14 millions de touristes en moins au premier semestre 2020 en Île-de-France
Première région de France pour son tourisme, notamment international, l’Île-de-France est de ce fait la plus sévèrement touchée par les conséquences de la crise de la Covid-19. Les effets se font ressentir non seulement au deuxième trimestre, mais aussi au troisième : de juillet à septembre 2020, le nombre de nuitées a baissé de près de 70 % dans les hôtels en Île-de-France par rapport à la même période en 2019 (contre - 34 % en France). Les caractéristiques du tourisme francilien, notamment le poids des clientèles internationale et d’affaires, expliquent que cette activité ait été davantage impactée dans la région.
- Avant la crise sanitaire, en dépit d’une conjoncture difficile, l’Île-de-France restait une destination touristique prisée
- Le tourisme, une activité économique de premier plan pour la région
- Depuis le début de la crise sanitaire, une fréquentation hôtelière en berne
- La saison estivale ne voit pas le retour des touristes
- Une saison estivale marquée par une perte d’activité de 50 % pour l’hôtellerie-restauration
- L’activité impactée dans tous les départements franciliens, en premier lieu à Paris
- Septembre 2020 : une fréquentation touristique toujours à la traîne
- Encadré - Un modèle économique particulier : le tourisme urbain
Avant la crise sanitaire, en dépit d’une conjoncture difficile, l’Île-de-France restait une destination touristique prisée
Avec 50 millions de visiteurs par an, l’Île-de-France est la première région touristique française. Selon le Comité régional du tourisme (CRT), Paris était en 2018 « la destination la plus populaire au monde » devant Londres, Rome et New York. Les attentats de janvier et novembre 2015 avaient certes conduit à une baisse importante de la fréquentation touristique début 2016 (jusqu’à - 70 % pour la clientèle étrangère) mais, depuis, la région avait retrouvé son attractivité.
En 2019, le nombre de nuitées dans les hôtels s’y élève à près de 71 millions, soit le tiers des 214 millions de nuitées comptabilisées sur le territoire national. L’Île-de-France représente aussi le tiers des emplois touristiques nationaux. Le poids du tourisme en Île-de-France est notamment porté par la clientèle internationale de loisirs ou d'affaires, revenue en masse après 2016 et représentant plus de la moitié des nuitées.
Le tourisme, une activité économique de premier plan pour la région
En 2019, les touristes en Île-de-France dépensent en moyenne 111 euros par jour et par personne, pour un total de 21,9 milliards d’euros de consommation touristique (sources). Ce secteur d’activité génère entre 6 et 7 % du PIB régional. Avec 119 000 entreprises dans les activités liées au tourisme, le secteur comptabilise 8,6 % des emplois salariés en Île-de-France, soit 511 000 personnes dont près de 60 % dans l’hôtellerie-restauration.
Plus de la moitié des visiteurs des musées (jusqu’à 71 % pour le musée du Louvre et 80 % pour le domaine de Versailles) sont des touristes étrangers. Ces derniers représentent 10 % des voyageurs sur les lignes RATP et leurs achats peuvent représenter jusqu’à 80 % du chiffre d’affaires de certains commerces de Paris, notamment en biens de luxe.
Au sein de la région, il existe toutefois d’importantes inégalités qui tiennent à la plus ou moins grande offre touristique selon les départements. Ainsi, 57 % des séjours franciliens ont lieu à Paris, qui ne représente que 18 % de la population francilienne. La Seine-et-Marne, où se situe le parc Disneyland, représente 9,5 % des séjours, les Hauts-de-Seine, boostés par le pôle d'affaires de la Défense, 8 % et les Yvelines, où le domaine de Versailles a accueilli 8,2 millions de visiteurs en 2019, 6 %.
Depuis le début de la crise sanitaire, une fréquentation hôtelière en berne
Lors du premier confinement entre le 17 mars et le 11 mai 2020, la quasi-totalité des lieux recevant du public sont fermés, en particulier les établissements hôteliers et restaurants, les rassemblements interdits, les déplacements nationaux et internationaux réduits. Le secteur du tourisme est alors pratiquement à l’arrêt.
