Nouveau recul de l’emploi au premier trimestre 2014

Alain COËNON, Anne-Solange GONY, Matthieu BOIVIN, Insee Basse-Normandie

Au premier trimestre 2014, l’emploi dans le secteur marchand baisse en Basse-Normandie (- 0,5 %) de façon plus marquée que la moyenne nationale (- 0,1 %). Le fort recul de l’emploi intérimaire n’est pas compensé par les secteurs qui connaissent une croissance d’effectifs comme la construction ou l’industrie agroalimentaire. Malgré l’atonie des mises en chantier de logements neufs, le secteur de la construction regagne des emplois permanents pour la première fois depuis le quatrième trimestre 2011. Néanmoins, l’activité demeure déprimée, le marché de l’entretien-amélioration notamment n’ayant pu maintenir l’accélération de l’activité constatée au trimestre précédent. De plus, la baisse du nombre de permis de construire délivrés n’annonce pas une reprise prochaine de l’activité. Fin mars, le taux de chômage augmente légèrement et s’établit à 9 % de la population active. Les demandes d’emplois progressent plus fortement chez les plus de 50 ans et chez les chômeurs de longue durée. Néanmoins, sur un an, le taux de chômage diminue de 0,3 point en Basse-Normandie, soit un repli plus marqué qu’en France métropolitaine (- 0,2 point). Le démarrage de l’activité touristique a été modeste au premier trimestre, mais la fréquentation a en revanche été plus dynamique au printemps. Le premier trimestre n’ayant pu maintenir l’accélération de l’activité observée au quatrième trimestre 2013, un retour à un rythme de croissance modérée est attendu pour la suite de l’année dans la région comme dans l’ensemble du pays.

Insee Conjoncture Basse-Normandie
No 1
Paru le :Paru le18/07/2014
Alain COËNON, Anne-Solange GONY, Matthieu BOIVIN, Insee Basse-Normandie
Insee Conjoncture Basse-Normandie No 1- Juillet 2014

Retour à la baisse de l’emploi salarié

Après une pause le trimestre précédent, l’emploi salarié non agricole bas-normand repart à la baisse pour atteindre 310 600 emplois fin mars 2014. Au cours du premier trimestre 2014, 1 400 postes ont été détruits (- 0,5 %). Cette détérioration ne concerne pas tous les secteurs. Ainsi, la construction a gagné quelques emplois et l’industrie a stabilisé ses effectifs. Mais ce n’est pas suffisant pour compenser les destructions d’emplois dans le tertiaire, notamment dans l’intérim. Au niveau national, on observe une tendance comparable, mais moins marquée : l’emploi diminue de 0,1 %.

Le tertiaire marchand hors intérim perd 700 emplois (- 0,7 %), principalement dans le commerce, la réparation d’automobiles et de motocycles, les transports et l’entreposage, l’hébergement et restauration, l’information et communication, les activités financières et d’assurance et les activités immobilières. Seuls les secteurs des activités scientifiques et techniques, des services administratifs et de soutien hors intérim et des autres activités de services gagnent des emplois. Au niveau national, la tendance est différente puisque le tertiaire marchand hors intérim gagne des emplois (+ 0,2 %), sous l’influence de l’Île-de-France et de régions comptant de grandes métropoles.

Après deux trimestres de hausse, l’intérim marque un temps d’arrêt sensible (- 5,5 %), dans des proportions comparables au niveau national (- 4,8 %).

Dans l’industrie, l’emploi permanent est stable, contrairement à la France métropolitaine (- 0,2 %). Cette stabilité cache des situations disparates. Les nouvelles pertes d’emplois dans la fabrication de matériels de transport (- 1,9 %) sont compensées par les embauches dans l’industrie agroalimentaire (+ 0,8 %) et dans le secteur regroupant cokéfaction et raffinage, industries extractives, énergie, eau, gestion des déchets et dépollution (+ 1,4 %).

Malgré l’atonie des mises en chantier de logements neufs, le secteur de la construction regagne des emplois permanents pour la première fois depuis le quatrième trimestre 2011 (+ 0,2 % ), alors qu’il se contracte au niveau national (- 0,3 %).

Des trois départements, la Manche connaît l’évolution la plus favorable avec une stabilité de l’emploi salarié dans les secteurs marchands non agricoles ; les créations d’emplois dans l’industrie et la construction compensent les destructions dans le tertiaire marchand. A l’inverse, dans le Calvados les effectifs salariés décroissent fortement (- 0,9 %), sous l’effet d’une baisse des effectifs dans le tertiaire et particulièrement dans l’intérim. Dans l’Orne, les destructions sont moindres (- 0,1 %), mais concernent principalement, à rebours de la tendance régionale, l’industrie et la construction.

