Emploi, activité, chômage : les aires urbaines d'Alsace sensibles à la crise

Lionel Cacheux, Dominique Kelhetter, Christiane Kuhn

Entre 2006 et 2011, la population active âgée de 25 à 54 ans a diminué dans les principales aires urbaines d'Alsace, sauf dans celle de Saint-Louis. En revanche, les effectifs en emploi au lieu de travail ont progressé, excepté dans l'aire urbaine de Mulhouse. Le nombre de chômeurs est également en hausse à des degrés divers dans les huit grandes aires de la région. Le constat paradoxal d'une augmentation de l'emploi et du chômage, et d'une diminution de la population active, dans l'aire urbaine de Strasbourg, s'explique par la poursuite de la périurbanisation : l'augmentation des emplois dans la couronne attire des actifs de communes extérieures et laisse le chômage se concentrer dans le pôle de l'aire urbaine.

Insee Analyses Alsace
No 1
Paru le :Paru le26/06/2014
Lionel Cacheux, Dominique Kelhetter, Christiane Kuhn
Insee Analyses Alsace No 1- Juin 2014

En Alsace, l'armature urbaine est organisée en huit grandes aires Strasbourg, Mulhouse, Colmar, Saint-Louis, Haguenau,Thann-Cernay, Saverne et Sélestat). Parmi les quatorze plus grandes aires urbaines que compte la métropole, Strasbourg, en 9e position, est la seule dans le quart nord-est.

Entre 2006 et 2011, les grandes aires urbaines d'Alsace, à l'exception de Saint-Louis, connaissent toutes une baisse du « noyau dur » de la population active, celle des 25 à 54 ans. C'est dans ce contexte qu'est intervenue la récession de 2008-2009.

Moins de population et d'actifs entre 25 et 54 ans dans les grandes aires urbaines, sauf à Saint-Louis

Au cours de la période, la population de cette tranche d'âge diminue dans l'aire urbaine de Strasbourg (- 2,2 % soit 7 100 personnes) et plus rapidement encore dans celles de Haguenau (- 3,4 %), de Mulhouse (- 4,0 %) et de Saverne (- 5,6 %). La position de Colmar est moins défavorable (- 1,5 %).

Malgré des taux d'activité en hausse, notamment parmi les femmes, la population active âgée de 25 à 54 ans qui réside dans ces aires suit le même mouvement de baisse, mais de façon plus atténuée. Elle recule de 1 % dans l'aire urbaine de Strasbourg et de 3 à 4 % dans les aires de Haguenau, de Mulhouse et de Saverne. À Colmar, le retrait est plus modéré mais égal à celui de la population.

Dans le même temps, cette population active est restée presque stable (- 0,5 %) dans les autres grandes aires urbaines du pays (hors Paris et les très grandes aires urbaines).

L'aire urbaine de Saint-Louis, frontalière de la Suisse, se démarque en gagnant en population (+ 1,1 %) et plus encore en population active (+ 3,5 %), grâce au travail frontalier. Sur son territoire, le taux d'activité a progressé de 2,2 points. Dans les autres aires, son évolution pourtant favorable ne permet pas d'éviter le recul de la population active : à part à Saverne (+ 1,5 point) et à Strasbourg (+ 1,1 point), sa hausse est de moins d'un point.

Figure_1Diminution du nombre d'actifs âgés de 25 à 54 ans dans l'aire urbaine de Strasbourg

  • Source : Insee, RP2011 exploitations principale (1) et complémentaire au lieu de résidence (3) et complémentaire au lieu de travail (2).