En matière de fréquentation hôtelière, la région est sévèrement impactée. Au deuxième trimestre 2020, le taux d’ouverture des hôtels en Île-de-France reste l’un des plus faibles du territoire : de 17 % en avril, il remonte à 28 % en mai, après la fin du premier confinement, puis à 54 % en juin, contre respectivement 23 %, 39 % puis 78 % à l’échelle nationale (figure 1). Cela peut s’expliquer, entre autres, par des mesures de déconfinement plus strictes mises en œuvre dans la région du fait d’une plus grande circulation du virus. Les grands sites (comme le musée du Louvre ou le Château de Versailles) n’ont rouvert leurs portes que début juillet, en raison du protocole sanitaire très strict à mettre en place et de la jauge instaurée dans leur fréquentation.
Globalement, entre le deuxième trimestre 2019 et le deuxième trimestre 2020, le nombre de nuitées est en chute de 92 % contre près de 87 % en France. En Île-de-France, le recul du nombre de touristes a entraîné un manque à gagner estimé par le CRT à plus de 6 milliards d’euros pour le premier semestre. Ce manque tient à la fois au recul de la clientèle internationale (- 68 % de séjours au premier semestre) et à celui de la clientèle française (- 54 %). Non seulement la clientèle française est moins présente que les années passées mais, de surcroît, les Franciliens qui ont quitté la région pendant le premier confinement ne sont que très partiellement revenus en juin.
tableauFigure 1 – En juin 2020, l’Île-de-France est, avec la Guadeloupe, la région où la proportion d’hôtels ouverts est la plus faibleTaux d'occupation et taux d'ouverture selon les régions, en juin 2020
Taux d'ouverture | Taux d'occupation | |
---|---|---|
Pays de la Loire | 90 | 37 |
Normandie | 88 | 38 |
Bretagne | 88 | 37 |
Centre-Val de Loire | 86 | 37 |
Nouvelle-Aquitaine | 85 | 36 |
Hauts-de-France | 83 | 39 |
Bourgogne - Franche-Comté | 83 | 38 |
Grand Est | 81 | 35 |
Auvergne-Rhône-Alpes | 81 | 34 |
Guyane | 81 | 31 |
Provence-Alpes-Côte d'Azur | 79 | 35 |
Occitanie | 78 | 35 |
France entière | 78 | 35 |
Corse | 75 | 28 |
La Réunion | 74 | 31 |
Martinique | 68 | 21 |
Île-de-France | 54 | 32 |
Guadeloupe | 54 | 25 |
- Lecture : en juin, la moitié des hôtels franciliens sont ouverts mais près d’un tiers du parc total de lits est occupé.
- Champ : France hors Mayotte.
- Source : Insee, en partenariat avec les comités régionaux du tourisme.
graphiqueFigure 1 – En juin 2020, l’Île-de-France est, avec la Guadeloupe, la région où la proportion d’hôtels ouverts est la plus faibleTaux d'occupation et taux d'ouverture selon les régions, en juin 2020
La saison estivale ne voit pas le retour des touristes
À l’été 2020, la clientèle internationale ne représente qu’environ 29 % des nuitées dans les hébergements touristiques franciliens. Les hôtels haut de gamme, prédominants en Île-de-France et notamment à Paris, sont les plus impactés. Certains ont fait le choix de ne pas rouvrir en raison des coûts fixes engagés.
Par ailleurs, si, en province, la baisse de la clientèle étrangère a été en partie compensée par la clientèle résidente, ce n’est que peu le cas dans la région capitale. Le tourisme urbain (encadré) est peu prisé l’été, d’autant que de nombreuses attractions touristiques franciliennes n’ont été en mesure de rouvrir que très tardivement : la Tour Eiffel le 25 juin, Disneyland Paris le 15 juillet, etc.
Ainsi, le taux d’occupation des hôtels franciliens durant l’été reste faible malgré une très légère amélioration par rapport à celui de juin (32 %) : 39 % en juillet et 34 % en août.
Dans ce contexte, le montant des transactions par carte bancaire des résidents français fait apparaître une baisse des dépenses touristiques très marquée entre juillet 2019 et juillet 2020, et ce dans l’ensemble de la région. L’Île-de-France est d’ailleurs la seule région métropolitaine où les dépenses touristiques mesurées par les transactions par carte sont en recul dans chacun des départements. Les baisses observées à Paris, dans les Hauts-de-Seine et en Seine-et-Marne sont les plus importantes de France métropolitaine (plus de 10 %) (figure 2).
