Après une naissance, un homme sur neuf réduit ou cesse temporairement son activité contre une femme sur deux
En France, plus d’une mère sur deux d’enfants de moins de huit ans s’est arrêtée de travailler après la naissance de ses enfants ou a réduit temporairement son temps de travail, c’est-à-dire au moins un mois au-delà de son congé de maternité. Seuls 12 % des pères ont modifié leur temps d’activité au-delà de leur congé de paternité. Chez les femmes, ces modifications du temps de travail s’effectuent majoritairement dans le cadre du congé parental. Les moins diplômées cessent plus souvent leur activité alors que les titulaires d’un diplôme de niveau Bac + 2 tendent davantage à la réduire. Dans quatre cas sur cinq, la décision de prendre un congé parental à temps plein a été prise avant la naissance. Neuf mères sur dix ayant pris un congé parental à temps plein considèrent que c’était la meilleure solution pour l’enfant, trois sur dix qu’un autre mode de garde aurait été trop cher, et trois sur dix qu’elles en avaient besoin pour se remettre de la naissance. En France, les interruptions d’activité féminines suite à une naissance sont moins fréquentes qu’en Suède, en Allemagne ou au Royaume-Uni. Ces écarts s’expliquent en partie par les différences de législation du congé parental entre pays et par leurs particularités en matière d’offre de modes de garde.
- Un parent sur trois réduit ou cesse son activité au moins un mois pour son enfant
- Plus les mères sont diplômées, moins elles interrompent leur activité
- Un congé parental avant tout pour le bien de l’enfant
- Les pères sont peu enclins au congé parental
- Le congé parental en pointe en Suède et en Allemagne
Un parent sur trois réduit ou cesse son activité au moins un mois pour son enfant
À l’occasion de la naissance d’un enfant, les parents en emploi bénéficient de congés de maternité ou de paternité. Ils peuvent également interrompre plus longuement leur activité ou réduire leur temps de travail, notamment dans le cadre d’un congé parental d’éducation. En 2010, en dehors du congé de maternité ou de paternité, 33 % des parents ayant au moins un enfant de moins de 8 ans (sources) ont modifié leur temps de travail pendant au moins un mois pour s’occuper de leur plus jeune enfant (tableau 1) : 21 % ont interrompu leur activité et 19 % l'ont réduite ; ces chiffres incluent 7 % de personnes qui ont successivement interrompu et réduit leur activité.
Les parents cessent d’autant plus fréquemment leur activité que leur famille est déjà nombreuse. Ainsi, 28 % des mères se sont arrêtées de travailler pendant au moins un mois pour leur premier enfant ; elles sont 40 % pour leur deuxième enfant et 55 % pour leur troisième enfant ou pour un enfant de rang supérieur.
La proportion de mères ayant réduit leur activité est également plus fréquente à partir du deuxième enfant : elle atteint alors 36 % contre 23 % pour un premier enfant. Quel que soit le rang de l’enfant, les mères s’arrêtent davantage qu’elles ne réduisent leur activité. Mais c’est plus particulièrement le cas lorsque l’enfant est au moins le troisième (55 % de cessations contre 37 % de réductions). À l’inverse, et dans des proportions plus faibles, les pères ont davantage tendance à réduire leur activité qu’à l’interrompre (9 % contre 5 %). Au total, environ un père sur neuf a réduit ou interrompu son activité professionnelle au moins un mois, contre plus d’une mère sur deux.
Chez les femmes, les modifications d’activité s’effectuent majoritairement dans le cadre légal du congé parental, à temps partiel ou à temps plein. Ainsi, parmi les mères déclarant s’être arrêtées de travailler pour s’occuper de leur plus jeune enfant, 75 % ont pris un congé parental à temps plein, 8 % ont utilisé uniquement des jours de congé, et 17 % ont eu recours à d’autres formes d’interruption (congé sans solde, démission, fin de contrat...). Parmi les mères déclarant avoir réduit leur durée de travail, 68 % ont pris un congé parental à temps partiel et 25 % sont passées à temps partiel ou ont réduit leurs horaires de travail en dehors de ce cadre.