Figure 2L'aire urbaine de Saint-Louis moins sensible à la crise

L'aire urbaine de Saint-Louis moins sensible à la crise
Zone géographique Évolution 2006-2011 de la population âgée de 25 à 54 ans (en %) Variation du taux d'activité (en points de %) Variation du taux d'activité féminin (en points de %) Évolution du nombre de chômeurs déclarés (en %) Évolution de la population active par catégorie socio-professionnelle (en %)
Ensemble Actifs Cadres et professions intellectuelles supérieures Ouvriers
France métropolitaine -0,6 0,8 1,3 2,3 7,5 8,7 -4,5
Alsace -2,3 -1,1 1,1 2,2 12,5 6,2 -7,9
Aire urbaine de Strasbourg -2,2 -1,0 1,1 2,0 11,1 6,8 -8,8
Ensemble des 13 très grandes aires urbaines de province 1,1 2,6 1,3 2,3 5,9 12,7 -3,6
Aire urbaine de Mulhouse -4,0 -3,5 0,5 1,3 10,6 -4,0 -7,0
Aire urbaine de Colmar -1,5 -1,4 0,1 0,9 37,0 0,4 -5,8
Aire urbaine de Saint-Louis 1,1 3,5 2,2 4,1 13,8 24,9 -5,0
Aire urbaine de Haguenau -3,4 -2,9 0,5 1,9 10,5 -1,3 -8,6
Aire urbaine de Thann-Cernay -2,9 -1,8 0,9 1,9 13,4 14,7 -6,9
Aire urbaine de Saverne -5,6 -4,0 1,5 3,4 11,7 2,8 -11,7
Aire urbaine de Sélestat -3,4 -2,6 0,8 2,9 12,5 -0,4 -14,6
Ensemble des 7 grandes aires urbaines d'Alsace hors Strasbourg -2,7 -1,9 0,7 1,9 15,5 2,8 -7,1
Moyennes aires urbaines d'Alsace -4,5 -3,8 0,7 1,9 10,5 4,0 -7,2
Petites aires urbaines d'Alsace -4,6 -2,2 2,3 3,5 14,5 15,6 -8,1
Communes multipolarisées d'Alsace -0,8 1,0 1,7 3,3 8,8 13,6 -8,7
Communes isolées d'Alsace -2,3 -0,6 1,6 3,4 7,4 -1,6 -4,9
  • Champ : population âgée de 25 à 54 ans.
  • Source : Insee, RP2011, exploitations principale et complémentaire au lieu de résidence.

Plus d'emplois, sauf à Mulhouse

La moindre population active s'accompagne d'un ralentissement du mouvement tendanciel de concentration des emplois dans les aires urbaines concernées. La première reflète la géographie des lieux de résidence, les seconds celle des lieux de travail. Entre 2006 et 2011, l'emploi total offert progresse de 1,4 % dans l'aire urbaine de Strasbourg qui regroupe 45 % des emplois régionaux. Mais cette croissance atteint 4,7 % dans l'ensemble des treize plus grandes aires de province et 1,9 % pour la métropole. Les autres très grandes aires urbaines ont dans l'ensemble été mieux préservées de la crise par leur niveau de spécialisation tertiaire.

Les autres grandes aires urbaines de la région concentrent plus du tiers des emplois régionaux. La progression de l'emploi total, plus faible que dans l'aire urbaine de Strasbourg, y est identique à l'évolution régionale (+ 1,0 %), avec des situations contrastées. Saint-Louis, connaît l'évolution positive la plus importante (+ 7,1 %), suivie par Saverne (+ 6,1 %) et Sélestat (+ 3,5 %). À l'opposé, l'aire urbaine de Mulhouse perd 1 300 emplois sur la période (- 1,2 %).

Dans l'aire de Strasbourg, l'emploi s'est développé dans les secteurs de la construction, du commerce, et de l'administration, mais se trouve en recul dans les secteurs de l'agriculture et surtout de l'industrie (- 11,5 %). Cette forte baisse de l'emploi dans l'industrie se retrouve également au niveau régional et national avec des amplitudes du même ordre. Pour autant, dans l'ensemble des très grandes aires urbaines de province, l'emploi industriel n'a reculé que de 8,7 %, en n'étant relativement préservé qu'à Toulouse. Résultant de ces variations, la part de l'emploi dans le commerce, les transports et les services gagne 1,3 point entre 2006 et 2011, et 0,7 point pour l'administration et la santé, une tertiarisation de l'aire de Strasbourg plus accentuée que pour la moyenne des très grandes aires urbaines hors Paris.