De nombreux Français, limités dans leurs déplacements internationaux, sont certes restés en France durant l’été, mais ils ont privilégié les départements du littoral, ruraux ou de montagne. Cela se traduit en province par une hausse des dépenses touristiques : plus de 10 % notamment dans le Jura, le Morbihan et les Pyrénées-Atlantiques.
tableauFigure 2 – Les dépenses touristiques intérieures en chute dans tous les départements franciliens : une situation unique en métropoleÉvolution des dépenses touristiques départementales par carte bancaire entre juillet 2019 et juillet 2020
Code | Département | Évolution |
---|---|---|
01 | Ain | de -5 à +5 |
02 | Aisne | de -5 à +5 |
03 | Allier | de -5 à +5 |
04 | Alpes-de-Haute-Provence | plus de +10 |
05 | Hautes-Alpes | plus de +10 |
06 | Alpes-Maritimes | plus de +10 |
07 | Ardèche | plus de +10 |
08 | Ardennes | de +5 à +10 |
09 | Ariège | de +5 à +10 |
10 | Aube | de -5 à +5 |
11 | Aude | de +5 à +10 |
12 | Aveyron | plus de +10 |
13 | Bouches-du-Rhône | plus de +10 |
14 | Calvados | plus de +10 |
15 | Cantal | plus de +10 |
16 | Charente | de +5 à +10 |
17 | Charente-Maritime | de +5 à +10 |
18 | Cher | de -5 à +5 |
19 | Corrèze | de +5 à +10 |
20R | Corse | de -5 à +5 |
21 | Côte-d'Or | de -5 à +5 |
22 | Côtes-d'Armor | plus de +10 |
23 | Creuse | de +5 à +10 |
24 | Dordogne | plus de +10 |
25 | Doubs | de -5 à +5 |
26 | Drôme | de -5 à +5 |
27 | Eure | de +5 à +10 |
28 | Eure-et-Loir | de -5 à +5 |
29 | Finistère | de +5 à +10 |
30 | Gard | de +5 à +10 |
31 | Haute-Garonne | de -5 à +5 |
32 | Gers | de -10 à -5 |
33 | Gironde | de -5 à +5 |
34 | Hérault | de +5 à +10 |
35 | Ille-et-Vilaine | plus de +10 |
36 | Indre | de -5 à +5 |
37 | Indre-et-Loire | de +5 à +10 |
38 | Isère | de -5 à +5 |
39 | Jura | plus de +10 |
40 | Landes | de +5 à +10 |
41 | Loir-et-Cher | plus de +10 |
42 | Loire | de -5 à +5 % |
43 | Haute-Loire | de +5 à +10 |
44 | Loire-Atlantique | de -5 à +5 |
45 | Loiret | de -5 à +5 |
46 | Lot | plus de +10 |
47 | Lot-et-Garonne | de -5 à +5 |
48 | Lozère | plus de +10 |
49 | Maine-et-Loire | de -5 à +5 |
50 | Manche | plus de +10 |
51 | Marne | de -5 à +5 |
52 | Haute-Marne | de -5 à +5 |
53 | Mayenne | de -5 à +5 |
54 | Meurthe-et-Moselle | de -5 à +5 |
55 | Meuse | de -5 à +5 |
56 | Morbihan | plus de +10 |
57 | Moselle | de -10 à -5 |
58 | Nièvre | de -5 à +5 |
59 | Nord | de -5 à +5 |
60 | Oise | de -5 à +5 |
61 | Orne | de -5 à +5 |
62 | Pas-de-Calais | de -5 à +5 |
63 | Puy-de-Dôme | de -5 à +5 |
64 | Pyrénées-Atlantiques | plus de +10 |
65 | Hautes-Pyrénées | de -5 à +5 |
66 | Pyrénées-Orientales | de +5 à +10 |
67 | Bas-Rhin | de -5 à +5 |
68 | Haut-Rhin | de -5 à +5 |
69 | Rhône | de -5 à +5 |
70 | Haute-Saône | de -5 à +5 |
71 | Saône-et-Loire | de -5 à +5 |
72 | Sarthe | de -5 à +5 |
73 | Savoie | plus de +10 |
74 | Haute-Savoie | plus de +10 |
75 | Paris | moins de -10 |
76 | Seine-Maritime | de -5 à +5 |
77 | Seine-et-Marne | moins de -10 |
78 | Yvelines | de -10 à -5 |
79 | Deux-Sèvres | de -5 à +5 |
80 | Somme | de +5 à +10 |
81 | Tarn | de +5 à +10 |
82 | Tarn-et-Garonne | de -5 à +5 |
83 | Var | plus de +10 |
84 | Vaucluse | de -10 à -5 |
85 | Vendée | de +5 à +10 |
86 | Vienne | de -5 à +5 |
87 | Haute-Vienne | de -5 à +5 |
88 | Vosges | de -5 à +5 |
89 | Yonne | de -5 à +5 |
90 | Territoire de Belfort | de -10 à -5 |
91 | Essonne | de -5 à +5 |
92 | Hauts-de-Seine | moins de -10 |
93 | Seine-Saint-Denis | de -10 à -5 |
94 | Val-de-Marne | de -10 à -5 |
95 | Val-d'Oise | de -10 à -5 |
971 | Guadeloupe | moins de -10 |
972 | Martinique | moins de -10 |