Après une stabilisation le trimestre précédent, l’emploi salarié en Basse-Normandie, reparti à la baisse, est donc toujours loin de retrouver son niveau d’avant la crise. Depuis le pic du quatrième trimestre 2007, 19 200 emplois ont été détruits, pour moitié dans l’industrie.

Graphique_1Évolution de l’emploi salarié marchand

  • Source : Insee, estimations d'emploi

Graphique_2Évolution de l’emploi salarié marchand par secteur

  • Source : Insee, estimations d'emploi

Graphique_3Évolution de l’emploi intérimaire

  • Source : Insee, estimations d'emploi

Le chômage augmente légèrement

Au premier trimestre 2014, le taux de chômage s’établit à 9 % de la population active bas-normande

(+ 0,1 point). Il reste inférieur de 0,7 point au taux de chômage métropolitain. Sur un an, de mars 2013 à mars 2014, le taux de chômage diminue de 0,3 point dans la région, contre un repli de 0,2 point en France métropolitaine.

Au premier trimestre, le Calvados a le taux de chômage le plus élevé (9,5 %), suivi de l’Orne (9,2 %), la Manche présentant le taux le plus faible (8,2 %). Sur les douze derniers mois, le taux de chômage diminue dans des proportions équivalentes dans les trois départements.

L’atonie du marché de l’emploi régional au premier trimestre est confirmée par une hausse du nombre de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle Emploi sur l’ensemble du premier semestre 2014. En effet, si le nombre d’inscrits s’est stabilisé en février, il est reparti en hausse sensible dès le mois de mars, hausse qui s’est ensuite amplifiée en avril et mai. Cette dégradation du marché de l’emploi touche toutes les catégories, mais avec une intensité différente. Ainsi, les demandes d’emplois progressent plus fortement chez les plus de 50 ans et chez les chômeurs de longue durée. Au total, fin mai 2014, près de 108 000 demandeurs inscrits en Basse-Normandie étaient immédiatement disponibles pour occuper un emploi.

Graphique_4Taux de chômage

  • Source : Insee, taux de chômage au sens du BIT et taux de chômage localisé

L’activité dans la construction continue de chuter

Au premier trimestre, l’activité continue de se réduire dans le secteur de la construction. Le marché du neuf s’effondre tandis que le marché de l’entretien-amélioration se maintient difficilement. La demande, tant privée que publique, poursuit son repli.

En effet, sur 12 mois glissant, 6 200 logements ont été mis en chantier dans la région. Par rapport au trimestre précédent, c’est une diminution de 13 %. Cette dégradation, plus marquée qu’au niveau national (- 10 %), impacte fortement la construction de logements collectifs (- 22 %) mais aussi individuels (- 12 %). A l’inverse, les mises en chantier de logements en résidences continuent de progresser. Le nombre de mises en chantier diminue de 16 % dans le Calvados et de 24 % dans l’Orne, mais reste stable dans la Manche.

Cependant, les mises en chantier de locaux non résidentiels progressent de 7,5 % en glissement annuel ce trimestre. Cette bonne tenue s’explique par la forte demande de locaux industriels et agricoles dans le secteur privé et de locaux dédiés à l’action sociale ou à la culture et aux loisirs dans le secteur public.

En ce qui concerne le second œuvre, le marché de l’entretien et de la rénovation finit par céder et affiche un repli pour la première fois depuis le début de la crise. Cette baisse d’activité résulte pour partie de l’anticipation par les ménages de travaux fin 2013 avant le passage de la TVA de 7 à 10 % à partir du 1er janvier 2014.

Dans ce contexte, les prix sont toujours orientés à la baisse et les capacités de production sont sous-utilisées dans une entreprise sur deux. Les entreprises du secteur enregistrent une durée moyenne des carnets de commande stable par rapport au trimestre précédent, mais très en deçà de la moyenne de longue période.

Graphique_5Évolution du nombre de logements autorisés à la construction

  • Source : SOeS, Sit@del2

Graphique_6Évolution du nombre de logements commencés

  • Source : SOeS, Sit@del2

Légère baisse de la fréquentation hôtelière

Au premier trimestre, la fréquentation hôtelière a diminué de 0,4 % par rapport au premier trimestre 2013. Le nombre de touristes n’a pas fléchi (+ 0,2 %), mais ceux-ci sont restés un peu moins longtemps. Le regain de la clientèle française (+ 1,5 %) n’a pas suffi à compenser la désaffection de la clientèle étrangère (- 11 %). Le taux d’occupation est en baisse de 3 %.

Excepté les hôtels haut de gamme (4 et 5 étoiles) dont la fréquentation est stable, toutes les catégories d’hôtels ont vu une érosion de leur clientèle, et tout particulièrement les hôtels non classés (- 15 %).

Cependant, cette baisse de la fréquentation dans les hôtels bas-normands est moins forte que dans la moyenne des régions métropolitaines françaises (- 0,7 %) où la diminution concerne à la fois la clientèle étrangère et la clientèle française.

