Insee PremièreÉcarts de revenus au sein des couples Trois femmes sur quatre gagnent moins que leur conjoint

Thomas Morin, division Études sociales, Insee

En 2011, aux âges actifs, trois femmes en couple sur quatre gagnent moins que leur conjoint, en tenant compte des revenus d’activité (salaires, revenus des indépendants) et de remplacement (chômage et retraites). En moyenne, les femmes contribuent à hauteur de 36 % aux revenus du couple. Elles perçoivent un salaire inférieur en moyenne à celui de leur conjoint, travaillent plus souvent à temps partiel et ont un taux d’activité moins élevé. De 2002 à 2011, la contribution moyenne des femmes a augmenté de trois points, du fait principalement du recul de la part des femmes au foyer. Les écarts de revenus au sein des couples sont plus prononcés quand il y a des enfants et quand les conjoints sont mariés ; ils le sont moins quand les couples sont plus jeunes et plus diplômés.

Thomas Morin, division Études sociales, Insee
Insee Première No 1492- Mars 2014

Des écarts de revenus hommes-femmes plus marqués pour les personnes en couple

En 2011, la France compte presque 10 millions de  composés d’un homme et d’une femme âgés de 20 à 59 ans, non étudiants. Dans les trois quarts de ces couples, le  de l’homme est supérieur à celui de la femme.

En moyenne, en 2011, les femmes vivant en couple ont perçu un revenu annuel de 16 700 euros contre 29 000 euros pour leur conjoint, soit 42 % de moins. Par comparaison, cet écart n’est que de 9 % entre les femmes et les hommes sans conjoint (encadré). Au total, sur l’ensemble de la population non étudiante âgée de 20 à 59 ans, l’écart de revenu est de 35 %.

Les femmes contribuent en moyenne pour 36 % aux revenus du couple

En 2011, la s’élève en moyenne à 36 %.

Cette contribution varie cependant selon les situations. Dans les couples dont les deux membres travaillent à temps complet (44 % des couples), la femme contribue en moyenne pour 44 % aux revenus du couple (figure 1), niveau plus proche de la parité des revenus. Dans ceux où la femme travaille à temps partiel et l’homme à temps complet (20 % des couples), la contribution des femmes est de 34 % en moyenne. Enfin, dans les couples où seul l’homme occupe un emploi (21 % des couples), la femme contribue en moyenne pour 13 % au revenu du couple.

Figure 1Contributions aux revenus du couple selon les situations d’emploi

  • Lecture : dans 44 % des couples, l’homme et la femme occupent un emploi à temps complet. En moyenne, le revenu de ces couples est de 54 700 euros par an, et les femmes y contribuent pour 44 %. Ne sont pas représentés dans ce graphique 15 % des couples qui sont dans des situations plus minoritaires vis-à-vis de l’emploi.
  • Champ : couples composés d’un homme et d’une femme âgés de 20 à 59 ans, hors étudiants.
  • Sources : Insee ; DGFiP ; Cnaf ; Cnav ; CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2011, calculs Insee.

Une femme sur quatre gagne plus que son conjoint

On peut distinguer quatre catégories de couples d’effectifs similaires selon la contribution des femmes aux revenus du couple (figure 2). Tout d’abord, dans 24 % des couples, la contribution des femmes est inférieure à 20 %. Dans plus d’un cas sur deux, la femme ne perçoit en fait aucun revenu. Sinon, le plus souvent, elle perçoit une faible indemnité de chômage ou un salaire modeste issu d’un travail à temps très partiel.

Dans un deuxième groupe, qui représente 28 % des couples, la contribution des femmes varie de 20 % à 40 % des revenus du couple. Dans huit cas sur dix, la femme occupe un emploi. Mais, parmi ces emplois, 44 % sont à temps partiel.

Dans un troisième groupe, qui représente 23 % des couples, la contribution des femmes varie entre 40 % et 50 %. Le revenu des femmes reste inférieur à celui de leur conjoint, mais en est très proche. Dans la plupart des cas, les deux conjoints travaillent. Un quart des femmes occupant un emploi de ce groupe travaille à temps partiel ; certaines d’entre elles auraient un meilleur salaire que leur conjoint si elles étaient à temps plein.

Enfin, dans 25 % des couples, la contribution des femmes est supérieure (ou égale) à 50 %. Ces femmes percevant un revenu supérieur à celui de leur conjoint sont souvent diplômées du supérieur et occupent davantage d’emplois de cadres ou de professions intermédiaires que la moyenne des femmes en couple. La plupart du temps, les deux membres du couple travaillent, le salaire de la femme étant plus élevé que celui de son conjoint. C’est particulièrement le cas dans les couples où la contribution des femmes est comprise entre 50 % et 60 %. Quand l’écart se creuse davantage en faveur de la femme, il s’agit aussi de situations où l’homme est au chômage ou inactif. Ainsi, dans 2 % de l’ensemble des couples, l’homme ne déclare aucun revenu et la femme contribue pour 100 % aux revenus du couple.