À l'exception de l'aire urbaine de Thann-Cernay, les secteurs du commerce, transports et services et de l'administration, enseignement, santé et action sociale gagnent des emplois dans toutes les grandes aires urbaines d'Alsace. Ils représentent plus de 75 % des emplois à Mulhouse et à Sélestat. Leur progression est supérieure à la moyenne métropolitaine des grandes aires urbaines, hors Paris et les très grandes aires urbaines. Notamment, le secteur administration, enseignement, santé et action sociale gagne 14,8 % à Saint-Louis et le secteur du commerce, transports et services 13,6 % à Saverne.

Comme pour Strasbourg, les fortes baisses d'emploi total des autres grandes aires urbaines concernent surtout le secteur de l'industrie, en particulier l'aire urbaine de Mulhouse qui connaît un recul de près de 20 % de l'emploi dans ce secteur. Dans une moindre mesure, les emplois industriels diminuent aussi à Colmar, Haguenau et Thann-Cernay mais augmentent dans les aires urbaines de Sélestat et surtout de Saint-Louis.

Plus de cadres, moins d'ouvriers et d'employés dans le « noyau dur » des actifs

À l'instar de la répartition sectorielle des emplois offerts localement, la structure des catégories socioprofessionnelles des actifs âgés de 25 à 54 ans résidant dans les grandes aires urbaines s'est modifiée entre 2006 et 2011. Dans l'aire urbaine de Strasbourg, la croissance la plus importante (+ 6,8 %) concerne les cadres et les professions intellectuelles supérieures, qui représentent près de 20 % des actifs. Pour l'ensemble des treize très grandes aires urbaines de province, cette croissance est deux fois plus forte.

Les employés (26,2 % des actifs) et les ouvriers (22,7 %), ont vu leurs effectifs diminuer. En particulier, le nombre d'ouvriers a baissé de près de 9 %. Cette baisse est deux fois plus rapide que celle observée en métropole et 2,5 fois plus que pour l'ensemble des treize très grandes aires urbaines de province. Seule celle de Lille connaît des évolutions de même amplitude.

Plus du quart des actifs (27 %) appartiennent à la catégorie des professions intermédiaires, qui n'a que faiblement progressé (+ 0,8 %). Dans les autres grandes aires urbaines d'Alsace, le nombre d'ouvriers recule également, de plus de 7 %. Les aires urbaines de Sélestat et de Saverne connaissent les baisses du nombre d'ouvriers les plus importantes (respectivement - 14,6 % et - 11,7 %). À Sélestat ce mouvement est en partie compensé par la progression des catégories intermédiaires, ce qui n'est pas le cas dans l'aire urbaine de Saverne.

Dans l'aire urbaine de Saint-Louis, où pourtant l'emploi industriel augmente, le nombre d'ouvriers est en baisse, mais le nombre de cadres (+ 25 %) et professions intermédiaires (+ 7,7 %) y connaissent les plus fortes progressions d'effectif. À Thann-Cernay le nombre de cadres varie dans le même sens (+ 14,7 %).

Chômage en hausse pour les 25-54 ans

Dans l'aire urbaine de Strasbourg, la part des chômeurs déclarés dans la population active (entre 25 et 54 ans) a augmenté de 1,1 point entre 2006 et 2011 pour atteindre 10,2 %. Si Strasbourg connaît l'augmentation de la part des chômeurs déclarés la plus importante des treize très grandes aires urbaines de province, elle leur reste cependant inférieure.

En cinq ans, le nombre de ces chômeurs augmente de plus de 10 % dans les autres grandes aires urbaines d'Alsace. La progression la plus importante concerne Colmar (+ 37 %) et Saint-Louis (+ 13,8 %), même si ces deux grandes aires urbaines conservent une part de chômeurs inférieure à celle de Mulhouse ou de Sélestat.