tableauTableau 1 – Un parent sur trois réduit ou interrompt son activité au moins un mois pour son enfant
Père | Mère | Ensemble | ||||
---|---|---|---|---|---|---|
Pour un premier enfant | Pour un deuxième enfant | Pour un enfant de rang 3 ou plus | Ensemble | |||
Total | 100 | 100 | 100 | 100 | 100 | 100 |
A interrompu son activité professionnelle pendant au moins un mois pour s'occuper de son plus jeune enfant | 5 | 28 | 40 | 55 | 37 | 21 |
en prenant un congé parental à temps plein | 2 | 17 | 33 | 45 | 28 | 15 |
en utilisant uniquement des jours de congé | 2 | 3 | 3 | 2 | 3 | 2 |
par d'autres arrangements | 2 | 9 | 4 | 9 | 6 | 4 |
A réduit son temps de travail pendant au moins un mois pour s'occuper de son plus jeune enfant | 9 | 23 | 36 | 37 | 31 | 19 |
en prenant un congé parental à temps partiel | 2 | 13 | 26 | 28 | 21 | 11 |
en passant à temps partiel ou en réduisant ses horaires de travail | 2 | 8 | 8 | 6 | 8 | 5 |
en utilisant uniquement des jours de congé | 2 | 1 | 1 | 0 | 1 | 2 |
par d'autres arrangements | 1 | 2 | 1 | 3 | 1 | 1 |
A interrompu ou réduit son activité professionnelle | 12 | 42 | 63 | 70 | 55 | 33 |
- Note : le total des interruptions et des réductions est supérieur à la dernière ligne car des parents peuvent avoir combiné les deux.
- Lecture : interrogés en 2010, 12 % des pères ont interrompu ou réduit leur activité professionnelle pendant au moins un mois pour s'occuper de leur plus jeune enfant.
- Champ : parents d'enfants de moins de 8 ans, ayant travaillé après la naissance du plus jeune enfant ou ayant cessé leur activité professionnelle moins d'un an avant sa naissance, hors personnes en congé de maternité post-natal ou de paternité, en France.
- Source : Insee, enquête Emploi et module complémentaire sur la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle 2010.
Plus les mères sont diplômées, moins elles interrompent leur activité
Suite à une naissance, 47 % des mères titulaires d’un diplôme de niveau CAP-BEP ou inférieur ont interrompu leur activité ; ce n’est le cas que de 29 % des mères titulaires d’un diplôme de niveau supérieur à Bac + 2 (tableau 2). De même, les employées et les ouvrières ont plus souvent interrompu leur activité que les cadres et les professions intermédiaires. Leur perte de salaire est moins forte et relativement mieux compensée par le complément de libre choix d’activité et par les économies réalisées (sur les frais de garde, les frais de transports...). Leurs conditions de travail et leurs perspectives de carrière peuvent également expliquer leur moindre réticence à interrompre leur activité. Les interruptions sont par ailleurs plus fréquentes chez les salariées du secteur privé (41 % contre 29 % dans le secteur public).
La réduction du temps de travail concerne 45 % des mères titulaires d’un diplôme de niveau Bac + 2 contre 23 % des mères titulaires d’un diplôme de niveau CAP-BEP ou inférieur. Elle concerne aussi davantage les cadres et professions intermédiaires, ainsi que les salariées du secteur public. Pour ces dernières, le temps partiel est rémunéré à un taux légèrement supérieur à celui correspondant à la quotité de temps partiel lorsque celui-ci est supérieur ou égal à 80 %.
tableauTableau 2 – Les plus diplômées peu enclines au congé parental
Part de mères | |||
---|---|---|---|
ayant interrompu leur activité | ayant réduit leur activité | ayant interrompu ou réduit leur activité | |
Total | 37 | 31 | 55 |
Diplôme | |||
CAP-BEP ou diplôme de niveau inférieur | 47 | 23 | 57 |
Bac | 33 | 27 | 51 |
Bac + 2 | 33 | 45 | 62 |
Diplôme de niveau supérieur à Bac + 2 | 29 | 32 | 50 |
Catégorie socioprofessionnelle en 2010 ou du dernier emploi | |||
Cadres ou professions intermédiaires | 31 | 37 | 55 |
Employées ou ouvrières | 43 | 26 | 56 |
Statut de l'emploi en 2010 ou du dernier emploi | |||
Salariées du privé | 41 | 28 | 55 |
Salariées du public | 29 | 38 | 58 |
- Lecture : interrogées en 2010, 43 % des mères employées ou ouvrières déclarent avoir interrompu leur activité professionnelle pendant au moins un mois pour s'occuper de leur plus jeune enfant, contre 31 % des mères cadres ou professions intermédiaires.
- Champ : mères d'enfants de moins de 8 ans, ayant travaillé après la naissance du plus jeune enfant ou ayant cessé leur activité professionnelle moins d'un an avant sa naissance, hors mères en congé de maternité post-natal, en France.
- Source : Insee, enquête Emploi et module complémentaire sur la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle 2010.
