives et fiscales qu’il permet, le statut d’auto-entrepreneur attire certains non-salariés qui exercent déjà une activité indépendante sous un régime classique. Au cours de l’année 2009, 35 000 non-salariés ont ainsi changé de statut, passant du régime des indépendants au régime des auto-entrepreneurs. Ces « auto-entrepreneurs par changement de statut » représentent un auto-entrepreneur de 2009 sur dix ; 69 % d’entre eux sont économiquement actifs fin 2009.
tableauTableau 1 – De l’immatriculation à l’activité économique
Ensemble des auto-entrepreneurs | dont auto-entrepreneurs par changement de statut | |||
---|---|---|---|---|
Effectif (milliers) | Répartition ( %) | Effectif (milliers) | Répartition ( %) | |
Immatriculés à l’Urssaf en 2009 | 328,1 | 100 | 35,3 | 100 |
Économiquement inactifs au 31/12/2009 | 153,9 | 47 | 10,9 | 31 |
monoactifs | 74,9 | 23 | 8,8 | 25 |
pluriactifs | 79,0 | 24 | 2,1 | 6 |
Économiquement actifs au 31/12/2009 | 174,2 | 53 | 24,4 | 69 |
monoactifs | 89,2 | 27 | 21,1 | 60 |
pluriactifs | 84,9 | 26 | 3,4 | 10 |
- Champ : France entière.
- Source : Insee, base Non-salariés.
Une population jeune et concentrée dans les services
Les créateurs d’auto-entreprises économiquement actifs (hors auto-entrepreneurs par changement de statut) et les créateurs d’entreprises classiques de 2009 ont des caractéristiques proches : 38 % sont des femmes (soit 6 points de plus que l’ensemble des indépendants) et plus de la moitié ont moins de 40 ans. Ils s’installent dans les mêmes secteurs d’activité, les auto-entrepreneurs choisissant un peu plus souvent les services (60 %) que les nouveaux entrepreneurs classiques (50 %).
Les auto-entrepreneurs par changement de statut se distinguent plus nettement des créateurs et ressemblent davantage à l’ensemble des indépendants. Ils sont plus âgés : plus de 30 % d’entre eux ont entre 40 et 50 ans, et seulement 10 % ont moins de 30 ans ; 32 % travaillent dans le commerce (contre environ 20 % des créateurs), et ils sont moins présents dans les services.
Des revenus non salariaux trois fois plus faibles que ceux des créateurs d’entreprises classiques
Bien que proches par leurs caractéristiques, les auto-entrepreneurs et les créateurs classiques de 2009 perçoivent des revenus très différents (graphique 1). Le revenu moyen annualisé des créateurs d’auto-entreprises économiquement actifs (hors auto-entrepreneurs par changement de statut) avoisine 4 300 euros en 2009, alors que celui des créateurs classiques est plus de trois fois supérieur (14 100 euros).
Cet écart ne provient pas d’une plus forte proportion de revenus nuls chez les auto-entrepreneurs, car seulement 20 % d’entre eux ne dégagent aucun revenu en 2009, contre 34 % des créateurs classiques. Il s’explique par une concentration des revenus dans le bas de la distribution, et la quasi-absence de revenus élevés : plus de 90 % des auto-entrepreneurs économiquement actifs gagnent moins que le Smic la première année. Le revenu plancher des 25 % de créateurs classiques les mieux payés (3e quartile) est plus de trois fois supérieur au revenu plancher des 25 % d’auto-entrepreneurs les plus rémunérés. Le revenu plancher des 10 % de créateurs classiques les mieux payés (9e décile) atteint 33 000 euros, contre seulement 12 000 euros pour les auto-entrepreneurs.
Parmi les auto-entrepreneurs par changement de statut, seulement 5 % ont un revenu nul en 2009. Leur revenu moyen, de 6 900 euros environ, est supérieur de 60 % à celui des autres créateurs d’auto-entreprises, mais reste inférieur de 51 % à celui des créateurs classiques. Leur revenu médian, qui sépare la population en deux, s’élève à 4 800 euros.
graphiqueGraphique 1 – Dispersion des revenus annuels des auto-entrepreneurs et des créateurs classiques en 2009
Au démarrage de l’auto-entreprise, les plus âgés dégagent les revenus les plus élevés
Au cours de la première année d’activité, l’âge, le sexe, la localisation et le secteur d’activité des créateurs d’auto-entreprises (hors auto-entrepreneurs par changement de statut) influencent leur niveau de revenu.
À la création de l’auto-entreprise, le revenu d’activité des plus âgés est plus élevé. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, un auto-entrepreneur ayant plus de 60 ans gagne 33 % de plus que son homologue ayant entre 41 et 50 ans, qui lui-même perçoit un revenu supérieur de 17 % à celui des 31-40 ans. Le revenu des moins de 30 ans est inférieur de 20 % à celui des 31-40 ans.