Figure_3Chômage marqué dans le Sud vosgien

  • © IGN Insee 2014
  • Source : Insee, RP2011 exploitation complémentaire lieu de résidence.

Les aires urbaines de moindre taille plus fragiles

Dans les petites et moyennes aires urbaines d'Alsace comme dans les grandes, la population totale et la population active au lieu de résidence baissent sensiblement pour les 25-54 ans. L'emploi total au lieu de travail y diminue de plus de 3 %, soit nettement plus que la moyenne nationale pour ces catégories d'aires urbaines.

Certaines petites aires sont cependant dynamiques en termes d'emploi (Fessenheim, Ingwiller et Soufflenheim).

Dans les petites et les moyennes aires urbaines, seule la catégorie socioprofessionnelle des cadres et professions intellectuelles supérieures voit ses effectifs augmenter, respectivement de 15 % et de 4 %.

Comme dans les grandes aires urbaines, le nombre de chômeurs déclarés a progressé dans les petites et les moyennes aires, mais la part de chômeurs dans la population active de 25 à 54 ans reste inférieure à celle observée dans les aires équivalentes de métropole.

Des évolutions parfois positives hors des aires urbaines

La population des 25-54 ans des communes multipolarisées par les aires urbaines et des communes isolées hors influence des pôles diminue en Alsace. Le taux d'activité y augmente, mais deux fois plus pour les femmes que pour les hommes.

L'emploi total augmente dans les communes multipolarisées, hausse plus importante qu'au niveau national. Il baisse moins dans l'industrie qu'en métropole.

Le nombre de cadres du « noyau dur » a sensiblement augmenté (+ 13,6 %), ainsi que les professions intermédiaires (+ 12,3 %) alors que les effectifs d'ouvriers ont baissé. Mais les ouvriers représentent encore plus du tiers des actifs. Dans ces communes, la part des chômeurs est de moins de 7 % de la population active.

Dans les communes isolées hors influence des pôles, l'emploi total augmente comme au plan national. L'industrie représente plus d'un tiers des emplois, autant que le commerce, transports et services.

Dans cet espace, l'évolution du nombre d'artisans, commerçants, chefs d'entreprises et du nombre d'employés est positive parmi les 25-54 ans. Par contre le nombre de cadres baisse, ainsi que le nombre d'ouvriers. La part des chômeurs (7,1 %) est inférieure à la moyenne de métropole, de plus de deux points.

Figure 4Progression plus modérée de l'emploi dans les aires urbaines d'Alsace

Progression plus modérée de l'emploi dans les aires urbaines d'Alsace
Zone géographique Évolution 2006-2011 de l'emploi total (en %) Évolution de l'emploi par secteur d'activité (en %) Répartition de l'emploi par secteur d'activité en 2011 (en %)
Industrie Commerce, transports, services divers Administration publique, enseignement, santé, action sociale Industrie Commerce, transports, services divers Administration publique, enseignement, santé, action sociale
France métropolitaine 1,9 -11,3 4,4 4,9 13,2 46,0 31,0
Alsace 1,0 -11,6 4,4 5,3 18,4 43,6 29,5
Aire urbaine de Strasbourg 1,4 -11,5 4,1 3,8 13,7 49,1 29,7
Ensemble des 13 très grandes aires urbaines de province 4,7 -8,7 7,2 6,3 11,5 49,2 31,4
Aire urbaine de Mulhouse -1,2 -19,7 3,1 6,1 17,0 45,6 29,9
Aire urbaine de Colmar 1,3 -12,0 5,4 2,8 14,3 41,5 34,2
Aire urbaine de Saint-Louis 7,1 2,7 6,1 14,8 23,1 43,5 24,7
Aire urbaine de Haguenau 1,5 -8,9 4,4 5,2 25,4 34,6 33,5
Aire urbaine de Thann-Cernay -0,2 -7,1 -0,5 5,1 30,6 33,1 28,5
Aire urbaine de Saverne 6,1 -3,2 13,6 5,3 26,6 37,3 30,0
Aire urbaine de Sélestat 3,5 1,5 5,4 5,1 19,3 44,0 31,7
Ensemble des 7 grandes aires urbaines d'Alsace hors Strasbourg 1,0 -11,7 4,3 5,7 19,3 42,1 30,8
Moyennes aires urbaines d'Alsace -3,6 -16,0 6,9 2,1 28,5 35,0 30,0
Petites aires urbaines d'Alsace -3,3 -17,0 5,6 7,8 34,5 30,3 27,2
Communes multipolarisées d'Alsace 2,3 -9,3 6,1 10,7 23,8 34,2 26,3
Communes isolées d'Alsace 1,8 -4,7 4,7 12,2 32,5 32,3 23,4
  • Champ : ensemble des emplois.
  • Source : Insee, RP2011, exploitation complémentaire au lieu de travail.