973 | Guyane | moins de -10 |
974 | La Réunion | de -5 à +5 |
976 | Mayotte | de -10 à -5 |
- Avertissement : les données agrégées utilisées dans cette figure proviennent de Cartes Bancaires CB et couvrent l’essentiel des transactions par carte bancaire. Elles sont tirées d’une extraction de transactions anonymisées et agrégées à l’échelle départementale afin de respecter les exigences de confidentialité. Ces informations sont sujettes à certaines limites (exclusion des transactions en ligne ou effectuées par des touristes étrangers) et diffèrent des données nationales (voir Point de conjoncture du 7 mai 2020, p.21 et documentation).
- Lecture : l'évolution du montant total des dépenses “touristiques” par carte bancaire dans la Meuse (55) en juillet 2020 par rapport à juillet 2019 est comprise entre - 5 % et + 5 %.
- Source : Cartes Bancaires CB, calculs Insee.
graphiqueFigure 2 – Les dépenses touristiques intérieures en chute dans tous les départements franciliens : une situation unique en métropoleÉvolution des dépenses touristiques départementales par carte bancaire entre juillet 2019 et juillet 2020
Une saison estivale marquée par une perte d’activité de 50 % pour l’hôtellerie-restauration
Conséquence de la chute de la fréquentation hôtelière et des dépenses touristiques, les chiffres d’affaires du secteur de l’hôtellerie-restauration plongent durant le premier confinement et se redressent moins vite ensuite que sur le reste du territoire. En juillet, l’hôtellerie francilienne enregistre une baisse de 76 % de son volume de ventes par rapport à 2019 (- 44 % au niveau national) (figure 3). Néanmoins, l’activité des établissements d’entrée de gamme semble repartir plus vite que celle des hôtels de catégorie supérieure durant l’été.
Moins dépendante de la clientèle touristique mais soumise à des protocoles sanitaires renforcés avec des jauges réduites, la restauration résiste mieux mais souffre aussi : la baisse est de 25 % du chiffre d’affaires en juillet, contre 9,5 % seulement à l’échelle nationale.
Jusqu’en juin, la baisse d’activité ne se répercute pas sur l’emploi, grâce à l’effet d’amortissement du chômage partiel : 42 % des 290 000 salariés du secteur hébergement-restauration demeurent en situation de chômage partiel au sortir du confinement, soit 10 points de plus qu’à l’échelle nationale (figure 4). De ce fait, dans ce secteur, l’emploi, principalement dans l’intérim, ne diminue que de 6,0 à 6,5 % au cours du deuxième trimestre 2020 selon les départements en Île-de-France (contre - 35 % en province).
tableauFigure 3 – L’absence des clientèles résidente et non résidente pénalise le secteur hébergement-restauration au sortir du premier confinementÉvolution du chiffre d’affaires par rapport au même mois de l’année précédente
Hôtellerie | |||
---|---|---|---|
Mois | France entière | Île-de-France | Paris |
10/2019 | 0,2 | -4,5 | -5,3 |
11/2019 | 0,8 | -2,5 | -5,2 |
12/2019 | 4,9 | 3,3 | 4,4 |
01/2020 | 7,8 | 9,8 | 10,9 |
02/2020 | 3,7 | 0,3 | 0,6 |
03/2020 | -59,2 | -64,8 | -69,5 |
04/2020 | -89,4 | -88,8 | -91,4 |
05/2020 | -88,9 | -91,9 | -95,6 |
06/2020 | -71,9 | -88,3 | -92,4 |
07/2020 | -44,0 | -76,4 | -81,8 |
- Champ : entreprises déclarant leur TVA mensuellement. À l’échelon national, la couverture géographique porte sur la France entière, à l’exception de la Guyane et de Mayotte où les entreprises ne sont pas assujetties à la TVA. À l’échelon local, il s’agit des unités légales monorégionales ou monodépartementales pérennes de 2017 à 2020, dont l’activité principale n’a pas bougé durant cette période.