La différence de revenu d’activité entre les hommes et les femmes est moins marquée pour les auto-entrepreneurs que pour l’ensemble des non-salariés. À caractéristiques d’activité comparables, les femmes auto-entrepreneurs ont un revenu inférieur de 14 % à celui des hommes, contre 34 % pour l’ensemble des indépendants. Il est possible qu’un effet générationnel joue : parmi les créateurs d’entreprises classiques de 2009, la différence de revenu entre hommes et femmes n’est que de 11 %.
Les Franciliens gagnent, toutes choses égales par ailleurs, 43 % de plus que les auto-entrepreneurs des autres régions. Enfin, la pluriactivité s’accompagne d’un moindre revenu non salarial : les auto-entrepreneurs qui conjuguent activité non salariée et salariée perçoivent un revenu non salarial inférieur de 12 % à celui des auto-entrepreneurs monoactifs. Pour autant, si l’on prend en compte les revenus salariaux, le revenu total des auto-entrepreneurs pluriactifs est, en moyenne, près de cinq fois plus élevé que celui des auto-entrepreneurs monoactifs.
Cinq trimestres en moyenne avant de réaliser un chiffre d’affaires
Pour un auto-entrepreneur récemment installé, réaliser un chiffre d’affaires n’est ni certain ni immédiat. Seulement 15 % de l’ensemble des créateurs d’auto-entreprises de 2009 - qu’ils soient actifs économiquement fin 2009 ou non - ont déclaré un chiffre d’affaires positif au cours du premier trimestre d’installation. Pour les auto-entrepreneurs par changement de statut, cette proportion est trois fois plus élevée (48 %).
La part des auto-entrepreneurs qui ont déclaré au moins un euro de chiffre d’affaires depuis leur installation s’accroît d’abord rapidement (près d’un sur deux en deux trimestres), puis de plus en plus lentement pour se stabiliser autour de 60 % au bout de huit trimestres. En raison de leur expérience dans le non-salariat, la situation des auto-entrepreneurs par changement de statut est plus favorable : 65 % dégagent un chiffre d’affaires positif au cours des deux premiers trimestres, 80 % au bout de huit trimestres.
En moyenne, pour l’ensemble des auto-entrepreneurs, le premier chiffre d’affaires intervient cinq trimestres environ après leur installation. Pour la moitié d’entre eux, le délai est de deux trimestres.
À caractéristiques comparables, les auto-entrepreneurs par changement de statut demeurent deux fois moins longtemps sans chiffre d’affaires que les autres auto-entrepreneurs (encadré). Les pluriactifs ont une durée sans chiffre d’affaires de 7 % plus courte que les monoactifs, qui se sont pourtant entièrement consacrés à leur activité non salariée. Enfin, la durée sans chiffre d’affaires est 20 % plus courte pour les femmes que pour les hommes.
Par ailleurs, plus l’âge de l’auto-entrepreneur est élevé au moment de la création, plus la durée sans chiffre d’affaires est courte : pour les moins de 30 ans, elle est supérieure de 30 % à celle des 30-40 ans. Enfin, c’est dans le commerce et la construction que la durée est la plus longue (respectivement + 42 % et + 25 % par rapport aux services).
58 % sont toujours actifs fin 2011
Fin 2010, un peu plus de trois auto-entrepreneurs sur quatre (76 %) actifs économiquement en 2009 le sont toujours (graphique 2) ; 10 % environ n’ont pas déclaré de chiffre d’affaires en 2010, tandis que 14 % ne sont plus auto-entrepreneurs. Les auto-entrepreneurs qui ont changé de régime et opté en 2010 pour un statut d’indépendant classique sont très peu nombreux. Environ 58 % des auto-entrepreneurs actifs de 2009 le sont toujours fin 2011, 14 % n’ont pas déclaré de chiffre d’affaires en 2011, et plus d’un sur quatre ont quitté ce statut.
Les auto-entrepreneurs qui cessent leur activité sont plus jeunes que l’ensemble (30 % de moins de 30 ans contre 23 %), plus souvent pluriactifs (52 % contre 49 %) et légèrement surreprésentés dans le secteur du commerce (22 % contre 20 %).
Sur 174 000 auto-entrepreneurs actifs économiquement en 2009, seuls 79 000 (soit 45 %) ont dégagé un revenu positif en 2009, 2010 et 2011, et sont encore actifs au 31 décembre 2011. Dans la suite, on s’intéresse aux revenus de cette population « pérenne ». En moyenne, leur revenu a légèrement augmenté entre 2009 et 2011 (+1,4 % - tableau 2).
Hors auto-entrepreneurs par changement de statut, le revenu moyen des auto-entrepreneurs pérennes s’est accru de 4,3 % en euros constants sur deux ans. Cependant, pour une forte minorité (48 %), le revenu a diminué. Par conséquent, la dispersion s’accroît en haut et en bas de l’échelle des revenus (graphique 3) : le 1er décile (revenu en deçà duquel se situent les 10 % les moins bien rémunérés) diminue, tandis que le 3e quartile (limite au-delà de laquelle se trouvent les 25 % les mieux rémunérés) et le 9e décile (plancher des 10 % les mieux rémunérés) s’accroissent.