Dans l'aire urbaine de Strasbourg, le pôle est constitué de la seule unité urbaine de Strasbourg et les autres communes en constituent la couronne

Pour le pôle, la population âgée de 25 à 54 ans est en baisse de 3,6 % entre 2006 et 2011, un rythme dix fois plus important que dans la couronne. La population active de cette tranche d'âge recule de 2,7 % (deux fois moins pour la population active féminine) alors qu'elle augmente de 1,2 % dans la couronne (+ 3,2 % pour les femmes).

Cesdifférences s'expliquent par la variation du taux d'activité, variation près de deux fois supérieure dans la couronne.

Les nouveaux emplois sont treize fois plus nombreux dans la couronne que dans le pôle et ne sont pas concentrés sur les mêmes secteurs d'activité. Dans la couronne, la croissance est due aux secteurs du commerce, transport et services et de la construction, alors que dans le pôle, c'est dans le secteur de l'administration, enseignement, santé et action sociale que la gain d'emplois est le plus important. L'évolution des effectifs des catégories socioprofessionnelles des actifs de 25 à 54 ans est également différenciée. Dans le pôle, s'observe surtout une augmentation du nombre de cadres. Ils représentent 21,5 % de la population en 2011, et ont enregistré la progression la plus forte. Dans une moindre mesure, le nombre d'agriculteurs et d'artisans, commerçants, chefs d'entreprise augmente, mais leur part dans la population totale reste très faible. Les effectifs des autres catégories sont en recul et plus particulièrement les ouvriers (- 9,8 %).

Dans la couronne par contre, l'augmentation du nombre de cadres est proportionnellement plus importante, même s'ils représentent moins de 15 % des effectifs. La part des emplois de catégories intermédiaires progresse presque autant que celle des cadres alors que le nombre d'ouvriers et d'agriculteurs y est en baisse.

Le nombre de chômeurs déclarés a plus fortement augmenté dans la couronne (+ 18,3 %) que dans le pôle (+ 8,8 %). Il s'agit en fait d'un rattrapage, la part des chômeurs restant encore bien inférieure dans la couronne que dans le pôle (6,2 % contre 13,3 %).

Ces différences d'évolutions viennent éclairer le fonctionnement du marché du travail local et environnant. Le constat global d'une diminution de la population et de la population active de la tranche d'âge et d'une augmentation simultanée de l'emploi total et du chômage dans l'aire urbaine peut sembler paradoxal mais doit s'interpréter en prenant en compte les migrations résidentielles et la variation des échanges domicile-travail avec l'extérieur de l'aire urbaine intervenus dans la période. Si les premières, pour des raisons strictement techniques, ne seront observables que dans la publication des résultats du recensement de 2013 programmée en 2016, en revanche la seconde est facteur explicatif observable. Entre 2006 et 2011, le nombre d'actifs résidant dans l'aire urbaine et y travaillant a diminué de 500. Dans le même temps, le nombre d'actifs résidant en dehors et venant y travailler a augmenté de 5 200 alors que le nombre d'actifs résidant dans l'aire urbaine et travaillant à l'extérieur n'augmente que de 1 800. Préfigurant une extension de la périurbanisation de l'unité urbaine de Strasbourg, l'augmentation des emplois dans sa couronne attire les actifs des communes périphériques et laisse le chômage se concentrer dans le pôle de l'aire urbaine.