- Sources : Insee ; DGFiP.
graphiqueFigure 3 – L’absence des clientèles résidente et non résidente pénalise le secteur hébergement-restauration au sortir du premier confinementÉvolution du chiffre d’affaires par rapport au même mois de l’année précédente
tableauFigure 4 – À Paris, en juin 2020, un mois après la fin du confinement, près de la moitié des salariés du secteur hébergement-restauration sont au chômage partielPart des salariés du secteur hébergement-restauration en situation d’activité partielle entre mars et juin 2020
Mois | France entière | Île-de-France | Paris |
---|---|---|---|
mars | 31,7 | 30,2 | 32,7 |
avril | 68,2 | 65,6 | 72,1 |
mai | 62,6 | 60,3 | 68,3 |
juin | 31,5 | 41,5 | 49,6 |
- Avertissement : données arrêtées au 21 août 2020.
- Source : DSN.
graphiqueFigure 4 – À Paris, en juin 2020, un mois après la fin du confinement, près de la moitié des salariés du secteur hébergement-restauration sont au chômage partielPart des salariés du secteur hébergement-restauration en situation d’activité partielle entre mars et juin 2020
L’activité impactée dans tous les départements franciliens, en premier lieu à Paris
Entre juillet 2019 et juillet 2020, le chiffre d’affaires du secteur de l’hôtellerie chute de 82 % à Paris. Cette baisse est moindre dans les autres départements franciliens, elle n’est par exemple « que » de 57 % dans les Yvelines. Dans la restauration, la baisse dépasse les 28 % à Paris alors que dans l'Essonne le niveau d’activité est revenu à la normale (+ 1,5 %).
Les territoires les plus touristiques sont ceux accusant le plus les effets de la crise, Paris en tête. Les Hauts-de-Seine (avec La Défense) sont surtout affectés par les perturbations du tourisme d’affaires et le recours au télétravail ; le niveau d’activité dans l’hôtellerie recule de 70 % en juillet (figure 5). En Seine-et-Marne, la fermeture du parc Disneyland jusqu’au 15 juillet explique la forte baisse des dépenses touristiques des résidents enregistrée au début de l’été. La situation revient d’ailleurs à l’équilibre dès le mois suivant.
Dans les autres départements moins touristiques comme l’Essonne, le Val-d’Oise, le Val-de-Marne et la Seine-Saint-Denis, le secteur résiste mieux.
La structure de l’emploi local conforte cette analyse : avec 24 % de l’emploi total affecté à des activités très fortement ou partiellement touristiques en 2017, Paris est plus exposée à des chocs conjoncturels que les Yvelines, par exemple, où cette part n’est que de 16 %. Ainsi, près de la moitié des salariés parisiens du secteur hébergement-restauration sont encore en situation d’activité partielle en juin, contre 30 % dans l’Essonne.
