Insee PremièrePrix des logements anciens Dans les années 2000, ils ont augmenté beaucoup plus vite que les loyers et les revenus

Catherine Rougerie, division logement, Insee et Jacques Friggit, Conseil général de l’environnement et du développement durable

De la fin des années 1990 jusqu’au début 2008, les prix des logements anciens ont augmenté de façon ininterrompue. Cette croissance a été très supérieure depuis 2000 à celle des prix à la consommation, des loyers et du revenu disponible par ménage ; il en est résulté pour les accédants à la propriété des taux d’effort plus élevés et des durées d’emprunt plus longues, malgré un contexte de diminution des taux d’intérêt. Début 2006, les prix ont amorcé un ralentissement, ils ont baissé en 2008 mais sont repartis à la hausse au quatrième trimestre 2009. Le nombre de transactions de logements anciens, de l’ordre de 800 000 par an entre 2000 et 2007, a diminué brutalement ensuite. Il s’est stabilisé courant 2009 puis a recommencé à croître, s’établissant en fin d’année un peu en dessous de 600 000.

Catherine Rougerie, division logement, Insee et Jacques Friggit, Conseil général de l’environnement et du développement durable
Insee Première No 1297- Mai 2010

Dix ans de hausse ininterrompue

À partir de la fin des années 1990, les prix des ont augmenté de façon ininterrompue jusqu’au début de 2008. Début 2007, ils avaient été multipliés par deux par rapport à leur niveau de 2000 (graphique 1). Leur variation annuelle a oscillé autour de 7 à 8 % de 2000 à mi-2002 puis s’est accélérée jusqu’à mi-2004, atteignant 16,5 % au quatrième trimestre 2004 en province, à peine moins en Île-de-France.

La progression a suivi sensiblement les mêmes inflexions en province et en Île-de-France (graphique 2). Quelle que soit la localisation, les rythmes de hausse ont été soutenus mais ils l’ont été davantage dans certaines zones. Ainsi, de 2000 jusqu’au début de 2004, dans les de plus de 10 000 habitants, les appartements en banlieue ont augmenté plus vivement que dans les  ; alors que les prix avaient augmenté particulièrement vite à Paris en 1999 et 2000, la hausse a été plus forte en banlieue parisienne à partir de 2004, et plus encore en grande couronne qu’en petite couronne de 2005 à fin 2006 (graphique 3).

Graphique 1Indice des prix des logements anciens

  • Lecture : l'indice des prix des logements anciens en province est passé de 100 au quatrième trimestre 2000 à 191,9 au quatrième trimestre 2009.
  • Champ : France métropolitaine, ensemble des transactions de logements anciens.
  • Source : Indices Notaires-Insee des prix des logements anciens.

Graphique 2Évolution en glissement annuel des prix des logements anciens

  • Lecture : la variation annuelle de l'indice en Île-de-France était de − 4,8% au premier trimestre 1997. Les indices de l'Île-de-France ne sont disponibles que depuis 1996.
  • Champ : France métropolitaine, ensemble des transactions de logements anciens.
  • Source : Indices Notaires-Insee des prix des logements anciens.

Graphique 3Évolution en glissement annuel du prix des appartements anciens

  • Lecture : la variation annuelle de l'indice en petite couronne parisienne était de − 7,8 % au premier trimestre 1997.
  • Champ : France métropolitaine, ensemble des transactions de logements anciens.
  • Source : Indices Notaires-Insee des prix des logements anciens.

Depuis 2001, le prix des appartements augmente plus que celui des maisons…

Les prix des maisons ont crû plus vite que ceux des appartements de 1996 à 1999. Puis ce sont les appartements qui ont connu les hausses les plus fortes, dès 2000 en Île-de-France, et à partir de 2002 en province. Depuis, les rythmes de hausse des appartements ont été régulièrement supérieurs ou au moins égaux à ceux des maisons.

Les prix des appartements ont évolué différemment dans les grandes agglomérations de Lyon et Marseille, comparativement à l’Île-de-France. Les plus fortes progressions ont d’abord eu lieu en Île-de-France en 1999 et 2000 (12 % en rythme annuel mi-2000), alors qu’à Marseille et Lyon la hausse des prix se situait aux alentours de 8 à 9 % par an. Puis Marseille s’est distinguée en 2001 et 2002, avec des taux de 15 à 19 %. Enfin, Lyon a rejoint Marseille en 2004 et 2005. Au total, c’est à Marseille que la hausse a été la plus forte : les prix y ont été multipliés par 2,7 fin 2007 par rapport au quatrième trimestre 2000, contre 2,5 à Lyon, et 2,1 en Île-de-France.