Figure 2Répartition des couples selon la contribution de la femme aux revenus du couple en 2011

  • Lecture : dans 23 % des couples, la contribution de la femme est comprise entre 40 % et 50 % (exclu).
  • Champ : couples composés d’un homme et d’une femme âgés de 20 à 59 ans, hors étudiants.
  • Sources : Insee ; DGFiP ; Cnaf ; Cnav ; CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2011, calculs Insee.

Avec la montée de l’activité des femmes, les revenus se rapprochent dans les couples

De 2002 à 2011, l’écart de revenu annuel au sein des couples s’est réduit, passant, en euros constants 2011, de 13 600 à 12 300 euros. Sur cette période, le revenu moyen des femmes en couple s’est accru, de 14 300 à 16 700 euros, tandis que celui des hommes en couple a progressé un peu plus faiblement, de 27 900 à 29 000 euros. Ainsi, la contribution moyenne des femmes aux revenus du couple a augmenté de 33 % à 36 % (figure 3). Plus largement, sur l’ensemble de la population âgée de 20 à 59 ans, l’écart entre le revenu des hommes et celui des femmes s’est réduit sur la période dans des proportions similaires.

L’essentiel de cette réduction des inégalités s’explique par la poursuite de la montée de l’activité des femmes. Ainsi, au sein des couples, la proportion de femmes occupant un emploi est passée de 70 % à 75 %, tandis que celle des hommes occupant un emploi est restée stable, autour de 87 %. Au total, la proportion de couples dont les deux membres occupent un emploi a augmenté de 64 % à 68 %.

De ce fait, alors qu’en 2002, 20 % des femmes en couple ne percevaient aucun revenu individuel, elles ne sont plus que 14 % en 2011. Sur la même période, parmi les hommes en couple, la proportion de ceux qui ne touchent aucun revenu est passée de 2 % à 3 %.

C’est donc essentiellement au niveau de la présence sur le marché du travail et de l’accès à l’emploi que les inégalités se sont réduites entre les hommes et les femmes en couple. En revanche, dans les couples où l’homme et la femme perçoivent tous deux un revenu, les disparités ne se sont quasiment pas réduites : la contribution moyenne des femmes reste toujours d’environ 40 %. Par ailleurs, la proportion de temps partiel est restée stable sur la période, autour de 31 % des emplois occupés par des femmes en couple. Dans le même temps, cette proportion est passée de 3 % à 4 % chez les hommes en couple, soit une légère augmentation, mais qui pèse peu sur les écarts de contribution. Contrairement aux femmes, les hommes travaillent davantage à temps partiel quand ils vivent sans conjointe (8 % des emplois) que lorsqu’ils vivent en couple (4 %).

Figure 3Contribution des femmes aux revenus du couple de 2002 à 2011

  • Lecture : en moyenne, la femme contribue à 36 % des revenus du couple en 2011.
  • Champ : couples composés d’un homme et d’une femme âgés de 20 à 59 ans, hors étudiants.
  • Sources : Insee ; DGFiP ; Cnaf ; Cnav ; CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2002 à 2011, calculs Insee.

Moins d’écarts de revenu dans les couples de revenu intermédiaire ou relativement élevé

Les écarts de revenus entre hommes et femmes sont moins prononcés au sein des couples dont le niveau de revenu est intermédiaire ou relativement élevé. En effet, c’est dans les couples percevant au total entre 35 000 et 59 000 euros par an, soit 40 % des couples, que la contribution moyenne des femmes est la plus élevée (figure 4).

En moyenne, les hommes et les femmes sont plus souvent en couple avec des personnes qui perçoivent un revenu proche du leur (figure 5). Cependant, pour les couples les plus modestes et, dans une moindre mesure, pour les plus aisés, la part de femmes au foyer est plus importante (figure 6). Cela explique en partie que la contribution moyenne des femmes soit plus réduite en bas de l’échelle des revenus (et de manière plus faible tout en haut).

La contribution des femmes augmente avec le niveau de diplôme. Parmi les couples où les deux membres sont diplômés du supérieur, la contribution des femmes s’élève à 39 %, contre 36 % quand les deux membres ont un diplôme de niveau baccalauréat, brevet professionnel, CAP ou BEP, et enfin 31 % quand aucun des deux n’a de diplôme supérieur au brevet. Quand elles ont un niveau de diplôme supérieur à celui de leur conjoint, les femmes contribuent pour 41 % au revenu de leur couple. En dépit de diplômes plus élevés, elles travaillent plus souvent à temps partiel et sont plus souvent au foyer que leur conjoint. Les hommes plus diplômés que leur conjointe déclarent quant à eux 69 % des revenus perçus par le couple.