tableauFigure 5 – Les chiffres d’affaires dans le secteur de l’hôtellerie chutent fortement dans tous les départements à partir de mars 2020Évolution par département du chiffre d’affaires dans l’hôtellerie par rapport au même mois de l’année précédente
2019 | 2020 | |||||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Octobre | Novembre | Décembre | Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin | Juillet | |
Paris | -5,3 | -5,2 | 4,4 | 10,9 | 0,6 | -69,5 | -91,4 | -95,6 | -92,4 | -81,8 |
Hauts-de-Seine | -3,9 | 5,1 | -3,6 | 11,3 | -0,8 | -65,5 | -88,1 | -88,5 | -84,5 | -70,4 |
Seine-Saint-Denis | -9,7 | 4,8 | 36,0 | 2,7 | -9,0 | -55,2 | -79,4 | -74,1 | -72,8 | -58,7 |
Val-de-Marne | -1,7 | 0,6 | -3,9 | 5,8 | -14,3 | -53,4 | -78,3 | -70,5 | -64,7 | -66,8 |
Seine-et-Marne | 1,2 | 6,4 | 0,3 | 7,5 | 12,0 | -57,3 | -93,4 | -94,0 | -89,6 | -71,7 |
Yvelines | -12,0 | -13,7 | -26,3 | 9,1 | -5,7 | -53,6 | -85,2 | -79,6 | -72,4 | -56,9 |
Essonne | 2,4 | -1,4 | -0,7 | 3,3 | 0,7 | -46,5 | -40,7 | -78,1 | -70,7 | -62,5 |
Val-d’Oise | -14,2 | -4,5 | 18,4 | 1,4 | -25,2 | -55,7 | -73,1 | -70,2 | -61,1 | -65,2 |
Île-de-France | -4,5 | -2,5 | 3,3 | 9,8 | 0,3 | -64,8 | -88,8 | -91,9 | -88,3 | -76,4 |
- Champ : entreprises déclarant leur TVA mensuellement ; unités légales monorégionales ou monodépartementales pérennes de 2017 à 2020, dont l'activité principale n'a pas bougé durant cette période.
- Sources : Insee ; DGFiP.
Septembre 2020 : une fréquentation touristique toujours à la traîne
Au troisième trimestre 2020, les hôtels franciliens ont enregistré 5,9 millions de nuitées, soit 69 % de moins qu’au cours du troisième trimestre 2019 (contre - 34 % en France métropolitaine). La chute est moins forte pour les hôtels les plus économiques (- 58 % pour les 1 et 2 étoiles ou les non classés) que pour les hôtels 3 à 5 étoiles, plus dépendants de la clientèle internationale (- 73 %). La clientèle internationale est de moins en moins présente (16 % de la clientèle en septembre), peut-être en raison de la flambée épidémique sur les autres continents, notamment en Amérique. La fréquentation hôtelière fléchit de 7,3 % entre août et septembre, pour un taux d’occupation ramené à 33 %, soit 12 points de moins que la moyenne nationale. En effet, en Île-de-France, la clientèle touristique résidente habituelle est absente du fait, entre autres, de la non-tenue de salons ou de grands évènements sportifs, des activités lourdement touchées par la crise sanitaire. Entre mars et septembre, 670 salons et congrès ont été annulés dont le Salon international de l’alimentation, le salon de la technologie VivaTech ou encore le Salon nautique international de Paris. La CCI Paris Île-de-France estime que les 6,6 millions de visiteurs et congressistes et les 70 000 entreprises ayant reporté ou annulé leur venue ont entraîné un manque à gagner de 3,8 milliards d’euros pour la région capitale et de 15,7 milliards d’euros de ventes pour les entreprises. De manière analogue, de nombreuses manifestations sportives (marathon de Paris, finale des championnats nationaux de football, championnats d’Europe d’athlétisme) ont été annulés ou reportés tandis que d’autres se sont tenus en quasi huis clos (tournoi de Roland Garros reporté à l’automne avec une jauge de 1 000 spectateurs par jour). En 2019, selon le CRT, ces manifestations avaient attiré plus de 800 000 visiteurs, résidents ou non-résidents.
Les effets de la crise sanitaire se font encore ressentir avec une intensité particulière sur le tourisme en Île-de-France. Avec le second confinement, la situation demeure encore trop incertaine pour augurer des conséquences à long terme sur cette activité. Cependant, le rayonnement culturel de la capitale demeure et l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 constitue assurément un enjeu important pour le tourisme francilien dans les années à venir.