…et beaucoup plus rapidement que les loyers et le revenu disponible

Depuis 2000, le prix des logements a augmenté beaucoup plus que les loyers, qui ont eux-mêmes augmenté plus vite que les prix à la consommation. Ainsi, les indices de loyer et de prix des logements anciens ont fortement divergé : l’indice des loyers passe de 100 en 2000 à 124 en 2007 tandis que dans le même temps l'indice des prix des logements anciens grimpe jusqu’à 207. Du fait de la baisse des prix immobiliers durant la période récente, cette distorsion s’est légèrement atténuée (tableau).

Rapporté au , l’indice du prix des logements a été multiplié par 1,7 entre 2000 et 2007. Les enquêtes Logement, dont la dernière a été réalisée en 2006, indiquent que le confort sanitaire, le nombre de pièces par personne, la surface moyenne des résidences principales (90 % du parc total), ont augmenté au fil des années. Mais ces caractéristiques sont prises en compte pour calculer un indice à qualité constante (sources). L’augmentation de l’indice ne traduit donc pas une amélioration de la qualité physique moyenne des logements vendus. Pourtant, les prix moyens ont évolué un peu moins rapidement que les indices. Une explication peut être que les logements achetés aujourd’hui sont moins bien situés géographiquement. En effet, en s’éloignant des villes-centres et des pôles d’emploi, les ménages ont pu acheter des logements moins chers ou plus grands mais impliquant des temps de déplacement plus longs.

TableauPrix et loyers des logements anciens, revenu disponible

Prix et loyers des logements anciens, revenu disponible
Année Revenu disponible par ménage Revenu disponible par UC2 Indice du prix des logements anciens Prix moyen des logements anciens Loyers du secteur libre
Montants (€) Évolution (2000=100) Évolution (2000=100) Indice3 (2000=100) Indice de prix rapporté à l'évolution du revenu Prix (€) Évolution (2000=100) Indice3 (2000=100)
(a) (b) (b)/(a)
1996 34 149 91 89 84 0,92 77 131 80 94
2000 37 473 100 100 100 1,00 96 534 100 100
2006 44 187 118 122 194 1,65 181 066 188 120
2007 45 800 122 128 207 1,69 192 842 200 124
2008 46 722 125 131 209 1,68 193 368 200 126
20091 46 924 125 131 194 1,55 179 510 186 127
  • 1. Provisoire ou estimé.
  • 2. UC : unité de consommation.
  • 3. Moyenne des indices des quatre trimestres.
  • Champ : France métropolitaine pour l'indice du prix des logements anciens et l'indice des loyers, France entière pour le revenu disponible par ménage et le prix moyen des logements anciens.
  • Source : comptes de la Nation, indices Notaires-Insee et CGEDD d'après bases notariales et DGFiP (MEDOC), enquête Loyers et Charges.

Des durées d’emprunt plus longues pour accéder à la propriété

Entre 2000 et 2008, la croissance du prix des logements beaucoup plus rapide que celle des revenus a dégradé la solvabilité des ménages , malgré le contexte de diminution des taux d’intérêt : pour acheter le même logement ancien, avec le même initial et avec le même apport personnel en proportion du revenu, un ménage qui se serait endetté sur 14 ans en 2000 aurait dû s’endetter sur 27 ans en 2006 et 31 ans en 2008 (24 ans en 2009 grâce à la baisse du prix des logements et à la diminution des taux d’intérêt).

Dans les faits, toujours selon les enquêtes Logement, alors qu’en moyenne, de la période 1997-2001 à la période 2002-2006, les taux d’intérêt pratiqués pour l’achat d’une résidence principale dans l’ancien sont passés de 5,5 % à 4,0 %, le taux d’effort correspondant est passé dans le même temps en moyenne de 18,6 % à 21,8 %, et le prix du logement acheté de 3 à 4,2 années de revenu ; la durée de l’emprunt a augmenté de 6 ans entre 1999 et 2006.

Baisse puis stabilisation et remontée des prix en 2009

Les prix amorcent un ralentissement début 2006 (graphique 4). En données trimestrielles corrigées des variations saisonnières (encadré), ils commencent à baisser au deuxième trimestre 2008 pour les maisons et au troisième pour les appartements. Sur certains marchés, la baisse survient plus tardivement (un trimestre plus tard pour les appartements en Île-de-France).