Le recensement de la population, une source pour mesurer l'impact de la crise sur les territoires

La méthode de recensement de la population a été rénovée en 2004. À la collecte exhaustive qui avait lieu tous les huit ou neuf ans se substitue désormais une enquête réalisée chaque début d'année. Elle concerne successivement toutes les communes au cours d'une période de cinq ans. Le recensement de la population millésimé 2006 (RP2006) a ainsi été élaboré à partir des enquêtes réalisées de 2004 à 2008. Avec la diffusion du RP 2011, qui cumule celles de 2009 à 2013, deux millésimes peuvent pour la première fois être directement comparés puisque constitués chacun à partir de cinq enquêtes annuelles distinctes. De plus, la dernière grande crise économique ayant démarré au deuxième semestre 2008, confronter les résultats de ces deux millésimes du RP permet d'analyser à un niveau géographique relativement fin les grands changements intervenus avant et pendant la crise sur la population active et l'emploi.

Le recensement est déclaratif et les questions des enquêtes sont nécessairement simples et courtes. Les résultats sur le chômage ne se situent pas dans le cadre de la définition du bureau international du travail (BIT). Ils permettent cependant de mesurer les évolutions et de faire des comparaisons spatiales à un niveau fin.

Dans cette étude, on se limite au champ des actifs de 25 à 54 ans afin de mesurer l'impact de la crise sur le « noyau dur » de la population active. À des âges où la très grande majorité des personnes sont en emploi ou en recherche d'emploi, on analyse ainsi les effets directs de la crise sur l'activité, Dans un contexte économique difficile, les plus jeunes et les plus âgés sont eux davantage susceptibles de modifier leur comportement en entrant ou sortant plus ou moins tardivement de la vie active. À titre d'illustration, la population active des 55-64 ans a crû très fortement en France, + 25,2 %, sous le double effet des hausses démographiques et des maintiens en activité.

Sources

Les résultats sont issus des recensements de la population de 2006 et de 2011.

Définitions

Aire urbaine ou « grande aire urbaine » :ensemble de communes constitué par un pôle urbain (unité urbaine) de plus de 10 000 emplois, et par des communes non agglomérées ou unités urbaines (couronne périurbaine) dont au moins 40 % de la population résidente ayant un emploi travaille dans le pôle ou dans des communes attirées par celui-ci. La notion d'aire urbaine permet ainsi de définir un concept de grande ville ou métropole à l'aide d'une approche fonctionnelle et économique. Parmi ces grandes aires urbaines, on peut isoler les « très grandes aires urbaines » (Paris et les treize aires urbaines les plus importantes de France métropolitaine) qui regroupent chacune plus de 210 000 emplois en 2011.

De la même façon sont définies les moyennes aires (pôle de 5 000 à 10 000 emplois) et les petites aires (pôle de 1 500 à 5 000 emplois). Les communes multipolarisées sont des communes situées hors des aires, dont au moins 40 % de la population résidente ayant un emploi travaille dans plusieurs aires urbaines, sans atteindre ce seuil avec une seule d'entre elles. Les autres communes en dehors des aires sont les communes isolées, hors influence des pôles.

Pour en savoir plus

En matière d'emploi, les métropoles ont davantage résisté à la crise, Insee Première n° 1503, juin 2014.

Les grandes aires urbaines structurent l'espace alsacien, Chiffres pour l'Alsace n° 22, octobre 2011.