Encadré - Un modèle économique particulier : le tourisme urbain
Le modèle économique du tourisme francilien est bien différent de celui d’autres régions à forte « touristicité ». Il s’agit d’un tourisme dit urbain qui attire une clientèle cosmopolite aux motivations multiples : culture, patrimoine, shopping, gastronomie, loisirs, événements, hébergement, centres d’affaires, etc. Il présente donc quelques caractéristiques notables :
• une saisonnalité peu marquée : les arrivées hôtelières sont réparties tout au long de l’année, contrairement aux zones littorales ou aux massifs montagneux ;
• une importante clientèle internationale, favorisée par les infrastructures (TGV, vols low cost…), constituée majoritairement de citadins actifs au fort pouvoir d’achat ;
• un tourisme à forte composante culturelle : selon le CRT, plus des deux tiers des touristes en Île-de-France ont pour principale activité la visite de musées et de monuments ;
• un tourisme de shopping porteur : selon le Crocis, près de 26 millions de visiteurs, dont 60 % d’étrangers, effectuent chaque année des achats de biens durables en Île-de-France. En 2018, les retombées économiques liées à ce type de tourisme sont estimées à plus de 3 milliards d’euros, soit 15 % de la consommation touristique totale ;
• un tourisme d’affaires particulièrement développé : 31 % des séjours en Île-de-France sont effectués pour des motifs professionnels ou mixtes. En 2019, 434 salons se sont tenus en Île-de-France, ainsi que 1 231 évènements d’entreprises, 104 spectacles et manifestations culturelles et sportives, 293 examens et formations, etc., l’ensemble ayant rassemblé 12,3 millions de participants.
Ces traits distinctifs font du tourisme urbain un segment en croissance, mais sévèrement impacté par la crise sanitaire.
Sources
L’enquête mensuelle de fréquentation touristique, conduite par l’Insee auprès des hébergements collectifs de tourisme, a été suspendue en mars 2020 du fait de la crise sanitaire. Un dispositif d’enquête allégée a été mis en place d’avril à juin 2020 uniquement pour les hôtels, permettant de disposer d’un nombre restreint d’indicateurs et de connaître le type de personnes hébergées (touristes, personnels soignants, personnes confinées, personnes placées par les services sociaux du type Samu social).
L’enquête du Comité régional du tourisme sur la consommation touristique consiste à interroger 50 000 touristes chaque année sur leurs dépenses sur place en matière d’hébergement, d’alimentation-restauration, de loisirs-spectacles-musées, de shopping et de transports au sein de la région. Elle permet d’évaluer les dépenses générées par les touristes français et internationaux ayant séjourné au moins une nuitée en Île-de-France pour motif personnel ou professionnel au cours de l’année.
Définitions
Fréquentation touristique : pour évaluer la fréquentation touristique d’une région, d’un type d’hébergement ou d’un pays, on utilise deux concepts : des arrivées et des nuitées. Pour les arrivées, deux régions d’un même pays comptabiliseront chacune une arrivée pour un même touriste visitant ces deux régions au cours de son séjour. En revanche, au niveau national, ce même touriste ne sera à l’origine que d’une seule arrivée en France. Il est alors difficile d’agréger les arrivées locales, au sein d’un même pays, sans risque de doubles-comptes et ce risque augmente proportionnellement à la taille du pays. Les nuitées, elles, présentent l’avantage de ne pas induire de doubles-comptes et constituent un indicateur statistiquement plus aisé à utiliser.
Consommation touristique intérieure : agrégat qui mesure la consommation des visiteurs (touristes et excursionnistes) français ou étrangers, au cours ou en vue des voyages qu’ils ont effectués en France ou à partir du territoire français ; elle est réalisée auprès des fournisseurs de services et de biens de consommation résidant en France.
Taux d’occupation : rapport entre le nombre de chambres occupées et le nombre de chambres offertes par les hôtels ouverts. Il diffère du taux d’utilisation qui rapporte le nombre de chambres occupées au nombre total de chambres des hôtels, qu’ils soient ouverts ou fermés.
Résidents : personnes ayant leur domicile principal en France, quelle que soit leur nationalité.
Pour en savoir plus
Canonero B., Gidrol J.-C., Mainguené A., « La fréquentation touristique se dégrade en septembre, après avoir repris quelques couleurs en juillet-août », Insee Focus n° 215, novembre 2020.
Deheeger S., Druelle S., Martin J.-Ph., Trinquier B., « L’économie francilienne toujours fortement impactée par la crise sanitaire au deuxième trimestre », Insee Conjoncture Île-de-France n° 31, octobre 2020.
Belliard M. et al., « Ouvrir dans un nouvel ongletUn tourisme francilien à réinventer après une crise mondiale sans précédent », Crocis, Paris Region, Enjeux Île-de-France n° 222, octobre 2020.
Nays J.-M., « Ouvrir dans un nouvel ongletTourisme d’affaires à Paris Île-de-France, édition 2020 - Une filière d’excellence fortement marquée par les crises sociales de 2019 et sanitaire de 2020 », CCI Paris Île-de-France, août 2020.