Les prix se stabilisent au troisième trimestre 2009 puis augmentent au quatrième trimestre (indice provisoire) de 1,9 %, (soit + 2,2 % pour les maisons et + 1,7 % pour les appartements). Cette remontée sur trois mois est vive, puisqu’ elle est du même ordre que les hausses constatées au deuxième semestre de 2006, un an avant la phase de baisse. Néanmoins, sur un an, les prix demeurent en baisse (− 4,3 % dont − 4,0 % pour les prix des appartements et − 4,5 % pour ceux des maisons).

Graphique 4Variations trimestrielles des prix des logements anciens

  • Lecture : le prix des maisons anciennes en données corrigées des variations saisonnières et à qualité constante a augmenté de 2,2 % au quatrième trimestre 2009 (provisoire) par rapport au trimestre précédent.
  • Champ : France métropolitaine, ensemble des transactions de logements anciens.
  • Source : Indices Notaires-Insee des prix des logements anciens.

Le nombre de transactions se contracte fortement en 2008 et 2009

Le nombre de transactions de logements anciens avait augmenté au cours des années 1990, puis était resté relativement constant entre 2000 et 2007 (environ 800 000 par an). En 2008 et 2009, il diminue brutalement. Néanmoins, fin 2009, la chute est enrayée : le nombre de transactions sur 12 mois recommence à augmenter, s’établissant un peu au-dessous de 600 000.

La comparaison du nombre de transactions de logements anciens et des indices de prix rapportés au revenu par ménage (graphique 5) permet de distinguer trois périodes : de 1997 à 2000, le nombre de transactions augmente fortement alors que le prix des logements n’augmente pas beaucoup plus vite que le revenu ; de 2000 à 2007, le nombre de transactions se stabilise, les prix augmentent fortement et le rapport entre les prix et le revenu passe de 1 à 1,7 ; en 2008 et surtout en 2009, enfin, le prix des logements diminue tandis que le nombre de transactions se contracte fortement.

Des inflexions dans le nombre des transactions ont souvent précédé d’une à deux années des inflexions similaires des prix. Cela a été le cas à Paris en 1990 (à la baisse) puis pour l’ensemble de la France à la fin des années 1990 (à la hausse). Néanmoins, alors que le nombre des transactions s’est stabilisé à partir de 2000, les prix ont continué d’augmenter jusqu’en 2007. Ainsi, la relation entre le nombre et le prix des transactions n’est pas simple.

Graphique 5Nombre de transactions en fonction du prix

  • Lecture : en 2009 (provisoire), le nombre de transactions est de 587 000 et l'indice de prix des logements rapporté au revenu est égal à 1,55 fois l'indice de 2000.
  • Champ : France entière pour le nombre de transactions et le revenu par ménage, France métropolitaine pour l'indice de prix des logements anciens.
  • Source: d'après bases de données notariales et DGFiP.

Un marché saisonnier

Le marché du logement est saisonnier. De nombreux acheteurs et vendeurs (ceux qui ont des enfants d’âge scolaire en particulier) sont amenés à déménager pendant les congés d’été. Il en résulte que le nombre des transactions est particulièrement élevé au troisième trimestre (graphiques).

De plus, dans les tranches d’âge (moins de 55 ans) au sein desquelles se situent les familles avec des enfants d’âge scolaire, les acheteurs sont plus nombreux que les vendeurs. Leur marge de négociation étant de ce fait amoindrie, ils sont obligés d’accepter des prix plus élevés au troisième trimestre. Ainsi, les prix augmentent davantage aux deuxième et troisième trimestres qu’aux premier et quatrième trimestres.

Graphique 6.1Transactions

  • Champ : France entière, ensemble des transactions de logements anciens.
  • Lecture : la saisonnalité augmente de 0,9% le prix des logements anciens à Paris au troisième trimestre.
  • Source : d'après bases de données notariales et DGFiP.

Graphique 6.2Prix

  • Champ : France métropolitaine, ensemble des transactions de logements anciens.
  • Source : Indices Notaires-Insee des prix des logements anciens.

Sources

Les indices Notaires-Insee sont calculés sous la surveillance d’un conseil scientifique. Ils sont en base 100 au quatrième trimestre 2000 et disponibles en deux versions, avant et après correction des variations saisonnières. Les DOM ne sont pas inclus dans le champ car les taux de couverture des bases notariales sont insuffisants.