Dans 20 % des couples, la femme est ouvrière ou employée tandis que l’homme exerce une profession intermédiaire, est cadre ou exerce une profession intellectuelle supérieure. Dans ces couples, la contribution moyenne des femmes est seulement de 27 %. Dans 12 % des couples, ces catégories socioprofessionnelles sont inversées ; la contribution moyenne des femmes au revenu du couple est alors de 51 %.

Figure 4Contribution moyenne des femmes selon la tranche de revenu du couple

  • Lecture : dans les 10 % de couples qui déclarent un revenu annuel inférieur à 17 000 euros, la contribution moyenne des femmes au revenu est de 33 %.
  • Champ : couples composés d’un homme et d’une femme âgés de 20 à 59 ans, hors étudiants.
  • Sources : Insee ; DGFiP ; Cnaf ; Cnav ; CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2011, calculs Insee.

Figure 5Répartition des couples selon le revenu de chaque conjoint

Répartition des couples selon le revenu de chaque conjoint - Lecture : dans 5,2 % des couples, les revenus de l’homme et de la femme sont tous deux inférieurs à 9 000 euros. Si les couples se formaient au hasard, la proportion ne serait que de 9,5 % x 30,5 % = 2,9 %. Chacune des 5 tranches de revenu regroupe environ un cinquième des personnes vivant en couple, sans distinction de sexe.
Revenu des hommes (en euros) Revenu des femmes (en euros)
moins de 9 000 de 9 000 à 17 000 de 17 000 à 22 000 de 22 000 à 31 000 plus de 31 000 Ensemble
moins de 9 000 5,2 2,0 1,0 0,7 0,6 9,5
de 9 000 à 17 000 6,0 4,9 2,4 1,4 0,6 15,3
de 17 000 à 22 000 5,7 6,4 4,0 2,6 0,9 19,6
de 22 000 à 31 000 6,4 6,7 6,1 5,3 2,1 26,6
plus de 31 000 7,2 4,9 4,4 6,2 6,3 29,0
Ensemble 30,5 24,9 17,9 16,2 10,5 100,0
Ces couples sont plus de 1,2 fois plus fréquents dans la population que s’ils étaient formés au hasard
Ces couples sont moins de 0,8 fois moins fréquents dans la population que s’ils étaient formés au hasard
  • Champ : couples composés d’un homme et d’une femme âgés de 20 à 59 ans, hors étudiants.
  • Lecture : dans 5,2 % des couples, les revenus de l’homme et de la femme sont tous deux inférieurs à 9 000 euros. Si les couples se formaient au hasard, la proportion ne serait que de 9,5 % x 30,5 % = 2,9 %. Chacune des 5 tranches de revenu regroupe environ un cinquième des personnes vivant en couple, sans distinction de sexe.
  • Sources : Insee ; DGFiP ; Cnaf ; Cnav ; CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2011, calculs Insee.

Figure 6Situation des femmes vis-à-vis de l’emploi selon la tranche de revenu du couple

  • Champ : couples composés d’un homme et d’une femme âgés de 20 à 59 ans, hors étudiants.
  • Sources : Insee ; DGFiP ; Cnaf ; Cnav ; CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2011, calculs Insee.

Plus d’inégalité dans les couples mariés ou avec enfants

L’arrivée des enfants conduit parfois à des arbitrages qui se traduisent par une baisse de l’activité des femmes. En effet, la présence d’enfant dans le couple va de pair avec des temps partiels plus fréquents pour les femmes qui occupent un emploi, et, à partir de trois enfants, avec une nette diminution du taux d’emploi des femmes. De ce fait, la contribution des femmes est de 39 % dans les couples sans enfant, contre respectivement 38 % et 36 % quand il y a un ou deux enfants mineurs, et enfin 27 % quand il y trois enfants ou plus.

Par ailleurs, la contribution des femmes aux revenus du couple est plus faible quand elles sont mariées : 34 % contre 41 % dans les couples en concubinage ou pacsés. Il est possible que le statut du mariage renforce aux yeux des conjoints la stabilité de leur couple,  rendant moins problématiques ces inégalités de revenus, quand il y a partage des ressources.

Les écarts de revenus sont plus importants pour les générations les plus âgées, mais la variation  reste modérée. Ainsi, la contribution des femmes aux revenus individuels du couple est de 39 % quand les deux membres ont entre 20 et 30 ans, 38 % quand ils ont entre 30 et 40 ans, 36 % pour la tranche des 40-50 ans et enfin 35 % pour les 50-60 ans.