La fréquentation est en hausse dans le Calvados, alors que les départements de l’Orne et surtout de la Manche accusent une baisse de leur clientèle.

Graphique_7Évolution de la fréquentation dans les hôtels

  • Sources : Insee ; DGCIS, partenaires régionaux

Rebond des créations d’entreprises

Après une baisse au trimestre précédent, le nombre de créations d’entreprises bas-normandes repart à la hausse. Ce sont un peu moins de 2 100 nouvelles entreprises qui ont vu le jour au premier trimestre (+ 1,2 % contre + 5,1 % en France métropolitaine). Cette augmentation provient des créations d’entreprises hors auto-entrepreneurs (+ 3 % contre - 0,8 % en France métropolitaine). En effet, les créations d’entreprises sous le régime d’auto-entrepreneur sont stables (- 0,5 % contre une nouvelle forte augmentation de 10,8 % en France métropolitaine). Comme sur l’ensemble du territoire national, les auto-entreprises représentent la moitié des créations en Basse-Normandie.

En données brutes à la date de jugement, on observe une stabilité des défaillances d’entreprises au premier trimestre en Basse-Normandie alors qu’elles progressent en France métropolitaine (+ 1,6 %).

Graphique_8Créations d'entreprises

  • Source : Insee, REE (Répertoire des Entreprises et des Établissements ­ Sirene)

Graphique_9Défaillances d'entreprises

  • Source : Fiben, Banque de France

Contexte national

La croissance revient mais ne décolle pas

Au premier trimestre 2014, l’activité stagne. La croissance reviendrait en France au deuxième trimestre (+ 0,3 %). Au second semestre, la croissance ne décollerait pas : elle resterait moyenne (+ 0,3 % par trimestre). Au total, le PIB progresserait de 0,7 % en 2014, après + 0,4 % en 2012 et 2013. Des facteurs persistants continuent de limiter l’ampleur de la reprise. Le pouvoir d’achat des ménages s’améliore certes, mais trop modestement pour conduire à une franche accélération de la consommation (+ 0,3 % en 2014) et à une reprise de l’investissement en logements neufs. Confrontées à une demande qui ne décolle pas, et avec un taux de marge qui se redresse mais reste bas, les entreprises ne sont pas enclines à investir. Enfin, les exportations françaises ne profiteraient pas pleinement de l’accélération attendue du commerce mondial, pénalisées notamment par l’appréciation de l’euro.

L’emploi total progresserait au premier semestre 2014 (+ 22 000 postes) comme au second semestre (+ 38 000) du fait des emplois aidés. Le taux de chômage augmenterait légèrement d’ici fin 2014 (10,2 %).

Le contexte international

Les économies avancées ralentissent ponctuellement

Les économies avancées ralentissent au premier trimestre 2014, principalement du fait de la contraction de l’économie américaine. Dans la zone euro, l’activité accélère en Allemagne et en Espagne mais cale en France et en Italie.

Les économies émergentes traversent toujours une zone de turbulences : les attaques monétaires ont cessé mais les resserrements monétaires passés continueraient de peser sur l’activité. Leurs importations ne progresseraient que modérément d’ici la fin de l’année.

À l’inverse, les économies avancées retrouveraient de l’élan d'ici fin 2014. Aux États-Unis, l’activité rebondirait fortement. Au Royaume-Uni, la demande intérieure progresserait vigoureusement malgré un marché immobilier qui s’assagirait au second semestre. La zone euro, et notamment l’Espagne, retrouverait du tonus (+ 0,3 % par trimestre), grâce à une moindre consolidation budgétaire, un redressement de l’investissement et une baisse de l’épargne de précaution des ménages. En revanche, la construction continuerait de peser négativement dans la zone, excepté en Allemagne.

Définitions

Les séries de taux de chômage localisés associées à la publication des résultats du quatrième trimestre 2013 sont révisées. D’une part, le nombre de chômeurs est revu à la baisse au niveau national après la rénovation du questionnaire de l’enquête Emploi ce qui a une incidence comparable sur les taux de chômage estimés au niveau local. D’autre part, la méthode d’estimation des taux de chômage localisés a été améliorée sur différents points (passage de l’emploi au lieu de travail à l’emploi au lieu de résidence, information sur les travailleurs frontaliers…). A partir d’avril 2014, les nouvelles séries de taux de chômage régionaux et départementaux sont rétropolées. L'impact des changements de méthode ayant été neutralisé, elles sont cohérentes sur l'ensemble de la période d'estimation. Dans cette série rétropolée, l’écart est d’environ - 0,5 point par rapport aux données publiées antérieurement portant sur les trimestres précédents. Cet écart est comparable avec celui enregistré, en moyenne, dans les autres régions.