Un congé parental avant tout pour le bien de l’enfant
Dans quatre cas sur cinq, la décision de prendre un congé parental à temps plein précède la naissance : 40 % des mères ayant pris un congé parental à temps plein ont toujours su qu’elles en prendraient un, 38 % ont pris leur décision quand elles étaient enceintes, 21 % pendant leur congé de maternité post-natal et environ 1 % après avoir repris le travail.
De nombreuses raisons conduisent les mères à prendre un congé parental à temps plein (graphique), mais les plus fréquentes - citées par environ 90 % des mères - sont le bien de l’enfant et le souhait de se consacrer à son éducation. Parmi les autres motifs proposés dans l’enquête, suivent le coût des modes de garde (pour 33 % des mères) et le besoin de se remettre de la naissance (30 %), puis l’incompatibilité entre les horaires de travail et les horaires des services d’accueil (17 %) et l’absence de solution de garde à proximité (17 %).
graphiqueGraphique – Le congé parental des mères : avant tout pour le bien de l’enfant
Les pères sont peu enclins au congé parental
98 % des pères et 72 % des mères interrogés n’ont pas pris de congé parental à temps plein. Parmi eux, 46 % des pères ont déclaré que le congé parental à temps plein ne les intéressait pas a priori contre 25 % des mères (tableau 3). Les autres parents n’excluent pas d’emblée l’option du congé parental. Les hommes invoquent alors plus souvent le risque d’un effet défavorable du congé parental à temps plein sur leur travail ou leur carrière (30 % contre 16 % des femmes). Parmi les craintes évoquées, les plus fréquentes sont la dégradation de leurs relations avec l’employeur, ou, pour les personnes à leur compte, l’incompatibilité d’un congé avec l’activité de leur entreprise. Les femmes, quant à elles, déclarent plus souvent que le congé parental n’est pas assez payé (39 % contre 22 % des hommes).
Ce sont les parents les plus diplômés qui déclarent le plus souvent qu’un congé parental à temps plein leur aurait causé des problèmes dans leur travail ou pour leur carrière : c’est le cas de 19 % des titulaires d’un diplôme de niveau supérieur à Bac + 2, contre 11 % des personnes n’ayant pas le baccalauréat.
Enfin, opter pour un congé parental nécessite de satisfaire à des critères d’activité antérieure que certains parents ne remplissaient pas, ou pensaient ne pas remplir : c’est le cas de 36 % des mères et de 30 % des pères interrogés qui, sans exclure d’emblée l’option du congé parental, n’en ont finalement pas pris.
tableauTableau 3 – Pourquoi n'ont-ils pas pris de congé parental à taux plein ?
Père | Mère | Ensemble | |
---|---|---|---|
Parmi les parents n'ayant pas pris de congé parental à temps plein | |||
N'était pas intéressé(e) a priori | 46 | 25 | 37 |
Parmi ceux qui étaient intéressés a priori | |||
Aurait pu l'envisager, mais a pu s'arranger autrement : | 17 | 7 | 11 |
conjoint en congé de maternité / de paternité / parental ou autre personne de la famille à la maison | 13 | 1 | 8 |
autre arrangement | 4 | 5 | 5 |
Le congé parental lui aurait causé des problèmes dans son travail ou pour sa carrière : | 30 | 16 | 22 |
peur que ses relations avec l'employeur ne se dégradent | 9 | 3 | 5 |
peur que sa promotion hiérarchique ou salariale ne soit freinée | 6 | 3 | 3 |
peur de perdre son emploi | 6 | 4 | 5 |
pour un indépendant, peur que ce soit incompatible avec l'activité de son entreprise | 9 | 3 | 6 |
autre raison | 4 | 3 | 3 |
Le congé parental n'est pas assez payé | 22 | 39 | 30 |
Il n'y avait pas assez de choix dans les dates de congé | 0 | 1 | 0 |
A prévu de prendre un congé parental à temps plein plus tard | 2 | 1 | 2 |
Ne remplissait pas (ou pensait ne pas remplir) les conditions requises | 30 | 36 | 32 |
- Champ : parents d'enfants de moins de 8 ans n'ayant pas pris de congé parental à temps plein, ayant travaillé après la naissance du plus jeune enfant ou ayant cessé leur activité professionnelle moins d'un an avant sa naissance, hors personnes en congé de maternité post-natal ou de paternité.
- Source :Insee, enquête Emploi et module complémentaire sur la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle 2010.