Dans l’ensemble, les femmes qui ont au moins cinq ans de plus que leur conjoint contribuent pour 41 % au revenu du couple. A l’inverse, les femmes dont le conjoint a au moins cinq ans de plus qu’elles contribuent pour 34 % aux revenus de leur couple.

Le revenu des hommes sans conjointe est nettement inférieur à celui des hommes en couple

Le revenu des hommes sans conjointe est nettement inférieur à celui des hommes en couple (18 000 euros contre 29 000 euros en 2011). De leur côté, les femmes sans conjoint perçoivent un revenu quasiment égal à celui des femmes en couple (16 400 contre 16 700 euros). Ceci explique que les écarts soient moins prononcés entre les hommes et les femmes sans conjoint qu’entre les hommes et les femmes en couple.

Le revenu moindre des hommes sans conjointe va de pair avec une insertion moins bonne sur le marché du travail par rapport aux hommes en couple. En effet, ils occupent moins souvent un emploi (72 % contre 87 % pour ceux en couple), et a fortiori un emploi stable (83 % des contrats sont à durée indéterminée contre 92 % pour les hommes en couple). De surcroît, ils occupent des emplois moins qualifiés (16 % d’emplois de cadres contre 22 %). Ainsi, les hommes sans conjointe sont quatre fois plus nombreux que les hommes en couple à ne déclarer aucun revenu (13 % contre 3 %).

Le revenu moindre des hommes sans conjointe correspond partiellement à des caractéristiques sociales moins favorables. À âge, catégorie socioprofessionnelle et diplôme égaux, l’écart de revenu entre les hommes en couple et les hommes sans conjointe serait réduit de plus de moitié (5 000 euros d’écart contre 11 000 euros d’écart).

Les situations vis-à-vis de l’emploi sont moins contrastées en ce qui concerne les femmes en couple et les femmes sans conjoint. Certes, les femmes en couple sont plus souvent inactives (19 % contre 16 % pour celles sans conjoint). Mais, d’un autre côté, elles sont moins touchées par le chômage (6 % d’entre elles contre 12 % des femmes sans conjoint). Au final, les femmes en couple occupent plus souvent un emploi (75 % contre 72 %). En revanche, les emplois qu’elles occupent sont plus souvent à temps partiel (31 % des emplois à temps partiel pour les femmes en couple contre 24 % pour les femmes sans conjoint).

Sources

Les statistiques présentées ici sont tirées des enquêtes Revenus fiscaux et sociaux rétropolées de 2001 à 2004 et des enquêtes Revenus fiscaux et sociaux de 2005 à 2011. En 2011, cette enquête s’appuie sur un échantillon représentatif, issu de l’enquête Emploi de l’Insee, de plus de 55 000 ménages comprenant 20 000 couples d’un homme et d’une femme âgés de 20 à 59 ans en France métropolitaine. Les caractéristiques sociodémographiques et l’emploi sont mesurés pour une semaine donnée tandis que les revenus sont annuels.

Définitions

Couples : le champ retenu pour cette étude est celui des couples composés d’un homme et d’une femme vivant dans le même logement en France métropolitaine, âgés de 20 à 59 ans, non étudiants. Par souci d’homogénéité, les couples dont un seul membre est âgé de 20 à 59 ans ne sont pas pris en compte. Les couples de même sexe ne sont pas non plus pris en compte car ils requièrent une approche différente de l’égalité au sein du couple.

Revenu : le revenu considéré ici comprend les revenus individuels d’activité ou de remplacement qui ont été déclarés à l’administration fiscale (salaires, revenus des indépendants, indemnités de chômage, pensions et allocations de retraite et d’invalidité). Il ne comprend pas les revenus du patrimoine et les prestations sociales. Avant 59 ans, les pensions et allocations de retraite et d’invalidité représentent 2 % des revenus individuels ; ne pas les prendre en compte ne modifie pas l’analyse de l’écart des contributions relatives des conjoints. Les revenus du couple correspondent à la somme des revenus individuels des deux conjoints.

Contribution des femmes aux revenus du couple : dans un couple, la contribution de la femme représente la part du revenu qu’elle a perçu dans le total des revenus individuels perçus par le couple. La contribution vaut 50 % si les revenus de l’homme et de la femme sont égaux, 0 % si l’homme perçoit des revenus mais pas la femme, 100 % si la femme perçoit des revenus mais pas l’homme. La contribution moyenne correspond à la moyenne des contributions au sein de chaque couple. Dans 1 % des couples, ni l’homme ni la femme ne perçoivent de revenu. On considère que la contribution des femmes est alors de 50 %.

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