Le prix d’un logement ne peut être observé qu’au moment d’une transaction, c’est-à-dire rarement et le type de biens vendus change selon les périodes. On ne peut donc pas se contenter de rapporter les prix moyens, il faut comparer des parcs identiques en termes de qualité, de façon à obtenir un indice « à qualité constante ». La méthode « hédonique » utilisée pour les indices Notaires-Insee, consiste à modéliser le prix des caractéristiques des biens échangés (époque de construction, présence d’une salle de bain, localisation, surface, nombre de pièces, etc.) et à mesurer l’évolution du prix d’un « panier de référence », qui représente tous les biens échangés pendant une certaine « période de référence ». La qualité ainsi expurgée de l’indice est celle qui provient de l’évolution des caractéristiques observables par les modèles, c’est donc une mesure approchée.

Depuis mai 2009, des indices provisoires sont publiés sept semaines après la fin du trimestre. Ils sont disponibles sur le site www.insee.fr.

Le nombre des transactions de logements anciens (appartements vendus à l’unité et maisons) est estimé par le Conseil général de l’environnement et du développement durable dans le cadre du Conseil scientifique des indices Notaires-Insee. Il est obtenu en comparant les montants des mutations immobilières à titre onéreux enregistrées dans chaque département par les conservations des hypothèques de la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP), tous types de biens confondus, avec les montants et les effectifs des mutations figurant dans les bases de données notariales pour les différents types de biens.

L’indice des loyers du secteur libre est calculé grâce à l’enquête Loyers et charges, réalisée par l’Insee tous les trimestres, auprès des ménages locataires de leur résidence principale louée vide, dans une unité urbaine, en France métropolitaine. Des tests sont actuellement réalisés par l’Insee dans le but d’étendre l’enquête aux DOM à l’horizon 2012.

Définitions

Logement ancien : ce terme est pris au sens fiscal ; il s’agit des logements construits depuis plus de cinq ans ou faisant l’objet d’une seconde mutation.

Agglomération (ou unité urbaine) : l’agglomération regroupe un ensemble d’une ou plusieurs communes d’au moins 2 000 habitants et présentant une continuité du tissu bâti (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions).

Une commune appartient à l’unité urbaine si plus de la moitié de sa population se trouve dans cette zone bâtie.

Ville-centre : dans une agglomération multi-communale, si une commune abrite plus de 50 % de la population de l’unité urbaine, elle est seule ville-centre. Sinon, toutes les communes qui ont une population supérieure à 50 % de la commune la plus peuplée, ainsi que cette dernière, sont villes-centres. Les communes urbaines qui ne sont pas villes-centres constituent la banlieue de l’agglomération multi-communale.

Revenu disponible par ménage (respectivement par unité de consommation) : revenu disponible des ménages divisé par le nombre de ménages (respectivement par le nombre d’unités de consommation). Le revenu disponible comprend les revenus d’activité, les revenus du patrimoine, les transferts en provenance d’autres secteurs institutionnels, les pensions de retraite, les indemnités de chômage et les prestations sociales, nets des impôts directs.

Accédant à la propriété : ménage achetant un logement en vue de l’occuper à titre de résidence principale et en souscrivant un ou plusieurs emprunts.

Taux d’effort des accédants : part du revenu consacrée aux remboursements d’emprunts. Les taux sont donnés nets, c’est-à-dire en retranchant les aides au logement du montant des remboursements.

Pour en savoir plus

« L’accession à la propriété dans les années 2000 », Pierrette Briant, Insee Première, n° 1291, mai 2010.

« Dans les grandes agglomérations, la mobilité quotidienne des habitants diminue, et elle augmente ailleurs », Jean-Paul Hubert, Insee Première, n° 1252, juillet 2009.

« Les logements en 2006 - Le confort s’améliore, mais pas pour tous », Bénédicte Castéran, Layla Ricroch, Insee Première, n° 1202, juillet 2008.

« Prix des logements anciens : la hausse reste vive en 2005 », Martine Beauvois, Insee Première n° 1082, juin 2006.

Ouvrir dans un nouvel onglet« Managing hedonic housing price indexes : The French experience », Journal of Housing Economics, 18, 3, 206-213, Christian Gouriéroux et Anne Laferrère, 2009.