Entre 2009 et 2011, pour les auto-entrepreneurs par changement de statut pérennes, le revenu moyen a diminué de 6,8 %, et seulement 41 % ont vu leur revenu s’accroître. Ces auto-entrepreneurs s’apparentent sans doute, pour nombre d’entre eux, à des non-salariés dont l’activité était déjà en phase descendante avant leur changement de statut.
graphiqueGraphique 2 – Le devenir des auto-entrepreneurs économiquement actifs en 2009
graphiqueGraphique 3 – Dispersion des revenus d’activité 2009, 2010 et 2011
tableauTableau 2 – Évolution du revenu non salarial annuel moyen, en euros constants
Evolution 2009-2011 | ||
---|---|---|
en % | en euros constants | |
Auto-entrepreneurs créateurs | + 4,3 | + 236 |
Auto-entrepreneurs par changement de statut | − 6,8 | − 523 |
Ensemble | + 1,4 | + 85 |
- Champ : auto-entrepreneurs dégageant un revenu positif en 2009, 2010 et 2011, et actifs au 31/12 de chaque année.
- Source : Insee, base Non-salariés.
Après deux ans, les revenus demeurent faibles
En excluant les auto-entrepreneurs par changement de statut, entre 2009 et 2011, la hausse du revenu moyen est plus marquée pour les femmes (+ 7,1 %) que pour les hommes (+ 2,7 %). Le revenu augmente pour les moins de 50 ans et diminue au-delà. Par secteur, c’est la construction qui génère la plus forte hausse de revenus (+ 5,7 %), devant l’industrie (+ 4,5 %). Dans les services, le revenu s’accroît également (+ 4,0 %) sauf dans les activités scientifiques et techniques et dans l’hébergement et restauration. Les auto-entrepreneurs franciliens enregistrent un repli de leur revenu (− 2,9 %), à l’inverse de ceux installés dans les autres régions (+ 7,0 %). En moyenne, les auto-entrepreneurs qui étaient pluriactifs en 2009 ont un revenu plus dynamique que les autres (+ 9,0 %, contre − 0,4 %).
Si une petite majorité d’auto-entrepreneurs parvient à pérenniser son activité non salariée, les revenus demeurent faibles. En 2011, le revenu non salarial des auto-entrepreneurs ayant débuté en 2009 atteint très rarement un niveau comparable à celui d’un non-salarié classique du même secteur en 2009. Seuls 10 % des auto-entrepreneurs se développent suffisamment pour percevoir un revenu supérieur à la médiane des revenus de leur secteur, et 10 % perçoivent un revenu inférieur de 30 %. Enfin, 92 % des auto-entrepreneurs perçoivent un revenu inférieur de plus de 30 % à la moyenne du secteur.
Modèle de durée
En décembre 2011, date des données les plus récentes disponibles, certains auto-entrepreneurs de 2009 n’ont encore déclaré aucun chiffre d’affaires ; pour eux, la durée écoulée avant le premier chiffre d’affaires strictement positif n’est pas connue. Pour estimer malgré tout une durée moyenne, on met en œuvre un modèle de durée paramétrique « à durée de vie accélérée » qui permet de contrôler les effets du sexe, de l’âge, du secteur d’activité, de la multiactivité et de la région.
Sources
La base Non-salariés est issue d’une source administrative gérée par l’Acoss, caisse nationale des Urssaf. Celle-ci collecte les cotisations sociales et la CSG-CRDS assises sur les rémunérations des non-salariés.
Définitions
Auto-entrepreneur : régime mis en place le 1er janvier 2009 pour les entrepreneurs individuels qui relèvent du régime fiscal de la micro-entreprise. Il offre des formalités de création d’entreprise allégées ainsi qu’un mode de calcul et de paiement simplifié des cotisations et contributions sociales et de l’impôt sur le revenu.
Auto-entrepreneur économiquement actif : au cours de sa première année d’activité, un auto-entrepreneur est considéré comme économiquement actif s’il a déclaré au moins un euro de chiffre d’affaires dans un délai de quatre trimestres. Par la suite, un auto-entrepreneur demeure actif économiquement s’il déclare au moins un euro de chiffre d’affaires dans l’année.
Revenu d’activité indépendante ou revenu non salarial : somme des revenus nets découlant d’une activité non salariée ou indépendante au cours d’une année. Dans le cas des auto-entrepreneurs, le revenu non salarial est obtenu à partir des chiffres d’affaires trimestriels déclarés aux Urssaf, auxquels on applique un abattement représentatif des frais professionnels.
Auto-entrepreneur par changement de statut : non-salarié qui opte pour le régime de l’auto-entreprise après avoir exercé une activité non salariée sous un autre régime.
Revenu non salarial annualisé : pour les auto-entrepreneurs installés en cours d’année, le revenu non salarial correspond à une période d’activité incomplète sur l’année. Le revenu non salarial annualisé est obtenu en extrapolant sur un an le revenu non salarial mensuel moyen perçu sur la durée effective d’activité.