Le congé parental en pointe en Suède et en Allemagne
Une directive européenne de 1996 a mis en place, pour tous les travailleurs, un droit individuel à un congé parental d’une durée minimale de trois mois à l’occasion de la naissance ou de l’adoption d’un enfant. Ce congé s’ajoute aux quatorze semaines minimales de congé de maternité. Si dans la majorité des pays (dont la France), cette directive n’a pas suscité de changements majeurs, elle a néanmoins conduit l’Irlande et le Royaume-Uni à créer un congé parental à la fin des années 1990. Une nouvelle directive de 2010 relève de trois à quatre mois la durée du congé parental, avec une incitation à la prise du congé par les deux parents sous la forme d’un mois ni fractionnable ni transférable à l’autre parent.
La Suède, l’Allemagne et le Royaume-Uni se distinguent par une fréquence importante des interruptions d’activité pendant au moins un mois chez les mères (ou belles-mères) d’enfants de moins de 8 ans (respectivement 75 %, 56 % et 49 %), en dehors du congé de maternité (graphique). En France et en Belgique, elles sont 32 %, soit davantage qu’en Espagne (17 %), mais moins qu’en Italie (38 %).
Ces écarts s’expliquent en partie par les différences de législation du congé parental entre les pays, ainsi que par leurs particularités en matière d’offre de modes de garde. Ainsi, aucune structure d’accueil n’existe en Suède pour les enfants de moins d’un an ; elles sont peu répandues en Allemagne et particulièrement coûteuses au Royaume-Uni. De telles structures sont également peu développées dans les pays méditerranéens : le recours à la garde informelle (grands-parents, proches, voisins...) y est particulièrement fréquent. Par ailleurs, l’indemnisation du congé parental est proportionnelle aux revenus en Suède, en Allemagne et en Italie, tandis qu’elle est forfaitaire en Belgique et en France (complément de libre choix d’activité versé sous certaines conditions d’activité professionnelle antérieure). En Espagne et au Royaume-Uni, le congé parental n’est pas du tout rémunéré.
Quant à la réduction du temps de travail pendant au moins un mois, c’est en Allemagne qu’elle est la plus fréquente, avec 59 % des femmes concernées ; cette pratique est également assez répandue en Suède (45 %) et au Royaume-Uni (42 %). En France, elle concerne 28 % des femmes, une proportion supérieure à celle observée en Italie (23 %) et en Espagne (21 %).
graphiqueGraphique – Les Françaises interrompent moins leur activité que leurs voisines européennes
Sources
Les données sont issues du module complémentaire associé à l’enquête Emploi 2010, suite à la demande d’Eurostat, sur la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle. Il concerne les personnes âgées de 15 à 64 ans, vivant en ménage ordinaire, interrogées pour la sixième et dernière fois à l’enquête Emploi. Une personne par ménage a été interrogée. Au total, 24 302 personnes ont répondu à l’enquête.
Le champ de l’étude est restreint aux 3 028 parents qui répondent, au moment de l’enquête, aux caractéristiques suivantes : ils ont au moins un enfant âgé de moins de 8 ans qui vit avec eux dans le ménage ; ils ont travaillé après la naissance de leur plus jeune enfant, ou ont cessé leur activité professionnelle moins d’un an avant cette naissance ; ils ne sont ni en congé de maternité post-natal, ni en congé de paternité. Ces parents représentent 89 % des parents d’enfants âgés de moins de 8 ans. Ils ont été interrogés en 2010 sur la manière dont ils ont modifié éventuellement leur activité professionnelle suite à la naissance de leur plus jeune enfant, celle-ci ayant pu intervenir entre 2002 et 2010. L’enquête ne permet pas de connaître les caractéristiques de l’emploi que les personnes occupaient juste avant d’interrompre ou de réduire éventuellement leur activité ; elle ne permet de connaître que celles de l’emploi occupé ou du dernier emploi occupé.
Définitions
Les congés de maternité et de paternité sont des congés rémunérés octroyés aux salariés avant et après l’arrivée d’un enfant.
Le congé parental d’éducation, non rémunéré, est un droit à interrompre ou réduire son activité : on parle alors de congé parental à temps plein ou à temps partiel. Tout salarié peut en bénéficier, à l’occasion de la naissance de son enfant ou de l’adoption d’un enfant de moins de 16 ans, s’il justifie d’au moins un an d’ancienneté dans l’entreprise à la date de la naissance de l’enfant, ou, en cas d’adoption, de son arrivée au foyer. Le congé parental prend fin au plus tard au troisième anniversaire de l’enfant, ou, en cas d’adoption, à l’expiration d’un délai de trois ans à compter de l’arrivée au foyer de l’enfant (un an pour les enfants adoptés de plus de 3 ans et de moins de 16 ans). À l’issue du congé parental, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente.
Le complément de libre choix d’activité (CLCA) est une allocation versée par la caisse d’allocations familiales. Les personnes en congé parental peuvent, sous certaines conditions, en bénéficier.